COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2o chambre
ORDONNANCE sur REQUÊTE
RG N : 16/06021
APPELANTS :
M. Gil X...
[...]
Représenté par Me Elisabeth J... Y..., avocat au barreau de MONTPELLIER et assisté de Me Savine DEMARQUETTE-MARCHAT, avocat au barreau de NÎMES
Mme Isabelle D... K...
[...]
Mme Z... A...
K...
[...]
INTIMEES :
Maître B... C... mandataire judiciaire agissant ès qualités de liquidateur judiciaire de : LA SARL BERGERIE DE MANON, LA SCI DE MANON, Mme D... Isabelle, Mme A... Z... et M. X... Gil domicilié [...]
Représenté par Me Gilles E... de la F... , I... G... - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER
SELARL DE SAINT-RAPT BERTHOLET ès qualités d' administrateur judiciaire de la SARL BERGERIE DE MANON
L...
[...]
SARL BERGERIE DE MANON inscrite au RCS de TARASCON sous le numéro 414 579 128
[...]
SCI DE MANON inscrite au RCS de TARASCON sous le numéro 439 892 548
K...
[...]
Le PREMIER FEVRIER DEUX MILLE DIX SEPT,
Nous, Bruno BERTRAND, conseiller, magistrat chargé de la mise en état, assisté de Hélène ALBESA, greffier,
Vu les débats à l'audience sur incident du 4 janvier 2017, à laquelle l'affaire a été mise en délibéré au 01 Février 2017,
FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Dans sa requête au conseiller de la mise en état déposée au greffe le 12 septembre 2016, Me C... B..., agissant en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SARL Bergerie de Manon et de la SCI Bergerie de Manon, de Mme Isabelle D..., de Mme Z... A... et de M. Gil X..., a sollicité que la déclaration par ce dernier de saisine de la cour d'appel de Montpellier, juridiction de renvoi désignée par arrêt de la Cour de Cassation en date du 26 janvier 2016, dans l'instance l'opposant à M. Gil X..., soit déclarée irrecevable comme tardive, ayant été faite le 27 juillet 2016, au-delà du délai de 4 mois de la signification de l'arrêt de cassation. Il demande aussi qu'il soit dit et jugé en conséquence que le jugement rendu par le tribunal de commerce de Tarascon le 16 décembre 2011 a force de chose jugée, ainsi que la condamnation de M. Gil X... à lui payer une somme de 3.000,00 € par application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Dans ses conclusions en réponse déposées le 22 décembre 2016, M. Gil X... conteste la validité de la signification de l'arrêt de la Cour de Cassation qui lui a été faite par huissier de justice le 24 mars 2016 ; il soutient que cet acte n'a pu faire courir le délai de 4 mois pour saisir la cour d'appel de renvoi prévu à l'article 1034 du code de procédure civile, dès lors qu'il était irrégulier, n'indiquant pas les modalités selon lesquelles la juridiction de renvoi pouvait être saisie, comme exigé par l'article 1035 du code de procédure civile tout comme par l'article 680 du code de procédure civile, sans qu'un grief causé par l'irrégularité soit requis.
M. Gil X... reproche à l'acte de signification de ne pas lui avoir indiqué :
- la juridiction compétente à saisir,
- la mention du lieu du recours,
- le mention de l'obligation d'avoir à constituer un avocat inscrit dans le ressort de la cour d'appel compétente pour effectuer la déclaration de saisine.
Il déclare aussi que, si la démonstration d'un grief est requise, le seul fait que sa déclaration de saisine ait été faite tardivement atteste des difficultés qu'il a rencontrées pour déterminer les modalités de la saisine de la cour d'appel de Montpellier qui lui incombaient, caractérisant ce grief.
M. Gil X... sollicite le rejet de la requête et la condamnation de Me B..., ès-qualités, à lui payer une somme de 3.000,00 € par application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Dans ses dernières conclusions déposées le 23 décembre 2016, Me B..., ès-qualités, soutient que la sanction de l'irrégularité de la signification de l'arrêt de cassation est la nullité pour vice de forme, qui suppose la démonstration d'un grief, non rapportée par M. X... et reprend ses demandes initiales à son égard.
MOTIFS :
Par arrêt no79 prononcé le 26 janvier 2016, la chambre commerciale de la Cour de Cassation a notamment :
- cassé et annulé en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remis en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d'appel de Montpellier.
Cet arrêt a été signifié à la requête de Me C... B..., agissant en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la SARL Bergerie de Manon et de la SCI Bergerie de Manon, de Mme Isabelle D..., de Mme Z... A... et de M. Gil X..., par actes d'huissier de justice délivrés respectivement le :
- 24 mars 2016 à M. Gil X..., à sa personne
- 31 mars 2016 à Mme Z... A..., à domicile,
- 31 mars 2016 à la SCI de Manon, à domicile,
- 31 mars 2016 à Mme Isabelle D..., à domicile,
- 31 mars 2016 à la SARL Bergerie de Manon, à domicile.
Par déclaration de saisine parvenue au greffe de la cour d'appel de Montpellier le 27 juillet 2016 à 16 h 35, via le RPVA, Me Elisabeth J... Y..., avocat représentant M. Gil X..., a saisi la cour d'appel de Montpellier de ce renvoi de cassation au nom de son client, intimant les autres parties à cette instance.
Ainsi que le soulève Me C... B..., ès-qualités, la saisine par M. Gil X... de la cour d'appel de renvoi désignée par la Cour de Cassation a eu lieu plus de 4 mois après la signification qui lui avait été faite de l'arrêt du 26 janvier 2016, le délai expirant le lundi 25 juillet 2016 à minuit.
L'irrecevabilité de la saisine de la cour d'appel de Montpellier pour défaut de respect de ce délai de 4 mois, prévue à l'article 1034 du code de procédure civile est donc encourue.
Pour contester l'irrecevabilité invoquée par Me B..., ès-qualités, de cette saisine, M. Gil X... conteste la régularité de l'acte de signification du 24 mars 2016 qui lui a été délivré, au motif qu'il ne contenait pas l'exposé des modalités selon lesquelles la juridiction de renvoi de cassation pouvait être saisie.
L'indication de ces éléments est prévue, à peine de nullité de l'acte de signification, par l'article 1035 du code de procédure civile mais M. X... ne sollicite pas l'annulation de cet acte de procédure. Il demande qu'il soit retenu que cette irrégularité l'affectant interdit qu'il ait pu faire courir valablement le délai de 4 mois prévu à l'article 1034 du code de procédure civile.
En l'espèce l'acte de signification délivré le 24 mars 2016 par Me Véronique H..., huissier de justice à Aramon (30390) indique notamment :
- que l'arrêt de cassation signifié ordonne le renvoi devant la cour d'appel de Montpellier,
- la teneur intégrale des articles 1032, 1033, 1034 et 1035 du code de procédure civile, indiquant en particulier que la saisine de la juridiction de renvoi devait se faire par déclaration au secrétariat de cette juridiction, contenant les mentions exigées pour l'acte introductif d'instance, le respect d'un délai maximum de 4 mois à compter de la notification de l'arrêt de cassation faite à la partie qui entend saisir la cour d'appel de renvoi.
Il s'ensuit que c'est donc à tort que M. X... soutient qu'il n'y a pas dans cet acte de procédure la mention de la juridiction compétente à saisir (cour d'appel de Montpellier désignée par le renvoi de cassation, ainsi mentionné dans l'acte) ni de mention du lieu de recours, alors que l'article 1032 du code de procédure civile, reproduit, indique que la juridiction de renvoi est saisie par déclaration au secrétariat de cette juridiction.
Par contre c'est de façon exacte et pertinente que M. Gil X... relève l'omission, au titre de l'indication requise par l'article 1035 du code de procédure civile, des modalités selon laquelle la juridiction de renvoi peut être saisie, de celle relative à l'obligation de constituer un avocat inscrit dans le ressort d'un tribunal de grande instance de la cour d'appel désignée comme juridiction de renvoi.
Il est de principe en effet, ainsi que l'a rappelé la 2ème chambre civile de la Cour de Cassation dans son arrêt du 9 avril 2015, que le délai d'appel ne court pas lorsque la notification du jugement omet de mentionner que l'appelant devait constituer avocat et que celui-ci ne pouvait être qu'un avocat admis à postuler devant un tribunal de grande instance dépendant du ressort de la cour d'appel concernée.
Dès lors que la nullité de l'acte de signification n'est pas sollicitée, il importe peu de savoir si cette irrégularité dans l'information du destinataire de l'acte de procédure signifié lui a ou non causé un grief, au sens de l'article 114 du code de procédure civile, l'omission de cette information obligatoire, qui lui était destinée empêchant le délai de 4 mois prévu à l'article 1034 du code de procédure civile de courir à son égard.
L'exigence légale d'informer le destinataire, en particulier quand il n'est pas lui-même un professionnel du droit, de la nécessité de constituer un avocat pour effectuer la déclaration de saisine de la cour d'appel de renvoi et d'avoir à la choisir au sein d'un barreau relevant de cette seule cour d'appel, doit être respectée en toute hypothèse, peu important que le destinataire ait déjà eu l'occasion, dans cette instance, d'interjeter appel du jugement litigieux devant une autre cour d'appel selon des modalités identiques ou comparables.
L'existence d'une expérience procédurale précédente, même à la supposer transposable à la déclaration de saisine sur renvoi de cassation, n'exonère pas l'huissier de justice significateur de son obligation d'information sur les modalités de saisine de la juridiction d'appel de renvoi vis à vis du destinataire de cet acte de procédure. Et l'acte irrégulier de ce chef, ainsi signifié, est impuissant à faire courir le délai de saisine à l'égard du destinataire mal informé.
C'est par un autre moyen inopérant qu'il est argué par Me B..., ès-qualités, de l'existence d'une déclaration d'appel faite par erreur procédurale dans la présente instance par l'avocat du barreau de Montpellier de M. Gil X..., devant la cour d'appel de Montpellier, le 27 juillet 2016 à 14 h 28 (no16/6023), au lieu de la déclaration de saisine exigée par l'article 1032 du code de procédure civile.
En effet, cette erreur de procédure a été commise alors que le délai de 4 mois depuis la signification du 24 mars 2016 était déjà écoulé et si elle a entraîné un retard dans la déclaration da saisine de la cour d'appel de Montpellier, celui-ci n'a été que de 2 heures et 7 minutes (16 h 35 au lieu de 14 h 28), ce qui est inopérant quant à la question des conséquences de l'irrégularité de l'information sur les modalités de saisine de la cour d'appel de Montpellier et de la nécessité de saisir un avocat d'un barreau du ressort de cette cour d'appel, étant rappelé en outre que l'avocat plaidant de M. Gil X... est membre du barreau de Nîmes, hors de ce ressort.
Il convient donc de rejeter la fin de non-recevoir d'irrecevabilité de la déclaration de saisine de la cour d'appel de Montpellier par M. Gil X..., en date du 27 juillet 2016 et de déclarer celle-ci recevable.
L'équité ne commande pas particulièrement en l'espèce qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit d'aucune des parties.
Me B..., ès-qualités, supportera les dépens de l'incident.
PAR CES MOTIFS :
Nous, conseiller de la mise en état, statuant publiquement et contradictoirement,
Vu les articles 680, 772, 899, 907, 914, 916, 1032 à 1035 du code de procédure civile,
Déclarons recevable la saisine par M. Gil X... de la cour d'appel de Montpellier sur renvoi de cassation ordonné par arrêt de la chambre commerciale de la cour de Cassation prononcé le 26 janvier 2016, par déclaration parvenue au greffe le 27 juillet 2016,
Disons n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit d'aucune des parties,
Condamnons Me C... B..., ès-qualités de mandataire liquidateur judiciaire de la SARL Bergerie de Manon et de la SCI Bergerie de Manon, de Mme Isabelle D..., de Mme Z... A... et de M. Gil X... aux dépens de l'incident,
Rappelons que cette ordonnance peut être déférée à la cour par requête transmise au greffe dans un délai de 15 jours ;
Fait à Montpellier, le 1er février 2017.
Le GREFFIER, Le MAGISTRAT chargé de la mise en état,