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18/03/2014 | FRANCE | N°13/00059

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Expropriations, 18 mars 2014, 13/00059


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



Expropriations



ARRET DU 18 MARS 2014



Débats du 18 Février 2014



Numéro d'inscription au répertoire général :

13/00059



Minute n° :





Ce jour, DIX HUIT MARS DEUX MILLE QUATORZE,



A l'audience publique de la Chambre des Expropriations de la Cour d'Appel de MONTPELLIER , Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Conseiller assisté de M. Philippe CLUZEL, Greffier a prononcé l'arrêt suivant dans l'instance opposant :



d'une part :



S

A AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE (CONCESSIONNAIRE)

Direction Opérationnelle de la Construction de [Localité 20]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentant : Me TEISSEYRE avocat de...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

Expropriations

ARRET DU 18 MARS 2014

Débats du 18 Février 2014

Numéro d'inscription au répertoire général :

13/00059

Minute n° :

Ce jour, DIX HUIT MARS DEUX MILLE QUATORZE,

A l'audience publique de la Chambre des Expropriations de la Cour d'Appel de MONTPELLIER , Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Conseiller assisté de M. Philippe CLUZEL, Greffier a prononcé l'arrêt suivant dans l'instance opposant :

d'une part :

SA AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE (CONCESSIONNAIRE)

Direction Opérationnelle de la Construction de [Localité 20]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentant : Me TEISSEYRE avocat de la SCP BOUYSSOU-COURRECH, avocat au barreau de TOULOUSE

APPELANTE

et

d'autre part :

Monsieur [D] [YN]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me JEANJEAN avocat de la SCP SCHEUER, VERNHET ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Madame [Z] [C] [IB] épouse [YN]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentant : Me JEANJEAN avocat de la SCP SCHEUER, VERNHET ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES

en présence de

Monsieur le Commissaire du Gouvernement du département de [Localité 8]

Brigade des Evaluations Domaniales

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Les parties ont été régulièrement convoquées par lettres recommandées avec accusés de réception.

Statuant sur l'appel d'un jugement du Juge de l'Expropriation du Département de l'Hérault en date du

15 Mai 2013

Après que les débats aient eu lieu à l'audience publique du 18 Février 2014 où siégeaient :

- Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Conseiller de Chambre, Président suppléant, désigné par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de MONTPELLIER, en remplacement de M.BACHASSON, Président empêché,

- Madame Nathalie MATELLY, Vice-Présidente du Tribunal de Grande Instance de CARCASSONNE, Juge suppléant de l'Expropriation du Département de l'Aude, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président,

- Madame [JO] [A], Juge au Tribunal de Grande Instance de Rodez chargée du Tribunal d'instance de Millau, juge de l'Expropriation du Département de l'Aveyron, désignée par Ordonnance de Monsieur le Premier Président,

En présence de M. [M], délégué par le Trésorier Payeur Général de la Région [Localité 12], Commissaire du Gouvernement,

assistés de M. Philippe CLUZEL, Greffier,

Monsieur le Président entendu en son rapport, les conseils des parties et le Commissaire du Gouvernement entendus en leurs observations,

Après avoir mis l'affaire en délibéré au 18/03/2014 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, les magistrats du siège ont délibéré en secret, conformément à la loi.

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES :

Par décret du 30 avril 2007, ont été déclarés d'utilité publique et urgents les travaux de construction du dédoublement de l'autoroute A 9 au droit de [Localité 20], compris entre [Localité 14], à l'est, et [Localité 4], à l'ouest, et sur le territoire des communes de [Localité 1], [Localité 3], [Localité 4], [Localité 13], [Localité 14], [Localité 18], [Localité 20], [Localité 23], [Localité 24], [Localité 25], [Localité 26], [Localité 29] et [Localité 30] dans le département de [Localité 8].

Dans le cadre de la réalisation du projet conduit par la société des Autoroutes du Sud de la France, concessionnaire de l'Etat, a ainsi été déclarée cessible la parcelle cadastrée à [Localité 13], lieu-dit « [Localité 10] », section [Cadastre 20], issue de la parcelle anciennement cadastrée section [Cadastre 19], d'une superficie de 6127 m², appartenant à [N] [YN] et [Z] [IB] épouse [YN], usufruitiers, et [D] [YN], nu-propriétaire (les consorts [YN]).

Après avoir notifié, par courriers du 1er octobre 2012, une offre d'indemnisation aux consorts [YN] à hauteur de la somme de 32 960 €, sur la base d'un prix de 4 € le m², la société des Autoroutes du Sud de la France, a, à défaut d'accord amiable, saisi le juge de l'expropriation du département de l'Hérault selon la procédure d'urgence, aux fins de fixation des indemnités revenant aux intéressés.

L'ordonnance d'expropriation a ensuite été prononcée, le 20 mars 2013.

[N] [YN] est décédé en cours d'instance.

Après visite des lieux, le juge de l'expropriation a notamment, par jugement du 15 mai 2013 :

-fixé au 12 mars 2009 la date de référence,

-alloué à Mme [IB] veuve [YN] et M. [YN] une indemnité globale de dépossession de 46 440 €, due par la société des Autoroutes du Sud de la France, pour l'expropriation de la parcelle cadastrée à [Localité 13] au lieu-dit « [Localité 10] » section [Cadastre 20],

-condamné la société des Autoroutes du Sud de la France au paiement de la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 17 juillet 2013, la société des Autoroutes du Sud de la France a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Elle a déposé son mémoire d'appelante avec 28 pièces, le 5 septembre 2013, lequel a été notifié aux consorts [YN] les 10 et 11 septembre 2013 et au commissaire du gouvernement, le 10 septembre 2013.

Les consorts [YN] ont déposé leur mémoire d'intimés accompagné de 33 pièces, le 7 octobre 2013.

Le 30 octobre 2013, la société des Autoroutes du Sud de la France a déposé un mémoire complémentaire avec 10 pièces nouvelles (n° 30 à 39) en réplique à l'argumentation adverse.

Le commissaire du gouvernement a déposé des conclusions devant la cour, le 11 février 2014.

**

*

La société des Autoroutes du Sud de la France demande à la cour de réformer le jugement sur le montant de l'indemnité de dépossession, qui doit être fixée à la somme de 32 958,80 € arrondie à 32 960 €, conformément à ses offres, soit 24 508 € à titre d'indemnité principale, 3450,80 € à titre d'indemnité de remploi et 5000 € à titre d'indemnité accessoire pour la perte d'une haie de cyprès ; elle conclut également à la condamnation des consorts [YN] à lui payer la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :

-contrairement à ce que soutiennent les expropriés, le maintien en zone A dans le PLU de [Localité 13] d'une partie ponctuelle d'un secteur de la commune identifié par le SCOT comme zone d'extension urbaine, à un moment où la réalisation du projet de dédoublement de l'A 9 était incertaine, n'est en rien révélateur d'une intention dolosive,

-les ventes citées par les consorts [YN], faisant apparaître des prix d'environ 20 € le m² pour des terrains classés en zone A ou N, correspondent à des terrains, qui bénéficient d'une plus-value de situation très forte et/ou révèlent une intention spéculative de la part des acquéreurs,

-la valeur de 6 € le m² retenue par le premier juge n'est pas cohérente eu égard aux accords amiables conclus dans la zone de projet, aux mutations relatives à des terrains classés en zone agricole sur la commune de [Localité 13] et aux jugements et arrêts rendus par les juridictions de l'expropriation.

Formant appel incident, les consorts [YN] demandent à la cour de fixer l'indemnité de dépossession à la somme de 304 286 € en retenant l'intention dolosive de l'expropriant et, subsidiairement, à la somme de 135 794 € si l'intention dolosive est écartée ; enfin, ils réclament la condamnation de la société des Autoroutes du Sud de la France à leur payer la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils soutiennent en substance que :

-dans le cadre de la fixation du prix, il convient de se référer à la valeur de terrains classés en zone AU constructible, en situation privilégiée, présentant un COS de 0,8 et une vocation essentiellement économique,

-en effet, le classement de la parcelle [Cadastre 19], expropriée, en zone agricole A du PLU de [Localité 13] est incompatible avec le SCOT de l'agglomération de [Localité 20], qui classe l'intégralité de l'unité foncière en zone d'extension urbaine d'intensité A (offrant 8000 m² de SHON à l'hectare, soit un COS de 0,8), ainsi qu'avec le PPAD du PLU, dont l'orientation n° 16 classe tout le secteur compris, d'ouest en est, de [Localité 9] jusqu'à la [Adresse 5], et du nord au sud, de l'autoroute A 9 actuelle jusqu'au projet de ligne LGV, en espace à dominante économique,

-les services de l'Etat auraient dû imposer la mise en compatibilité du PLU de [Localité 13] avec les orientations du SCOT lors de l'élaboration du document d'urbanisme ou du contrôle de légalité, ce dont il résulte une réticence dolosive de leur part,

-l'évaluation doit donc être faite, en fonction des éléments de référence produits aux débats, sur la base d'un prix de 45 € le m² et, subsidiairement, de 20 € le m² si l'intention dolosive de l'expropriant était écartée.

Le commissaire du gouvernement propose à la cour de réformer le jugement et de fixer l'indemnité de dépossession due aux consorts [YN] à la somme de 32 960 €, conformément à l'offre de l'expropriant.

**

*

Lors des débats à l'audience, la cour a invité les parties à s'expliquer sur l'irrecevabilité, tirée de l'article R. 13-49, alinéa 3, du code de l'expropriation, des conclusions du commissaire du gouvernement déposées le 11 février 2014, après l'expiration du délai prévu par ce texte.

MOTIFS DE LA DECISION:

Le commissaire du gouvernement, qui s'est vu notifier par le greffe, suivant lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 5 septembre 2013, reçue le 10 septembre 2013, le mémoire et les pièces de la société des Autoroutes du Sud de la France, appelante, n'a déposé au greffe de la cour ses conclusions, que le 11 février 2014, soit hors du délai d'un mois imparti au 3ème alinéa de l'article R. 13-49 du code de l'expropriation, bien qu'aient été reproduites, dans la lettre de notification, les dispositions de ce texte ; il convient dés lors de déclarer d'office irrecevables ses conclusions.

**

*

La date à retenir pour l'appréciation de l'usage effectif de la parcelle [Cadastre 20] issue de la parcelle anciennement cadastrée [Cadastre 19], comprise au PLU de [Localité 13] dans un emplacement réservé pour le doublement de l'A 9, doit être fixée, par application de l'article L. 13-15 II (4°) du code de l'expropriation, au 17 mars 2009 qui correspond à la date d'opposabilité aux tiers de la délibération du conseil municipal de [Localité 13] approuvant le PLU délimitant notamment la zone dans laquelle est situé l'emplacement réservé ; la délibération du conseil municipal, adoptée en séance le 12 mars 2009, a, en effet, été transmise le 17 mars 2009 au représentant de l'Etat dans le département, ce qui l'a rendue opposable aux tiers à cette date.

Il n'est discuté qu'à la date de l'ordonnance d'expropriation, prononcée le 20 mars 2013, la parcelle est en nature de terre, libre d'occupation, bordant le chemin départemental n° 132 ; la cour se réfère aux constatations faites par le premier juge, lors de sa visite des lieux, qui a relevé que la parcelle constitue une terre plane en l'état de friche, située à proximité du bâti habité par les propriétaires et dont la façade sur le [Cadastre 30] est bordée d'une haie de cyprès.

A la date de référence, la parcelle [Cadastre 19] est classée en zone A correspondant à la zone agricole de la commune de [Localité 13], qui correspond aux coupures d'urbanisation définies dans le SCOT de l'agglomération de [Localité 20] et est réservée aux exploitations agricoles et aux bâtiments qui leur sont nécessaires ; elle se caractérise par une constructibilité limitée à la réalisation de constructions et installations techniques nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif et de constructions, installations et équipements nécessaires à l'exploitation agricole à condition d'être situés en continuité d'un bâtiment d'exploitation existant ou en continuité de [Localité 13], [Localité 19], [Localité 2].

Les consorts [YN] soutiennent que le classement de la parcelle expropriée, en zone agricole A du PLU de [Localité 13] est incompatible avec le SCOT de l'agglomération de [Localité 20] approuvé le 17 février 2006, qui les inclut dans une zone d'extension urbaine d'intensité A, ainsi qu'avec le plan d'aménagement et de développement durable du PLU, dont l'orientation n° 16 classe le secteur situé à l'extrémité nord de la commune en espace à dominante économique ; ils affirment que cette incompatibilité résulte d'une réticence dolosive des services de l'Etat, qui auraient dû imposer la mise en compatibilité du PLU de [Localité 13] avec les orientations du SCOT lors de l'élaboration du document d'urbanisme ou du contrôle de légalité ; ils en déduisent que la parcelle aurait dû être classée en zone AU à vocation essentiellement économique et que son évaluation doit être faite sur cette base.

Certes, il résulte des articles L. 123-1 et L. 123-1-5 du code de l'urbanisme que le plan local d'urbanisme doit être compatible avec le SCOT et que le règlement doit être en cohérence avec le PPAD ; pour autant, le maintien, comme en l'espèce, dans une zone agricole du PLU de terrains impactés par le projet de doublement de l'A9 n'est pas en soi manifestement incompatible avec les orientations du SCOT ou du PPAD, sachant que les perspectives d'extension de l'urbanisation prévues découlent précisément de la réalisation de l'autoroute A 9b et de la ligne TGV, au sud de [Localité 20] et au nord de [Localité 13], qu'une révision du PLU consacrant l'ouverture à l'urbanisation n'est alors envisageable qu'une fois réalisées les infrastructures projetées et que le secteur d'extension urbaine de niveau d'intensité A, prévu dans le SCOT, couvre un territoire 'le secteur [Localité 9] et [Localité 6]', situé de part et d'autre de l'actuelle autoroute A9, beaucoup plus vaste que la zone de projet ; par ailleurs, les parcelles en litige, incluses dans un secteur essentiellement agricole compris entre le tracé actuel de l'autoroute A 9 et le fleuve Le Lez, ont toujours été classées en zone agricole dans les documents d'urbanisme conformément à leur usage effectif, l'urbanisation s'étant développée au nord de l'autoroute, qui en constitue la limite ; enfin, lorsque le PLU de [Localité 13] a été approuvé en mars 2009, le Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire venait de décider de suspendre provisoirement les procédures d'expropriation et de fouilles archéologiques sur le tracé du projet de doublement de l'A9, ce dont les propriétaires concernés avaient été informés par courriers du 10 mars 2009.

Il s'ensuit qu'il ne peut être reproché aux services de l'Etat, soit à l'occasion du contrôle de légalité du PLU, soit lors de leur consultation dans le cadre de l'élaboration du document d'urbanisme, de n'avoir pas exigé la mise en compatibilité de celui-ci aux orientations du SCOT et du PPAD au point de caractériser une intention dolosive de leur part, dans le but de léser les propriétaires, comme les consorts [YN], susceptibles alors d'être expropriés.

Tenant son classement en zone A, dotée d'une constructibilité limitée, la parcelle [Cadastre 20] ne peut être considérée comme située dans un secteur désigné comme constructible au PLU au sens de l'article L. 13-15 II du code de l'expropriation et recevoir ainsi la qualification de terrain à bâtir, d'ailleurs non revendiquée par les consorts [YN].

Elle doit donc être évaluée en tenant compte de son usage effectif, qui correspond à celui d'un terrain classé en zone agricole A du PLU, mais bénéficiant d'une plus-value de situation en raison de sa localisation dans la première couronne de l'agglomération montpelliéraine, de la présence non contestée du réseau électrique et de sa desserte par une voie carrossable ; l'évaluation doit également prendre en compte sa consistance à la date de l'ordonnance d'expropriation, qui est celle d'une terre libre d'occupation.

Pour l'évaluation, la société des Autoroutes du Sud de la France se prévaut de divers accords amiables réalisés dans le cadre des opérations faisant l'objet de la DUP, relativement à des terrains situés à [Localité 13] et classés en zone A du PLU, conclus majoritairement sur la base d'un prix de 4 € le m²; sur les sept accords évoqués, sont notamment produits un acte du 20 août 2012 (chambre d'agriculture de [Localité 8] / société des Autoroutes du Sud de la France), qui concerne un terrain de 217 m² à détacher de la parcelle cadastrée au lieu-dit « [Localité 27] », section [Cadastre 27], vendu 4 € le m², ainsi qu'un acte du 1er mars 2012 ([T]-[X] / société des Autoroutes du Sud de la France) conclu au prix de 25 € le m², mais qui porte sur une parcelle de 3821 m² en nature de terre, cadastrée au lieu-dit « Pont Trinquat », section [Cadastre 36], anciennement classée en zone IVNA du POS de [Localité 13] et désormais classée en zone A du PLU. 

Elle communique, en outre, divers actes se rapportant à des ventes de terres agricoles situées sur le territoire de la commune de [Localité 13], intervenues entre septembre 2008 et décembre 2011, à des prix variant de 3,50 à 5,50 € le m² ; certains sont relatifs à des ventes entre particuliers de parcelles situées à proximité et bénéficiant d'une plus-value de situation comparable, comme la vente ([P] / GFA JJM ) du 19 septembre 2008 de la parcelle de terre cadastrée au lieu-dit « [Localité 15] », section [Cadastre 22], d'une surface de 7477 m², classée en zone NC, au prix de 3,61 € le m² et la vente ([BI] / GFA JJM) du 19 août 2010 de la parcelle de terre cadastrée au même lieu-dit, section [Cadastre 23], d'une surface de 7585 m², classée en zone A, au prix de 4 € le m² ; ces deux terrains sont situés à proximité du [Localité 15] et de deux maisons d'habitation, non loin de la [Adresse 6] (le [Cadastre 30]).

Parmi ces actes, figure aussi une vente (BRL / communauté d'agglomération de [Localité 20]) du 7 juillet 2010 de plusieurs parcelles, totalisant 71 929 m², cadastrées à [Localité 13] section [Cadastre 16], section [Cadastre 17], section [Cadastre 21] et section [Cadastre 26] au prix de 399 000 €, soit 5,54 € le m² ; le prix n'est pas cependant ventilé, alors qu'une partie des terrains vendus est classée en zone AU0 du PLU.

La société des Autoroutes du Sud de la France invoque, enfin, plusieurs décisions de justice, qui retiennent un prix de 4 € le m² pour l'évaluation de terrains classés en zone A ou N du PLU de [Localité 13], dans le cadre du doublement de l'A9, dont deux jugements de donné acte, entérinant des accords d'indemnisation intervenus avec des propriétaires de terrains expropriés, cadastrés au lieu-dit « [Localité 15] » (jugement du 23 janvier 2013, société des Autoroutes du Sud de la France c/ M. et Mme [R] ; jugement du 13 mars 2013, société des Autoroutes du Sud de la France c/ M. et mme [G]) et deux arrêts de cette cour en date du 18 juin 2013, l'un (société des Autoroutes du Sud de la France c/ CRAMA) fixant à 4 € le m² en valeur septembre 2012 l'indemnité due pour une emprise de 36 440 m² sur diverses parcelles cadastrées à [Localité 13] aux lieux-dits « [Localité 27] » et « Lous Tres Aoubrets », l'autre (société des Autoroutes du Sud de la France c/ SCI Mas Desplans) confirmant un jugement du 10 octobre 2012 ayant retenu un prix de 4 € le m² pour l'évaluation d'une emprise de 7949 m² sur une parcelle cadastrée au lieu-dit « [Localité 11] ».

Les décisions de justice, dont se prévalent les consorts [YN] pour justifier d'un prix de 45 € le m² au cas où serait retenue l'intention dolosive de l'expropriant (jugement du juge de l'expropriation du département de l'Hérault en date du 23 juin 2010, SERM c/ société civile agricole domaine Saint Jean de Pailletrice, arrêt de la cour d'appel de Montpellier en date du 16 octobre 2012, consorts [Y] c/ SERM ; arrêt rendu, sur renvoi de cassation, le 19 mars 2007 par la cour d'appel de Nîmes, SERM c/ consorts [K]), et qui portent sur des terrains classés en zone à urbaniser, à l'intérieur de ZAC d'activités à [Localité 21] ou [Localité 20], ne peuvent servir de termes de comparaison pertinents et doivent être écartés.

Les consorts [YN] produisent ensuite les éléments de référence suivants relatifs à des terrains classés en zones agricole ou naturelle des POS/PLU qui leur sont applicables, situés à [Localité 13] ou dans des communes de l'agglomération montpelliéraine :

-cession après DUP du 16 mars 1992 (Etat / Portes) au prix de 32 F (4,88 €) le m² de deux parcelles cadastrées à [Localité 13], lieu-dit « [Localité 11] », section [Cadastre 24] de [Cadastre 9], d'une surface totale de 1825 m², dans le cadre de la création de l'échangeur de [Localité 22].

-vente des 5 et 9 novembre 1993 ([I] / département de [Localité 8]) au prix de 40 F (6,10 €) le m² d'une parcelle cadastrée à [Localité 13], lieu-dit « [Localité 15] », section [Cadastre 25], d'une surface de 2878 m², en vue de l'élargissement du [Cadastre 30].

-ventes des 1er février 1995 (SIM / [UA]) et 15 mars 1995 (SIM /[F]) à des prix de 42 F (6,40 €) ou 44,80 F (6,82 €) le m², de divers lots en nature de jardins familiaux, dépendant d'une copropriété « Les Jardins de Loli » située à [Localité 13] au lieu-dit « [Localité 9] », ventes réalisées sous la condition suspensive de l'établissement d'un règlement de copropriété et d'un état descriptif de division, dont il n'est pas cependant établi qu'elle ait été levée.

-vente du 2 mai 2007 ([O] / SCI Les concordes) d'un terrain en friche avec un petit mazet et un puits, cadastré à [Localité 13], section [Cadastre 18], de 20 745 m², au prix de 20 € le m² ; alors classé en zone ND du POS, cette parcelle, localisée au nord ouest du territoire communal et en bordure de l'A 9, a été acquise dans la perspective de la réalisation future d'un construction, ainsi qu'il ressort des énonciations de l'acte (incomplet), pages 9 et 11.

-vente du 28 janvier 2010 (GFA des Domaines Fabre / communauté d'agglomération de [Localité 20]) de diverses parcelles classées en zone A du PLU de [Localité 13], dont tout ou partie des parcelles cadastrées au lieu-dit « [Localité 5] », section [Cadastre 28] et [Cadastre 6], au lieu-dit « [Localité 16] », section [Cadastre 29], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] et au lieu-dit « [Localité 17] », section [Cadastre 35], [Cadastre 1], [Cadastre 2] et [Cadastre 3] à des prix variant de 3 € à 14,25 € le m² selon le caractère inondable ou pas des terres.

-vente du 30 septembre 2011 (de [E] / SCI Quarante) d'une parcelle cadastrée à [Localité 13], lieu-dit « [Adresse 5] », section [Cadastre 15], de 6500 m², au prix de 24,61 € le m² ; cet élément de référence est relatif à un terrain situé le long du CD n° 986, mais qui était classé, avant l'approbation du PLU de mars 2009, en zone IVNA du POS.

-vente du 31 janvier 2012 ([J] / communauté d'agglomération de [Localité 20]) de six parcelles cadastrées à [Localité 13], section [Cadastre 34] et [Cadastre 31], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 12] et [Cadastre 13], d'une surface totale de 2349 m², au prix de 13,84 € le m², en vue de la réalisation de la 3ème ligne de tramway ; ces parcelles sont localisées au nord de la ville de [Localité 13], en bordure d'un secteur urbanisée comportant de nombreuses enseignes commerciales (Castorama, Carrefour ').

-vente du 5 mars 2012 ([Q] / SCI Lettara) d'une parcelle de terre cadastrée à [Localité 13], lieu-dit « [Localité 7] », section [Cadastre 33], d'une surface de 5713 m², au prix de 19,25 € le m² ; cette parcelle jouxte une parcelle [Cadastre 32], appartenant également à l'acheteur, sur laquelle est exploité un camping.

-vente du 26 février 2013 ([H] / [L]) relativement à trois parcelles en nature de jardin, cadastrées à [Localité 13] au lieu-dit « [Localité 28] », section [Cadastre 38], [Cadastre 7] et [Cadastre 8], de 200 m² chacune, et à un cinquième indivis d'une parcelle en nature de chemin d'accès, cadastrée au même lieu-dit, section [Cadastre 39], de 291 m², au prix global de 18 430 €, soit 28 € le m² ; cet acte fait suite à un compromis de vente signé le 4 décembre 2012 sous diverses conditions suspensives, dont il résulte que l'acquisition d'un terrain de 600 m², à prendre sur la parcelle cadastrée [Cadastre 37], était destinée à permettre à M. [L] et à quatre autres personnes (il est prévu dans l'acte, page 5, que les frais d'établissement d'un document d'arpentage seront partagés par les consorts [L] ' [W] et [S] ' [B] ' [L] et [V], à concurrence de 1/5ème chacun) de reconstituer les jardins familiaux, dont ils avaient été expropriés.

-jugement du juge de l'expropriation en date du 15 mai 2013 (société des Autoroutes du Sud de la France c/ [U]) fixant sur la base de 19 € le m² l'indemnité due pour l'expropriation d'une emprise de 1520 m² sur la parcelle cadastrée à [Localité 13], lieu-dit « [Localité 6], section [Cadastre 14], classée en zone A du PLU ; ce jugement porte cependant sur une parcelle en nature de sol compacté, qui fait partie d'un ensemble foncier servant à l'exploitation d'une activité de pépiniériste ' paysagiste.

Certains de ces éléments de référence sont relativement anciens, d'autres concernent des terrains ayant une nature spécifique (jardins familiaux, pépinière), situés en limite d'urbanisation ou ayant été acquis à des fins spéculatives ou par pure convenance personnelle de la part des acheteurs ; la vente du 30 septembre 2011 (de [E] / SCI Quarante) porte sur une terrain, anciennement classé en zone NA du POS, qui a été déclassé en zone A du PLU, et la ventilation du prix, dans la vente du 28 janvier 2010 (GFA des Domaines Fabre / CAM), est contestable, puisque notamment un prix de 32 € le m² apparaît comme anormalement bas pour des terrains situés à [Localité 20], [Adresse 7], classés en zone AU ouverte à l'urbanisation et qu'un prix de 14,25 € le m² apparaît, au contraire, élevé pour un terrain classé en zone A du PLU de [Localité 13].

Eu égard aux caractéristiques matérielles et juridiques du terrain exproprié, son estimation peut être faite, en valeur mai 2013, sur la base d'un prix de 4 € le m², qui est la valeur dominante observée pour des terrains comparables, bénéficiant d'une situation privilégiée ; le montant des indemnités principale et de remploi, doit dès lors être fixé comme suit :

- indemnité principale: 6127 m² x 4 € '''''''''.. 24 508,00 €

- indemnité de remploi : (20% x 5000 €) + (15% x 10 000 €)

+ (10 % x 9508 €) '''''''''''...'''...'. 3 450,80 €

Total 27 958,80 €

L'offre d'une indemnité accessoire de 5000 € pour la perte de la haie de cyprès implantée sur la parcelle, en limite du [Cadastre 30], n'est pas discutée ; il en résulte une indemnité globale de dépossession de : 27 958,80 € + 5000 € = 32 958,80 €, arrondie à 32 960 €.

Le jugement entrepris doit ainsi être réformé en ce qu'il fixe au 12 mars 2009 la date de référence et à 46 440 € le montant de l'indemnité globale de dépossession ; le surplus des dispositions du jugement doit être confirmé.

**

*

Au regard de la solution apportée au règlement du litige, les consorts [YN] doivent être condamnés aux dépens d'appel, mais sans qu'il y ait lieu de faire application, au profit de la société des Autoroutes du Sud de la France, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Déclare d'office irrecevable les conclusions du commissaire du gouvernement, déposées le 11 février 2014,

Au fond, réforme le jugement du juge de l'expropriation du département de [Localité 8] en date du 15 mai 2013, mais seulement en ce qu'il fixe au 12 mars 2009 la date de référence et à 46 440 € le montant de l'indemnité globale de dépossession,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Fixe au 17 mars 2009 la date de référence à retenir pour l'appréciation de l'usage effectif du bien,

Fixe à la somme de 32 960 € le montant de l'indemnité globale de dépossession dû par la société des Autoroutes du Sud de la France à [Z] [IB] veuve [YN], usufruitière, et [D] [YN], nu-propriétaire, pour l'expropriation de la parcelle cadastrée à [Localité 13], lieu-dit « [Localité 10] », section [Cadastre 20], d'une superficie de 6127 m²,

Confirme le jugement entrepris dans le surplus de ses dispositions,

Condamne les consorts [YN] aux dépens d'appel,

Rejette la demande de la société des Autoroutes du Sud de la France tendant à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Expropriations
Numéro d'arrêt : 13/00059
Date de la décision : 18/03/2014

Références :

Cour d'appel de Montpellier EX, arrêt n°13/00059 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-18;13.00059 ?
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