CB/ RBI
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale
ARRÊT DU 29 Juin 2011
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 05995
ARRÊT
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 juin 2010 conseil de prud'hommes-formation paritaire de Montpellier No RG09/ 1408
APPELANTE :
Madame Christiane X...
...
Représentant : Me Jean edmond SALES (avocat au barreau de MONTPELLIER)
INTIME :
Monsieur Cyril Z...
...
Représentant : Me Frédéric RICHERT (avocat au barreau de MONTPELLIER)
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 945-1 du Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 AVRIL 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Robert BELLETTI, Conseiller, chargé (e) d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Yves ROLLAND, Président de chambre
Monsieur Robert BELLETTI, Conseiller
Monsieur Richard BOUGON, Conseiller
Greffière, lors des débats : Mme Chantal BOTHAMY
ARRÊT :
- Contradictoire.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, initialement prévu le 8 juin 2011 et prorogé au 29 juin 2011, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de Procédure
civile ;
- signé par Monsieur Yves ROLLAND, Président de chambre, et par Mme Chantal BOTHAMY, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur Cyril Z...a été embauché à compter du 02 mai 1996 par Madame Christiane X...qui gérait un élevage de chevaux, en qualité de cavalier-soigneur bénéficiant au surplus à titre gratuit de l'hébergement et de la nourriture.
Le 14 août 2002 alors qu'il est absent de l'élevage il est convoqué, à l'adresse qu'il a communiquée en Haute-Marne, à un entretien préalable fixé au 26 août 2002 et licencié par lettre recommandée en date du 28 août 2002.
Rendu destinataire le 31 août 2002 de son solde de tout compte et de son certificat de travail, Monsieur Z...saisit sept ans plus tard, soit le 20 juillet 2009, le conseil de prud'hommes de Montpellier de diverses réclamations dont des demandes en paiement de dommages-intérêts pour défaut de loyauté, travail dissimulé, licenciement abusif, licenciement vexatoire.
Suivant jugement rendu le 03 juin 2010, la juridiction prud'homale a dit son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, a condamné l'employeur à lui verser la somme de 6000, 00 € de dommages-intérêts pour absence de cause réelle et sérieuse au licenciement ainsi que pour non respect de la procédure, a également ordonné sous astreinte à l'employeur de délivrer à Monsieur Z...les bulletins de salaire correspondant à un emploi à temps complet pour la période de juin 1996 à août 2002, et débouté le salarié du surplus de ses prétentions.
Appelante de cette décision Madame X...a développé à l'audience ses écritures déposées le 1er février 2011.
Elle soutient que bien que se trouvant, comme le salarié, dans l'incapacité de produire, plus de 15 ans après sa conclusion et plus de 8 ans après sa rupture, la copie du contrat de travail, les éléments qui le constituaient sont établis par les pièces versées aux débats et notamment que ce contrat de travail était à durée indéterminée à temps partiel.
Déniant toutes les défaillances qui lui sont attribuées et notamment l'absence de remise de bulletins de paye, et considérant que les griefs visés dans la lettre de licenciement sont fondés, Madame X...conclut à l'infirmation du jugement déféré, au déboutement de l'intégralité des demandes formulées par Monsieur Z..., à son obligation de restituer l'attestation établie en exécution de la décision prud'homale et à la condamnation de Monsieur Z...à payer la somme de 2000, 00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur Z...a déposé des écritures le 12 avril 2011 qu'il a développées à l'audience.
IL fait valoir que son travail s'exerçait à temps complet, que les manquements reprochés dans la lettre de licenciement ne sont pas fondés ou alors prescrits et il conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et le contrat de travail à temps complet.
Pour le surplus il demande la réformation du jugement et réclame paiement par Madame X...des sommes suivantes :
-24 407, 28 € de dommages-intérêts pour licenciement abusif,
-8135, 76 € d'indemnité pour travail dissimulé ou à défaut 1627, 15 € d'indemnité de licenciement,
Il est également demandé, sous astreinte de 100, 00 € par jour de retard à compter du 8ème jour qui suivra la notification de l'arrêt à intervenir, la remise des bulletins de paye rectifiés, du certificat de travail et de l'attestation ASSEDIC rectifiés et la condamnation à " payer les cotisations afférentes aux organismes sociaux ".
Il est enfin réclamé la somme de 3000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR QUOI
Sur l'exercice du temps de travail
Les parties conviennent l'une et l'autre que le contrat de travail qui les liait a pris effet le 02 mai 1996 et qu'il était à durée indéterminée ; de même il n'est pas discuté que Monsieur Z...bénéficiait d'un avantage en nature tenant à l'hébergement et à la nourriture gratuits.
Elles ne s'opposent que sur la durée du temps de travail.
Le contrat de travail d'un salarié à temps partiel doit être écrit et l'absence d'écrit constatant l'existence d'un tel contrat fait présumer que celui-ci a été conclu pour un horaire normal.
Il s'agit toutefois d'une présomption simple et l'employeur est recevable à apporter la preuve qu'il s'agissait bien d'un contrat à temps partiel et que le salarié n'était pas dans l'obligation de se tenir à sa disposition permanente.
Il est produit par Madame X...deux attestations émanant de Mesdames C...et D..., anciennes salariées de l'élevage X..., qui certifient l'une et l'autre que Monsieur Z...exerçait ses fonctions à temps partiel (pièces no 1 et 2 employeur).
A ces pièces s'ajoutent deux documents émanant de la Mutualité Sociale Agricole de l'Hérault datés du 10 septembre 2009, constitués pour l'un de la reconstitution de carrière de Monsieur Z...(pièce no3 employeur) faisant apparaître que celui-ci a exercé du " 02-05-1996 au 30-09-2002 " en qualité de " SA TEMPS PARTIEL " (SA = salarié agricole).
Le second document de la MSA est le relevé de compte de Monsieur Z...(pièce no 3 employeur) qui traduit pour les années 1996 à 2002 le salaire annuel moyen versé au salarié et les trimestres pris en compte pour ses droits, permettant de constater que celui-ci a été parfaitement servi dans la mesure où d'une part les salaires ont bien été payés pour l " ensemble de la période considérée mais aussi que l'intégralité des trimestres lui ont été comptabilisés pour l'ouverture de ses droits.
IL est également communiqué les duplicatas des fiches de paye de Monsieur Z...pour les mois de janvier à septembre 2002 qui, régulières en la forme, mentionnent toutes pour chacun des mois considérés un nombre d'heures de travail égal à 86, 66 heures ; le dernier bulletin justifiant au surplus du versement d'une indemnité de licenciement et du préavis de deux mois (pièces no 14 à 22 employeur).
Est enfin versée la copie de l'attestation établie le 03 février 2002, donc antérieurement à la procédure de licenciement, par Madame X...qui déclare " Je soussignée Mme X..., certifie employer M. Cyril Z...en tant que cavalier soigneur depuis 1995 et lui verser un salaire de 2974, 38 F net par mois pour un temps partiel de 20h par semaine " (pièce no4 employeur).
Pour combattre ces témoignages, Monsieur Z...verse deux attestations, pour la première écrite par Madame E..., sa grand-mère, laquelle déclare qu'il lui a dit " n'avoir ni week-end ni vacances " et pour la seconde par Mademoiselle F..., étudiante née à Dijon en 1983 domiciliée en haute-marne qui sans indication aucune sur ses liens avec le salarié ou sa connaissance de l'élevage X...déclare également que Monsieur Z..." s'est souvent plaint à elle régulièrement de ne pas avoir ni week-end ni vacances " (pièces no 5 et 6 salarié).
Il produit également copies de pages du magasine Equimag qui lui a consacré un article et dans le corps duquel il est écrit en page 28 " En 1996 face aux résultats obtenus l'éleveur propose à Cyril, avec salaire en retour, d'exercer ses dons à temps complet " (pièce no 3 salarié) ; aucune précision n'est cependant fournie sur la date de publication de cet article, ni sur les conditions de recueil des renseignements y figurant et notamment sur celui tenant à l'exercice du temps de travail.
La preuve ayant été rapportée par l'employeur que le contrat de travail qui le liait à Monsieur Z...était bien un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel et que ce temps de travail constant, égal à 20h par semaines, ne plaçait pas le salarié, compte tenu de la nature de l'emploi et de l'environnement professionnel, dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler, la Cour infirmera le conseil de prud'hommes.
Sur la rupture du contrat de travail
La lettre de licenciement en date du 28 août 2002 vise divers manquements du salarié dont celui de n'avoir au cours du dernier semestre " débourré que deux jeunes chevaux au lieu d'une moyenne de six par semestre les années précédentes ", " de n'avoir " pas renouvelé son permis E " contraignant ainsi l'employeur à assurer les déplacements des chevaux, " d'avoir sans avertissement préalable cessé de participer, au même titre que le reste du personnel, aux saillies des étalons en mai ", d'avoir " adopté une attitude grossière ", d'avoir " refusé d'effectuer un stage de perfectionnement " ainsi que d'avoir " refusé de sortir en concours un étalon ".
Tous faits qui pour être discutés par le salarié dans ses écritures ne sont nullement contestés dans leur réalité ni leur matérialité, Monsieur Z...reconnaissant lui-même dans un courrier adressé cinq mois après son licenciement à l'employeur être " impulsif voire agressif " et que les " deux dernières années ont été très dures " pour Madame X..., ce dont il se dit " désolé " (pièce no 11).
L'employeur rapportant la preuve du refus d'effectuer le stage de perfectionnement par l'attestation établie par Madame G...
(pièce no26) ; comme est établi par l'attestation mise en forme par Madame H..., le refus de sortir un étalon en concours (pièce no34).
En infirmant le conseil de prud'hommes, la Cour déclarera le licenciement de Monsieur Z...fondé sur une cause réelle et sérieuse le privant du paiement de dommages-intérêts.
Sur le travail dissimulé
Il est réclamé paiement par Monsieur Z...de la somme de 8135, 76 € au titre du travail dissimulé.
L'attestation du 03 février 2002 (pièce no 4), la copie des bulletins de salaire (pièces no 14 à 22) comme les documents de la Mutualité Sociale Agricole (pièce no 3), toutes pièces déjà évoquées, suffisent à établir l'absence d'intention frauduleuse de l'employeur de se soustraire intentionnellement aux obligations mises à sa charge.
La Cour confirmera le conseil de prud'hommes qui a débouté Monsieur Z...de ce chef de demande.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il déboute Monsieur Cyril Z...de sa demande en paiement d'indemnité pour travail dissimulé ;
L'infirme pour le surplus, et statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées ;
Dit que le contrat de travail qui liait Madame X...et Monsieur Z...est un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel ;
Déclare le licenciement de Monsieur Z...fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
Déboute Monsieur Z...de l'intégralité de ses demandes ;
Y ajoutant,
Ordonne à Monsieur Z...de restituer à Madame X...l'attestation qui lui a été délivrée par cette dernière en exécution du jugement infirmé du conseil de prud'hommes ;
Dit n'y avoir lieu à prononcer condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Monsieur Z...aux dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT