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10/09/2013 | FRANCE | N°12/03542

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1o chambre section d, 10 septembre 2013, 12/03542


Grosse + copie délivrées le à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1o Chambre Section D
ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2013
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 03542
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 FEVRIER 2012 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN No RG 08/ 03964

APPELANTES :

Association SKI CLUB LES ANGLES représentée par son représentant statutaire en exercice, domicilié en cette qualité au siège social Ancienne Gare des Télécabines 66210 LES ANGLES représentée par la SCP GILLES ARGELLIES, FABIEN WATREMET, avocats au b

arreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Me Joël JUSTAFRE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENT...

Grosse + copie délivrées le à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1o Chambre Section D
ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2013
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 03542
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 FEVRIER 2012 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN No RG 08/ 03964

APPELANTES :

Association SKI CLUB LES ANGLES représentée par son représentant statutaire en exercice, domicilié en cette qualité au siège social Ancienne Gare des Télécabines 66210 LES ANGLES représentée par la SCP GILLES ARGELLIES, FABIEN WATREMET, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Me Joël JUSTAFRE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

S. A AXA FRANCE représentée par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social 313 Terrasses de l'Arche 92727 NANTERRE CEDEX représentée par la SCP GILLES ARGELLIES, FABIEN WATREMET, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Me Joël JUSTAFRE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

INTIMES :

Monsieur Stéphane Y...agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de ses fils mineurs Romain Y...né le 15/ 01/ 1997 et Bryan Y...né le 22/ 01/ 2001 né le 05 Novembre 1967 à PERPIGNAN de nationalité Française ...66210 LES ANGLES représenté par Me Morgane SALVIGNOL GUILHEM, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et Me Philippe LIDA, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

Madame Delphine B...épouse Y...agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de ses fils mineurs Romain Y...né le 15/ 01/ 1997 et Bryan Y...né le 22/ 01/ 2001 née le 16 Décembre 1970 à DIGNE LES BAINS de nationalité Française ...66210 LES ANGLES représentée par Me Morgane SALVIGNOL GUILHEM, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et Me Philippe LIDA, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

Monsieur Sébastien C...né le 09 Août 1976 à LAVELANET de nationalité Française ...Résidence Casa Nostra 66120 FONT ROMEU représenté par la SCP YVES GARRIGUE, YANN GARRIGUE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Me FAVET, avocat au barreau de GRENOBLE, avocat plaidant

Monsieur Christian F...de nationalité Française ... 19300 EGLETONS représenté par la SCP YVES GARRIGUE, YANN GARRIGUE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Me FAVET, avocat au barreau de GRENOBLE, avocat plaidant

Madame Delphine X...née le 23 Février 1976 à PERPIGNAN de nationalité Française ...66210 LES ANGLES représentée par la SCP YVES GARRIGUE, YANN GARRIGUE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et Me FAVET, avocat au barreau de GRENOBLE, avocat plaidant

RAM GAMEX représentée par son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social 4 rue d'Iéna 66850 PERPIGNAN assignée à personne habilitée le 22/ 10/ 2012 et le 19/ 11/ 2012

ORDONNANCE DE CLÔTURE du 27 Mai 2013

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 JUIN 2013, en audience publique, Monsieur Jacques MALLET ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Jacques MALLET, Président Madame Chantal RODIER, Conseiller Mme Françoise VIER, Conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Monique AUSSILLOUS

ARRET :

- réputé contradictoire
-prononcé en audience publique par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Jacques MALLET, Président, et par Mme Ginette DESPLANQUE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *
* EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 28 février 2006, Romain Y..., alors âgé de 9 ans pour être né le 15 janvier 1997, a été grièvement blessé sur le domaine skiable des Angles lors d'une séance d'entraînement du ski club dont il était adhérent, ayant violemment heurté un arbre.
Suivant exploits des 21, 25 et 29 août 2008, M. Stéphane Y...et Mme Delphine B...épouse Y...(époux Y...), agissant en qualité de représentants légaux de leur fils mineur Romain, ont fait assigner l'association Ski Club Les Angles et son assureur, la SA AXA France ainsi que la RAM Gamex devant le tribunal de grande instance de Perpignan pour obtenir réparation des préjudices subis par l'enfant.
De même, suivant exploits des 2, 4 et 7 décembre 2009, l'association Ski Club Les Angles et la société d'assurance AXA France ont attrait en la cause les trois moniteurs qui encadraient les participants à la séance d'entraînement à savoir, M. Sébastien C..., M. Christian F...et Mme Delphine X...épouse J...pour les entendre déclarés solidairement responsables de l'accident survenu à Romain Y...et à titre subsidiaire, de les entendre condamnés solidairement à les relever de toutes condamnations qui pourraient être prononcées contre elles, à hauteur de 95 % du montant des dommages.
Par ordonnance du 27 mai 2010, le juge de la mise en état a ordonné la jonction de ces deux instances.
Aux termes de leurs ultimes conclusions, outre l'indemnisation du préjudice subi par leur fils Romain Y..., les époux Y...ont également sollicité réparation de leur propre préjudice ainsi que du préjudice subi par le frère de la victime, Bryan Y....
Par jugement du 28 février 2012, le tribunal de grande instance de Perpignan a : ¿ jugé que la demande de l'association Ski Club Les Angles tendant à voir déclarer les trois moniteurs, M. Sébastien C..., M. Christian F...et Mme Delphine X...épouse J..., solidairement responsables de l'accident de Romain Y..., est irrecevable ; ¿ jugé que l'association Ski Club Les Angles est entièrement responsable du préjudice subi par Romain Y...; ¿ débouté les époux Y...des demandes formulées à l'encontre de M. Sébastien C..., M. Christian F...et Mme Delphine X...épouse J...; ¿ avant dire droit sur la liquidation du préjudice corporel de Romain Y..., ordonné une expertise médicale confiée au Dr Pierre K...; ¿ condamné in solidum l'association Ski Club Les Angles et son assureur, la SA AXA France, à payer aux époux Y...les provisions de :-20. 000 ¿ en leur qualité de représentants légaux de leur fils mineur Romain à valoir sur la liquidation de son préjudice ;-5. 000 ¿, chacun, à titre personnel à valoir sur la liquidation de leur propre préjudice ; ¿ rejeté la demande de provision formulée pour le compte Bryan Y..., frère de Romain Y..., ¿ renvoyé l'affaire à la mise en état et invité les demandeurs à conclure en lecture du rapport d'expertise, une fois déposé ; ¿ réservé les frais irrépétibles et les dépens en fin d'instance.

Le 9 mai 2012, l'association Ski Club Les Angles et son assureur, la SA AXA France, ont relevé appel de ce jugement.
Vu les dernières conclusions déposées : * le 14 novembre 2012 par l'association Ski Club Les Angles et la SA AXA France ; * le 19 octobre 2012 par les époux Y...; * le 30 novembre 2012 par M. Sébastien C..., M. Christian F...et Mme Delphine X...épouse J....

L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 mai 2013.
******
L'association Ski Club Les Angles et son assureur, la SA AXA France, concluent, au visa des articles 1134, 1147, 1382, 1383 et 1384 du code civil, à la réformation du jugement déféré et statuant à nouveau, demandant à la cour de : débouter les époux Artus ainsi que M. Sébastien C..., M. Christian F...et Mme Delphine X...épouse J...de toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées contre elles ; dire et juger que Romain Y...était au moment des faits sous la surveillance de M. Sébastien C..., M. Christian F...et Mme Delphine X...épouse J...qui ne sont pas des préposés de l'association Ski Club Les Angles ; dire et juger qu'ils ont commis une faute qui les rend solidairement responsables de l'accident survenu le 28 février 2006 au jeune Romain, sous réserve d'une part de responsabilité qui serait laissée à la charge de la victime ; les condamner solidairement à en réparer les conséquences ; à titre subsidiaire, les condamner solidairement à relever l'association Ski Club Les Angles et la société AXA France de toutes condamnations qui pourraient être prononcées contre elles, à hauteur de 95 % du montant des dommages ; en toute hypothèse, condamner solidairement les époux Y..., M. Sébastien C..., M. Christian F...et Mme Delphine X...épouse J...à leur payer une somme de 3. 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au profit de SCP Argellies-Watremet sur ses offres de droit.

Au soutien de leur appel, les appelantes soulignent notamment : * qu'elles sont bien fondées à appeler en la cause les moniteurs de ski qui ont méconnu leur obligation contractuelle et engagé ainsi leur responsabilité ; que la mise en oeuvre de leur intervention forcée était juridiquement incontournable ;

* qu'en sa qualité d'organisatrice d'activités sportives, l'association Ski Club Les Angles n'est tenue qu'à une obligation de moyens ; * qu'elle n'est pas responsable du défaut de surveillance qui incombait aux moniteurs ; qu'il en était de même concernant l'organisation de la séance d'entraînement ; qu'elle n'était pas plus responsable de la sécurisation de la piste et des installations utilisées ; * que le comportement fautif et imprudent de la victime est la cause exclusive de l'accident tandis que la minorité ne constitue en aucun cas une cause d'exonération de responsabilité en matière civile ; * qu'au moment de l'accident, la victime était sous la surveillance directe des trois moniteurs qui exercent leurs fonctions en toute indépendance et n'ont aucun lien de subordination avec l'association ; * que les documents médicaux versés aux débats ne permettent pas d'allouer une provision tant pour le jeune Romain que pour ses parents ; que le préjudice personnel de ces derniers ainsi que de leur fils Bryan n'est pas prouvé.

Les époux Y..., agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de leurs fils mineurs, Romain Artus et Bryan Y..., demandent à la cour, au visa des articles 1134, 1147, 1382 et suivants du code civil, de : confirmer le jugement en ce qu'il a jugé l'association Ski Club Les Angles entièrement responsable de l'accident survenu le 28 février 2006 dont le jeune Romain Y...a été victime, ordonné une expertise médicale et condamné in solidum cette association et la société AXA France au paiement des provisions à valoir sur le préjudice de l'enfant Romain et de chacun des parents ; le réformer pour le surplus ; juger M. Sébastien C..., M. Christian F...et Mme Delphine X...épouse J...sont aussi responsables de cet accident survenu au jeune Romain Y...; condamner solidairement l'association Ski Club Les Angles, son assureur AXA France, M. Sébastien C..., M. Christian F...et Mme Delphine X...épouse J...à réparer l'intégralité du préjudice de Romain Y..., de ses parents et de son frère ; allouer une provision à valoir sur le préjudice moral de l'enfant Bryan Y...frères de Romain, à hauteur de 5. 000 ¿ ; condamner la partie requise aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement de 3. 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du même code.

À l'appui de leurs prétentions, les époux Y...font notamment valoir qu'ils ont logiquement dirigé leur action contre la seule association Ski Club Les Angles qui était leur seul interlocuteur. Ils précisent : * que la faute alléguée de leur enfant Romain n'est pas rapportée et qu'en tout état de cause, il n'a commis aucune faute susceptible d'exonérer les responsables ou de réduire son droit à indemnisation ; qu'il s'agit de prendre en compte non pas sa minorité mais son jeune âge, en l'occurrence 9 ans ; * que l'association a engagé sa responsabilité à raison de la mauvaise organisation du cours, du nombre d'élèves trop élevés pour trois moniteurs, de consignes non données ou imprécises, du défaut de surveillance, de la piste non sécurisée et de l'absence de sécurité passive sur un arbre en saillie, de la partie de piste ordonnée des moniteurs ; * que l'association est responsable du choix et de son acceptation des installations qu'elle utilise, est garante de la surveillance des enfants qui lui sont confiés, responsable de ses entraîneurs qui ont commis une faute au regard du devoir de discipline et de surveillance qui leur incombait.

M. Sébastien C..., M. Christian F...et Mme Delphine X...épouse J...demandent à la cour, au visa des articles 31 et 32 du code de procédure civile, 1147 et 1382 du code civil, de : confirmer le jugement entrepris en ce que l'association Ski Club Les Angles et la compagnie AXA France ont été déclarées irrecevables en leur demande de condamnation solidaire dirigée contre eux et tendant à la réparation du préjudice corporel de Romain Y...; confirmer le jugement entrepris en ce que leur responsabilité a été écartée dans le cas de l'accident dont a été victime Romain Y...le 28 février 2006 ; dire et juger en tout état de cause que l'accident dont Romain Y...a été victime, est exclusivement imputable aux comportements imprudents adoptés par ce dernier ; débouter l'association Ski Club Les Angles et la compagnie AXA France de l'intégralité de leurs demandes dirigées contre eux, en l'absence de démonstration d'une faute imputable aux moniteurs de ski qui serait en lien avec l'accident en litige ; débouter les époux Y...de leur appel incident et de leurs demandes dirigées contre eux, en l'absence de démonstration d'une faute imputable aux moniteurs de ski qui serait en lien avec l'accident en litige ; condamner in solidum l'association Ski Club Les Angles et la compagnie AXA France à leur payer la somme de 3. 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel et pour ces derniers, avec distraction au profit de la SCP Garrigue, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

Au soutien de leurs prétentions, ces trois moniteurs intimés rappellent que les demandes des appelantes à leur endroit sont irrecevables et mettent en exergue : * que débiteurs d'une obligation de sécurité de moyens, ils n'ont commis aucune faute et ne sont soumis à aucun lien de subordination avec l'association ; * qu'il ne peut leur être reproché aucun défaut de surveillance, alors que la deuxième partie de piste pouvait être empruntée seule par la victime et ne nécessitait pas une surveillance particulière de leur part tandis que des recommandations avaient été prodiguées à cet effet ; * qu'ils ne peuvent être tenus responsables d'une éventuelle défaillance dans la mise en oeuvre des moyens de sécurité des pistes de ski ; qu'en l'occurrence, la piste en question ne présentait pas de danger pour les usagers, qu'elle était balisée, en bon état et sécurisée ; * que seul le comportement de Romain Y...est à l'origine de l'accident dont il a été victime.

Bien que régulièrement assignée à personne habilitée, par exploits du 22 octobre et 19 novembre 2012 valant respectivement dénonce de conclusions des époux Y...et dénonce de la déclaration d'appel et des conclusions des appelantes, la RAM Gamex n'a pas constitué avocat.
Il sera statué par arrêt réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.

SUR CE :

Sur la recevabilité des demandes formulées par l'association Ski Club Les Angles et son assureur, la société AXA France, à l'encontre des moniteurs :
La cour fera sienne la motivation des premiers juges qui ont déclaré irrecevable la demande principale de l'association Ski Club Les Angles mais aussi de son assureur, la société AXA France, en ce qu'il était sollicité la condamnation solidaire des trois moniteurs, appelés par elles en la cause, à réparer les conséquences de l'accident dont Romain Y...a été victime le 28 février 2006 et ce, en lieu et place des parents de l'enfant.
Nonobstant le fait que cette irrecevabilité était et demeure sans incidence sur l'issue du litige, en l'état de l'action aux mêmes fins formée par les époux Y..., il est rappelé que les parties appelantes sont bien fondées, sur le principe, à exercer une action en garantie à l'encontre de ces mêmes moniteurs au terme de leur " subsidiaire ".
Le jugement déféré sera confirmé en ce sens.
Sur la responsabilité de l'association Ski Club Les Angles :
Il ressort des éléments de la cause et notamment, de l'enquête préliminaire effectuée par les services de gendarmerie, selon l'exposé fait par les premiers juges et auquel il est expressément renvoyé (pages 7 et 8 du jugement), que : l'accident dont s'agit a eu lieu alors que Romain Y...participait à une séance d'entraînement, organisée par l'association Ski Club Les Angles dont il était adhérent, sur une piste bleue dénommée " Les Collets " sur la commune de Les Angles, qui " était balisée, en bon état et sécurisée " ; les conditions atmosphériques au moment de l'accident étaient bonnes et ne sont nullement en cause ; il en est tout autant des équipements de sécurité portés par les enfants ; la séance d'entraînement était organisée sur la piste dont s'agit de la manière suivante :- sur la première partie de la piste, les moniteurs avaient tracé un parcours de slalom et un autre de géant avec un moniteur au départ de ces deux tracés (M. Sébastien C...et M. Christian F...) et le troisième à l'arrivée de ceux-ci (Mme Delphine X...épouse J...) ;- sur la deuxième partie, située après l'arrivée des deux tracés, la descente se faisait librement pour les participants à la séance d'entraînement, jusqu'au départ des remontées mécaniques afin de pouvoir rejoindre le haut des tracés.

Y ajoutant, la cour relève que ces mêmes constatations des enquêteurs font ressortir qu'aux lieux de l'accident, la piste était large de 35 mètres et bien balisée.
Le jeune Maxime L..., alors âgé de 8 ans et demi, qui accompagnait son camarade Romain Y..., a déclaré aux enquêteurs, tout en confirmant le balisage, le bon état et la sécurisation de la piste : " Pour cet entraînement, nous étions encadrés par trois moniteurs du Ski Club Les Angles (¿). Nous étions un groupe de plusieurs jeunes de tous les niveaux placés au sommet de la piste en compagnie d'un moniteur de ski. On devait descendre en slalomant sur la première partie de la piste puis après on descendait comme l'on voulait, soit en attendant l'ordre de descendre soit en attendant que le précédent ait accompli deux ou trois virages. Nous avions tous les équipements de sécurité obligatoires pour la descente à savoir le casque, un masque et un renfort dans le dos pour la colonne vertébrale. Nous attendions en haut de la piste (¿) quand tout à coup Romain s'est élancé sur la piste en slalomant. J'étais derrière lui. Nous nous sommes arrêtés au milieu de la piste. Nous avons décidé d'aller faire des bosses pour s'amuser. Elles sont situées au bord des pistes. Romain est passé devant moi et a commencé à descendre. Nous allions assez vite. Voyant qu'il se dirigeait vers les arbres, j'ai crié pour qu'il fasse attention. Il a fait volte-face mais il n'a pas pu freiner ni dévié sa course et a heurté un arbre de plein fouet. (¿). Il a un très bon niveau de ski et avait tous les équipements obligatoires mentionnés plus haut ".

De même, la monitrice Delphine X...épouse J...confirmait les conditions dans lesquelles se déroulait cet entraînement ainsi que la descente en " ski normal " concernant la deuxième partie.
Il est tout aussi constant qu'aucun des moniteurs n'a été le témoin direct de l'accident. Chacun d'entre eux était titulaire des diplômes requis lui permettant d'exercer son activité de moniteurs de manière libérale.
Il s'évince ainsi de l'ensemble des éléments de la cause que d'évidence, en sa qualité d'organisatrice d'une activité sportive, en l'occurrence une séance d'entraînement de ski, l'association Ski Club Les Angles n'a pas rempli son obligation de sécurité de moyens, ainsi que le rapportent à suffisance les époux Y..., en ne s'assurant pas des conditions de surveillance des participants à cette séance sur la deuxième partie de piste, alors même qu'elle ne pouvait assurément ignorer :- ni que les trois moniteurs qu'elle avait choisis aux termes de la convention de partenariat 2005/ 2006 dont elle se prévaut, avaient nécessairement leur attention monopolisée sur l'exécution par les participants des parcours de slalom et de géant, situés sur la première partie de la piste ;- ni par voie de conséquence, l'impossibilité pour le seul moniteur situé entre d'une part, l'arrivée des deux parcours d'entraînement et d'autre part, le début de la deuxième partie de la piste, en l'occurrence Mme Delphine X...épouse J..., de pouvoir à la fois contrôler le déroulement des entraînements en amont et la descente libre desdits participants sur la deuxième partie de piste en aval, n'étant par ailleurs pas contesté que de sa place, cette monitrice tout comme ses deux autres collègues ne pouvaient avoir une vue continue sur ladite partie ;- ni enfin, que le jeune âge de ces participants ne rendait pas imprévisible la possibilité pour ces derniers, comme le relèvent à bon droit les premiers juges, de ne point se conformer aux consignes de sécurité qui leur avaient été données pour rejoindre en ski libre le départ des remontées mécaniques.

D'ailleurs, ni les époux Y..., ni l'association Ski Club Les Angles ne viennent sérieusement discuter le rapport d'accident établi par le moniteur Sébastien C...(pièce 2 des moniteurs intimés) aux termes duquel il est fait état des préconisations données aux participants pour éviter tout sinistre, à savoir : " Les consignes de sécurité étaient données en groupe au début de la séance aux enfants, qui étaient de skier dans le tracé sur la partie haute et de travailler en ski libre avec mot illisible sur partie basse " milieu de piste sans sortir des pistes " (sic).

Dans ces conditions, l'association Ski Club Les Angles ne saurait s'exonérer de toute responsabilité, en se retranchant derrière la faute de la victime, voire celle des moniteurs, comme examinées ci-après, alors même que la preuve est rapportée qu'en sa qualité d'organisatrice de la séance d'entraînement, elle n'a pas été en mesure de prévoir les moyens nécessaires et adéquats pour permettre une surveillance efficace et adaptée de la descente libre et de s'assurer du respect des consignes données pour effectuer cette descente, eu égard au jeune âge des enfants.
Aussi, par des motifs partiellement adoptés et ajoutés, la cour confirmera le jugement déféré en ce qu'il a retenu la responsabilité de l'association Ski Club Les Angles, in solidum avec son assureur, la SA AXA France, dans l'accident dont Romain Y...a été victime.
Sur la faute de la victime :
Pour écarter la faute de la victime, les premiers juges ont, en substance, rappelé que celle-ci doit s'apprécier au regard du jeune âge de l'enfant et que si l'enquête de gendarmerie laisse supposer, encore qu'il n'y ait aucune certitude sur ce point, qu'au moment de l'accident, l'enfant skiait hors piste en dépit des consignes qui lui avaient été données, il ne disposait pas de la maturité suffisante pour mesurer les conséquences qui pouvaient en découler.
Toutefois, ainsi que le soulignent à bon droit l'association appelante et son assureur, la minorité ne constitue pas une cause d'exonération de responsabilité en matière civile tandis que la faute d'un mineur peut être retenue à son encontre même s'il n'est pas capable de discerner les conséquences de son acte.
Au cas d'espèce, il n'est pas sérieusement discuté que Romain Y..., bien que seulement âgé de 9 ans, possédait un très bon niveau de ski et à ce titre, en tant que participant à cet entraînement, était en mesure de maîtriser sa vitesse comme sa direction, qui plus est sur une piste " bleue ", largement à portée de son niveau de ski.
Il n'est pas non plus contesté que Romain Y...était en parfaite capacité, même à son âge, de comprendre les consignes qui avaient été données à chacun des participants de la séance d'entraînement et de connaître, par la pratique du ski qui était la sienne, les risques et autres dangers de ce sport.
Dès lors, eu égard à la configuration des lieux, aux constatations des enquêteurs et au témoignage de son camarade d'entraînement, il demeure établi que Romain Y...s'est affranchi des consignes qui avaient été ainsi données, y compris de celles élémentaires de sécurité, en décidant d'aller " faire des bosses ", peu important le motif, et pour ce faire, de skier en bord de la piste pourtant large de 35 mètres, en allant " assez vite ", au point de ne plus avoir le contrôle de sa direction et de percuter un arbre situé en limite de cette piste.
Ce comportement est ainsi constitutif d'une faute imputable à la victime et de nature, en l'état des circonstances de la cause, de réduire son droit à indemnisation à concurrence de 20 %.
Le jugement déféré sera donc infirmé en ce sens.
Sur la responsabilité des moniteurs :
Au regard de leur obligation de sécurité de moyens et de leur activité libérale exercée ainsi en toute indépendance, la cour ne peut que reprendre à son compte la motivation pertinente des premiers juges qui n'ont retenu à l'encontre des trois moniteurs intimés aucun manquement aux règles de sécurité, tant au titre de la sécurité individuelle des enfants qu'au titre de la sécurisation des pistes.
De même, compte tenu des moyens mis à leur disposition par l'association Ski Club Les Angles et des consignes de sécurité qui ont été prodiguées par eux aux participants à la séance d'entraînement, ces moniteurs ne sauraient être tenus responsables d'une quelconque faute de surveillance, voire d'un manquement à leur obligation de vigilance, envers le groupe de skieurs et plus particulièrement, envers le jeune Romain Y....
Dans ces conditions, par des motifs adoptés et ajoutés, la cour confirmera le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les époux Y...de leur demande à l'encontre de ces trois moniteurs.
Sur les préjudices invoqués :
Tenant les éléments de la cause, les documents médicaux produits aux débats, la cour confirmera le jugement déféré en ce qu'il a ordonné avant dire droit une mesure d'expertise médicale de Romain Y....
Il en sera de même du principe de l'allocation et des montants des provisions retenues par les premiers juges, à valoir sur les préjudices respectifs de cette victime et de chacun de ses parents, victimes par ricochet, sauf à les réduire, compte tenu de la faute retenue à l'encontre de la victime Romain Y...à concurrence de 20 %, aux sommes respectives de 16. 000 ¿ et 4. 000 ¿.
Le jugement déféré sera infirmé en ce sens.
En revanche, le rejet de la demande de provision formulée au nom de l'enfant Bryan sera confirmé en l'absence de justification d'un préjudice subi par lui en sa qualité de victime par ricochet, étant relevé que le seul document produit à l'appui de cette demande consiste en un compte-rendu d'un bilan orthophonique en date du 30 avril 2008 qui à aucun moment, ne fait référence à des quelconques difficultés de cet enfant, susceptibles d'être liées à l'accident dont son frère Romain a été victime le 28 février 2006.
Sur les autres demandes :
En équité, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, une somme de 2. 000 ¿ sera allouée aux époux Y..., agissant à titre personnel et ès qualités de représentants légaux de leur fils, et celle de 2. 000 ¿ à M. Sébastien C..., M. Christian F...et Mme Delphine X...épouse J..., pris ensemble, en remboursement de leurs frais irrépétibles respectifs en cause d'appel tandis que la demande de l'association Ski Club Les Angles et de la SA AXA France sur le même fondement sera rejetée.
L'association Ski Club Les Angles et la SA AXA France seront tenues, in solidum, aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,
Confirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne la détermination de la faute de la victime et le montant des provisions allouées à Romain Y...et à chacun de ses parents, victimes par ricochet,
Statuant à nouveau sur ces chefs infirmés et y ajoutant,
Dit que Romain Y...a commis une faute d'imprudence de nature à réduire de 20 % son droit à indemnisation et celui des victimes par ricochet,
Ramène les condamnations prononcées in solidum à titre provisionnel à l'encontre de l'association Ski Club Les Angles et de la SA AXA France aux sommes suivantes de :-16. 000 ¿ au profit des époux Y..., agissant ès qualités de représentants légaux de leur fils mineur Romain Y..., à valoir sur la liquidation du préjudice de ce dernier,-4. 000 ¿ au profit de chacun des époux Y..., agissant à titre personnel à valoir sur leur propre préjudice,

Condamne in solidum l'association Ski Club Les Angles et la SA AXA France à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, les sommes suivantes :-2. 000 ¿ aux époux Y..., pris ensemble,-2. 000 ¿ à M. Sébastien C..., M. Christian F...et Mme Delphine X...épouse J..., pris ensemble,

Déboute l'association Ski Club Les Angles et la SA AXA France de leur demande sur le même fondement,
Déclare commun le présent arrêt à l'organisme social, la RAM Gamex,
Condamne in solidum l'association Ski Club Les Angles et la SA AXA France aux dépens d'appel, avec recouvrement direct au profit de Maître Morgane Salvignol et de la SCP Garrigue, avocats, par application de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER. LE PRÉSIDENT.

JM


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1o chambre section d
Numéro d'arrêt : 12/03542
Date de la décision : 10/09/2013

Analyses

La minorité ne constitue pas une cause d'exonération de responsabilité en matière civile tandis que la faute d'un mineur peut être retenue à son encontre même s'il n'est pas capable de discerner les conséquences de son acte. A commis une faute de nature à réduire son droit à indemnisation à concurrence de 20% un enfant de 9 ans possédant un très bon niveau de ski qui s'est affranchi des consignes élémentaires de sécurité données lors d'un entraînement en décidant d'aller ¿faire des bosses¿ et de skier en bord de la piste pourtant large de 35 mètres, en allant ¿assez vite¿, au point de ne plus avoir le contrôle de sa direction et de percuter un arbre situé en limite de cette piste.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Perpignan, 28 février 2012


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2013-09-10;12.03542 ?
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