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28/10/2014 | FRANCE | N°13/04266

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1o chambre section d, 28 octobre 2014, 13/04266


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COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1o Chambre Section D
ARRET DU 28 OCTOBRE 2014
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/04266

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 16 MAI 2013 COUR DE CASSATION No RG 480 fs-d

APPELANT :
OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX DES AFFECTIONS IATROGENES ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES - ONIAM - pris en la personne de son Directeur en exercice domicilié en cette qualité au siège social sisTour Galliéni II36 Avenue du Général de Gaulle93170 BAGNOLETreprésenté par Me P

hilippe SENMARTIN de la SCP PHILIPPE SENMARTIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avoc...

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COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1o Chambre Section D
ARRET DU 28 OCTOBRE 2014
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/04266

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 16 MAI 2013 COUR DE CASSATION No RG 480 fs-d

APPELANT :
OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX DES AFFECTIONS IATROGENES ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES - ONIAM - pris en la personne de son Directeur en exercice domicilié en cette qualité au siège social sisTour Galliéni II36 Avenue du Général de Gaulle93170 BAGNOLETreprésenté par Me Philippe SENMARTIN de la SCP PHILIPPE SENMARTIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Me Mathilde BRUM substituant Me Olivier SAUMON du CABINET VATIER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

INTIMEE :
SOCIETE HOSPITALIERE D'ASSURANCES MUTUELLES - SHAM - prise en la personne de son représentant légal en exercice18 Rue Edouard Rochet69372 LYON CEDEX 08représentée par Me Yves GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me SACEPE substituant Me Sandrine MARTINIANI, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 27 Août 2014 dont le rabat a été prononcé le 17 Septembre 2014 avec clôture du même jour.

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 SEPTEMBRE 2014, en audience publique, Monsieur Jacques MALLET ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Jacques MALLET, PrésidentMadame Françoise VIER, ConseillerMadameNathalieLECLERC-PETIT, Vice-Présidente placée déléguée par ordonnance de Monsieur le Premier Président du 01 septembre 2014qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Myriam RUBINI

L'affaire mise en délibéré au 21 octobre 2014 a été prorogée au 28 octobre 2014.
ARRET :
- CONTRADICTOIRE.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile ;
- signé par Monsieur Jacques MALLET, Président, et par Madame Myriam RUBINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
EXPOSÉ DU LITIGE :
Mme Christine X..., victime d'un accident de la circulation le 15 juin 1985, a reçu à cette occasion plusieurs transfusions, pendant une intervention et dans la phase post-opératoire. M. Douglas Y... a été reconnu responsable de cet accident et condamné pour blessures involontaires.
À partir des années 1993-1994, Mme Christine X... s'est plainte d'asthénie et une biopsie a mis en évidence le 18 septembre 2000 une hépatite chronique.
Après une expertise amiable, Mme Christine X... a assigné l'Établissement français du sang (l'EFS) d'une part, M. Y... et la société Axa son assureur d'autre part, devant le tribunal de grande instance de Nîmes.

Par jugement du 26 octobre 2006, le tribunal de grande instance de Nîmes a débouté Mme Christine X... de ses demandes et déclaré sans objet l'appel en garantie formé par l'EFS à l'encontre de son assureur la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM).
Par un premier arrêt avant dire droit en date du 25 novembre 2008, statuant sur l'appel formé par Mme Christine X..., la cour d'appel de Nîmes a estimé, sur le fondement de l'article 102 de la loi no 2002-203 du 4 mars 2002, qu'il appartenait à l'EFS d'apporter la preuve de l'innocuité des produits sanguins inoculés à Mme Christine X... et d'une autre source de contamination, et ordonné une expertise.
Par un second arrêt en date du 6 décembre 2011, rendu en lecture du rapport d'expertise, la cour d'appel de Nîmes a infirmé le jugement dont appel et jugé notamment que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affectations iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM) qui s'était substitué à l'EFS en vertu de l'article 67, IV, de la loi no 2008-1330 du 17 décembre 2008 applicable aux instances en cours lors de son entrée en vigueur, ne rapportait pas la preuve qui lui incombait. Elle a ainsi :¿ condamné in solidum l'ONIAM et M. Y... ainsi que son assureur, la société Axa France IARD, à payer diverses sommes à Mme Christine X... et à la CPAM ;¿ dit que ces sommes seraient supportées à concurrence de moitié chacun par l'ONIAM d'une part, M. Y... et son assureur d'autre part ;¿ condamné la SHAM à prendre en charge les condamnations prononcées à la charge de l'ONIAM.
Par arrêt du 16 mai 2013, statuant entre autres sur le pourvoi formé par la SHAM à l'encontre de ce dernier arrêt, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt du 6 décembre 2011, mais seulement en ce qu'il a condamné la SHAM à garantir l'ONIAM des condamnations prononcées contre lui, renvoyant sur ce point la cause et les parties devant la cour d'appel de Montpellier, motifs pris, au visa des articles L. 1221-14 du code de la santé publique et 67, IV, de loi no 2008-1330 du 17 décembre 2008 :Qu'en statuant ainsi, alors que la substitution de l'ONIAM à l'EFS, dans les instances en cours à la date du 1er juin 2010, pour lui permettre d'indemniser, au titre de la solidarité nationale, les victimes de contaminations transfusionnelles par le virus de l'hépatite C, n'opère pas transfert à l'ONIAM des créances de l'EFS envers les assureurs de celui-ci, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Vu la saisine de la cour de renvoi le 5 juin 2013 à la requête de l'ONIAM.

Vu les dernières conclusions déposées devant cette cour :* le 28 août 2014 par l'ONIAM ;* le 25 août 2014 par la SHAM.
L'ordonnance de clôture, initialement rendue le 27 août 2014, a été rapportée et à nouveau prononcée sur l'audience du 17 septembre 2014, à la demande de l'appelante et sans opposition de la part de l'intimée.
******
L'ONIAM conclut, au visa notamment des articles L. 1221-14 du code de la santé publique, 67 IV de la loi no 2008-1330 du 17 décembre 2008, des dispositions des décrets no 2010-251 et no 2010-252 du 11 mars 2010, enfin de l'arrêté du 15 mars 2010 portant nomination au conseil d'orientation de l'ONIAM :¿ au débouté de la SHAM de l'ensemble de ses prétentions ;¿ à sa condamnation à le garantir de toutes les condamnations prononcées à son encontre par l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 6 décembre 2011 ;¿ à la condamnation de la SHAM à lui payer la somme de 5 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;¿ à ce qu'il soit statué ce que de droit sur les dépens avec distraction au profit de Maître Philippe Senmartin, avocat aux offres de droit.
La SHAM demande à la cour, au visa notamment de la loi no 2008-1330 du 17 décembre 2008 et subsidiairement de l'article 72 II et III de la loi no 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 :¿ à titre principal, dire qu'elle ne doit pas sa garantie à l'ONIAM et la mettre en conséquence purement et simplement hors de cause ;¿ à titre subsidiaire, infirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeter toutes les fins de non-recevoir soulevées par elle ;¿ dire en conséquence les demandes formées par l'ONIAM irrecevables et mal fondées ;¿ dire que l'ONIAM doit seul répondre des conséquences dommageables de l'infection par le virus de l'hépatite C de Mme Christine X... ;¿ dire et juger qu'elle ne doit pas sa garantie à l'ONIAM ;¿ à titre infiniment subsidiaire, au visa de l'article L. 441-1 du code de l'organisation judiciaire, solliciter l'avis de la Cour de cassation qui devra se prononcer dans le délai de trois mois de sa saisine ;¿ surseoir à statuer à toute décision sur le fond de l'affaire jusqu'à l'avis de la Cour de cassation ou, à défaut, jusqu'à l'expiration du délai ci-dessus mentionné ;¿ condamner l'ONIAM à lui payer la somme de 5 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont ceux d'appel distraits au profit de Maître Yves Garrrigues, avocat sur son affirmation de droit.
SUR CE :
Il est constant que l'arrêt infirmatif rendu par la cour d'appel de Nîmes, le 6 décembre 2011, est définitif en ses dispositions relatives :¿ à la mise hors de cause de l'EFS auquel s'est substitué l'ONIAM en application de l'article 67 IV de la loi no 2008-1330 du 17 décembre 2008 ;¿ à l'obligation pour l'ONIAM de devoir indemniser Mme Christine X... du préjudice subi par elle suite à sa contamination par le virus de l'hépatite C ;¿ à la condamnation in solidum de l'ONIAM, d'une part, de M. Y... et son assureur la société Axa France IARD, d'autre part, à payer diverses sommes à Mme Christine X... et à la CPAM,¿ à la répartition de ces sommes devant être supportées à concurrence de la moitié chacun, par l'ONIAM d'une part et par M. Y... et son assureur d'autre part.
Dès lors, statuant dans les limites de la cassation partielle prononcée par l'arrêt du 16 mai 2013 de la Cour de cassation, la cour de renvoi demeure saisie de la seule question de la garantie due à l'ONIAM par la SHAM en sa qualité d'assureur de l'EFS.
Il a été définitivement jugé, comme rappelé auparavant, qu'en application de l'article 67, IV, de la loi no 2008-1330 du 17 décembre 2008, l'ONIAM s'est substitué à l'EFS, dans les instances en cours à la date du 1er juin 2010, pour lui permettre d'indemniser, au titre de la solidarité nationale, les victimes de contaminations transfusionnelles par le virus de l'hépatite C, telles que visées à l'article L. 1221-14 du code de la santé publique.
De même, il s'évince des dispositions de cet article 67, IV, dans sa rédaction issue de la loi no 2008-1330 du 17 décembre 2008, en vigueur jusqu'au 19 décembre 2012, que la substitution de l'ONIAM à l'EFS n'opère pas de transfert à l'ONIAM des créances de l'EFS envers les assureurs de celui-ci.
C'est ainsi que la SHAM sollicite de la cour de renvoi l'application des dispositions précitées et partant, sa mise hors de cause, faute de devoir sa garantie à l'ONIAM.
Toutefois, ainsi que s'en prévaut l'ONIAM, l'article L. 1221-14 du code de la santé publique, créé par l'article 67, IV, de la loi no 2008-1330 du 17 décembre 2008, a été modifié par l'article 72 de la loi no 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013, qui dispose, en son paragraphe II, que l'ONIAM, lorsqu'il a indemnisé une victime et, le cas échéant, remboursé des tiers payeurs, peut directement demander à être garanti des sommes qu'il a versées par les assureurs des structures reprises par l'EFS. L'entrée en vigueur de cette modification est au 19 décembre 2012.
Enfin, selon l'article 72 III de la même loi, ces dispositions s'appliquent aux actions juridictionnelles engagées à compter de la date du 1er juin 2010, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée.
Pour s'opposer à l'application de l'article 67, IV, dans sa rédaction issue de l'article 72 de la loi no 2012-1404 du 17 décembre 2012, la SHAM fait valoir que :au principal, le pourvoi en cassation ne provoque aucun effet suspensif de la décision frappée de pourvoi et la loi nouvelle est sans incidence sur cette décision ;l'arrêt qui n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation ne peut être remis en cause par une loi de validation, de sorte que la loi du 17 décembre 2012 n'avait pas vocation à s'appliquer à l'instance devant la Cour de cassation ;à titre subsidiaire, l'article 72 II et III de la loi no 2012-1404 du 17 décembre 2012 porte atteinte au droit à un procès équitable, garanti par l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme (CEDH) et au droit au respect des biens, garanti par l'article 1er du Protocole additionnel no 1 de la CEDH ;à titre infiniment subsidiaire, au cas où la cour hésiterait sur l'absence de conventionnalité de l'article 72 précité, il y aurait lieu de saisir la Cour de cassation pour avis.
À l'instar des deux parties qui invoque la jurisprudence de l'assemblée plénière de la Cour de cassation, sans en tirer les mêmes conséquences, il sera rappelé que si le législateur peut adopter, en matière civile, des dispositions rétroactives, le principe de prééminence du droit et la notion de procès équitable consacrés par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, s'opposent, "sauf pour d'impérieux motifs d'intérêt général, à l'ingérence du pouvoir législatif dans l'administration de la justice afin d'influer sur le dénouement judiciaire des litiges".
En l'espèce, il est justifié que l'article 72 dont s'agit a pour objectif "de renforcer la sécurité juridique des conditions dans lesquelles l'ONIAM peut exercer en lieu et place de l'EFS une action directe contre les assureurs des anciens centres de transfusion sanguine, afin de lui permettre de bénéficier des garanties prévues par les contrats d'assurance souscrits par ces derniers" selon les propos mêmes de la ministre des affaires sociales et de la santé lors des débats parlementaires le 26 octobre 2012 lors du vote de cette loi, tels que rapportés par l'intimée.
De même, alors que le mécanisme de substitution mis en place par la loi no 2008-1330 du 17 décembre 2008 prenait financièrement en compte l'existence des contrats d'assurance conclus entre les centres de transfusions et l'EFS, dans le cadre de l'action subrogatoire alors prévue par l'article L 3122-4 du code de la santé publique, il apparaît que l'article 72 de la loi no 2012-1404 du 17 décembre 2012 tend à répondre aux difficultés que pourraient rencontrer l'ONIAM, en étant privé de toute possibilité financière d'être garanti durant la période entre le 1er juin 2010 et le 19 décembre 2012.
D'ailleurs, en déclarant cet article 72 conforme à la Constitution, le Conseil constitutionnel a souligné, dans sa décision no 2012-659 DC du 13 décembre 2012 que cette loi vise "à renforcer la sécurité juridique des conditions dans lesquelles l'ONIAM peut exercer en lieu et place de l'EFS une action directe contre les assureurs", que le but poursuivi est "de permettre à l'ONIAM de bénéficier des garanties prévues par les contrats d'assurance que les structures reprises par l'EFS avaient souscrits et qui sont toujours en vigueur" de sorte que "les dispositions contestées ne modifient pas les conventions légalement conclues et se bornent à renvoyer à l'exécution des contrats déjà souscrits" (considérant no 80).
D'évidence, l'article 72 en ses § II et III ne porte pas atteinte au droit à un procès équitable garanti par l'article 6 § 1 de la CEDH dès lors que l'application aux instances en cours de ce texte, lequel a pour but de faire bénéficier l'ONIAM, chargé d'indemniser, au titre de la solidarité nationale, les victimes de contaminations transfusionnelles par le virus de l'hépatite C, des contrats d'assurance que les structures reprises par l'EFS, demeuré responsable de la contamination, avaient légalement souscrits, répond à d'impérieux motifs d'intérêt général.
Il en est tout autant de la prétendue atteinte au droit au respect des biens, garanti par l'article 1er du Protocole additionnel no 1 de la même Convention, dès lors que l'utilité publique du texte litigieux ne saurait être "manifestement dépourvu de base raisonnable", au sens de la jurisprudence de la CEDH.
En effet, alors que l'ONIAM est tenu d'indemniser, au titre de la solidarité nationale, les victimes de contaminations transfusionnelles par le virus de l'hépatite C, l'article 72 dont s'agit tend précisément à combattre l'enrichissement sans cause des assureurs à qui les primes d'assurance ont été versées en exécution des contrats souscrits par les centres de transfusion repris par l'EFS, mais aussi à éviter l'appauvrissement corrélatif des pouvoirs publics, voire l'accroissement des difficultés financières auxquelles l'ONIAM se trouve inévitablement confronté.
Au demeurant, loin de porter atteinte au droit au respect des biens, le texte incriminé ne fait que rétablir un équilibre entre la solidarité nationale due à toute victime d'une contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C et le droit de propriété invoqué au nom des assureurs, ces derniers ne pouvant bénéficier d'avantages exorbitants qui découleraient de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique dans sa version issue de l'article 67, IV, de la loi no 2008-1330 du 17 décembre 2008 alors que dans le même temps, ils conserveraient des indemnités qu'ils s'étaient engagés à verser en exécution de contrats pour lesquels ils ont perçu les primes y afférentes.
Il n'est donc aucunement rapporté l'existence d'une atteinte au droit de propriété comme étant anormale et exorbitante et donc disproportionnée.
Le moyen tiré du caractère non conventionnel de l'article 72 de la loi no 2012-1404 du 17 décembre 2012 n'est aucunement établi tandis que l'invitation à saisir la Cour de cassation d'une demande d'avis sur cette question s'avère inopérante, cette juridiction suprême ayant déjà statué dans le sens de la conventionnalité de ce texte en soulignant qu'il répondait à d'impérieux motifs d'intérêt général dans un arrêt de la 1re chambre civile no 753 du 18 juin 2014 (pourvoi no 13-13.471).
Dans ces conditions, la cour condamnera la SHAM à garantir l'ONIAM des condamnations prononcées à son encontre au profit de Mme Christine X... et la CPAM dans la limite de la part mise à la charge de l'ONIAM.
La SHAM qui sera tenue aux dépens d'appel exposés devant la présente cour, devra en outre rembourser à l'ONIAM le montant de ses frais irrépétibles à hauteur de la somme de 2 500 ¿.

PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Statuant dans les limites de l'arrêt rendu le 16 mai 2013 par la Cour de cassation,
Vu l'article L. 1224-14 du code de la santé publique, l'article 67, IV, de la loi no 2008-1330 du 17 décembre 2008, modifié par l'article 72 de la loi no 2012-1404 du 17 décembre 2012,
Dit que l'article 72 de la loi no 2012-1404 du 17 décembre 2012 ne porte atteinte ni à l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ni à l'article 1er du Protocole additionnel no 1 de la même Convention,
Condamne la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) à garantir l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affectations iatrogènes et des infections nosocomiales (l'Office) des condamnations prononcées, par l'arrêt du 6 décembre 2011 par la cour d'appel de Nîmes, à l'encontre de l'Office, au profit de Mme Christine X... et de la caisse primaire d'assurance maladie de Privas, dans la limite de la part mise à la charge de l'Office,
Condamne la société hospitalière d'assurances mutuelles à payer à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affectations iatrogènes et des infections nosocomiales la somme de 2 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute la société hospitalière d'assurances mutuelles de sa demande sur le même fondement,
Condamne la société hospitalière d'assurances mutuelles aux dépens d'appel exposés devant la cour de renvoi, avec recouvrement direct au profit de la SCP Senmartin, avocat sur son affirmation de droit, par application de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER. LE PRÉSIDENT.

JM


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1o chambre section d
Numéro d'arrêt : 13/04266
Date de la décision : 28/10/2014

Analyses

La loi nº 2008-1330 du 17 décembre 2008 a substitué l'ONIAM à l'EFS, dans les instances en cours à la date du 1er juin 2010, pour lui permettre d'indemniser, au titre de la solidarité nationale, les victimes de contaminations transfusionnelles par le virus de l'hépatite C . Alors que l' article 72 III de cette loi, dans sa rédaction initiale, disposait que cette substitution n'opérait pas de transfert à l'ONIAM des créances de l'EFS envers les assureurs de celui-ci, il résulte de sa nouvelle rédaction, applicable à compter du 19 décembre 2012, que l'ONIAM, lorsqu'il a indemnisé une victime et, le cas échéant, remboursé des tiers payeurs, peut directement demander à être garanti des sommes qu'il a versées par les assureurs des structures reprises par l'EFS. Selon l'article 72 III nouveau, ces dispositions s'appliquent aux actions juridictionnelles engagées à compter de la date du 1er juin 2010, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée. Ce texte ne porte pas atteinte au droit à un procès équitable garanti par l'article 6 § 1 de la CEDH dès lors que son application aux instances en cours, qui a pour but de faire bénéficier l'ONIAM des contrats d'assurance que les structures reprises par l'EFS, demeuré responsable de la contamination, avaient légalement souscrits, répond à d'impérieux motifs d'intérêt général. Il en est tout autant d'une prétendue atteinte au droit au respect des biens, garanti par l'article 1er du Protocole additionnel nº 1 de la même Convention, dès lors que l'utilité publique du texte litigieux ne saurait être ¿manifestement dépourvu de base raisonnable¿ , au sens de la jurisprudence de la CEDH. En effet, alors que l'ONIAM est tenu d'indemniser, au titre de la solidarité nationale, les victimes de contaminations transfusionnelles par le virus de l'hépatite C, l'article 72 tend précisément à combattre l'enrichissement sans cause des assureurs à qui les primes d'assurance ont été versées en exécution des contrats souscrits par les centres de transfusion repris par l'EFS, mais aussi à éviter l'appauvrissement corrélatif des pouvoirs publics, voire l'accroissement des difficultés financières auxquelles l'ONIAM se trouve inévitablement confronté. Au demeurant, loin de porter atteinte au droit au respect des biens, le texte incriminé ne fait que rétablir un équilibre entre la solidarité nationale due à toute victime d'une contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C et le droit de propriété invoqué au nom des assureurs, ces derniers ne pouvant bénéficier d'avantages exorbitants qui découleraient de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique dans sa version issue de l'article 67, IV, de la loi nº 2008-1330 du 17 décembre 2008 alors que dans le même temps, ils conserveraient des indemnités qu'ils s'étaient engagés à verser en exécution de contrats pour lesquels ils ont perçu les primes y afférentes.


Références :

ARRET du 17 février 2016, Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 17 février 2016, 15-12.805, Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour de cassation, 16 mai 2013


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2014-10-28;13.04266 ?
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