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18/03/2014 | FRANCE | N°13/00480

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3ème chambre correctionnelle, 18 mars 2014, 13/00480


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3ème CHAMBRE CORRECTIONNELLE

ARRET N

DU 18/ 03/ 2014

DOSSIER 13/ 00480
GN/ DDT

prononcé publiquement le Mardi dix huit mars deux mille quatorze, par la troisième Chambre des appels correctionnels, par Madame DE TALANCE, en application des dispositions de l'article 485 dernier alinéa du code de procédure pénale.
et assisté du greffier : Madame BOURBOUSSON

qui ont signé le présent arrêt
en présence du ministère public près la Cour d'Appel
sur appel d'un jugement du tribunal de grande instance de

NARBONNE du 21 DECEMBRE 2012

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :

Président : Mad...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3ème CHAMBRE CORRECTIONNELLE

ARRET N

DU 18/ 03/ 2014

DOSSIER 13/ 00480
GN/ DDT

prononcé publiquement le Mardi dix huit mars deux mille quatorze, par la troisième Chambre des appels correctionnels, par Madame DE TALANCE, en application des dispositions de l'article 485 dernier alinéa du code de procédure pénale.
et assisté du greffier : Madame BOURBOUSSON

qui ont signé le présent arrêt
en présence du ministère public près la Cour d'Appel
sur appel d'un jugement du tribunal de grande instance de NARBONNE du 21 DECEMBRE 2012

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :

Président : Madame DE TALANCE
Conseillers : Madame BRESDIN
Monsieur TAMALET

présents lors des débats :
Ministère public : Monsieur DEVILLE
Greffier : Monsieur SAMBITO

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :
PREVENUE
Y...Fouzia Née le 11 mai 1972 à AIN TOLBA (ALGERIE), fille de Y...Kouider et de Z...Cherifa, de nationalité française, demeurant ...-66530 CLAIRA Sous contrôle judiciaire (O. C. J. du 27/ 02/ 2009)
Prévenue, appelante
Comparante Assistée de Maître PECHEVIS Maryse, avocat au barreau de MONTPELLIER

LE MINISTERE PUBLIC, appelant

RAPPEL DE LA PROCEDURE :

Par jugement contradictoire du 21 décembre 2012 le Tribunal correctionnel de NARBONNE statuant à la suite d'une ordonnance de renvoi du juge d'instruction en date du 27 mars 2012, a :
Sur l'action publique :
A rejeté l'exception de nullité soulevée par la prévenue ;

Déclaré Y...Fouzia coupable :
* d'avoir dans l'Aude et les Pyrénées Orientales, en tout cas sur le territoire national, entre le 0l janvier 2006 et le 25 février 2009, en tout cas depuis temps non couvert par la prescription :
- apporté son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'une fraude fiscale, faits qualifiés de blanchiment du produit d'une fraude fiscale.,

infraction prévue par l'article 324-1 AL. 2, AL. 3 du Code pénal et réprimée par les articles 324-1 AL. 3, 324-3, 324-7, 324-8 du Code pénal
-intentionnellement accompli dans un but lucratif
des actes de commerce, en l'espèce en exerçant l'activité de marchande sur les marchés, en ne procédant pas aux déclarations devant être faites aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale, faits qualifiés d'exécution d'un travail dissimulé.,
infraction prévue par les articles L. 8224-1, L. 8221-1 AL. 1 1, L. 8221-3, L. 8221-4, L. 8221-5 du Code du travail et réprimée par les articles L. 8224-1, L. 8224-3, L. 8224-4 du Code du travail
-apporté son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit, en l'espèce en dissimulant les revenus de son activité dissimulée de commerçante, faits qualifiés de blanchiment, concours à une opération de placement, dissimulation ou conversion du produit d'un délit puni d'une peine n'excédant pas 5 ans,

infraction prévue par l'article 324-1 AL. 2, AL. 3 du Code pénal et réprimée par les articles 324-1 AL. 3, 324-3, 324-7, 324-8 du Code pénal
et en répression, l'a condamnée à :
- la peine de 18 mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve pendant 3 ans, avec obligations particulières de :- exercer une activité professionnelle, suivre un enseignement ou une formation professionnelle,
- justifier de l'acquittement des sommes dues au trésor public,
- au paiement d'une amende de 7. 500 ¿,
Ordonné la confiscation des scellés,
Rejeté la requête en demande de restitution.

APPELS :

Par déclaration au greffe le 21 décembre 2012 la prévenue a interjeté appel à titre principal des dispositions pénales de ce jugement.
Le ministère public a formé appel incident le même jour.

DEROULEMENT DES DEBATS :
A l'appel de la cause à l'audience publique du 21 JANVIER 2014, Madame la Présidente a donné lecture de l'identité de la prévenue et constaté sa présence, et a fait le rapport prescrit par l'article 513 du code de procédure pénale.

Le conseil de la prévenue soulève avant toute défense au fond la nullité de l'ordonnance de renvoi qui n'indique pas sur quel délit précis porte le blanchiment ainsi que l'exception de prescription puisque Mme Y...est poursuivie pour des faits commis en 2006 alors que les bons au porteur et les assurances vie saisis ont été souscrits en 2001.
M. l'avocat général requiert le rejet des exceptions soulevées comme non fondées.
La cour décide de joindre l'incident au fond

Fouzia Y...indique que les sommes figurant dans les coffres de la banque sont le fruit de son travail sur les marchés jusqu'en 2002.
M. l'avocat général requiert la confirmation du jugement et de la saisie des scellés.
Le conseil de la prévenue fait valoir que le délit de travail dissimulé par dissimulation d'activité est une infraction créée par la loi du 21 décembre 2011 et que la prévention couvrant la période de janvier 2006 à février 2009, Mme Y...ne peut être retenue dans les liens de la prévention ; qu'au surplus le travail dissimulé reproché ne repose sur aucun élément matériel dès lors le délit de blanchiment de travail dissimulé ne saurait être poursuivi ; concernant le blanchiment de fraude fiscale reprochée, il est fait état du fait que la fraude fiscale n'a jamais été établie en tout cas pour les années 2006 à 2009.
Il sollicite la restitution des sommes et effets saisis.
La prévenue a eu la parole en dernier.

A l'issue des débats, la Cour a mis l'affaire en délibéré et Madame la Présidente a averti les parties que l'arrêt serait prononcé le 18 MARS 2014.
RAPPEL DES FAITS
A l'occasion du déplacement de l'agence de la
CAISSE D'EPARGNE boulevard CLEMENCEAU à PERPIGNAN entraînant l'impossibilité de réinstaller les coffres dans la nouvelle agence, un courrier était envoyé aux détenteurs de coffres.
La famille Y...détentrice de deux coffres n'ayant pas répondu à ces courriers, un inventaire par voie d'huissier puis une mise sous scellés étaient effectués, la réception des fonds par Me B..., huissier à NARBONNE le 11 juillet 2007 l'amenait devant l'importance des sommes en numéraire découvertes dans le coffre No 78 à saisir le service TRACFIN.
Il apparaissait des investigations effectuées que ce coffre avait été loué le 14 mars 2002 au nom de Fouzia Y...qui avait fait état d'un montant déposé inférieur à 200 000 F ne nécessitant pas la souscription d'une assurance complémentaire.
Elle y avait effectué diverses visites :
-4 visites en 2002-3 visites en 2003
-2 visites en 2004
- une visite le 4 avril 2006.
Les sommes étaient restituées à la famille Y...en octobre 2008 suite à leur demande.
Le 2 octobre 2008, Fouzia Y...ouvrait un coffre à la BNP de PERPIGNAN en indiquant sur la fiche d'ouverture de coffre " sans profession ".
Elle faisait une visite au coffre en janvier
2009.
Lors de la perquisition du coffre le 26 février 2009 les policiers découvraient :
-10 bons au porteur CARDIF d'une valeur nominale de 4875 F, soit 7431, 9 ¿
-19 bons au porteur CAIF MULTI PLUS CAPITALISATION d'une valeur nominale de 10. 140 F (1. 545, 83 ¿) soit 29 370, 77 ¿
-1 bon au porteur CARDIF MULTI PLUS CAPITALISATION d'une valeur nominale de 10. 383, 75 F (1. 582, 99 ¿)-4 bons au porteur CARDIF MULTI PLUS CAPITALISATION d'une valeur nominale de 9. 750 F (1. 486, 38 ¿), soit 5945, 52 ¿
-3 bons au porteur CARDIF MULTI PLUS CAPITALISATION d'une valeur nominale de 9. 750 F (1. 486, 38 ¿) soit 4459, 14 ¿
-24 Titres de capitalisation au porteur CAPI POSTE 2 d'une valeur nominale de 10. 000 F soit 36 587, 76 ¿- Une copie de demande de souscription anonyme d'une valeur de 50 000 F versés en espèces pour l'acquisition de 10 titres CARDIF MULTI PLUS CAPITALISATION enregistrée au nom suivant : ANO 135/ 10/ 09/ 01
- Une copie de demande de souscription anonyme d'une valeur de 208. 250 F pour l'acquisition de 20 titres CARDIF MIJLTI PLUS CAPITALISATION enregistrée au nom suivant : ANO 135/ 17/ 07/ 2001 établie à PERPIGNAN le 17/ 07/ 01
- Une copie de demande d'adhésion pour un contrat collectif d'assurance sur la vie établie à PERPIGNAN le 10/ 09/ 2001 au nom de Y...Fouzia portant mention d'un versement libre de 28400 F et mention de bénéficiaire Y...Chérifa et Kouider soit 4329, 55 ¿- Un compte rendu du 19/ 06/ 2001 établi par A...Yohan pour le client No 1 824 718 41 portant sur quatre titres numérotés de 6 121 985 à 6 121 988- Un compte rendu du 04/ 07/ 2001 établi par A...Yohan pour le client No 1 829 309 42 portant sur trois titres numérotés de 6 124 412 à 6124414.
Interpellée sur la présence de ces contrats d'assurance vie et de ces bons de capitalisation, Y...Fouzia déclarait que tout ceci lui appartenait et qu'elle s'expliquerait ultérieurement.
Etaient en outre saisies
-une pochette cartonnée à rabat de couleur bleue contenant la somme de 30. 950 euros
-Une pochette cartonnée à rabat de couleur verte contenant plusieurs liasses de billets de banque libellés en euro qui se détaillent comme suit :
610 (six cent dix) billets de 50 (cinquante) euros ; Soit une somme de 30. 500 (trente mille cinq cents) euros

-Une pochette cartonnée à rabat de couleur mauve contenant plusieurs liasses de billets de banque libellés en euro et une liasse de billets libellés en dollar américain qui se détaillent comme suit :-1020 (mille vingt) billets de 20 (vingt) euros
-580 (cinq cent quatre vingt) billets de 10 (dix) euros
-16 (seize) billets de 100 (cents) dollar $-14 (quatorze) billets de 50 (cinquante) dollar $
-05 (cinq) billets de 20 (vingt) dollar $ 11 (onze) billets de 10 (dix) dollar $
-34 (trente quatre) billets de 05 (cinq) dollar $-49 (quarante neuf) billets de 01 (un) dollar $
Soit une somme de 26. 200 (vingt six mille deux cents) euros et 2. 729 dollars américains.
Des éléments de l'enquête il apparaissait que :

Fouzia Y...était gérante de la SCI FODIRA créée en octobre 2002 dont l'activité est la location de terrains et d'autres biens immobiliers, en l'espèce un appartement 12 rue du Figuier à CLAIRA type F2, loué dont la location remboursait le prêt.
Son montant d'imposition sur les revenus était nul en 2007 et elle avait déclaré des BIC pour
4572 ¿.
Elle demeure avec ses parents et ses enfants dans une maison ...à CLAIRA.
Elle indiquait lors de sa garde à vue travailler comme commerçante sur les marchés en vendant soit des fruits et légumes soit des vêtements et ce, depuis 4 ou 5 ans, activité lui rapportant 50 ¿ par jour de travail, 3 fois par semaine et bénéficier des allocations familiales.

Fouzia Y...expliquait que les sommes et titres trouvés dans son coffre provenaient de son activité professionnelle mais reconnaissait ne pas pouvoir fournir les factures d'achats auprès de ses fournisseurs et admettait ne pas avoir déclaré ces revenus.
Entendue, sa mère indiquait qu'elle avait en ce qui la concerne loué depuis 1985 le coffre no 20 à la CAISSE D'EPARGNE boulevard CLEMENCEAU à PERPIGNAN pour y déposer ses bijoux et paraissait interloquée par le montant des avoirs figurant dans celui de sa fille.
Fouzia Y...était mise en examen le 27 février 2009 :
* Pour avoir dans l'Aude et les PO de 2006 à 2009 détenu 80 000 ¿ en espèces, une assurance vie de 150 000 ¿, des titres de capitalisation et des dollars des chefs de blanchiment, travail dissimulé par dissimulation d'activité (défaut de déclarations obligatoires aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale). Elle était mise en examen supplétive le 26 mars 2010 pour blanchiment de fraude fiscale.
Elle a été renvoyée devant le tribunal correctionnel par ordonnance du 27 mars 2012 pour avoir, dans l'AUDE et les PYRENEES ORIENTALES, entre le 01 janvier 2006 et le 25 février 2009, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription :
¿- intentionnellement accompli dans un but lucratif des actes de commerce, en l'espèce en exerçant l'activité de marchande sur les marchés, en ne procédant pas aux déclarations devant être faites aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale, faits qualifiés d'exécution d'un travail dissimulé, prévus et réprimés par les articles L8221-1, L 8221-3, L 8224-1 et L 8224-4 du code du travail anciennement 1. 362-3 al. 1, 1. 324-9, 1. 324-10, 1. 324-11, 1. 320, 1. 143-3, 1. 362-4, 1. 362-5 du code du travail,
¿- apporté son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'une fraude fiscale, faits qualifiés de blanchiment du produit d'une fraude fiscale prévus et réprimés par l'article 1741 du code général des impôts, et les articles 324-1, 324-3, 324-5, 324-6, 324-7 et 324-8 du code pénal

¿- apporté son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit, en l'espèce en dissimulant les revenus de son activité dissimulée de commerçante, faits qualifiés de banchiment, concours à une opération de placement, dissimulation ou conversion du produit d'un délit puni d'une peine n'excédant pas 5 ans, faits prévus et réprimés par articles 324-1 al. 2, 324-3, 324-4, 324-5, 324-6, 324-7 et 324-8 du code pénal
Eléments de personnalité
Le casier judiciaire de Madame Fouzia Y...est vierge de toute condamnation.
Elle n'a pas respecté les obligations de son contrôle judiciaire relatives au pointage à la gendarmerie deux fois par mois puisqu'elle ne s'est présentée qu'une seule fois.
DÉCISION

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, jugeant publiquement, a rendu l'arrêt suivant :
La cour est saisie de l'appel interjeté le 21 décembre 2012 par Fouzia Y...son appel portant sur les dispositions pénales du jugement et par M. le procureur de la République.
Ces appels formés dans les délais et formes prescrits par les articles 496 et suivants du Code de procédure pénale sont recevables.
Sur l'action publique

Sur l'exception de nullité
Considérant qu'il appartenait à Mme Y...sous peine de forclusion, de demander l'annulation de sa mise en examen dans les 6 mois de sa première comparution ou de faire valoir ses observations ou formuler ses demandes quant à la régularité de la procédure dans le délai imparti par l'article 175 du code de procédure pénale ;
Que contrairement à ce qui est soutenu par la défense, l'ordonnance de renvoi indique clairement que Mme Y...est renvoyée pour avoir apporté son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'une fraude fiscale, faits qualifiés de blanchiment du produit d'une fraude fiscale et également pour avoir apporté son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit en l'espèce en dissimulant les revenus de son activités de commerçante, faits pour lesquels elle a été mise en examen respectivement les 26 mars 2010 et 27 février 2009. Qu'ainsi conformément à l'appréciation des premiers juges aucune nullité ne saurait être tirée de l'ordonnance de renvoi qui a satisfait aux exigences de l'article 184 du code de procédure pénale.

Sur l'exception de prescription
Il n'est pas contesté que Mme Y...a effectué une visite du coffre No 78 ouvert à la CAISSE D'EPARGNE de PERPIGNAN le 4 avril 2006, et qu'elle a ouvert un coffre le 2 octobre 2008 à la BNP de PERPIGNAN et effectué une visite de ce coffre en janvier 2009 ;
Que c'est donc bien dans la période de prévention de 2006 au 26 février 2009 date de la perquisition que les faits de blanchiment qui consistent en l'espèce à apporter son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un délit ont pu avoir lieu ;
Qu'il y a lieu en conséquence de rejeter cette exception.

AU FOND
Sur le travail dissimulé
Le terme de « travail dissimulé » a été introduit dans le Code du travail par la loi no 97-210 du 11 mars 1997 et notamment par son article L 324-10 qui dispose qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'activité l'exercice à but lucratif d'une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l'accomplissement d'actes de commerce par toute personne physique ou morale qui, se soustrayant intentionnellement à ses obligations :- N'a pas requis son immatriculation au répertoire des métiers ou, dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, au registre des entreprises ou au registre du commerce et des sociétés, lorsque celle-ci est obligatoire, ou a poursuivi son activité après refus d'immatriculation, ou postérieurement à une radiation ;
- Ou n'a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale en vertu des dispositions législatives et réglementaires en vigueur ;
Ce texte est en tous points identiques aux dispositions de l'article L 8221-3 du code du travail modifié par la loi du 21 décembre 2011 qui a renforcé le dispositif de lutte contre le travail illégal. Dès lors, il ne saurait être sérieusement soutenu que l'incrimination n'a été créée que par la loi du 21 décembre 2011.
Mme Y...a reconnu ne pas avoir procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale concernant sa profession de commercante sur les marchés et elle a été dans l'incapacité de fournir aux enquêteurs la moindre facture d'achat auprès de ses fournisseurs ni d'éléments concrets sur la nature et les gains procurés par cette activité. Comme l'ont fait justement observer les premiers juges, entre juillet 2007 date de l'inventaire du coffre ouvert à la CAISSE D'EPARGNE et la perquisition du 27 janvier 2009 au coffre de la BNP, le montant des numéraires s'était accru de plus de 4000 ¿, Mme Y...n'a pas contesté avoir continué à travailler au moins jusqu'en 2007 et même au delà puisqu'elle a renouvellé son inscription au registre du commerce et des sociétés pour la période du 24 juillet 2006 au 12 novembre 2009. Elle doit être en conséquence maintenue dans les liens de la prévention de ce chef.

Sur le délit de blanchiment de travail dissimulé et de fraude fiscale
Le blanchiment défini par l'article 324-1 du code pénal est " le fait de faciliter par tout moyen, la justification mensongère de l'origine des biens ou des revenus de l'auteur d'un crime ou d'un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect.
Il est également constitué par le fait " d'apporter son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit ".
Si le fait de placer des espèces dans le coffre d'un établissement bancaire ne suffit pas en soi à caractériser une " opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit ", Mme Y...a néanmoins déclaré, lors de l'ouverture du coffre le 14 mars 2002, des montants ou valeurs inférieurs à 200 000 F soit 36 625, 19 ¿, ce qui était mensonger puisque le montant des espèces totalise la somme de 89. 644, 73 ¿ et que la valeur des titres se monte à 89 707 ¿ 73 ; qu'il y a eu manifestement volonté de dissimulation de sa part du produit des infractions ressortant du travail dissimulé et de la fraude fiscale. Que par ailleurs, les bons au porteur anonymes et souscrits en espèces, les titres de capitalisation au porteur, les souscriptions anonymes de titre de capitalisation en espèces, et assurances vie retrouvés pour un montant de 89. 707 ¿ 63 dans le coffre de Mme Y...correspondent à des placements financiers ayant pour but de convertir les espèces recueillies illicitement en titres anonymes afin d'occulter le véritable bénéficiaire de l'opération et aux fins de dissimuler l'origine frauduleuse des fonds. Etant l'auteur des délits d'origine reconnus par elle à savoir le travail dissimulé et la fraude fiscale, (étant précisé qu'il n'est pas nécessaire que la fraude fiscale ait été préalablement poursuivie pour que le délit de blanchiment de fraude fiscale puisse être poursuivi et réprimé) Mme Y...n'ignorait pas l'origine frauduleuse des sommes ainsi dissimulées ou converties, ce qui caractérise en tous ses éléments le délit de blanchiment. Comme en matière de recel, le délai de prescription du blanchiment commence à courir au jour où la dissimulation ou le placement cesse, ce qui n'a été le cas qu'au moment de la perquisition du 26 février 2009 et de la saisie des avoirs.

La cour confirmera en conséquence la culpabilité de Mme Y...de ces chefs de prévention et compte tenu des sommes en jeu confirmera également les peines prononcées dont la peine complémentaire de confiscation des scellés à hauteur cependant de la moitié des espèces et valeurs saisies sur laquelle s'imputera la créance du trésor public.

PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement à l'égard de Fouzia Y..., en matière correctionnelle, après en avoir délibéré conformément à la loi,
EN LA FORME :
Reçoit les appels.
AU FOND :
Sur l'action publique :

REJETTE l'exception de prescription CONFIRME le jugement déféré dans toutes ses dispositions à l'exception de la peine complémentaire de saisie des scellés.

REFORME sur ce point et STATUANT à nouveau
CANTONNE la confiscation des scellés à la moitié des espèces et valeurs saisies soit à hauteur de la somme de 89 676 ¿ 18 sur laquelle s'imputera la créance des impôts.
ORDONNE la restitution pour le surplus.

Dit que la condamnée sera soumise au paiement du droit fixe de procédure d'un montant de 120 Euros prévu par l'article 1018 A du Code Général des Impôts ; elle est avisée par le présent arrêt que ce droit sera diminué de 20 % si elle s'en acquitte dans le délai d'un mois à compter du prononcé de la présente décision.
Le tout conformément aux articles visés au jugement et au présent arrêt et aux articles 512 et suivants du Code de Procédure Pénale.
Ainsi jugé et prononcé en audience publique les jour, mois et an susdits ; le présent arrêt a été signé par la Présidente et le Greffier présents lors de son prononcé.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3ème chambre correctionnelle
Numéro d'arrêt : 13/00480
Date de la décision : 18/03/2014

Analyses

Le terme de « travail dissimulé » a été introduit dans le Code du travail par la loi nº 97-210 du 11 mars 1997 et notamment par son article L. 324-10 du Code du travail assimilant la dissimulation d'activité au travail dissimulé. Ce texte étant en tout point identique aux dispositions de l'article L. 8221-3 du Code du travail, modifié par la loi nº 2011-1906 du 21 décembre 2011, il ne peut être valablement soutenu que l'incrimination de travail dissimulé, par dissimulation d'activité, n'a été créée que par cette dernière loi. Si le placement d'espèces dans le coffre d'un établissement bancaire ne peut suffire à qualifier le délit de blanchiment, la volonté de dissimulation du produit des infractions de travail dissimulé et de fraude fiscale, par la déclaration de sommes inférieures, caractérise cette infraction. Il n'est pas nécessaire que la fraude fiscale soit préalablement poursuivie pour que le délit de blanchiment de fraude fiscale puisse être poursuivi et réprimé. Enfin, le délai de prescription du blanchiment commence à courir, comme en matière de recel, au jour où la dissimulation ou le placement cesse.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Narbonne, 21 décembre 2012


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2014-03-18;13.00480 ?
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