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31/01/2017 | FRANCE | N°14/04080

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2o chambre, 31 janvier 2017, 14/04080


Grosse + copie
délivrées le
à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2o chambre

ARRET DU 31 JANVIER 2017

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/04080

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 MAI 2014
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN
No RG 11/00295

APPELANTE :

S.A.S CASINO DE SAINT CYPRIEN
Quai Arthur Rimbaud
66750 SAINT CYPRIEN
Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de Montpellier, avocat postulant
Représentée par Me Yann G

ARRIGUE loco Me Karen BABIN VILLEROUX, avocat au barreau de Lyon, avocat plaidant

INTIME :

Monsieur le DIRECTEUR DU CONTROLE FI...

Grosse + copie
délivrées le
à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2o chambre

ARRET DU 31 JANVIER 2017

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/04080

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 MAI 2014
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN
No RG 11/00295

APPELANTE :

S.A.S CASINO DE SAINT CYPRIEN
Quai Arthur Rimbaud
66750 SAINT CYPRIEN
Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de Montpellier, avocat postulant
Représentée par Me Yann GARRIGUE loco Me Karen BABIN VILLEROUX, avocat au barreau de Lyon, avocat plaidant

INTIME :

Monsieur le DIRECTEUR DU CONTROLE FISCAL SUD PYRENEES agissant sous l'autorité de l'administrateur général de la direction régionale des finances publiques de la région Midi-Pyrénées et du directeur général des finances publiques
34 RUE DES LOIS BP 56605
31066 TOULOUSE CEDEX 06
Représenté par Me Jean-Michel CASANOVA de la SCP CASANOVA ET ASSOCIES, avocat au barreau de Montpellier, avocat postulant
Représenté par Me MARCE, loco Me CASANOVA, avocat au barreau de Montpellier, avocat plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 22 Novembre 2016

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 DECEMBRE 2016, en audience publique, Monsieur Bruno BERTRAND ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

Madame Laure BOURREL, Président de chambre
Madame Brigitte OLIVE, conseiller
Monsieur Bruno BERTRAND, conseiller
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvia TORRES

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Madame Laure BOURREL, Président de chambre, et par Madame Sylvia TORRES, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par acte en date du 25 avril 2006, la SAS Casino de Saint Cyprien, établie à Saint Cyprien (66750) a acquis de la SARL Texaco ADSL un fonds de commerce de bar-restaurant-snack pour un prix total de 175.924,00 €.
Ce prix était composé :
- des éléments incorporels pour la somme de 45.735,00 €,
- des éléments corporels pour la somme de 93.530,00 €,
- de la clientèle pour la somme de 35.000,00 €,
- du stock pour la somme de 1.659,00 €.

Par un autre acte en date du 25 avril 2006, la SAS Casino de Saint Cyprien a acquis de la SARL Scatola Po un fonds de commerce de discothèque, dancing, débit de boissons, organisation de spectacles pour un prix total de 90.964,00 €.
Ce prix était composé :
- des éléments incorporels pour la somme de 77.410,00 €,
- de la clientèle pour la somme de 10.000,00 €,
- du stock pour la somme de 3.824,00 €.

L'exploitation de ces fonds de commerce se faisait dans des locaux situés sur le port, relevant du domaine public de la commune de Saint Cyprien, suivant convention d'occupation du domaine public conclue le 1er juin 2003 entre cette commune et la SARL Texaco ADSL, d'une part et la SARL Scatola Po, d'autre part. Mais celles-ci avaient été résiliées par la commune le 16 mars 2005 et la SARL Texaco ADSL restait devoir à la commune de Saint Cyprien une somme de 24.147,91 € au titre de l'occupation de ces locaux. La société Scatola Po restait devoir, quant à elle, la somme de 4.734,85 €.

Le 13 décembre 2005 la commune de Saint Cyprien avait conclu une nouvelle convention d'occupation de ces locaux, applicable rétroactivement depuis le 1er juillet 2005, avec la SAS Casino de Saint Cyprien, nonobstant le maintien dans les lieux des anciennes occupantes, à cette date, et ce malgré une ordonnance d'expulsion prononcée le 26 mai 2005 par le tribunal administratif de Montpellier, envers chacune d'elles.

Une convention tripartite transactionnelle a ensuite été conclue le 25 avril 2006 entre la commune de Saint Cyprien, la SAS Texaco ADSL et la SAS Casino de Saint Cyprien, aux termes de laquelle, notamment :
- la SAS Texaco ADSL abandonnait ses demandes à l'encontre de la Commune de Saint Cyprien, notamment concernant les travaux effectués par elle dans ces locaux durant l'occupation, en contrepartie d'une indemnité transactionnelle globale et forfaitaire de 288.655,00 € TTC,
- la SAS Casino de Saint Cyprien s'engageait à payer cette indemnité de 288.655,00 €, pour partie en réglant la dette de la SARL Texaco ADSL envers la commune de Saint Cyprien, pour partie en lui payant directement le solde de cette somme,
- la SAS Texaco ADSL s'engageait à quitter les lieux dans un délai de 8 jours.

Le 25 avril 2006, toujours, une autre convention tripartite conventionnelle était conclue entre la commune de Saint Cyprien, la SAS Casino de Saint Cyprien et la SARL Scatola Po, identique dans son contenu, sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité transactionnelle fixée à la somme de 116.267,00 € TTC.

Le directeur du contrôle fiscal Sud Pyrénées, dans une proposition de rectification en date du 15 mai 2009, a considéré que ces indemnités transactionnelles constituaient un complément du prix de cession des deux fonds de commerce, qui aurait dû être inclu dans l'assiette de calcul des droits d'enregistrement et taxes additionnelles, par application des articles 719 et 720 du code général des impôts. Il a donc proposé une rectification à l'encontre de la SAS Casino de Saint Cyprien pour les sommes de 20.046,00 euros au titre des droits d'enregistrement et de 2.886,00 € au titre des intérêts de retard sur cette somme.

Après observations de la SAS Casino de Saint Cyprien adressées le 15 juillet 2009, auxquelles une réponse a été apportée le 19 octobre 2009, puis rejet de cette réclamation, maintenue par la contribuable, par le supérieur hiérarchique du contrôleur le 9 décembre 2009 et ensuite par l'interlocuteur départemental le 24 mars 2010, l'administration fiscale a émis un avis de mise en recouvrement no10 04 00017, de ces chefs, pour les sommes de 20.046,00 € et 2.886,00 €, le 5 mai 2010.

La réclamation contentieuse formée le 28 mai 2010 par la SAS Casino de Saint Cyprien a été rejetée par décision notifiée le 17 novembre 2010.

Par acte d'huissier délivré le 17 janvier 2011 à M. le directeur du contrôle fiscal Sud Pyrénées, à Toulouse, la SAS Casino de Saint Cyprien a saisi le tribunal de grande instance de Perpignan d'une demande d'annulation de cet avis de mise en recouvrement no10 04 00017 émis le 5 mai 2010.

Par jugement contradictoire prononcé le 6 mai 2014, le tribunal de grande instance de Perpignan a notamment :
- débouté la SAS Casino de Saint Cyprien de ses demandes,
- confirmé la décision de l'administration fiscale notifiée le 17 novembre 2010, rejetant la réclamation de la SAS Casino de Saint Cyprien concernant son imposition au titre des droits d'enregistrement sur la mutation des fonds de commerce des sociétés Texaco ADSL et Scatola Po,
- rejeté les autres demandes des parties et laissé les dépens à la charge de la SAS Casino de Saint Cyprien.

Par déclaration d'appel parvenue au greffe de la cour d'appel de Montpellier le 2 juin 2014, la SAS Casino de Saint Cyprien a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions transmises au greffe le 23 décembre 2014, la SAS Casino de Saint Cyprien sollicite notamment :
- l'annulation du jugement du tribunal de grande instance de Perpignan,
- que soit prononcée en sa faveur la décharge des impositions mises à sa charge,
- la condamnation de l'administration fiscale aux dépens, ainsi qu'à lui rembourser les frais réels de signification et tous autres frais pouvant être mis à la charge de l'administrations fiscale en raison de cette procédure judiciaire, en application des articles L.207 et R.207-1 et suivants du livre des procédures fiscales.

Dans ses dernières conclusions transmises au greffe le 4 février 2015, l'administrateur général des finances publiques, chargé de la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées, sollicite notamment, au visa des articles 719 et 720 du code général des impôts :
- que l'appel interjeté soit déclaré autant irrecevable qu'infondé,
- que le calcul des droits d'enregistrement soit effectué sur la totalité des sommes payées par la SAS Casino Saint Cyprien au titre de l'acquisition des deux fonds de commerce et des conventions d'occupation du domaine public les concernant, soit la somme globale de 667.540,00 €, et non sur les seules valeurs des fonds de commerce,
- la confirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris,
- le rejet des demandes adverses et la condamnation de la SAS Casino de Saint Cyprien aux dépens.

L'affaire a fait l'objet d'un déchambrement à la cour d'appel de Montpellier, le 26 janvier 2016, passant de la 1ère chambre civile AO1 à la 2ème chambre commerciale.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 novembre 2016.

* * * * * * * *

MOTIFS :

SUR LA PROCÉDURE :

Aucun moyen ni exception de procédure n'est invoqué par la SAS Casino de Saint Cyprien à l'appui de sa demande d'annulation du jugement du tribunal de grande instance de Perpignan, dont elle soutient seulement qu'il a commis une erreur de droit en retenant que l'indemnité transactionnelle constituait une charge augmentative du prix de cession des fonds de commerce. Il convient donc de rejeter cette demande, infondée.

Aucun moyen, aucune exception de procédure ni fin de non-recevoir n'est invoquée par l'administration fiscale à l'appui de sa demande d'irrecevabilité de l'appel, qui doit donc être rejetée, en conséquence.

SUR LA RECTIFICATION DES DROITS D'ENREGISTREMENT :

La position initiale de l'administration fiscale était de considérer que les deux indemnités transactionnelles relatives aux locaux faisant l'objet de conventions d'occupation du domaine public constituaient un complément du prix de cession du fonds de commerce.

Lors de l'examen des réclamations de la SAS Casino de Saint Cyprien, l'administration fiscale a modifié son analyse, considérant désormais dans la décision de rejet du 17 novembre 2010, que les indemnités transactionnelles constituaient un droit d'entrée dans les locaux, assimilable au paiement d'un droit au bail pour un local commercial, sous la forme du paiement d'une indemnité représentative des travaux effectués par l'ancien occupant.

Mais lors de l'instance judiciaire devant le tribunal de grande instance de Perpignan, l'administration fiscale a soutenu qu'il s'agissait de charges augmentatives du prix de cession des fonds de commerce, élément essentiel de la cession et soumises aux droits de mutations à titre onéreux. Elle reprend cette position en appel.

Pour contester cette analyse, la SAS Casino de Saint Cyprien invoque la décision du tribunal administratif de Montpellier en date du 18 octobre 2012, rendue en matière d'impôt sur les sociétés pour l'année 2006 et concernant les effets de cette transaction à l'égard de la société mère du groupe fiscalement intégré dont elle-même faisait partie, la SAS Joagroupe Holding.
Elle précise que ce jugement est devenu définitif, faute de recours exercé dans le délai de deux mois de son prononcé par l'administration fiscale.

Cette juridiction administrative a ainsi prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire correspondant à l'impôt sur les sociétés appliquée de ces chefs, au titre de l'année 2006, à la SAS Joagroupe Holding, aux motifs que :
« le versement de deux indemnités transactionnelles a permis à la SAS Casino de Saint Cyprien, qui ce faisant s'est substituée aux obligations de la commune (de Saint Cyprien) d'obtenir la libération rapide des locaux nécessaires à son activité, libération à laquelle était conditionnée la délivrance de l'autorisation du ministre de l'intérieur, préalable à l'exploitation du casino transféré ; que cette dépense n'a donc pas eu pour effet d'augmenter la valeur ou la durée d'exploitation des fonds de commerce acquis, mais doit être regardée comme une charge de l'exercice clos le 31 octobre 2006, exposée dans l'intérêt direct de l'exploitation ; que par suite c'est à tort que l'administration, après avoir réintégré la charge en cause dans les résultats de l'exercice clos le 31 octobre 2006 de la SAS Casino de Saint Cyprien, en a rattaché le montant à son actif immobilisé ; que par suite la SAS Joagroupe Holding, en sa qualité de société mère du groupe fiscalement intégré, doit être déchargée de la cotisation supplémentaire correspondant à l'impôt sur les sociétés qui en procède».

Mais cette analyse du paiement des indemnités transactionnelles comme une charge pour la SAS Casino de Saint Cyprien au titre de l'exercice clos le 31 octobre 2006, liée à la cession des deux fonds de commerce exploités dans les locaux faisant l'objet des transactions, tombe néanmoins sous l'application de l'article 720 du code général des impôts, relatif aux droits d'enregistrement, en particulier en son dernier alinéa :
« Article 720 :
Les dispositions du présent code applicables aux mutations de propriété à titre onéreux de fonds de commerce ou de clientèles sont étendues à toute convention à titre onéreux, ayant pour effet de permettre à une personne d'exercer une profession, une fonction ou un emploi occupé par un précédent titulaire, même lorsque ladite convention conclue avec ce titulaire ou ses ayants cause ne s'accompagne pas d'une cession de clientèle.

Les droits sont exigibles sur toutes les sommes dont le paiement est imposé, du chef de la convention, sous quelque dénomination que ce soit, au successeur, ainsi que sur toutes les charges lui incombant au même titre. »

L'appelante soutient que ces indemnités doivent être qualifiées de prestations de services, à savoir une obligation de faire consistant à libérer les lieux occupés sans droit ni titre, qui aurait été souscrite postérieurement à la cession des fonds de commerce et réalisée ensuite par les vendeurs des fonds de commerce, au profit de l'acquéreur, prestation dont l'indemnité transactionnelle constituerait le prix.

Mais cette analyse apparaît inexacte ; les sociétés Texaco ADSL et Scatola Po ne se sont pas seulement engagées à quitter les lieux, dont elles étaient expulsées administrativement et qu'elles occupaient alors sans droit ni titre, mais surtout à abandonner le recours devant le Conseil d'Etat exercé contre la décision d'expulsion des locaux, et à renoncer aussi à solliciter une indemnisation par la commune de Saint Cyprien, propriétaire des locaux faisant l'objet de la convention d'occupation du domaine public, supérieure au montant substantiel fixé dans la transaction et que leur successeur a accepté de leur payer en contrepartie.

Il est aussi opposé par l'appelante que si l'indemnité transactionnelle était un élément du prix de cession de chacun des fonds de commerce, elle aurait été prévue dans l'acte de cession, ce qui n'est pas le cas.

Mais le texte de l'article 720 du code général des impôts s'applique à toutes les conventions « sous quelques dénomination que ce soit » et le seul fait qu'une convention de cession portant sur un fonds de commerce fasse l'objet de plusieurs actes sous seing privé distincts, suivant les éléments du fonds cédés et les charges réparties entre le cédant et le cessionnaire, n'enlève pas à la convention de cession son caractère global et unique.

Ce caractère global était d'ailleurs revendiqué par la SAS Casino de Saint Cyprien, dans sa lettre adressée le 1er avril 2009 au vérificateur des impôts, reprise en extrait dans la proposition de rectification du 15 mai 2009 (pièce no3) :
« le versement de ces indemnités est indissociable du rachat des fonds de commerce de restauration et de discothèque exploités par lesdites sociétés, opération qui s'insère dans le projet global de réimplantation de notre établissement de jeux sur le site de la Scatola. »

Par ailleurs, en toute hypothèse, l'acte de cession des fonds de commerce, sans la convention d'accord transactionnel permettant la mise en œuvre des conventions d'occupation du domaine public, n'aurait pas pu être mis à exécution, faute de respect de l'obligation de délivrance des locaux ; l'ancien occupant restant dans les lieux nécessaires à l'exploitation menaçait donc la validité de la nouvelle convention d'occupation du domaine public au moins durant le maintien de son recours devant le Conseil d'Etat concernant la résiliation de sa convention et son expulsion,

notamment et plus encore en cas de succès de son action juridique administrative.

Il est aussi soutenu que les indemnités transactionnelles payées correspondaient seulement à la nécessité de l'exploitation et ne sont donc pas un complément du prix.

Mais d'une part ceci est inexact, la délivrance des locaux faisant l'objet de la convention d'occupation du domaine public constituait la contrepartie nécessaire à la cession des fonds de commerce et non uniquement le moyen de lever un obstacle juridique et matériel à l'exploitation des fonds de commerce.

D'autre part, le fait que cette transaction réponde également aux nécessités de l'exploitation n'interdit nullement de considérer que l'indemnité transactionnelle correspondait à une charge augmentative du prix de cession, dont elle était une condition essentielle, pour les deux fonds de commerce.

En effet les charges augmentatives de cession en matière de droits de mutation à titre onéreux sont définies dans une circulaire administrative (7 C-1223 no2 du 1er octobre 2001) reprise dans les conclusions de l'appelante (page 8 et 9) comme : «toutes les prestations supplémentaires que le contrat impose à l'acquéreur et tous les avantages indirects que l'acheteur procure au vendeur soit en acquittant ses dettes, soit en prenant à son compte des obligations qui incombent normalement à ce dernier. »
Toutefois il convient de compléter la citation du texte de cette circulaire, par la phrase immédiatement à la suite de celle reprise dans les conclusions de l'appelante :
« Les charges ne profitent au vendeur que d'une manière détournée. C'est la seule particularité qui les distingue du prix de vente. Sauf cette différence, les charges participent de la nature du prix. »

Tel est bien le cas en l'espèce, la SAS Casino de Saint Cyprien acheteur des fonds de commerce, ayant pris à son compte, dans le cadre des deux transactions intervenues, les dettes de redevances d'occupation des vendeurs, les société Texaco ASDL et Scatola Po vis à vis du concédant, la commune de Saint Cyprien, depuis le mois de juillet 2005, notamment.

En effet, la convention d'occupation du domaine public a été conclue le 13 décembre 2005, à effet de façon rétroactive au 1er juillet 2005.

Elle comportait donc l'obligation souscrite par la SAS Casino de Saint Cyprien, d'acquitter les loyers échus depuis cette date, alors que les locaux étaient encore occupés par les deux sociétés expulsées et non par elle-même. Le montant de ces loyers échus dus à la commune de Saint Cyprien, qui a été repris dans les indemnités transactionnelles convenues, ne saurait donc s'analyser en une prestation de service d'obligation de faire, souscrite après la cession des fonds de commerce par les sociétés Texaco ADSL et Scatola Po.

D'autre part la prise en compte, dans le cadre de la transaction intervenue avec chacun des vendeurs, du coût des travaux d'amélioration réalisés par eux sur l'immeuble destiné à être exploité commercialement par la SAS Casino de Saint Cyprien, était une dépense future évitée par l'acquéreur, qu'il aurait dû assumer lui-même sinon, dès lors que les fonds de commerce cédés étaient destinés à une exploitation commerciale identique par le successeur.

Enfin il y a lieu de relever également que la prise en charge, par paiement aux lieu et place de la commune de Saint Cyprien, des indemnités contractuelles auxquelles pouvaient prétendre les sociétés Texaco ADSL et Scatola Po du fait de la cessation de la convention d'occupation des locaux, permettait à ces dernières de cesser l'exercice des recours judiciaires alors engagés de ces chefs, ce qui constitue un avantage indirect procuré au vendeur.

Il convient donc de confirmer le jugement déféré, qui avait lui-même confirmé la décision de rectification de l'administration fiscale, notifiée le 17 novembre 2010 et rejeté la réclamation de la SAS Casino de Saint Cyprien, étant relevé que les calculs de rectification des droits d'enregistrements proposés par l'administration fiscale ne sont pas particulièrement contestés par l'appelante.

SUR LES FRAIS DE PROCÉDURE ET LES DÉPENS :

Il y a lieu de condamner la SAS Casino de Saint Cyprien aux entiers dépens de première instance et d'appel.

* * * * * * * * * *

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Vu les articles 6 et 9 du code de procédure civile,
Vu les articles 719 et 720 du code général des impôts,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Perpignan prononcé le 6 mai 2014, en toutes ses dispositions,
Condamne la SAS Casino de Saint Cyprien aux dépens d'appel,

Autorise la S.C.P. Casanova et associés avocat, à recouvrer directement les dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Ainsi prononcé et jugé à Montpellier le 31 janvier 2017.

Le greffier, Le président,

B.B.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2o chambre
Numéro d'arrêt : 14/04080
Date de la décision : 31/01/2017

Analyses

Constitue une charge augmentative du prix de cession d'un fonds de commerce au sens de l'article 720 du code général des impôts et soumise de ce fait aux droits de mutations à titre onéreux, une indemnité transactionnelle qui a permis au cessionnaire d'obtenir la libération rapide par des occupants sans droit ni titre des locaux nécessaires à son activité et faisant l'objet de conventions d'occupation du domaine public. Cette indemnité ne s'analyse pas en une obligation de faire consistant pour les occupants à libérer les lieux dès lors qu'ils se sont en outre engagés à abandonner leur recours contre la décision d'expulsion des locaux et à renoncer à solliciter une indemnisation par la commune de Saint Cyprien, propriétaire des locaux. Il est indifférent que cette indemnité n'ait pas été prévue dans l'acte de cession, l'article 720 du code général des impôts s'appliquant à toutes les conventions « sous quelques dénomination que ce soit  » et le seul fait qu'elle ait donné lieu à plusieurs actes sous seing privé distincts ne lui enlevant pas son caractère global et unique. Enfin, cet accord transactionnel constituait une condition essentielle de la cession du fonds de commerce puisqu'à défaut, l'obligation de délivrance des locaux faisant l'objet de la convention d'occupation du domaine public, qui constituait la contrepartie nécessaire à la cession, n'aurait pu être mise à exécution.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Perpignan, 06 mai 2014


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2017-01-31;14.04080 ?
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