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16/07/2013 | FRANCE | N°12/05110

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1o chambre section d, 16 juillet 2013, 12/05110


Grosse + copie délivrées le à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1o Chambre Section D
ARRÊT DU 16 JUILLET 2013
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 05110

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 MARS 2012 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE RODEZ No RG 10/ 01148

APPELANTES :

Madame Anne-Marie X... née le 11 Novembre 1942 à MILLAU (12100) de nationalité Française ...12500 ESPALION représentée par Me Philippe COUTURIER de la SELARL SELARL COUTURIER, avocats au barreau d'AVEYRON

SA MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD pris

e en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège. 14 Bd Marie e...

Grosse + copie délivrées le à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1o Chambre Section D
ARRÊT DU 16 JUILLET 2013
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 05110

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 MARS 2012 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE RODEZ No RG 10/ 01148

APPELANTES :

Madame Anne-Marie X... née le 11 Novembre 1942 à MILLAU (12100) de nationalité Française ...12500 ESPALION représentée par Me Philippe COUTURIER de la SELARL SELARL COUTURIER, avocats au barreau d'AVEYRON

SA MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège. 14 Bd Marie et Alexandre Oyon 72030 LE MANS CEDEX 9 représentée par Me Philippe COUTURIER de la SELARL SELARL COUTURIER, avocats au barreau d'AVEYRON

INTIMEES :
Madame Marthe Thérèse Y...née le 14 Mars 1939 à GRAULHET (81300) de nationalité Française ...81800 LOUPIAC représentée par Me Joséphine HAMMAR, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et assistée de Me Céline DELAGNEAU de la SCP COMOLET, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant,

CPAM DU TARN prise en la personne de son Directeur en exercice, domicilié en cette qualité au siège social sis
5 Place Lapérouse 81000 ALBI représentée par la SCP PHILIPPE SENMARTIN ET ASSOCIES, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants et assistée de Me GRECIANO substituant Me Alain COMBAREL, avocat au barreau d'ALBI, avocat plaidant,

ORDONNANCE DE CLÔTURE du 06 Mai 2013

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 MAI 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jacques MALLET, Président, chargé du rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Jacques MALLET, Président Madame Chantal RODIER, Conseiller Mme Françoise VIER, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Andrée ALCAIX
L'affaire, mise en délibéré au 2 JUILLET 2013, a été prorogée au 9 JUILLET 2013 puis prorogée au 16 juillet 2013.
ARRET :
- contradictoire
-prononcé en audience publique par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile ;
- signé par Monsieur Jacques MALLET, Président, et par Mme Andrée ALCAIX, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *
*

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 9 février 2009, vers 0 h 30, sur le viaduc de la Brienne-deux fois deux voies sur la commune de Luc-survenait un accident de la circulation impliquant d'une part, le véhicule de marque Opel Corsa conduit par Mme Anne-Marie X... (Mme X...) et assuré auprès de la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD (ci-après, MMA) et d'autre part, le véhicule poids-lourd appartenant à la société de transport Latour, conduit par M. Daniel Y...et assuré auprès de la compagnie Aréas Dommages.
Mme X... exposait avoir glissé sur la chaussée verglacée et s'être immobilisée. Son véhicule était alors percuté par l'ensemble routier conduit par M. Y..., puis arrachait les glissières et les caillebotis séparant les deux voies de circulation pour s'immobiliser sur la voie opposée.
Suite au choc violent, Mme X... et sa passagère étaient grièvement blessée.
Une fois son ensemble routier immobilisé, M. Y...descendait de son véhicule et faisait appel aux secours, tout en se dirigeant vers le véhicule qu'il venait de heurter. Tout en étant en conversation téléphonique avec le service de secours et alors qu'il traversait la chaussée dont les grilles de protection séparant les deux sens de circulation avaient été arrachées, M. Y...faisait une chute mortelle d'une trentaine de mètres.
Suite au refus par la société MMA de prendre en charge les dommages subis par les ayants droit de M. Daniel Y..., Mme Marthe Thérèse Y...délivrait assignation à Mme X..., à son assureur MMA et à la caisse primaire d'assurance maladie d'Albi (en réalité, CPAM du Tarn) devant le tribunal de grande instance de Rodez pour obtenir réparation de ses préjudices-financier et moral.
Par jugement contradictoire du 23 mars 20112, le tribunal de grande instance de Rodez a :
¿ dit que Daniel Y...est décédé à l'occasion d'un accident de la circulation dans lequel le véhicule conduit par Mme X..., assurée auprès des MMA, était seul impliqué, Daniel Y...ayant la qualité de piéton au moment des faits où il est décédé, ¿ dit en conséquence que Mme X... et son assureur, les MMA, sont tenus à la réparation de l'entier préjudice résultant de cet accident, ¿ condamné d'ores et déjà les défenderesses à porter et à payer à Mme Y...en réparation de son préjudice moral (20 000 ¿ selon le montant visé dans les motifs mais non repris dans le dispositif), ¿ sursis à statuer sur le préjudice économique, ¿ ordonné une expertise et désigné à cet effet Mme Christine C..., en qualité d'expert avec la mission telle que définie au dispositif du jugement déféré et auquel il est expressément renvoyé ; ¿ renvoyé l'affaire devant le juge de la mise en état.

Le 3 juillet 2012, Mme X... et la SA MMA ont relevé appel de ce jugement.
Vu les dernières conclusions déposées : * le 25 septembre 2012 par Mme X... et la SA MMA ; * le 30 novembre 2012 par Mme Y...; * le 3 décembre 2012 par la CPAM du Tarn.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 mai 2013.
******
Mme X... et la SA MMA concluent à la réformation dans toutes ses dispositions du jugement déféré, demandant à la cour de : à titre principal, débouter Mme Y...de l'ensemble des ses prétentions, motif pris que M. Y...n'a pas droit à indemnisation en sa qualité de conducteur d'un véhicule impliqué et responsable d'un accident de circulation ayant commis les fautes de défaut de maîtrise et d'imprudence, sans avoir perdu la qualité de conducteur lorsqu'il est descendu de son véhicule avant de chuter mortellement alors qu'il n'avait pas pris la précaution élémentaire qu'il pouvait traverser la chaussée en toute sécurité ; subsidiairement, si par impossible la cour n'excluait pas le droit à indemnisation de M. Y...du fait des fautes commises par lui mais limitait seulement sa responsabilité,

rejeter la demande d'indemnisation au titre du préjudice économique comme infondée, ou la chiffrer à 30 892 ¿ avant abattement pour la part de responsabilité de M. Y...dans l'accident dont s'agit, à savoir 80 % à la charge de la victime et 20 % à la charge de Mme X... et de son assureur MMA ; fixer à 15 000 ¿ le montant de la réparation du préjudice moral avant application des mêmes taux de responsabilité de M. Y...; condamner Mme Y...au paiement de la somme de 2 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec application de l'article 699 du même code.

Mme Y...demande à la cour, au principal, de confirmer le jugement déféré sur le principe de l'implication du véhicule de Mme X... dans l'accident de circulation à l'occasion duquel M. Y...est décédé et de condamner solidairement Mme X... et son assureur, les MMA, à lui verser la somme de 118 107 ¿ en réparation de son préjudice financier. À titre subsidiaire, elle sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a sursis à statuer sur le préjudice économique et ordonné une expertise. En tout état de cause, elle conclut à la condamnation des appelantes à lui verser la somme de 30 000 ¿ en réparation de son préjudice moral, celle de 2 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

La CPAM du Tarn demande à la cour de constater le rapprochement des parties et l'accord de la SA MMA pour prendre en charge les débours de la caisse avec toutes conséquences de droit et de dire qu'elle n'a pas à supporter les dépens, sollicitant le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
SUR CE :
Sur le droit à indemnisation de l'ayant droit de M. Y...:
En application des articles 1 et 3 de la loi no 85-677 du 5 juillet 1985, les victimes d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur, hormis les conducteurs desdits véhicules, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l'exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l'accident et dans tous les cas, lorsqu'elles sont âgées de moins de seize ans ou de plus de soixante-dix ans, à moins que la victime n'ait volontairement recherché le dommage qu'elle a subi.
Au cas d'espèce, il n'est pas sérieusement discuté que le véhicule de Mme X... est impliqué dans l'accident survenu le 9 février 2009 sur le Viaduc de la Brienne situé sur la commune de Luc et qu'à ce titre, la loi no 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation doit recevoir application.
Le fait que la victime, M. Y..., ait été conducteur de l'ensemble routier qui a percuté le véhicule automobile de Mme X..., lui-même immobilisé sur la chaussée à la suite d'un défaut de maîtrise, ne saurait impliquer qu'il avait toujours cette qualité au moment où il a fait une chute mortelle du viaduc, faisant que Mme X... et son assureur seraient en droit d'invoquer une éventuelle faute de ce conducteur ayant pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages subis par son ayant droit, par application des articles 4 et 6 de ladite loi.
Bien au contraire, il ressort de la conversation enregistrée par le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de Rodez comme des constatations sur les lieux de l'accident que : M. Y...avait nécessairement quitté son véhicule-ensemble routier-après qu'il a " accroché une voiture " (celui de Mme X...) et qu'il s'est immobilisé sur la voie de circulation réservée aux véhicules circulant en sens inverse ; d'évidence, alors qu'il était en communication téléphonique avec le SDIS au moyen de son téléphone mobile, il se dirigeait vers le lieu où le véhicule automobile de Mme X... se trouvait immobilisé, pour porter secours aux victimes, ce qui l'obligeait à traverser la zone des séparations des voies ; lors de cette traversée, il chutait dans le vide laissé par l'arrachage des caillebotis de sécurité, étant observé que les lieux étaient dans l'obscurité totale.

Aussi, c'est à bon droit que le premier juge a retenu qu'au moment de sa chute mortelle, M. Y...avait la qualité de piéton. En effet, la victime était complètement descendue de son véhicule et se déplaçait pour porter secours.
Par ailleurs, il n'est pas plus contestable que la mort de M. Y...est une cause directe et certaine de l'accident dans lequel le véhicule automobile de Mme X... est impliqué, l'arrachage des caillebotis par l'ensemble routier conduit par la victime étant assurément une des conséquences de cet accident.
Contrairement à ce que soutiennent Mme X... et son assureur, le débat sur les éventuelles fautes commises par M. Y...est inopérant dès lors que cette victime n'avait plus la qualité de conducteur au moment de sa chute mais celle de piéton et qu'il n'est pas rapporté que cette victime aurait volontairement recherché le dommage qu'elle a subi, outre que née le 19 janvier 1938, elle était alors âgée de plus de soixante-dix ans au moment de l'accident.
Par ces motifs ajoutés et adoptés, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré Mme X... et son assureur, les MMA, tenues à la réparation intégrale du préjudice résultant de cet accident et subi par l'ayant droit de la victime.
Sur le préjudice économique invoqué par Mme Y...:
Le premier juge a ordonné une expertise judiciaire, considérant, en substance, qu'en l'état des justificatifs produits et de la nécessité de rechercher l'ampleur de l'activité à laquelle se livrait la victime, il y avait lieu de recourir à une telle mesure d'instruction.
Nonobstant cette expertise ainsi ordonnée et dont la cour n'est pas en possession de l'éventuel rapport, Mme Y...sollicite la liquidation de son préjudice économique, ce à quoi Mme X... et son assureur opposent des modalités différentes quant au calcul de l'assiette des revenus.
D'évidence, les parties, à commencer par l'intimée, n'apportent pas d'éléments suffisants pour venir remettre en question l'expertise ordonnée sur ce chef de préjudice. La cour confirmera donc le jugement sur ce chef de demande et renverra les parties à mieux se pourvoir devant le premier juge après l'accomplissement des opérations d'expertise.
Sur le préjudice moral :
Il a été fait une juste appréciation du montant de ce préjudice fixé à 20 000 ¿ par le premier juge, sauf à compléter le jugement déféré en ce que ce montant a été omis dans le dispositif

bien que condamnant les " défenderesses " (Mme X... et les MMA) à réparer le préjudice moral de Mme Y....

Le jugement sera confirmé et complété en ce sens.
Sur les demandes accessoires :
En équité, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, une somme de 1 500 ¿ sera allouée à Mme Y...en remboursement de ses frais irrépétibles en cause d'appel tandis que la demande des parties appelantes sur le même fondement sera rejetée.
Mme X... et les MMA seront tenues in solidum au paiement des dépens d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
Le complétant et y ajoutant,
Dit que la condamnation de Mme X... et de son assureur, la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD, en réparation de préjudice moral de Mme Y..., est prononcée pour la somme de 20 000 ¿,
Condamne in solidum Mme X... et la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD à payer à Mme Y...la somme de 1 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Déboute Mme X... et la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD de leur demande sur le même fondement,
Renvoie, en tant que de besoin, les parties devant le premier juge pour qu'il soit statué sur le préjudice économique de Mme Y...après dépôt du rapport d'expertise judiciaire,
Déclare le présent arrêt commun à la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn,
Condamne in solidum Mme X... et la SA Mutuelles du Mans Assurances IARD aux dépens d'appel, avec recouvrement direct au profit de la SCP Senmartin, avocat, par application de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER. LE PRÉSIDENT.

JM/ AA


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1o chambre section d
Numéro d'arrêt : 12/05110
Date de la décision : 16/07/2013

Analyses

ACCIDENT DE LA CIRCULATION

Si le conducteur d'un véhicules impliqué dans un accident de la circulation est exclu par les articles 1 et 3 de la loi nº85-677 du 5 juillet 1985 de l'indemnisation des dommages résultant des atteintes à sa personne, en revanche, lorsqu'au moment de sa chute mortelle la victime était complètement descendue de son véhicule et se déplaçait pour porter secours, elle n'avait plus la qualité de conducteur mais celle de piéton, qualité entraînant dès lors la réparation intégrale du préjudice résultant de cet accident et subi par son ayant droit.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Rodez, 23 mars 2012


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2013-07-16;12.05110 ?
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