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21/10/2014 | FRANCE | N°11/01332

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 21 octobre 2014, 11/01332


Grosse + copie
délivrées le
à



COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1o Chambre Section D

ARRET DU 21 OCTOBRE 2014

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02955



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 FEVRIER 2013
TRIBUNAL D'INSTANCE DE BEZIERS
No RG 11/ 01332



APPELANTE :

SCEA DU SAINT LAURENT, société civile d'exploitation agricole
Avenue de Toulouse
34310 CAPESTANG
représentée par Me Thierry BERGER de la SCP COSTE-BERGER-DAUDE-VALLET, avocat au barreau de MONTPELLIER,

avocat postulant et assistée de Me Christelle DAUDE de la SCP COSTE-BERGER-DAUDE-VALLET, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant



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Grosse + copie
délivrées le
à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1o Chambre Section D

ARRET DU 21 OCTOBRE 2014

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/ 02955

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 FEVRIER 2013
TRIBUNAL D'INSTANCE DE BEZIERS
No RG 11/ 01332

APPELANTE :

SCEA DU SAINT LAURENT, société civile d'exploitation agricole
Avenue de Toulouse
34310 CAPESTANG
représentée par Me Thierry BERGER de la SCP COSTE-BERGER-DAUDE-VALLET, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Christelle DAUDE de la SCP COSTE-BERGER-DAUDE-VALLET, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

INTIMEE :

FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DE L'HERAULT prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis
Parc d'Activités La Peyrière
11 Rue Robert Schumann
34433 ST JEAN DE VEDAS CEDEX
représentée par Me Yves GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Maëlle COMTE substituant Me Charles LAGIER, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 19 Août 2014

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 09 SEPTEMBRE 2014, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jacques MALLET, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jacques MALLET, Président
Madame Chantal RODIER, Conseiller
Madame Nathalie LECLERC-PETIT, Vice-Présidente placée déléguée par ordonnance de Monsieur le Premier Président du 01 septembre 2014

Greffier, lors des débats : Madame Myriam RUBINI

L'affaire mise en délibéré au 07 octobre 2014 a été prorogée au 21 octobre 2014.

ARRET :

- CONTRADICTOIRE.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile ;

- signé par Monsieur Jacques MALLET, Président, et par Madame Myriam RUBINI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

La SCEA du Saint-Laurent (la SCEA) exploite diverses parcelles de terres agricoles, en culture de pois protéagineux, sur le territoire de la commune de Capestang (34310).

Se plaignant de détériorations causées aux cultures par des sangliers, cette société a, par déclaration au greffe du tribunal d'instance de Béziers reçue le 4 août 2010, fait convoquer la fédération départementale des chasseurs de l'Hérault (ci-après la fédération départementale) devant ce tribunal, pour la faire déclarer responsable de ces dégradations et condamner à l'indemniser.

Par jugement avant dire droit du 6 juin 2011, ce tribunal a ordonné une mesure d'expertise confiée à M. Y...qui a été déposé son rapport le 22 mai 2012.

En lecture de ce rapport, la SCEA a demandé que la fédération départementale des chasseurs de l'Hérault, comme titulaire du droit de chasse sur les parcelles sinistrées, soit déclarée responsable des dégradations commises par les sangliers, condamnée à lui payer la somme de 5 229, 65 ¿, avec intérêts au taux légal à compter du 4 août 2010, ou le remboursement de ses frais irrépétibles et les dépens y compris les frais d'expertise.

La fédération départementale a conclu à l'irrecevabilité de la demande, le tribunal d'instance ayant été saisi avant même que la SCEA ait reçu une proposition d'indemnisation et a fait valoir qu'elle n'est pas titulaire du droit de chasse sur les parcelles concernées, qu'elle n'a jamais commis de faute de nature à avoir provoqué des dégâts constatés sur les parcelles, qu'elle n'était en aucun cas tenue de prendre des mesures préventives.

Par jugement contradictoire du 22 février 2013, le tribunal d'instance de Béziers a déclaré irrecevables les demandes visant la fédération départementale des chasseurs de l'Hérault, a condamné la SCEA du Saint-Laurent à lui payer la somme de 1 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens y compris les frais d'expertise ;
Motifs pris que :
* la SCEA pouvait agir avant même d'avoir une proposition d'indemnisation de la part de la fédération départementale ;
* cette action dirigée contre une fédération qui n'est pas titulaire du droit de chasse est cependant irrecevable, l'agriculteur victime de dégâts devant poursuivre l'auteur de dommages subis, qui n'est pas cette fédération et mettre en cause sa responsabilité pour faute.

Le 16 avril 2013, la SCEA du Saint-Laurent a relevé appel de ce jugement.

Vu les dernières conclusions déposées :
* le 24 mai 2013 par la SCEA du Saint-Laurent ;
* le 11 juillet 2013 par la fédération départementale des chasseurs de l'Hérault.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 août 2014.

******

La SCEA du Saint-Laurent conclut à l'infirmation du jugement déféré, demandant à la cour de :
dire et juger recevable son action sur le fondement de l'article L. 426-7 du code de l'environnement ;
condamner la fédération départementale à lui payer la somme de 5 529, 65 ¿, avec intérêts au taux légal depuis le 4 août 2010, et subsidiairement, sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil ;
la condamner à lui payer à la somme de 2 000 ¿ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise.

La fédération départementale des chasseurs de l'Hérault demande à la cour de :
débouter la SCEA de toutes de ses demandes ;
confirmer le jugement dans toutes ses dispositions ;
condamner la SCEA à lui payer la somme de 3 000 ¿ en application des dispositions de l'article 700 code de procédure civile, aux entiers dépens de première instance et d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du même code au profit de la SCP Garrigue, avocats.

SUR CE :

En cause d'appel, la SCEA développe l'argumentation qui suit :
* Le tribunal a justement retenu, ce qui n'est plus sérieusement discuté, qu'elle était recevable à agir, même si la fédération départementale ne lui avait pas encore notifié sa décision en réponse à sa demande d'indemnisation ;
* Il résulte du rapport d'expertise que la fédération départementale est titulaire d'un droit de chasse sur une partie des parcelles concernées, l'expert relevant, en page 15 son rapport : la parcelle numéro 1 (îlot 13 et 55) est incluse dans la réserve de chasse de la fédération départementale, l'îlot 13 d'une surface de 17, 99 ha est la plus grande parcelle de la propriété de la SCEA ;
* Par application des dispositions des articles L. 426-1 à L. 426-6 du code de l'environnement, la fédération départementale est tenue d'indemniser les dégâts causés par les sangliers, celle-ci n'ayant jamais contesté le principe du droit à indemnisation, puisqu'elle a retenu un seul îlot et formulé une proposition d'indemnisation, le désaccord ayant porté, non pas sur le principe du droit à indemnisation mais sur son étendue ;
* L'expert judiciaire a noté cet accord, dans sa lettre du 3 novembre 2011 (pièce 15), l'indication suivante : " bonne note a été prise de ce qu'il y avait accord des parties sur le barème administratif mais désaccord sur le quantum (3îlots non retenus) " ;
* Certes, lors de la réunion d'expertise organisée le 1er août 2011, l'expert n'a pas pu constater les dégâts occasionnés par les sangliers dans la mesure où, comme il l'indique : " les cultures de pois sont annuelles ¿ Mon déplacement d'août 2011 intervenait donc 13 à 14 mois après la récolte ", mais il a pu cependant tenir compte des témoignages produits, à savoir ceux de MM. Z...(pièce 16), A...(pièce 17) et B... (pièce 18) lesquels attestent de la réalité des dégâts, si bien que l'expert a pu proposer d'indemniser les quatre parcelles, tout en retenant un abattement, du fait d'un potentiel de rendement plus faible, liée à un salissement plus important ;
* C'est donc vainement que la fédération départementale soutient qu'aucune constatation n'a été possible sur les trois îlots rejetés ;
* En tout cas et subsidiairement, la fédération départementale lui doit réparation en raison de son abstention fautive puisque, si elle a organisé des battues de nature administrative, cela l'a été tardivement, l'expert judiciaire relevant, en page 15 de son rapport, l'absence d'anticipation de la part de cette fédération et confirmant la présence d'une surpopulation de sangliers en provenance de l'étang de Capestang, la fédération départementale ayant, par son omission et son défaut d'anticipation, favorisé cette prolifération.

Toutefois, la fédération départementale objecte justement que :
* la SCEA ne peut plus se prévaloir du régime administratif d'indemnisation fondé sur les articles L. 426-1 à L. 426-6 du code de l'environnement, dès lors qu'elle l'a actionnée sur le terrain de la procédure judiciaire, l'indemnisation des dégâts du gibier n'étant plus automatique dans le cadre judiciaire mais liée à la preuve d'une faute ;
* que les dégâts datent du 15 février 2010, alors que les réclamations ne lui ont été adressées et reçues par elle que les 17 mai 2010 et 16 juin 2010, soit plus de trois mois après l'apparition des premiers dégâts, de sorte que la SCEA n'a pas respecté les dispositions de l'article R. 426-12 du code de l'environnement qui lui imposaient de faire une déclaration " sans délai " ;
* que cette absence de diligence a entraîné l'impossibilité pour les estimateurs des dégâts de constater l'étendue du préjudice subi, seule la parcelle numéro 4 (îlot 61) ayant pu être évaluée ;
* que ces mêmes estimateurs ayant constaté la perte de 26, 60 quintaux (pièce 2), la fédération départementale a alors fait application des dispositions de l'article L. 426-3 alinéa 4 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à l'époque des faits (pièce 4), selon lesquelles les frais d'expertise sont déduits de cette indemnité, lorsque le montant du préjudice déclaré par l'exploitant est plus de 10 fois supérieur à celui de l'indemnité avant abattement, ce qui est le cas en l'espèce ;
* qu'ainsi, l'indemnité calculée sur la base du barème départemental fixé par le préfet était de 468, 16 ¿ dont il convenait de déduire les frais d'expertise d'un montant de 723, 10 ¿, ce qui justifiait qu'aucune indemnisation n'était due ;
* que sur la base des dispositions de l'article L. 426-7 du même code, lesquelles imposent au demandeur de prouver la faute de la fédération départementale, ce dont la SCEA est défaillante ;
* que la fédération départementale ne possède pas les moyens de détruire le gibier de façon autonome, n'étant pas détentrice du droit de chasse et ne possédant donc pas la maîtrise du gibier, que ce soit sur le terrain de la SCEA comme sur les terrains limitrophes ;
* que d'ailleurs, le rapport d'expertise précise bien, en page 15, que le titulaire du droit de chasse sur les parcelles concernées par le litige n'est pas la fédération départementale mais le syndicat de chasse de Capestang ;
* qu'il ne saurait donc lui être reproché de ne pas avoir conduit de battues administratives antérieurement, ces battues devant être ordonnées par le préfet.

La fédération départementale ajoute, tout aussi à bon droit, que la demande fondée sur les dispositions de l'article 1382 du code civil ne peut pas davantage aboutir, en l'absence de preuve d'une faute pouvant lui être imputée.

En effet, alors que la SCEA lui a déclaré tardivement les dégâts, deux battues administratives ont été organisées après que la fédération départementale en a été informée tandis que la SCEA ne prouve pas un manquement spécifique de la fédération départementale dans le cadre de sa mission d'actions préventives, ne justifiant en rien d'avoir adopté des mesures qui pouvaient s'imposer, notamment en donnant à des tiers le droit de chasser sur ses terrains, le rapport d'expertise étant vide de toute information à ce sujet, sauf qu'il identifie bien le titulaire du droit de chasser comme étant le syndicat de chasse de Capestang, cette question de la détention du droit de chasse n'ayant à aucun moment été posée devant l'expert judiciaire.

Par ces motifs partiellement ajoutés, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la SCEA de ses demandes, tenant les constatations et conclusions de l'expert judiciaire tandis que la SCEA ne conteste pas sérieusement le caractère tardif de sa demande, ni n'apporte la preuve incontestable de ce que la fédération départementale était titulaire du droit de chasse sur les terrains dont s'agit,

Succombant, la SCEA supportera aussi les dépens d'appel.

En revanche, il n'est pas contraire à l'équité que la fédération départementale conserve la charge de ses frais irrépétibles, la demande de la SCEA sur le même fondement de l'article 700 du code de procédure civile étant également en voie de rejet.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute la SCEA du Saint-Laurent et la fédération départementale des chasseurs de l'Hérault de leurs demandes respectives sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne la SCEA du Saint-Laurent aux dépens d'appel, avec recouvrement direct au profit de la SCP Garrigue, avocats, par application de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER. LE PRÉSIDENT.

JM/ MR


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 11/01332
Date de la décision : 21/10/2014

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Béziers


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-21;11.01332 ?
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