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03/09/2015 | FRANCE | N°15/00584

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre de l'instruction, 03 septembre 2015, 15/00584


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION

DU 03 septembre 2015

2015/ 00584

APPEL D'UNE
ORDONNANCE DE RENVOI DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL

DECISION :

CONFIRMATION
et MAINTIEN EN DETENTION

A R R E T N

prononcé en chambre du conseil le trois septembre deux mil quinze, par Madame ISSENJOU, président

Vu l'information suivie au Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER du chef d'arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire de plusieurs personnes suivi de libération avant le 7eme jou

r, port prohibé d'arme, munition ou élément essentiel de catégorie B, transport sans motif légitime d'arme, munit...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION

DU 03 septembre 2015

2015/ 00584

APPEL D'UNE
ORDONNANCE DE RENVOI DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL

DECISION :

CONFIRMATION
et MAINTIEN EN DETENTION

A R R E T N

prononcé en chambre du conseil le trois septembre deux mil quinze, par Madame ISSENJOU, président

Vu l'information suivie au Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER du chef d'arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire de plusieurs personnes suivi de libération avant le 7eme jour, port prohibé d'arme, munition ou élément essentiel de catégorie B, transport sans motif légitime d'arme, munition ou élément essentiel de catégorie B contre :

PERSONNE MISE EN EXAMEN :

X...Patrick
né le 28/ 10/ 1968 à TOULOUSE

...
Mandat de dépôt du 11 janvier 2015, Ordonnance de maintien en détention du 13 juillet 2015

Ayant pour avocat Me FIGUEROA, ULAKIA-8, avenue d'Assas-34000 MONTPELLIER

PARTIE CIVILE :

Y...Anne
Chez Me Garcia-3 rue Monjardin-30000 NIMES
Ayant pour avocat Me GARCIA, 3 rue Monjardin-30000 NIMES

COMPOSITION DE LA COUR :
lors des débats et du délibéré :

Madame ISSENJOU, Président, désignée par ordonnance no2015/ 144 de M. Le Premier Président, en date du 02 juillet 2015
Madame GAUBERT et Madame OLIVE, conseillers,

régulièrement désignés conformément à l'article 191 du code de procédure pénale.

GREFFIER : Madame CERIZOLLA lors des débats et Madame VIGINIER lors du prononcé de l'arrêt.

MINISTERE PUBLIC : Monsieur LAURENT, substitut général lors des débats.
Arrêt prononcé en présence du Ministère Public.

DEBATS

A l'audience en chambre du conseil le 20 août 2015, ont été entendus :

Madame ISSENJOU, Président, en son rapport

Maître GARCIA, avocat de la partie civile, en présence de cette dernière.

Monsieur LAURENT, substitut général, en ses réquisitions

Maître DAMON substituant Maître FIGUEROA, avocat de la personne mise en examen et qui a eu la parole en dernier.

RAPPEL DE LA PROCEDURE

Par ordonnance en date du 13 juillet 2015, le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Montpellier a renvoyé le mis en cause devant le Tribunal Correctionnel.

Par télécopies du 13 juillet 2015 avis a été donné à la personne mise en examen, à la partie civile et aux avocats.

Par déclaration au greffe du Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER en date du 17 juillet 2015, Maître GARCIA Avocat, a fait connaître sa volonté d'interjeter appel de ladite ordonnance.

Par avis et télécopies en date du 27 juillet 2015, le procureur général a notifié à la personne mis en examen, à la partie civile et aux avocats la date à laquelle l'affaire serait appelée à l'audience.

Le dossier comprenant le réquisitoire écrit de Monsieur le Procureur Général a été déposé au greffe de la Chambre de l'Instruction et tenu à la disposition des avocats des parties.

Il a été ainsi satisfait aux formes et délais prescrits par les articles 194 et 197 du code de procédure pénale.

Maître FIGUEROA, avocat, a déposé au nom de Patrick X...le 17 août 2015 à 14H45, au greffe de la Chambre de l'Instruction un mémoire visé par le greffier et communiqué au Ministère Public.

DECISION

prise après en avoir délibéré conformément à la loi ;

EN LA FORME

Cet appel est régulier en la forme, a été interjeté conformément aux prescriptions des articles 186 et 186-3 du code de procédure pénale ; il est donc recevable.

AU FOND

Le vendredi 9 janvier 2015, vers 17 h 30, les services de police de MONTPELLIER étaient informés qu'un individu, muni d'une arme, était vraisemblablement en train de commettre un vol à main armée dans la bijouterie BARRIERE, rue de l'Argenterie à MONTPELLIER, à l'intérieur de laquelle deux employées étaient retenues (D 3, D52).

À l'issue de longues négociations menées par les membres du GIPN, l'individu identifié comme étant Patrick X..., se rendait le 10 janvier à 1 h 50 mn, soit plus de neuf heures après le début de la séquestration.

Les deux employées, Mesdames Anne Y...et Christine Z..., expliquaient qu'un homme était arrivé aux alentours de
16 h 30, à visage découvert et porteur d un sac à dos (D 20, D 21).

Elles relataient que s'étant présenté comme simple client, l'individu avait sollicité la présentation de pièces de joaillerie. Puis, au moment de quitter le commerce, il s'était retourné et avait rapidement exhibé un revolver. Il avait rassuré les employées en précisant que l'arme n'était pas dangereuse et avait tiré un coup en l'air pour en attester.
Il leur avait soutenu ne pas leur vouloir du mal et les avait invitées à téléphoner à leurs proches et à leur employeur.
Il ne leur avait pas donné l'ordre de lui remettre des bijoux ce qui excluait en conséquence la thèse d'un vol à main armée.

Interpellé, le preneur d'otages déclarait se nommer Patrick X...(D 10, D 14).
Il était trouvé en possession d'un revolver d'alarme approvisionné de six cartouches, dont l'une avait été percutée.

La perquisition réalisée au domicile de ses parents chez lesquels il demeurait amenait la saisie de plusieurs armes factices du même ordre que celle utilisée lors des faits (trois revolvers d'alarme, trois pistolets automatiques d'alarme, une carabine Winchester d'alarme avec canon et crosse raccourcis, de très nombreuses boîtes de munitions d'alarme) mais aussi trois poignards de type baïonnettes, des couteaux de guerre et des sabres japonais (D 28).

Entendu, il expliquait tout d'abord avoir agi sans raison puis attribuait son passage à l'acte à une trop forte pression accumulée ces derniers temps en raison des événements liés aux attentats menés notamment à l'encontre du journal Charlie Hebdo et du caractère violent d'un film visionné l'après midi-même.
Ses motivations oscillaient entre le souhait d'être entendu de 1a
société et celui d'être tué à l'occasion de sa reddition devant les forces de l'ordre.

Patrick X...était mis en examen le 11 janvier 2015 des chefs de port et transport prohibés d'armes ainsi que d'arrestation, enlèvement, ou détention arbitraire de plusieurs personnes suivi de libération avant le septième jour, délit prévu par les articles 224-3 alinéa 1 et alinéa 3, 224-1 du Code pénal et réprimé par l'article 224-3 alinéa 3 du Code pénal.

Il était placé sous mandat de dépôt correctionnel (C 6).

Lors de cette mise en examen et d'un interrogatoire ultérieur, Patrick X...réitérait les déclarations faites lors de la garde à vue.

Ainsi expliquait-il à nouveau être allé voir le film " Queen and Country ", en être sorti vers 15 h 15-15 h 20, puis avoir regardé les vitrines. Il était entré dans la bijouterie par hasard.
Selon ses déclarations tout s'était déclenché sans en connaître les raisons précises.
Il admettait avoir volontairement tiré un coup en feu au moyen de l'arme en sa possession qui était toujours chargée.
Il précisait qu'i1 avait été énervé par les faits commis à Paris dans les locaux du journal " Charlie Hebdo " et qu'il y avait eu un élément déclencheur an moment de quitter la bijouterie qui avait fait lâcher la " pression de la cocotte ".
Il regrettait les faits qu'il avait commis et confirmait qu'il n'avait pas souhaité faire du mal aux deux victimes.
En revanche, il n'entendait pas suivre des soins ou même y réfléchir, les faits relevant pour lui du passé (D41).

La poursuite des investigations confirmait la projection du film Queen and Country le jour des faits au cinéma " Diagonal ".

Daniel A...exploitant d'un commerce situé face à la bijouterie indiquait avoir vu le 9 janvier 2015 Patrick X...qu'il connaissait et dont le comportement ne présentait rien d'anormal. Il le décrivait comme quelqu'un de maniaque, de généreux, ayant la tête sur les épaules tout en étant " déconnecté de la réalité ".

Mesdames Christine G... épouse Z...et Anne Y..., cette dernière se constituant partie civile, étaient réentendues (D57, D56).

Elles réitéraient leurs déclarations, confirmant les comportements erratiques du preneur d'otages, son absence d'intention de les agresser physiquement mais assuraient avoir eu très peur, l'état de Madame Anne Y...ayant nécessité des soins psychologiques durant plusieurs semaines après les faits.

Les armes et munitions trouvées en possession du mis en examen étaient saisies et placées sous scellés.

******

Le casier judiciaire de Patrick X...ne porte trace d'aucune condamnation.

Patrick X...a été soumis à une expertise psychologique et à une expertise psychiatrique.

Selon ces experts Patrick X...présente une personnalité pathologique, sans aucune autonomie et dépendante d'un étayage extérieur. Il est habité par des tensions nerveuses voire des angoisses qu'il n'a pas les moyens psychologiques de gérer et souffre d'un fort sentiment d'insécurité susceptible d'être réactivé par des événements extérieurs. Il perçoit le monde comme dangereux et il lui est difficile de l'affronter.
Il n'est pas auto protégé.
Le recours aux armes peut être une réponse à ce contexte mental.
Il n'est pas à l'abri de nouveaux passages à l'acte d'autant qu'il ne se sent pas coupable, les interdits n'étant pas intégrés.
Sa réadaptation reste aléatoire.
Patrick X...indemne de maladies mentales ne présente pas de dangerosité au sens psychiatrique. Il est accessible à une sanction pénale, assortie si possible d'une injonction de soins.
Son discernement ou le contrôle de ses actes étaient altérés au moment des faits.

******

Conformément aux réquisitions prises par le procureur de la république, le magistrat instructeur a, selon ordonnance en date du 13 juillet 2015 :

1/ estimé qu'il résultait de l'information charges suffisantes contre Patrick X...:

A/ d'avoir à Montpellier le 9 janvier 2015, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, sans ordre des autorités constituées et hors les cas prévus par la loi, arrêté, enlevé, détenu ou séquestré plusieurs personnes, en l'espèce Mme Anne Y...ct Mme Christine G... épouse Z..., lesdites personnes ayant été libérées volontairement avant le septième jour accompli depuis leur appréhension,

délit prévu et réprimé par les articles 224-3 al 1 et al 3, 224-1,
224-9 du Code Pénal,

B/ d'avoir à Montpellier le 9 janvier 2015, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription hors de son domicile et sans motif légitime porté une arme ou un élément de cette arme ou une munition de catégorie D, en l'espèce un revolver à grenaille de type MAGNUM, Cd 380 9mmk dont le numéro a été meulé,

délit prévu et réprimé par les articles L 311-2, L315-1, L 317-8, L 317-10, L317-12 du code de la sécurité intérieure, 2 et 121 du décret no 2013-700 du 30/ 07/ 13,

C/ d'avoir à Montpellier le 9 janvier 2015, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, hors de son domicile et sans motif légitime transporté une arme ou un élément de cette arme ou une munition de catégorie D, en l'espèce un revolver à grenaille de type MAGNUM, Cd 380 9mmk dont le numéro a été meulé,

délit prévu et réprimé par les articles L 311-2, L315-1, L 317-8, L 317-10, L317-12 du code de la sécurité intérieure, 2 et 121 du décret no 2013-700 du 30/ 07/ 13,

2/ renvoyé Patrick X...devant le tribunal correctionel de Montpellier pour y être jugé de ces chefs.

Le conseil de madame Anne Y..., partie civile, a formé appel le 17 juillet 2015 de cette ordonnance.

****

Aux termes de conclusions annexées à l'acte d'appel elle soutient que les faits doivent recevoir une qualification criminelle dès lors que la libération des otages ne peut être considérée comme volontaire, Patrick X..., menacé d'assaut par les forces de police ayant en réalité été contraint de rendre la liberté aux deux victimes.

La partie civile n'a pas déposé de mémoire.

Monsieur le Procureur Général requiert confirmation de l'ordonnance entreprise.

Dans son mémoire régulièrement déposé le conseil du mis en examen, rappelant les termes clairs des déclarations de Mesdames Y...et Z...et la volonté du mis en examen de mettre rapidement un terme, par la négociation, à la situation dans laquelle il s'était mis, en déduit que c'est bien volontairement que Patrick X...a libéré les deux victimes et sollicite confirmation de l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel.

****

SUR QUOI :

Selon les dispositions des articles 224-1 et 224-3 alinéa 3 du Code Pénal, le fait, sans ordre des autorités constituées et hors les cas prévus par la loi, d'arrêter, d'enlever, de détenir ou de séquestrer plusieurs personnes libérées volontairement avant le septième jour accompli depuis son appréhension constitue un délit puni de 10 ans d'emprisonnement.

Patrick X...a été mis en examen du chef du délit d'arrestation, d'enlèvement, de détention ou de séquestration, l'article répressif visé étant l'article 224-3 alinéa 3 du Code Pénal.

Il est acquis que la séquestration de Mesdames Y...et Z...a débuté le 9 janvier 2015 à 17 h 30 mn et s'est terminée le 10 janvier 2015 à 1 h 30 mn de sorte qu'elle a duré un peu plus de neuf heures.

Il sera relevé que la négociation mise en place a favorablement abouti dès lors que Patrick X...s'est volontairement rendu aux autorités judiciaires et a en conséquence volontairement libéré les deux otages.

En effet aucune des pièces de la procédure ne montre que Patrick X...aurait été contraint ou aurait été menacé d'un assaut des forces de l'ordre, le procès-verbal figurant en cote D 4 visant expressément " l'évolution positive des diverses phases de négociation ", les enquêteurs sur place constatant " que le négociateur toujours en discussion avec l'individu, nous informe qu'il se rend ".

Par ailleurs l'une des victimes rapporte les propos de Patrick X...selon lesquels son intention était de laisser partir les deux employées quand il le déciderait.

Le dialogue instauré a ainsi permis de ramener à la raison l'intéressé qui a, en pleine conscience et par sa seule volonté, pris la décision de se rendre et de relâcher par voie de conséquence les deux victimes.

Les faits poursuivis ne peuvent en conséquence que recevoir une qualification délictuelle.

C'est donc à raison que le premier juge a décidé comme il l'a fait, étant observé que les port et transport d'arme, d'élément d'arme ou de munition de catégorie D s'analysent en des délits

L'ordonnance attaquée devant être confirmée, le maintien en détention de Patrick X...sera ordonné sans qu'il soit besoin d'en préciser la durée ou d'en prévoir la prolongation dès lors que le délai de comparution devant le tribunal correctionnel prévu par l'article 179 alinéa 4 du Code de Procédure Pénale ne commence à courir qu'au jour où l'ordonnance de renvoi est devenue définitive.

PAR CES MOTIFS

Statuant en chambre du conseil, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu les articles 179, 183, 184, 185, 186, 186-3, 194 à 200, 207, 212 à 216, 217 et 801 du code de procédure pénale ;

EN LA FORME

Déclare l'appel recevable.

AU FOND

Confirme l'ordonnance déférée,

Ordonne le maintien en détention de Patrick X....
DIT que le présent arrêt sera exécuté à la diligence de Monsieur le PROCUREUR GENERAL.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre de l'instruction
Numéro d'arrêt : 15/00584
Date de la décision : 03/09/2015

Analyses

Selon les dispositions des articles 224-1 et 224-3 alinéa 3 du Code Pénal, le fait, sans ordre des autorités constituées et hors les cas prévus par la loi, d'arrêter, d'enlever, de détenir ou de séquestrer plusieurs personnes libérées volontairement avant le septième jour accompli depuis son appréhension constitue un délit puni de 10 ans d'emprisonnement. Relève de cette qualification délictuelle le fait pour le mis en examen d'avoir séquestré pendant un peu plus de 9 heures deux employées d'une bijouterie avant de se rendre à l'issue d'un dialogue avec les forces de l'ordre et de les relâcher par sa seule volonté et s'en y avoir été contraint ou menacé d'un assaut.


Références :

Décision attaquée : Juge d'instr. près le trib. de grande instance de Montpellier, 13 juillet 2015


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2015-09-03;15.00584 ?
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