COUR D'APPEL DE MONTPELLIER4ème chambre sociale
ARRÊT DU 30 Novembre 2011
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/08883
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 DECEMBRE 2009 CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEZIERS No RGF08/183
APPELANT :
Monsieur Bernard X......34120 CASTELNAU DE GUERSReprésentant : Me Marc BRINGER (avocat au barreau de BEZIERS)
INTIMEE :
Société GEOCOTON (ANCIENNEMENT SA DAGRIS)prise en la personne de son représentant légal36 Avenue HOCHE75008 PARISReprésentant : Me AMOREVA substituant la AARPI FRIEH-BOUHENIC (avocats au barreau de PARIS)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 OCTOBRE 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Pierre D'HERVE, Président de ChambreMonsieur Richard BOUGON, ConseillerMme Françoise CARRACHA, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Dominique VALLIER
ARRÊT :
- Contradictoire.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de Procédure civile ;
- signé par Monsieur Pierre D'HERVE, Président de Chambre, et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
** *FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES
Le 14 décembre 2009 le Conseil de prud'hommes de Béziers, saisi par M. Bernard X... le 25 mars 2008, déboute ce dernier de l'intégralité de ses demandes en le condamnant aux dépens et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code procédure civile.
Le 23 décembre 2009 M. Bernard X... a régulièrement interjeté appel du jugement du Conseil de prud'hommes et il sollicite, au visa, notamment de la jurisprudence de la Cour de cassation du 19 septembre 2007 et de l'arrêt de la Chambre Sociale de la Cour d'Appel de Paris du 23 mars 2011, la condamnation de la société Dagris, outre aux entiers dépens, à lui payer 49.690,90 euros au titre des dommages et intérêts pour perte de droits à la retraite pour la période du 8 juin 1972 au 31 juillet 1989 avec intérêts de droit à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes, 10.000 euros au titre du préjudice moral pour défaut d'information et au titre de la résistance abusive et 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Geocoton venant aux droits de la société Dagris demande la confirmation de la décision déférée.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives des parties, la cour se réfère au jugement du Conseil de Prud'hommes et aux conclusions des parties qui ont expressément déclaré s'y rapporter lors des débats du 27 octobre 2011.
MOTIFS DE LA DÉCISION
M. Bernard X... a été engagé à compter du 8 juin 1972 en qualité de chef de secteur par la société Compagnie française pour le développement des fibres textiles (CFDT) devenue la société Développement des agro-industries du Sud dite Dagris puis la société Geocoton pour des emplois situés à l'étranger, du 8 juin 1972 au 16 juin 1975 en République de Centre Afrique, du 17 juin 1975 au 13 septembre 1976 au Zaïre, du 14 septembre 1976 au 19 février 1979 au Cameroun, du 20 février 1979 au 10 février 1981 au Niger et du 11 février 1981 au 31 juillet 1989 en République de Centre Afrique, date à laquelle son contrat a pris fin par un licenciement.
Il est établi et d'ailleurs non contesté que :
- pour toutes ces périodes où M. Bernard X... travaille à l'étranger en qualité d'expatrié, le salarié est socialement affilié selon la législation du pays d'exercice et ne relève pas du régime de sécurité sociale français, notamment du régime de retraite obligatoire,
- depuis la loi du 31 décembre 1976 (codifié dorénavant au troisième alinéa de l'article L 762-1 du code de la sécurité sociale) les travailleurs salariés de nationalité française qui exercent leur activité dans un pays étranger et qui ne sont pas soumis à la législation française de sécurité sociale en vertu d'une convention internationale ou de l'article L. 761-2 ont la faculté d'adhérer à l'assurance volontaire contre le risque vieillesse prévue à l'article L. 742-1.
- depuis la loi 13 juillet 1984 (codifié dorénavant au quatrième alinéa de l'article L 762-1 du code de la sécurité sociale) ces mêmes travailleurs peuvent demander aux entreprises de droit français qui les emploient à l'étranger d'effectuer pour leur compte les formalités nécessaires à l'adhésion à l'assurance volontaire contre le risque vieillesse prévue à l'article L. 742-1.
Contrairement à ce que prétend M. Bernard X... ce dispositif ne crée aucune obligation légale pour la société Geocoton d'informer M. Bernard X... de sa possibilité d'adhérer à l'assurance volontaire contre le risque vieillesse.
Ensuite M. Bernard X... précise qu'en application des dispositions des conventions collectives successivement applicables, les conventions syntec (Syndicats des Sociétés d'Etudes et de Conseils) du 15 avril 1969 étendue le 20 avril 1973 puis du 15 décembre 1987 étendue le 13 avril 1988 (convention collective nationale applicable au personnel des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils), la société Geocoton avait l'obligation conventionnelle de l'affilier à l'assurance volontaire contre le risque vieillesse.
Or les dispositions du titre IX (articles 64 à 73) de la convention collective nationale du 15 décembre 1987 étendue par arrêté du 13 avril 1988 publié au journal officiel du 27 avril 1988 relatives à l'ordre de mission- avenant au contrat de travail constituant un préalable à l'envoi en mission hors de France métropolitaine ne peuvent s'appliquer au cas de M. Bernard X... puisque sa dernière mission a débuté le 11 février 1981, antérieurement à l'entrée en vigueur du texte.
Ensuite la société Geocoton expose que la convention collective nationale applicable au personnel des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 avril 1969 étendue par arrêté du 20 avril 1973 (parue au journal officiel du 15 mai 1973 des pages 5353 à 5380) n'est pas applicable à la situation de M. Bernard X... puisque la CFDT à l'époque n'était pas soumise légalement à l'obligation de l'appliquer dans la mesure où cette convention collective ne s'appliquait qu'aux membres signataires et aux adhérents aux organisations signataires, ce qui n'était pas le cas de CFDT dont l'activité (production et commercialisation de fibres de coton, vente de produits oléagineux et fourniture de prestations logistiques), de plus, ne relevait pas du champ d'application de cette convention, étant suffisant " pour s'en convaincre de se référer aux mentions de la convention collective sur les bulletins de paie, la mention de la convention applicable ne faisant référence à "Syntec" que depuis 1989, Géocoton appliquant auparavant l'accord CFDT".
Dans la mesure où la société Geocoton reconnaît l'application à la situation de M. Bernard X... de l'accord d'entreprise CFDT de 1974, reconnaissance d'ailleurs conforme au contenu des contrats d'engagement de M. Bernard X... des 17 avril 1975 et 1er septembre 1976, les dispositions de la convention collective nationale du 15 avril 1969 étendue par arrêté du 20 avril 1973 ont vocation à s'appliquer en l'espèce.
En effet l'article 1 du titre 1 de cet accord d'entreprise précise qu'il s'applique à l'ensemble du personnel recruté en France par contrat ou lettre d'engagement établis au siège social de la société (en l'espèce Paris), ce qui est le cas de M. Bernard X... ainsi que caractérisé par les éléments versés aux débats et d'ailleurs non contesté, accord qui prévoit expressément que " pour tout ce qui n'est pas repris dans le présent accord d'entreprise, il sera fait référence à la convention collective nationale en date du 15 avril 1969 applicable au Personnel des Bureaux d'Etudes Techniques suivant l'arrêté du 20 avril 1973 ".
Pour autant et si M. Bernard X... peut effectivement se référer à la convention collective nationale du 15 avril 1969 puisque la question de l'affiliation au régime obligatoire de retraite des salariés expatriés n'est pas reprise dans l'accord d'entreprise de 1974, l'article 49 ne concernant que le régime de prévoyance complémentaire bénéficiant aux cadres, il n'en reste pas moins qu'il ne peut se prévaloir des dispositions du titre IX de la convention collective nationale du 15 avril 1969 sur les déplacements hors de France métropolitaine, notamment l'article 70 i (actuellement l'article 72 de la convention collective nationale du 15 décembre 1987, M. Bernard X... précisant à juste titre que " l'actuelle convention collective reprend pour ce qui est l'objet du présent litige les dispositions de la convention collective ancienne ") imposant le maintien dans la mesure du possible de tous les régimes de prévoyance et de retraite, la couverture par des garanties analogues à celles du régime général de la sécurité sociale si le régime général de la sécurité sociale ne peut être maintenu et le maintien du régime volontaire risque vieillesse de la sécurité sociale et du régime des retraites complémentaires pour une charge supportée par le salarié et l'employeur dans les proportions habituelles et les conditions prévues par la loi, l'article 63 i ne formalisant que ces obligations.
En effet le dernier alinéa de l'article 61 de la convention collective nationale du 15 avril 1969 consultable sur internet à l'adresse suivante (http://www.legifrance.gouv.fr/jopdf/common/jo pdf.jsp?numJO=0etdateJO=19730515etpageDebut=05353etpageFin=etpageCourante=05376), actuellement le second alinéa de l'article 64, réserve l'application des dispositions du titre IX "pour autant que le personnel engagé soit soumis à la législation sociale française", ce qui n'a jamais été le cas de M. Bernard X... ainsi que ci-dessus rappelé, la société Geocoton étant effectivement fondée à distinguer le salarié envoyé en mission temporaire à l'étranger pour lequel le maintien de la législation française se pose et est réglée par ces dispositions conventionnelles du cas de M. Bernard X... engagé pour travailler à l'étranger en tant qu'expatrié et relevant exclusivement des législations locales successives.
Ces éléments justifient, par confirmation de la décision déférée, le rejet de l'intégralité des demandes présentées par M. Bernard X....
En raison de l'issue tant du litige que du présent recours les dépens de première instance et d'appel doivent être mis à la charge de M. Bernard X....
PAR CES MOTIFS
La Cour ;
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamne M. Bernard X... aux dépens d'appel.