COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3ème CHAMBRE CORRECTIONNELLE
ARRET N
DU 10 / 02 / 2010
DECISION
INTERETS CIVILS
DOSSIER 09 / 01388
GN / GB
prononcé publiquement le Mercredi dix février deux mille dix, par la troisième Chambre des appels correctionnels, par Monsieur RAJBAUT, en application des dispositions de l'article 485 dernier alinéa du code de procédure pénale.
et assisté du greffier : Mademoiselle GRIFFE
qui ont signé le présent arrêt
sur appel d'un jugement du tribunal de grande instance de MONTPELLIER du 08 JUIN 2009
COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :
Président : Monsieur RAJBAUT
Conseillers : Madame CHAPON
Madame BRESDIN
-------------------------------------------------- Greffier présent lors des débats : Mademoiselle GRIFFE
PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :
X... Jean Louis
Né le 08 mai 1963 à MONTPELLIER (34), de nationalité française, demeurant...
Libre
Défendeur, appelant
Comparant
Assisté de Maître LAFONT François, avocat au barreau de MONTPELLIER
PARTIES CIVILES
Y... Virginie, demeurant...-34430 SAINT JEAN DE VEDAS
Partie civile, appelante
Non comparante
Représentée par Maître VIVIEN LAPORTE Isabelle, avocat au barreau de MONTPELLIER
Z... Alain, demeurant...
Partie civile, appelant
Non comparant
Représenté par Maître VIVIEN LAPORTE Isabelle, avocat au barreau de MONTPELLIER
Z... Coline, demeurant N 7 La Roche-19310 AYEN
Partie civile, appelante
Non comparante
Représentée par Maître VIVIEN LAPORTE Isabelle, avocat au barreau de MONTPELLIER
Z... Daniele, demeurant...
Partie civile, appelante
Non comparante
Représentée par Maître VIVIEN LAPORTE Isabelle, avocat au barreau de MONTPELLIER
Z... Mélanie, sans domicile connu ayant demeuré...
Partie civile, appelante
Non comparante
Représentée par Maître VIVIEN LAPORTE Isabelle, avocat au barreau de MONTPELLIER
Z... Sacha, sans domicile connu ayant demeuré...
Partie civile, appelant
Non comparant
Représenté par Maître VIVIEN LAPORTE Isabelle, avocat au barreau de MONTPELLIER
PARTIE INTERVENANTE
Compagnie assurances COMPAGNIE CIC ASSURANCES, 34 rue du Wacken-67000 STRASBOURG
Partie intervenante, appelante
Représenté par Maître LAFONT François, avocat au barreau de MONTPELLIER
DEROULEMENT DES DEBATS :
A l'appel de la cause à l'audience publique du 13 JANVIER 2010 Monsieur le Président a constaté l'identité du prévenu.
Madame BRESDIN, Conseillère, a fait le rapport prescrit par l'article 513 du code de procédure pénale.
M. X... Jean-Louis a accepté de comparaître volontairement assisté de Maître LAFONT.
Maître VIVIEN LAPORTE pour les consorts Z..., partie civiles, est entendue en sa plaidoirie. Elle dépose des conclusions, lesquelles ont été visées par le président et la greffière, mentionnées par cette dernière aux notes d'audience et jointes au dossier.
Maître LAFONT pour M. X... Jean-Louis et la COMPAGNIE D'ASSURANCES est entendu en sa plaidoirie. Il dépose des conclusions, lesquelles ont été visées par le président et la greffière, mentionnées par cette dernière aux notes d'audience et jointes au dossier.
M. X... Jean-Louis a eu la parole en dernier.
Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience du DIX février DEUX MILLE DIX, les parties dûment avisées de la date de cette remise par Monsieur le Président à l'audience, conformément aux dispositions de l'article 462 alinéa 2 du code de procédure pénale.
A cette date, l'audience publique ouverte, la cause appelée ;
LA COUR,
Après en avoir délibéré, conformément à la loi, et composée des magistrats devant lesquels l'affaire a été plaidée, a statué en ces termes :
Par le jugement contradictoire du 8 juin 2009, le Tribunal correctionnel de MONTPELLIER :
SUR L'ACTION PUBLIQUE,
Disqualifie la prévention de : HOMICIDE INVOLONTAIRE et VIOLATION MANIFESTEMENT DELIBEREE D'UNE OBLIGATION DE SECURITE OU DE PRUDENCE
et requalifie en : HOMICIDE INVOLONTAIRE par CONDUCTEUR TERRESTRE A MOTEUR
Déclare X... Jean-Louis coupable des faits qui lui sont reprochés,
En répression, le condamne à 3 mois d'emprisonnement avec sursis à titre de peine principale.
SUR L'ACTION CIVILE,
Reçoit la constitution de partie civile des consorts Z...,
Opère un partage de responsabilité et dit que Florian Z... a concouru à la survenance du dommage à concurrence des deux tiers et que Jean-Louis X... y a concouru à concurrence d'un tiers,
Déboute les consorts Z... de leur demande de provision,
Donne à la CIE CIC ASSURANCES de son intervention volontaire,
Surseoit à statuer et réserve les droits des parties civiles,
Fixe la continuation des débats sur intérêts civils à l'audience du 17 décembre 2009, avec réserve des dépens.
APPELS
Le 18 juin 2009, les Consorts Z...- Y..., parties civiles, ont interjeté appel à l'encontre des dispositions civiles du jugement du 8 juin 2009.
Le 19 juin 2009, Monsieur Jean-Louis X..., prévenu et son assureur la compagnie d'assurance CIC ont formé appel à l'encontre les dispositions civiles du jugement du 8 juin 2009.
FAITS
Le 15 novembre 2007, vers 21 heures, Monsieur X... circulant au volant de son véhicule automobile Peugeot 207, avenue Charles FLAHAULT à MONTPELLIER, effectuait une manoeuvre de demi-tour, à hauteur de l'intersection avec la rue Hippolyte Rech, se déportant sur la voie de circulation la plus à droite des deux fois deux voies de circulation composant l'avenue.
Alors que son véhicule était quasiment immobilisé au milieu de la chaussée, Monsieur Florian Z..., né le 17 août 1980 à MONTPELLIER, survenant par l'arrière, circulant sur sa motocyclette MOTTO GUZZY sur la deuxième voie à gauche dans le même sens de circulation, s'encastrait dans le côté gauche de la voiture de Monsieur Jean-Louis X.... La victime décédait quelques minutes après sur les lieux de l'accident.
Les éléments réunis lors de l'enquête préliminaire et de l'instruction ont mis en évidence que Monsieur Z... avait consommé du cannabis en faible quantité moins de huit heures avant l'accident et que la motocyclette circulait à vive allure et n'avait pas respecté l'arrêt au feu rouge, selon le témoignage de Monsieur D..., conducteur d'une ambulance qui circulant sur l'avenue en sens inverse : celui-ci s'était arrêté au feu rouge fixe et ayant une vue claire et droite sur les lieux avait constaté que la voiture ne circulait pas très vite à la différence de la motocyclette qui était arrivée à vive allure à l'intersection et avait percuté le véhicule alors que le feu tricolore était passé au rouge sans son propre sens. La parfaite synchronisation des feux dans les deux sens de circulation a été constatée par les enquêteurs.
Les traces de freinage (11, 50 mètres) puis de ripage (11 m40) laissées sur la chaussée par la motocyclette, la violence du choc sous laquelle le véhicule était repoussé de plusieurs mètres supplémentaires, avec des dégâts importants causés à la voiture et à la motocyclette, confirmaient la vitesse à laquelle circulait la motocyclette.
PRETENTIONS DES PARTIES
Les Consorts Z...- Y..., parties civiles appelantes, demandent à la Cour : Vu le jugement du 8 juin 2009 sur l'action civile, le réformer en ce qu'il a opéré à tort un partage de responsabilité, dire que Monsieur X... est seul et entièrement responsable de l'homicide involontaire ; accueillir les constitutions de parties civiles de Monsieur et Madame Z..., Mélanie et Coline Z..., Sacha Z..., Madame Virginie Y... et Jeanne Y... ; constater leurs entiers droits à indemnisation des conséquences dommageables de l'homicide involontaire survenu le 15 novembre 2007 ; condamner in solidum Monsieur X... et sa compagnie d'assurance le CIC à payer aux concluants les sommes suivantes à titre de provision :
AU titre du préjudice moral :
18. 000 € à chacun des parents,
16. 000 € à chacun des frères et soeurs,
10. 000 € à sa compagne,
6. 000 € à Jeanne ;
Au titre du préjudice économique de Virginie et de Jeanne :
Au titre du préjudice matériel :
2. 849, 72 € de frais d'obsèques (Cf. Facture) à payer aux parents,
Condamner in solidum Monsieur X... et sa compagnie d'assurance le CIC à payer aux concluants la somme de 2. 000 € en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
Monsieur Jean Louis X... prévenu et de son assureur la CIE CIC ASSURANCES, appelants, concluent en demandant à la Cour de réformer le jugement déféré ; constatant que le jugement qui n'est déféré que sur les intérêts civils est définitif en ce qui concerne tant la requalification des faits reprochés que la déclaration de culpabilité pour simple imprudence sans commission d'une manoeuvre interdite ; réformer le jugement pour le surplus et dire, abstraction faite du comportement de Monsieur X..., que le motocycliste a commis une faute de nature à exclure le droit à indemnisation ; vu l'article 6 de la loi du 5 juillet 1985, débouter les parties civiles de leurs demandes.
MOTIFS DE LA DECISION
Il y a lieu de statuer par arrêt contradictoire à l'égard de toutes les parties.
Sur la recevabilité des appels
Les appels des parties civiles, du prévenu et de sa compagnie d'assurances, interjetés dans les formes et les délais légaux, sont recevables.
Sur le fond
Le jugement déféré est définitif en ses dispositions pénales retenant Monsieur Jean-Louis X... dans les liens de la prévention d'homicide involontaire sur la personne de Monsieur Florian Z....
Sur les intérêts civils dont la Cour est saisie, il convient de rappeler que selon les dispositions des articles 4 et 6 de la loi du 5 juillet 1985, la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur, abstraction faite du comportement de l'autre conducteur dont le véhicule est impliqué dans l'accident, a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation du dommage qu'il a subi dès lors qu'elle a contribué à sa réalisation. De même, les fautes commises par la victime décédée dans la collision, limitent ou excluent le droit à indemnisation au profit de ses ayants-droit.
En l'espèce, il résulte des éléments matériels réunis lors de l'enquête et de l'instruction que Monsieur Florian Z... a commis des fautes ayant concouru à l'accident mortel de la circulation dont il a été victime.
En effet, il avait consommé du cannabis en faible quantité depuis moins de 8 heures avant l'accident, selon les analyses effectuées sur les échantillons qualifiés de bons à leur réception le 16 novembre 2007 à 10 heures par le service de pharmacologie médicale et toxicologie de l'Hôpital Lapeyronie à MONTPELLIER.
En outre, il pilotait sa motocyclette de 1000 CM3 à une vitesse dépassant largement les 50 km / heure autorisés en ville à un carrefour, au vu des constatations concordantes des enquêteurs sur les lieux de l'accident : la longueur et de la localisation des traces de freinage sur la chaussée de plus de 11 m 50, la violence du choc établi par les dégâts importants sur la moto avec l'arrachement de la roue avant gauche, la réduction à l'état d'épave du véhicule de Monsieur X... circulant à allure réduite, avec un coût des travaux de réparations de 14. 757, 25 €, la projection de la moto à 7 mètres de là et la voiture à 10 mètres où elle s'immobilisait sur un poteau.
Plus grave encore, le motocycliste n'a pas respecté l'arrêt absolu imposé au feu rouge selon le témoignage de Monsieur D..., qui a déclaré avec certitude que c'est après que le feu était passé au rouge et qu'il avait ralenti pour s'arrêter, donc après le passage au rouge de la voie de circulation en sens inverse également, qu'il a vu la motocyclette circulant à vive allure surgir à l'intersection et venir percuter violemment le véhicule de Monsieur X....
La parfaite synchronisation des feux dans les deux sens a été vérifiée selon le procès-verbal de transport sur les lieux par les enquêteurs le 16 novembre 2007 : les feux tricolores commandant la circulation sur l'avenue Charles Flahaut à l'intersection de la rue Hyppolyte Rech dans le sens de circulation de la voie Domitienne vers le centre ville, et du centre ville vers la voie Domitienne étaient parfaitement synchronisés.
Le témoignage de Monsieur D... se trouvant sur les lieux, et décrivant de façon précise les circonstances de l'accident qu'il a vu se produire, ne peut pas être remis en cause du seul fait qu'il a indiqué que Monsieur X... venait de la Rue Rech comme le laissait penser son positionnement sur la chaussée, au lieu de l'avenue Charles Flahaut qu'il avait franchi alors que le feu était encore au vert. Ce témoin qui se situait sur l'avenue Flahaut en sens inverse, était à l'arrêt imposé, lorsqu'il a clairement vu la motocyclette arriver à vive allure à l'intersection après avoir franchi le feu rouge interdisant le passage des véhicules circulant sur l'avenue dans les deux sens.
Il apparaît ainsi qu'en franchissant le feu tricolore malgré l'arrêt absolu imposé par le feu rouge, à vive allure de surcroît alors qu'il circulait sur une intersection, Monsieur Florian Z..., conducteur victime, a commis des fautes qui ne lui ont pas permis d'éviter le choc qui lui a été fatal ; ces fautes, par leur nature et leur gravité, excluent tout droit à indemnisation des dommages subis par ses ayants-droit, victimes par ricochet.
En conséquence le jugement est infirmé et le droit à indemnisation des Consorts Z...- Y... est exclu par application des dispositions précitées de la Loi du 5 juillet 1985, avec rejet de l'ensemble des demandes des parties civiles.
Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en matière correctionnelle et sur intérêts civils, après en avoir délibéré conformément à la loi,
EN LA FORME,
Déclare les appels recevables,
AU FOND,
Infirme le jugement attaqué sur les intérêts civils,
Exclut le droit à indemnisation des Consorts Z...- Y... par application des dispositions de l'article 6 de la loi du 5 juillet 1985,
Le tout conformément aux articles visés au jugement et au présent arrêt et aux articles 512 et suivants du code de procédure pénale.
Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique les jours, mois et an susdits ; le présent arrêt a été signé par le Président et le greffier présents lors de son prononcé.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,