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08/01/2013 | FRANCE | N°12/01459

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Ct0606, 08 janvier 2013, 12/01459


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER 2o chambre
ARRET DU 08 JANVIER 2013
Grosse + copie délivrées le à
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 01459
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 FEVRIER 2012 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER No RG 12/ 00127

APPELANTE :
CARPIMKO-Organisme de Sécurité Sociale Caisse Autonome de Retraite et de Prévoyance des Infirmiers, Masseurs-Kinésithérapeutes, Pédicures-Podologues, Orthophonistes et Orthoptistes (CARPIMKO), une des dix sections professionnelle de la Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse d

es Professions Libérales instituée par l'article L 621 du Livre VI du Code de la Sécur...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER 2o chambre
ARRET DU 08 JANVIER 2013
Grosse + copie délivrées le à
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 01459
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 FEVRIER 2012 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER No RG 12/ 00127

APPELANTE :
CARPIMKO-Organisme de Sécurité Sociale Caisse Autonome de Retraite et de Prévoyance des Infirmiers, Masseurs-Kinésithérapeutes, Pédicures-Podologues, Orthophonistes et Orthoptistes (CARPIMKO), une des dix sections professionnelle de la Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse des Professions Libérales instituée par l'article L 621 du Livre VI du Code de la Sécurité Sociale concernant l'Allocation Vieillesse des Travailleurs Non Salariés. 6, Place Charles de Gaulle 78882 SAINT QUENTIN EN YVELINES représentée par la SCP LAFONT GUIZARD CARILLO LAFONT GUIZARD, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocats postulants assistée de Me Sonia BRETON (SCP LAFONT), avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

INTIMEES :
Madame Laurence X... épouse Y... née le 03 Mai 1966 à MONTCY NOTRE DAME (08090) de nationalité Française...-34140 MEZE et actuellement... 34120 TOURBES Assignée le 20 avril 2012 et le 15 Mai 2012- A domicile par dépôt de copie à l'étude
Maître Z... Philippe ès qualités de représentant des créanciers de Mme Laurence X... épouse Y... ... 34000 MONTPELLIER représentée par la SCP GILLES ARGELLIES, FABIEN WATREMET, avocats au barreau de MONTPELLIER
ORDONNANCE DE CLOTURE DU 06 Novembre 2012
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 NOVEMBRE 2012, en chambre du conseil, Monsieur Jean-Luc PROUZAT, conseiller, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :
Monsieur Daniel BACHASSON, président Monsieur Hervé CHASSERY, conseiller Monsieur Jean-Luc PROUZAT, conseiller qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SABATON
Ministère public : L'affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis.
ARRET :
- de défaut-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;- signé par Monsieur Daniel BACHASSON, président, et par Madame Sylvie SABATON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS et PROCEDURE-MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES :
Par jugement du 6 juillet 2010, le tribunal de grande instance de Montpellier a ouvert la procédure de redressement judiciaire de Laurence Y..., exerçant une activité d'infirmière libérale, et désigné M. Z... comme mandataire judiciaire ; à l'issue de la période d'observation, le plan de redressement de celle-ci a été arrêté par un jugement du 15 décembre 2011, désignant M. Z... en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
La caisse autonome de retraite et de prévoyance des infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et orthoptistes (la Carpimko), qui avait déclaré une créance de 44 503, 33 €, a saisi, le 20 octobre 2010, le juge-commissaire au redressement judiciaire de Mme Y... d'une requête tendant à obtenir le paiement privilégié de la somme de 4 970, 38 €, correspondant aux cotisations de l'année 2010, sur le fondement des articles L. 243-4 du code de la sécurité sociale et L. 625-8 du code de commerce.
Par ordonnance du 30 décembre 2011, le juge-commissaire a fait droit à la requête.
Sur le recours formé par M. Z... ès qualités, le tribunal de grande instance de Montpellier a, par jugement du 16 février 2012 :
- infirmé l'ordonnance du juge-commissaire,- dit qu'en application de l'article 2332-2 du code civil, le privilège de la Carpimko vient au même rang que le privilège des salariés visé au 4o de l'article 2331 du même code,- dit que la Carpimko ne peut bénéficier des dispositions de l'article L. 625-8 du code de commerce qui, en tout état de cause, ne bénéficie qu'aux créances des salariés garanties par un super privilège établi au code du travail.
La Carpimko a régulièrement relevé appel de ce jugement en vue de son infirmation.
Elle demande à la cour de confirmer l'ordonnance rendue, le 30 décembre 2011, par le juge-commissaire et d'ordonner, en conséquence, le paiement prioritaire de sa créance privilégiée relative aux cotisations 2010 à hauteur de 4 970, 38 €.
Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :
- l'article L. 243-4 du code de la sécurité sociale, qui renvoie à l'article L. 625-8 du code de commerce, lui permet, en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, d'obtenir le règlement, sur les premières rentrées de fonds, de sa créance privilégiée, correspondant à une année de cotisations,
- la somme privilégiée au titre des cotisations de retraite et de prévoyance doit ainsi être soustraite de la première annuité du plan,
- ce paiement prioritaire se justifie par la couverture sociale, dont le professionnel libéral doit profiter (retraite et versement d'indemnités journalières ou d'une rente), ce qui confirme le caractère alimentaire des cotisations.
M. Z..., ès qualités, conclut à la confirmation du jugement.
Il soutient que :
- l'article L. 243-4 du code de la sécurité sociale, inclus dans la partie du code régissant le régime général, n'est pas applicable au régime des travailleurs indépendants,
- le privilège institué par ce texte, qui est un privilège mobilier, ne peut être confondu avec le privilège général visé à l'article L. 625-8 du code de commerce, correspondant au super privilège des salaires, et est de même rang que le privilège de l'article 2331 (4o) du code civil,
- en toute hypothèse, les modalités particulières de paiement prévues par l'article L. 625-8 ne bénéficient qu'aux créances salariales et ne peuvent être étendues à d'autres créances, même de rang identique,
- enfin, ce texte, applicable durant la période d'observation, ne l'est plus une fois arrêté le plan de redressement.
Le ministère public déclare s'en rapporter à justice.
Citée à deux reprises, par actes d'huissier de justice des 20 avril et 15 mai 2012 délivrés à domicile, Mme Y... n'a pas constitué avocat.
L'arrêt sera donc rendu par défaut en application de l'article 474, alinéa 2, du code de procédure civile.
MOTIFS de la DECISION :
Il résulte de l'article L. 623-1 du code de la sécurité sociale que, pour les professions non agricoles, sont notamment applicables aux organismes et personnes entrant dans le champ d'application des titres II, III et IV du présent livre (livre 6 : Régimes des travailleurs non salariés) les dispositions de l'article L. 243-4 ; il ne peut donc être soutenu que la Carpimko, bien qu'étant l'une des sections professionnelles de la caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales relevant du titre IV du livre 6, ne peut se prévaloir de ce texte.
Reste à savoir si la Carpimko peut bénéficier, dans le cadre d'une procédure collective, du paiement préférentiel prévu à l'article L. 625-8 du code de commerce, par renvoi de l'article L. 243-4 susvisé.
L'article L. 243-4, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale dispose que le paiement des cotisations et des majorations et pénalités de retard est garanti pendant un an à compter de leur date d'exigibilité, par un privilège sur les biens meubles du débiteur, lequel privilège prend rang concurremment avec celui des gens de service et celui des salariés établis respectivement par l'article 2331 du code civil et les articles L. 625-7 et L. 625-8 du code de commerce.
Ainsi, l'article 2331 (4o) du code civil énonce notamment que les rémunérations des gens de services pour l'année échue et l'année courante bénéficient d'un privilège général sur les meubles, au même titre que les rémunérations pour les six derniers mois des salariés et que diverses indemnités dues à ceux-ci au titre du contrat de travail (indemnité due en cas d'inobservation du délai-congé, indemnités dues pour les congés payés, indemnités de licenciement …).
Les articles L. 143-10 (L. 3253-2 et L. 3253-3), L. 143-11 (L. 3253-4), L. 742-6 et L. 751-15 (L. 7313-8) du code du travail, qui sont visés aux articles L. 625-7 et L. 627-8 du code de commerce, instituent, en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, une garantie de paiement ayant pour objet les rémunérations de toute nature (salaires, appointements ou commissions et leurs accessoires) dues aux salariés pour les 60 derniers jours de travail, les indemnités de congés payés jusqu'à concurrence d'un plafond identique à celui établi pour une période de 30 jours de rémunération par l'article L. 3253-1 et les rémunérations de toute nature dues aux VRP au titre des 90 derniers jours de travail.
Ces créances dites « super privilégiées » doivent être payées avant toute autre créance privilégiée, même postérieure au jugement d'ouverture, dans les dix jours du prononcé du jugement, sur les fonds disponibles et, à défaut, sur les premières rentrées de fonds ; l'article L. 625-8 du code de commerce, qui institue ce paiement préférentiel par exception au principe de l'interdiction du paiement des créances nées avant l'ouverture de la procédure, s'applique exclusivement aux créances résultant du contrat de travail, le fondement de ce texte résidant dans le caractère alimentaire de celles-ci, nécessitant leur paiement immédiat et par priorité sur tout autre créance.
Les créances des salariés garanties par le privilège prévue à l'article 2331 (4o) du code civil et le superprivilège établi aux articles L. 3253-2, L. 3253-3, L. 3253-4 et L. 7313-8 du code du travail ne peuvent, en outre, faire l'objet de remises ou de délais dans le cadre d'un plan, conformément à l'article L. 626-20 I du code de commerce.
La finalité de l'article L. 243-4 du code de la sécurité sociale, dont se prévaut la Carpimko, est d'instaurer en faveur des organismes de sécurité sociale, pour le paiement des créances de cotisations et de majorations et pénalités de retard exigibles depuis moins d'un an, un privilège général sur les meubles du débiteur, d'un rang identique à celui du privilège général des salaires de l'article 2331 (4o) du code civil ; l'article 2332-2 du même code, traitant du classement des privilèges généraux, dispose ainsi que le privilège des caisses de sécurité sociale vient au même rang que le privilège des salariés ; l'article L. 243-4 du code de la sécurité sociale ne saurait donc avoir pour effet, par le simple visa de l'article L. 625-8 du code de commerce – l'article L. 625-7 également mentionné se borne à rappeler l'existence du privilège et du super-privilège garantissant les créances salariales –, de faire bénéficier les cotisations sociales du paiement préférentiel qu'il institue, en cas d'ouverture d'une procédure collective, en faveur des créances superprivilégiées résultant du contrat de travail, dont la nature et le montant sont d'ailleurs plus restreints que les créances couvertes par le privilège général des salaires.
Le droit au paiement immédiat, dès l'ouverture de la procédure collective, reconnu aux salariés pour leurs créances super-privilégiées, est justifié eu égard au caractère alimentaire de ces créances, qui ne peut être reconnu aux cotisations recouvrées par la Carpimko au titre du régime de l'assurance vieillesse et invalidité-décès auquel se trouvent assujettis les professionnels libéraux ; le dispositif mis en œ uvre pour le paiement des créances superprivilégiées tend, en effet, non seulement à assurer aux salariés, qui en bénéficient, une sûreté de premier plan dans l'ordre des privilèges, mais aussi à permettre le règlement immédiat de leurs créances sur les fonds disponibles dans les dix jours du prononcé du jugement d'ouverture et, à défaut de disponibilités, sur les premières rentrées de fonds ; un tel règlement immédiat ne saurait bénéficier à la Carpimko, dont la créance de cotisations, sans rapport avec l'exécution d'un contrat de travail, ne peut être assimilée, même accessoirement, à une créance salariale super-privilégiée, en dépit du privilège dont elle se trouve assortie.
La Carpimko est dès lors soumise, comme les autres créanciers privilégiés, aux modalités d'apurement du passif, telles qu'elles sont définies dans le jugement du 15 décembre 2011 arrêtant le plan de Mme Y... ; hors le cas des créances de faible montant visées au II de l'article L. 626-20 du code de commerce, il résulte des dispositions combinées de l'article L. 243-5 du code de la sécurité sociale, applicable par renvoi de l'article L. 623-1, et de l'article L. 626-20 I du code de commerce que les pénalités, majorations de retard et frais de poursuites dus à la caisse par le redevable à la date du jugement d'ouverture sont remis et que les cotisations sociales peuvent faire l'objet de délais dans le cadre du plan, à la différence des créances salariales.
Le jugement entrepris, qui, pour infirmer l'ordonnance du juge-commissaire, a considéré, d'une part, que le privilège de la Carpimko vient au même rang que le privilège des salariés visé à l'article 2331 (4o) du code civil et, d'autre part, que cet organisme de sécurité sociale ne peut bénéficier des dispositions de l'article L. 625-8 du code de commerce, doit en conséquence être confirmé en toutes ses dispositions.
Succombant sur son appel, la Carpimko doit être condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Montpellier en date du 16 février 2012,
Condamne la Carpimko aux dépens d'appel, lesquels seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT. JLP


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Ct0606
Numéro d'arrêt : 12/01459
Date de la décision : 08/01/2013

Analyses

L'article L. 243-4 du code de la sécurité sociale, instaure en faveur des organismes de sécurité sociale, pour le paiement des créances de cotisations et de majorations et pénalités de retard exigibles depuis moins d'un an, un privilège général sur les meubles du débiteur, d'un rang identique à celui du privilège général des salaires de l'article 2331 (4º) du code civil ; l'article 2332-2 du même code, traitant du classement des privilèges généraux, dispose ainsi que le privilège des caisses de sécurité sociale vient au même rang que le privilège des salariés ; l'article L. 243-4 du code de la sécurité sociale ne saurait donc avoir pour effet, par le simple visa de l'article L. 625-8 du code de commerce, de faire bénéficier les cotisations sociales du paiement préférentiel qu'il institue, en cas d'ouverture d'une procédure collective, en faveur des créances super-privilégiées résultant du contrat de travail, dont la nature et le montant sont d'ailleurs plus restreints que les créances couvertes par le privilège général des salaires. Le droit au paiement immédiat, dès l'ouverture de la procédure collective, reconnu aux salariés pour leurs créances super-privilégiées, est justifié eu égard au caractère alimentaire de ces créances, qui ne peut être reconnu aux cotisations recouvrées par des organismes de sécurité sociale.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Montpellier, 16 février 2012


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2013-01-08;12.01459 ?
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