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20/10/2010 | FRANCE | N°09/00117

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 20 octobre 2010, 09/00117


SD/ BB/ APCOUR D'APPEL DE MONTPELLIER 4o chambre sociale

ARRÊT DU 20 Octobre 2010



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 00844

ARRÊT no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 JANVIER 2010 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE PERPIGNAN
No RG09/ 00117



APPELANTE :

Madame Martine X... épouse Y...


...

66160 LE BOULOU
Représentant : Me Emilie BENZAKEN (avocat au barreau de PYRENEES ORIENTALES)



INTIMEE :

SAS TRANSPORTS Z...

prise en la personne de son représenta

nt légal Eric Z..., Président
Zone d'Activités Nord
1 Carrer d'En Cavaillès
66160 LE BOULOU
Représentant : Me BRIHI de la SCP RAYNAUD & ASSOCIES (avoc...

SD/ BB/ APCOUR D'APPEL DE MONTPELLIER 4o chambre sociale

ARRÊT DU 20 Octobre 2010

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 00844

ARRÊT no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 JANVIER 2010 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE PERPIGNAN
No RG09/ 00117

APPELANTE :

Madame Martine X... épouse Y...

...

66160 LE BOULOU
Représentant : Me Emilie BENZAKEN (avocat au barreau de PYRENEES ORIENTALES)

INTIMEE :

SAS TRANSPORTS Z...

prise en la personne de son représentant légal Eric Z..., Président
Zone d'Activités Nord
1 Carrer d'En Cavaillès
66160 LE BOULOU
Représentant : Me BRIHI de la SCP RAYNAUD & ASSOCIES (avocats au barreau de PYRENEES ORIENTALES)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 945-1 du Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 SEPTEMBRE 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Bernadette BERTHON, Conseillère, chargé (e) d'instruire l'affaire, Madame Bernadette BERTHON ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Pierre D'HERVE, Président de Chambre
Madame Bernadette BERTHON, Conseillère
Monsieur Robert BELLETTI, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON

ARRÊT :

- Contradictoire.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de Procédure civile ;

- signé par Monsieur Pierre D'HERVE, Président de Chambre, et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*
**
FAITS ET PROCEDURE

Martine X... épouse Y... a été engagée par la SARL TRANSPORTS Z... suivant contrat à durée indéterminée à compter du 11 septembre 2000 à temps partiel 20 heures hebdomadaires en qualité de comptable facturière par référence à l'emploi no 7 coefficient 215 de la convention collective nationale des transports routiers.

A compter du 7 décembre 2006, la salariée a été mise en arrêt de travail jusqu'au 21 décembre 2006 et qui était prolongé ultérieurement jusqu'au 7 janvier 2007.

Le 8 décembre 2006, l'employeur a envoyé un courrier à la salariée pour lui proposer d'augmenter sa durée de travail et de passer ainsi à 152 heures par mois.

Le 28 décembre 2006, l'employeur lui a renouvelé sa proposition et le même jour a fait procéder à un contrôle de l'arrêt de travail à l'issue duquel le médecin contrôleur a constaté l'absence de la salariée le 28 décembre 2006 à son domicile à 14h 45.

Le 2 janvier 2007, la salariée a écrit à Eric Z... pour :

- lui rappeler que lors de leur entrevue du 30 novembre 2006, elle s'était plainte de l'attitude malveillante brusquement adaptée par sa mère à son égard sans raison apparente, de la détérioration de la situation la semaine suivante ce qui a engendré pour sa part à un réel malaise et un stress l'obligeant à se mettre en congé maladie,
- lui signifier sur la proposition faite qu'elle voulait obtenir d'abord un rendez-vous pour un entretien avant de prendre sa décision, rendez vous qu'elle n'a jamais eu.

Le 8 janvier 2007, lors de la première visite de reprise, le médecin du travail a émis l'avis suivant : " inaptitude temporaire de la salariée sur son poste de travail à revoir dans 15 jours ".

Le 22 janvier 2007 à l'issue de la deuxième visite le dit médecin a déclaré la salariée " inapte définitivement à son poste de travail. "

Par courrier daté du 29 janvier 2007 réceptionné le 2 février 2007, l'employeur a proposé à titre de reclassement à la salariée les deux postes suivants :

"- dans le cadre de l'accueil des marchandises et conducteurs un poste de réceptionniste, pointage du stock groupe 6 de la CCNT salaire 1257 €/ 152 heures par mois (sur le site du BOULOU)
- dans le cadre de l'appartenance de l'entreprise au groupement ASTRE un poste de secrétariat et correspondancière basé à FLEURY MEROGIS (91) groupe 6 de la CCNT salaire 1257 €/ 152 heures par mois ".

En réponse, le 2 février 2007, la salariée a rappelé à l'employeur les termes de son courrier du 2 janvier 2007, a signalé que son inaptitude n'était pas liée au poste occupé mais due à l'impossibilité d'exercer ce poste au sein de l'entreprise qu'il n'était pas sans ignorer qu'elle occupait un poste de comptable facturière dans une autre entreprise sans qu'il n'y a aucune inaptitude de sa part dans un autre contexte, a refusé les postes de reclassement proposés notamment du fait de la rétrogradation des deux postes ne serait-ce qu'au niveau salaire de base alors que salaire actuellement est " de 1743, 30 € pour 130 heures par mois + 6 % d'ancienneté ".

Le 9 février 2007, l'employeur a convoqué la salariée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 16 février 2007 à 10 heures et par lettre recommandée du 22 février 2007 avec avis de réception, il l'a licenciée de la façon suivante :

" Nous vous avons reçu le 16 février 2007, à un entretien préalable à votre éventuel licenciement, assistée par Monsieur A..., conseiller du salarié.
Malgré les explications que vous nous avez exprimées lors de cet entretien, nous avons décidé de vous licencier pour cause réelle et sérieuse aux motifs suivants :
Inaptitude physique à votre poste de travail dans notre entreprise, médicalement constatée par la médecine du travail aux termes de deux avis médicaux et impossibilité de reclassement suite à vos refus des deux propositions formulées en ce sens.
En effet, en maladie depuis le 07 décembre 2006, vous avez souhaité passer, le 08 janvier 2007, une visite médicale de reprise du travail.
Au terme de celle-ci, le médecin du travail vous a déclarée temporairement inapte.
Quinze jours plus tard, dans le cadre d'une seconde visite en date du 22 janvier 2007, il constatait votre inaptitude physique définitive à votre poste de travail de comptable-facturière.
Dans ces conditions et en concertation avec le médecin du travail, nous vous avons adressé par lettre recommandée avec avis de réception du 24 janvier 2007, une proposition de reclassement aux deux postes de travail suivants, au choix :
- réceptionnaire, pointage de stock, dans le cadre de l'accueil des marchandises et conducteurs
-secrétaire à Fleury-Mérogis (dans le cadre de notre appartenance au groupement ASTRE).
Au terme de votre délai de réflexion, vous nous avez notifié suivant lettre recommandée avec avis de réception du 02 février 2007, votre refus à ces propositions.
Nous sommes au regret de vous informer que nous ne disposons d'aucun autre poste vacant ou compatible avec votre état de sanlé dans notre entreprise et au sein de notre groupement.
Quant à vos allégations et accusations mentionnées dans ce même courrier, nous vous précisons qu'elles sont tout à fait mensongères.
Votre licenciement prendra donc effet à compter de la première présentation de cette lettre à votre domicile.
En effet, compte tenu de votre inaptitude physique à occuper votre poste de travail, vous ne pouvez effectuer aucun préavis. "

Le 4 mai 2007, Martine Y... a saisi le Conseil de Prud'hommes de PERPIGNAN lequel section commerce a en premier lieu prononcé le 25 novembre 2008 la radiation de l'affaire au rôle faute de diligence de la demanderesse et après réinscription au rôle a par jugement du 26 janvier 2010 :
- dit régulier et bien fondé le licenciement,
- débouté la salariée de l'intégralité de ses demandes,
- débouté l'employeur de sa réclamation sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- condamné la salariée aux dépens.

Martine Y... a le 2 février 2010 régulièrement interjeté appel de ce jugement.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions, l'appelante demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré et de sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

*condamner l'employeur à lui payer :
-176, 97 € brut à titre de rappel de salaire relatif à la prime d'ancienneté et 17, 70 € brut pour les congés payés afférents
-6000 € au titre du préjudice subi du fait du non respect de la règle du 10 ème de la durée prévue au contrat pour les heures complémentaires,
-2129, 31 € brut au titre des heures complémentaires effectuées au delà du 1/ 10 de la durée contractuellement fixée ainsi que 212, 93 € pour les congés payés afférents,
*constater que l'employeur a procédé à une modification unilatérale du contrat de travail et par conséquent dire le licenciement intervenu dépourvu de cause réelle et sérieuse,
*constater que l'employeur n'a pas procédé à une recherche loyale de reclassement et par conséquent dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
*en tout état de cause constater que l'employeur n'a pas fait cesser les actes de harcèlement moral qu'elle a subi et dire que le licenciement est nul,
*condamner l'employeur à lui régler :
-10. 000 € en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral effectué par la mère de ce dernier,
-3486, 60 € brut au titre du préavis et 348, 66 € bruts pour les congés payés afférents,
-21 000 € correspondant à un an de salaire pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
-2000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile outre la prise en charge des dépens.

Elle fait valoir :
- que la régularisation de la prime d'ancienneté doit intervenir à compter de mars 2004,
- qu'à compter de juin 2004, elle a effectué un grand nombre d'heures complémentaires non payées au bon taux horaire et bien supérieure à la limite fixée par le Code du Travail de sorte qu'elle a été dans l'incapacité de s'organiser,
- qu'aucun avenant pour le passage de 121, 33 heures à compter d'octobre 2006, puis à 130 heures à compter de novembre 2006 n'a été signée.

Elle soutient :
- que l'employeur n'a sollicité aucun avis médical sur les postes qu'il lui a proposé de sorte qu'elle ne pouvait que refuser,
- que les postes proposés étaient d'un échelon inférieur (groupe 6) par rapport à son poste groupe 7 et avait un salaire très largement en dessous de ce qu'elle bénéficiait,
- que l'employeur n'a pas malgré sommation communiqué le registre du personnel, qu'il n'a fait que deux propositions alors qu'uniquement en France le groupe auquel il appartient comporte plus de 200 entreprises.

Elle souligne que la mère du gérant a manifesté une certaine animosité à son égard en raison de l'embauche à temps partiel dont elle a bénéficié auprès de la société CATALOGUE FERMETURES, et n'a pas supporté de devoir la partager avec un autre employeur ; qu'elle a cessé de lui apporter le courrier dans le bureau, faisant comme si elle n'existait pas ce qui a entraîné une altération de sa santé mentale, que malgré l'entretien qu'elle a eu le 30 novembre 2006 à ce sujet, le gérant n'a rien fait pour faire cesser ce type de harcèlement de la part de sa mère.

Elle invoque l'aveu de l'employeur sur les actes de harcèlement commis par sa mère et sur son incapacité à y faire face.

Aux termes de ses écritures, la SAS TRANSPORTS Z... conclut à la confirmation du jugement déféré mais réclame l'octroi de 2000 € à titre de frais irrépétibles et la prise en charge par l'appelante des dépens.

Elle s'oppose aux demandes adverses et argue :

- qu'il y a eu une erreur sur le calcul de la prime d'ancienneté qui a été régularisée par la suite la salariée ayant même bénéficié d'un trop perçu pour la période du 1er septembre 2002 au 31 août 2003,
- que la salariée qui impute à l'employeur le non respect des dispositions de l'article L. 3123-17 du Code du Travail sur le temps partiel n'a jamais pris acte de la rupture pour ce motif,
- qu'en tant qu'employeur elle n'a commis aucune faute sur l'accomplissement des heures complémentaires en l'absence d'opposition de la salariée.

Elle précise par ailleurs qu'elle a recherché loyalement et sérieusement le reclassement de la salariée, que les propositions faites sont précises et correspondent aux préconisations du médecin du travail, que le groupement ASTRE auquel elle a adhéré est une SA coopérative à capital variable ayant vocation de mettre en relation les transporteurs et leur permettre de développer les entreprises grâce à des actions collectives qu'il ne s'agit en aucun cas d'un groupe au sein duquel la permutation du personnel est possible, qu'elle justifie que le poste de Madame Y... n'a pas été supprimé.

Elle réplique enfin que l'appelante ne relate aucun fait précis et vérifiable ni dans ses conclusions ni dans ses différents courriers adressés à son employeur susceptibles de constituer un harcèlement moral, qu'il n'y a eu aucun aveu de sa part, que sa mère Madame Z... n'était ni salariée ni employeur, que ni le médecin traitant de la salariée ni le conseiller qui l'a assisté n'évoque un quelconque harcèlement.

Pour plus ample exposé, la Cour renvoie aux écritures déposées par les parties et réitérées oralement à l'audience.

SUR CE

I. Sur les différents rappels au titre de la prime d'ancienneté et de la durée du travail

1o Sur la prime d'ancienneté

En l'état des bulletins de salaires versés au débat et eu égard à la convention collective nationale des transports routiers applicable, il apparaît que l'employeur a réglé une prime d'ancienneté de 2 % après deux d'ancienneté c'est à dire à partir de septembre 2002 en appliquant ce qui était prévu pour le personnel roulant, alors qu'il aurait dû appliquer un taux de 3 % à compter seulement du 1er septembre 2003 (c'est à dire après trois ans d'ancienneté).

Considérant que l'employeur a procédé à un rappel de prime sur les heures complémentaires en décembre 2004 (76, 86 €), qu'il a appliqué le taux de 3 % à compter du mois d'octobre 2005 et a procédé également ce mois là à une régularisation à hauteur de 96, 92 € et considérant que la salariée a bénéficié d'un trop perçu de septembre 2002 à août 2003 de 243, 77 € à ce titre, il n'est rien dû par l'employeur sur ce point

2o Sur les heures complémentaires

Le contrat de travail liant les parties prévoit que " l'horaire de travail est fixé à 20 heures hebdomadaires le taux horaire étant fixé à 64F, que des heures complémentaires pourront être effectuées dans l'avenir, qu'elles seront limitées en fonction soit du Code du Travail soit de la convention collective nationale soit d'un accord entre les deux parties ; elles feront l'objet d'un avenant à ce contrat ".

D'autre part, il s'avère que la convention collective nationale des transports routiers prévoit le recours aux heures complémentaires dans la limite de 1/ 3 de la durée de base du contrat, étant précisé que l'appelante ne rapporte pas l'exclusion de la limite conventionnelle d'un 1/ 3 pour les transports de marchandise.

En l'état, compte tenu du pourcentage permis par les dispositions conventionnelles, l'employeur pouvait demander à la salariée d'effectuer 28, 86 heures complémentaires ce qui porte la limite de la durée du travail conventionnel à 115, 46 heures.

En l'état, aucun dommage et intérêt ne saurait être octroyé à la salariée pour non respect de la règle du 10 ème qui n'était pas applicable, étant précisé que la salariée malgré ce a pu trouver un autre emploi à temps partiel.

Toutefois en application de l'article L 3123. 19 du code du travail, dès lors que la limite est portée au delà de 1/ 10ème de la durée hebdomadaire du travail fixée au contrat chacune des heures complémentaires de cette durée donne lieu à une majoration de salaire de 25 %.

En l'espèce, l'employeur ne s'est jamais acquitté de cette majoration de sorte qu'il convient de faire droit à la réclamation du salarié suivant décompte joint et lui allouer à ce titre 2129, 31 € outre les congés payés afférents (212, 93 €) somme qui couvre la période de juin 2004 à septembre 2006.

3o Sur la modification du contrat de travail

Il est constant ainsi que cela ressort des bulletins de salaire qu'à compter d'octobre 2006 la durée du travail de la salariée a été portée à 86, 66 heures mensuelles à 121, 33 heures mensuelles et à compter de novembre 2006 à 130 heures mensuelles.

Compte tenu du dépassement prolongé dans les conditions de l'article L. 3123-5 du Code du Travail et en l'absence de la moindre opportunité de la salariée, il ne peut être considéré que la modification apportée par l'employeur soit fautive.

Au demeurant, l'appelante n'a jamais pris acte de la rupture sur une prétendue modification sans son accord et en aucune façon cette modification faite dans le respect de l'article sus visé ne peut laisser présumer un quelconque faite de harcèlement.

II. Sur le harcèlement

L'article L. 1152-1 du Code du Travail énonce qu " aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ".

En outre, l'article L. 1154-1 du même Code précise que : " lorsque survient un litige (.....) Le salarié établit les faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ".

En l'espèce, la salariée produit au débat en cause d'appel :

- le compte rendu de l'entretien préalable établi le 15 février 2007 de façon très succincte et non signé par l'employeur,
- l'attestation d'Isidore A... conseiller de la salariée déclarant que Eric Z... n'a pas voulu donner les raisons de l'attitude de sa mère et aurait précisé : " je ne peux pas tuer ma mère c'est elle qui a crée l'entreprise ".
- le compte rendu de visite du Docteur Eric Y... du 4 janvier 2007 relatant avoir reçu Martine Y... le 6 décembre 2006 pour un soutien psychologique par acupuncture suite à ce qui ressemble à un harcèlement moral, la patiente présentant un début de dépression avec oppression thoracique et pleurs chaque fois qu'elle évoque la problématique personnelle et professionnelle, ainsi qu'une ordonnance prescrivant un traitement " homéopathique " de ce même médecin
-le certificat du Docteur Jean Christophe C... en date du 5 janvier 2007 adressé au médecin du travail relatant que la salarié a toujours entretenu de bon rapport avec le patron jusque là mais que mi novembre la mère de ce dernier " aurait débuté une forme de harcèlement psychologique... ",
-6 attestations d'anciens salariés de la SAS TRANSPORTS Z... mentionnant la présence au sein de l'entreprise de Danielle Z..., et un attestant (Joël D...) d'un changement de comportement flagrant de cette dernière à son propre égard de temps en temps,
- trois attestations d'une amie, de la soeur, du compagnon de l'appelante relatant les confidences que leur a faite cette dernière sur les pressions subies dans son travail,
- les différents courriers échangés avec son employeur.

Au vu de ces pièces, l'appelante n'établit aucun fait précis et circonstancié permettant de présumer l'existence d'un harcèlement de la part de la mère du gérant étant observé que le moindre élément est fourni sur l'attitude malveillante qu'aurait Danielle Z... ni sur le mépris ou l'ignorance qu'elle aurait fait preuve à son égard.

Les seules allégations de la salariée ne peuvent suffire, aucun élément objectif ne venant corroborer ses dires ; Il convient en outre de souligner que les documents médicaux ne révèlent aucune constatation précise si ce n'est qu'ils relatent la seule version de la patiente.

Quant à la phrase mentionnée dans l'attestation de la personne qui a assisté la salariée lors de l'entretien préalable et qui est prêtée au gérant, elle ne saurait constituer un aveu de ce dernier ni extra judiciaire ni judiciaire.

Dans ces conditions, et à défaut d'agissements précis incriminés, et sans qu'il soit besoin que l'employeur apporte des justificatifs contraires, la demande au titre du harcèlement ne peut être que rejetée.

Aucun dommage et intérêt ne sera donc octroyé à l'appelante sur ce point.

III. Sur le licenciement

L'article L. 1226-2 du Code du Travail dispose :
Lorsque à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ;
Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail $gt; $gt;.

L'obligation de reclassement pèse sur l'employeur et il appartient à ce dernier de démontrer qu'il a tout mis en oeuvre pour tenter de reclasser le salarié concerné et qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité de le faire.

En l'espèce, il convient de constater en premier lieu que l'avis d'inaptitude définitive déclaré par le médecin du travail concerne le poste occupé de la salariée et non comme elle le prétend elle même tous postes dans l'entreprise.

Par ailleurs, il est constant et non contesté que l'employeur a fait deux propositions l'une dans l'entreprise au BOULOU, l'autre dans les entités ASTRE COMMERCIAL et ASTRE COOPERATIF où l'employeur reconnaît être actionnaire pour le poste de FLEURY MEROGIS étant précisé que pour ce dernier poste aucune pièce ne fait état d'une réponse des dites entités à une demande de l'employeur.

En l'état, d'une part, il s'avère que pour les postes proposés refusés par la salariée qui dans ses écritures argue de l'absence d'avis médical sur de tels postes, l'employeur ne produit aucun élément sur la compatibilité des dits postes avec les capacités de travail de la salariée.

En effet, l'employeur qui note dans son courrier du 29 janvier 2007 qu'il a eu la visite le lundi 22 janvier 2007 du médecin du travail qui lui a remis la fiche médicale d'inaptitude définitive au poste de travail et s'être entretenue avec elle dans le but de réaliser une étude de projet ne justifie pas pour autant par la moindre pièce avoir réellement soumis les propositions de reclassement avant la notification à la salariée au médecin du travail et avoir obtenu de ce dernier un avis favorable pour un compatibilité avec l'état de santé de la salariée.

D'autre part, il apparaît que les postes proposés entraînent une modification du contrat de travail de la salariée notamment en termes de salaires et que le refus de cette dernière ne peut être en soi un motif légitime de rupture, sauf à l'employeur de démontrer l'impossibilité de la reclasser suite à ce refus.

Or, là encore, l'employeur n'établit pas cette impossibilité au sein de l'entreprise par la seule production du registre du personnel le moindre organigramme ou autre élément, ni au sein des entités ASTRE COMMERCIAL et ASTRE COOPERATIF dont il se dit lui même actionnaire et sur lesquelles il ne produit aucune pièce même si aucun reproche ne peut lui être fait au niveau du groupement ASTRE ASSOCIATION DE TRANSPORTEURS EUROPEENS dont il n'est pas démontré qu'il y ait eu un lien capitalistique ainsi qu'une permutation possible du personnel.

Dans ces conditions, faute de propositions ayant eu l'aval du médecin du travail et d'impossibilité non démontrée de reclasser après ce refus, le licenciement doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse.

Tenant compte au moment de la rupture de l'âge de la salariée (51 ans) de son ancienneté (6 ans et 5 mois) de son salaire mensuel brut (selon la moyenne des trois derniers avant l'arrêt maladie 1754, 26 €) et de ce qu'elle justifie être inscrite au POLE EMPLOI et avoir bénéficié à tout le moins jusqu'au 2 juin 2009 de l'allocation de l'aide au retour à l'emploi, son indemnisation doit être fixée ainsi qu'il suit :

-3486, 60 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 348, 66 € tel que demandé étant précisé que l'inexécution du préavis ayant pour cause première le manquement de l'employeur à son obligation de reclassement

-15 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

IV. Sur les demandes annexes

L'équité commande d'allouer à l'appelante une indemnité de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

L'employeur qui succombe ne peut bénéficier de cet article et doit prendre en charge les dépens.

La salariée ayant plus de deux ans d'ancienneté et l'entreprise plus de 11 salariés, il y a lieu de faire application de l'article L. 1235-4 du Code du Travail dans les termes du dispositif ci après.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Déclare recevable en la forme l'appel de Martine X... épouse Y...,

Sur le fond, confirme le jugement déféré sur le rejet de la demande au titre du harcèlement et nullité du licenciement, de celle au titre de la prime d'ancienneté ainsi que de celle au titre des la modification unilatérale du contrat de travail ;

Le réforme pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les points réformés et y ajoutant,

Dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la SA TRANSPORTS Z... à payer à Martine Y... les sommes suivantes :

-2129, 31 € à titre de rappel de la majoration pour heures complémentaires effectuées au delà de 1/ 10 de la durée contractuellement fixée,
-212, 93 € pour les congés payés afférents,

-3486, 60 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

-348, 66 € pour les congés payés afférents,

-15 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-1000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Ordonne le remboursement par la SAS TRANSPORTS Z... aux organismes sociaux concernés des indemnité de chômage éventuellement payées à Martine Y... dans la limite de six mois,

Dit que conformément aux dispositions des articles L. 1235-4 et R. 1235-2 du Code du Travail, une copie du présent arrêt sera adressée par le Greffe au POLE EMPLOI du lieu où demeure le salarié,

Condamne la SAS TRANSPORTS Z... aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 09/00117
Date de la décision : 20/10/2010

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-10-20;09.00117 ?
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