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25/11/2009 | FRANCE | N°07/01066

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 25 novembre 2009, 07/01066


DV/ RVM/ BR
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale


ARRÊT DU 25 Novembre 2009




Numéro d'inscription au répertoire général : 09/ 02842


ARRÊT no


Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 AVRIL 2009 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MONTPELLIER
No RG07/ 01066


APPELANTE :


Mademoiselle Emeline X...


...


...

94170 LE PERREUX SUR MARNE
Représentant : Me Ratiba. OGBI (avocat au barreau de MONTPELLIER)




INTIMEE :


SAS RIVIERE CONSULT ASSO

CIES
prise en la personne de son représentant légal
18, rue de la République
34000 MONTPELLIER
Représentant : Me Michèle. TISSEYRE (avocat au barreau de MONTPELLIER)




COMP...

DV/ RVM/ BR
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale

ARRÊT DU 25 Novembre 2009

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/ 02842

ARRÊT no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 AVRIL 2009 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MONTPELLIER
No RG07/ 01066

APPELANTE :

Mademoiselle Emeline X...

...

...

94170 LE PERREUX SUR MARNE
Représentant : Me Ratiba. OGBI (avocat au barreau de MONTPELLIER)

INTIMEE :

SAS RIVIERE CONSULT ASSOCIES
prise en la personne de son représentant légal
18, rue de la République
34000 MONTPELLIER
Représentant : Me Michèle. TISSEYRE (avocat au barreau de MONTPELLIER)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 945-1 du Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 OCTOBRE 2009, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Régis VOUAUX-MASSEL, Président, chargé d'instruire l'affaire, Monsieur Régis VOUAUX-MASSEL ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Régis VOUAUX-MASSEL, Président
Madame Bernadette BERTHON, Conseillère
Madame Nicole MORIAMEZ, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Dominique VALLIER

ARRÊT :

- Contradictoire.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de Procédure civile ;

- signé par Monsieur Régis VOUAUX-MASSEL, Président, et par Mme Brigitte ROGER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*
* *

EXPOSE DU LITIGE

Le 24 janvier 2006, Melle Emeline X..., étudiante à l'ISEM (Institut des Sciences de l'Entreprise et du Management) en Master 1 « Gestion stratégique des Ressources Humaines » a conclu avec la SAS RIVIERE CONSULT ASSOCIES et l'Université de MONTPELLIER I une convention de stage obligatoire pour la période du 3 avril au 23 juin 2006, stage dont le thème était « Assistante Consultant Recrutement » dans le pôle agro-alimentaire.

Une nouvelle convention de stage tripartite était conclue le 22 juin 2006 pour la fonction de « chargée de recherche » pour la période allant du 3 juillet au 29 septembre 2006. Le stage était interrompu d'un commun accord à la date du 31 août 2006.

Suivant requête en date du 11 juin 2007, Melle X... saisissait le Conseil de prud'hommes de MONTPELLIER aux fins de voir « requalifier la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée ».

Suivant jugement en date du 3 avril 2009, le Conseil de prud'hommes a dit qu'il n'y avait pas de preuve d'une relation de travail et que les conventions de stage ne peuvent être qualifiées de contrat de travail. Il s'est déclaré incompétent et a renvoyé Mme X... à mieux se pourvoir, tout en déboutant la SAS RIVIERE CONSULT ASSOCIES de ses demandes fondées sur les articles 32-1 et 700 du Code de procédure civile.

Melle X... a régulièrement interjeté appel de la décision.

Dans des écritures développées oralement à l'audience et auxquelles la Cour renvoie expressément pour un exposé complet de ses moyens, Melle X..., sollicitant l'infirmation du jugement, a demandé à la Cour de :

- requalifier la relation de travail entre Emeline X... er la SAS RIVIERE CONSULT ASSOCIES en contrat de travail à durée indéterminée ;
- dire que la rupture du contrat de travail est imputable à la SAS RIVIERE CONSULT ASSOCIES ;
- condamner la SAS RIVIERE CONSULT ASSOCIES à lui payer les sommes de :
o 5. 477, 82 € à titre de rappel de salaire :
o 547, 78 € au titre des congés payés y afférents
o 8. 385, 78 € au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé
o 1. 397, 63 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis
o 139, 76 € au titre des congés payés y afférents
o 1. 397, 63 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier
o 8. 500 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et dépourvu de cause réelle et sérieuse
o 1. 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- ordonner la délivrance sous astreinte de 100 € des bulletins de paie d'avril à septembre 2006 ainsi que l'attestation ASSEDIC et du certificat de travail.

A l'appui de ses prétentions, Melle X... a notamment soutenu qu'elle avait essentiellement effectué du phoning et du mailing et avait été ainsi affectée à l'activité normale et permanente de l'entreprise pour l'exercice de tâches d'exécution n'ayant pas de rapport avec les études suivies ; qu'aucun programme de stage n'avait été établi et qu'elle n'avait reçu aucune formation ; que le versement d'une « gratification » supérieure à 30 % du SMIC par l'entreprise fait basculer le régime de « gratification » en régime de « rémunération » dont la conséquence est l'application du régime général de droit commun des salariés ; qu'ainsi la requalification de la relation de travail en contrat de travail à temps complet au SMIC s'impose avec toutes les conséquences financières qui s'ensuivent.

Dans ses écritures développées oralement à l'audience et auxquelles la Cour se réfère expressément, la SAS RIVIERE CONSULT ASSOCIES, considérant que les deux conventions de stage n'encourent aucune qualification en contrat de travail, conclut à la confirmation du jugement et au débouté de Melle X... de l'intégralité de ses demandes et, estimant son action abusive et dilatoire, sollicite à titre reconventionnel la condamnation de cette dernière à lui verser les sommes de 2. 000 € sur le fondement de l'article 559 du Code de procédure civile et de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 dudit Code.

MOTIFS DE LA DECISION

Melle X... a, pour prétendre à la requalification en contrat de travail des deux stages successifs qu'elle a effectués au sein de la SAS RIVIERE CONSULT & ASSOCIES, invoqué :

- l'absence – contrairement à ce qui est prévu dans les conventions signées – d'un programme de stage qui, s'il avait été rédigé, aurait permis d'établir le lien direct entre les études suivies par la stagiaire et la mise en pratique des connaissances acquises ;

- l'importance de la gratification versée qui, dès lors qu'elle est supérieure à 30 % du SMIC, place les parties dans une situation de salarié/ employeur nécessitant une déclaration de cette salariée auprès des organismes sociaux ;

- le fait que, sans qu'une formation ne lui soit parallèlement dispensée, elle n'a effectué que des tâches d'exécution, essentiellement du phoning et du mailing, occupant ainsi un poste permanent relevant de l'activité normale de l'entreprise.

Cependant, si effectivement aucun programme de stage n'a été établi par écrit à l'occasion de la signature de la convention tripartite université/ entreprise/ stagiaire, d'autres éléments du dossier permettent d'établir le lien entre les études suivies par la stagiaire et le stage mis en œ uvre au sein de la société RIVIERE CONSULT & ASSOCIES. Il résulte en effet des deux conventions de stage successivement signées que celles-ci avaient un caractère obligatoire pour l'obtention du diplôme, dans le cadre de la préparation à l'Université de Montpellier 1 – Institut des Sciences de l'Entreprise et du Management – du Master I Organisation et Stratégie – spécialité : Gestion stratégique des ressources humaines et qu'il existe un lien direct entre les études ainsi poursuivies et le thème du stage visé dans les convention, à savoir, pour la première celui d'« Assistante Consultant Recrutement » et pour la seconde celui « de « Chargée de Recherche » au sein d'une entreprise dont l'activité principale est le recrutement, par la sélection des candidats, de collaborateurs pour le compte d'entreprises clientes. Il résulte par ailleurs du mémoire rédigé en fin de stage par Melle X... que le stage, d'une part, s'est bien déroulé sous la tutelle du maître de stage désigné dans les conventions, à savoir M. Y..., dont les appréciations sur la stagiaire, cosignées par un responsable de même niveau (cf. organigramme de l'entreprise) qui l'a remplacé pendant son congé d'été, sont également produites aux débats, et, d'autre part, que ce stage ainsi que Melle X... en décrit le déroulement dans ce mémoire, a un rapport direct avec les études suivies, Melle X... établissant une mise en parallèle constante entre les connaissances pratiques acquises au cours du stage et le contenu de ses études universitaires.

Alors que la loi no2006-396 du 31 mars 2006 et le décret no2006-1093 du 29 août 2006 n'étaient pas applicables à l'époque où le stage considéré a été mis en place, puis exécuté, la convention de stage énonce en son article 5 sous la rubrique « gratification » : le stagiaire ne peut recevoir aucune rémunération au sens du Code du travail et du Code de sécurité sociale. Une gratification est laissée à l'appréciation de l'organisme d'accueil qui pourra également, si elle le souhaite, procurer au stagiaire des avantages en nature et/ ou prendre en charge ses frais. Il ne peut bénéficier que d'une gratification inférieure à 30 % du SMIC pour un mois à temps complet pour continuer à bénéficier du régime étudiant. Tout montant supérieur à ces seuils fait basculer le régime de « gratification » en celui de « rémunération » dont les conséquences sont l'application du régime général de droit commun des salariés (cotisations patronale et salariales de sécurité sociale à payer par l'organisme d'accueil).
En l'espèce, il résulte des pièces produites que les gratifications mensuelles versées par la SAS RIVIERE CONSULT & ASSOCIES sont restées inférieures au taux de 30 % du SMIC, à l'exception du mois de juillet 2007, seul mois pour lequel l'inspecteur URSAFF, à défaut pour l'entreprise de justifier de frais remboursés, a pratiqué un redressement, en soumettant à cotisation la seule partie de la gratification excédant le taux de 30 % du SMIC. En tout cas, il ne résulte pas de ce fait unique que la SAS RIVIERE CONSULT & ASSOCIES entendait rémunérer un travail salarié qu'aurait exécuté Melle X... dans le cadre de son stage.

Enfin force est de constater que Melle X... ne verse aucun élément concret de nature à étayer ses allégations selon lesquelles aucune formation ne lui aurait été dispensée par l'entreprise et qu'elle aurait été affectée à des tâches d'exécution tels que phoning et mailing, occupant ainsi un poste relevant de l'activité normale de l'entreprise. Le courrier qu'elle produit émanant d'un contrôleur du travail en date du 14 mai 2007 relative à une situation présumée de délit de travail dissimulé relevé dans l'entreprise revêt un caractère général et ne relate la constatation d'aucun fait relatif au stage que Melle X... a elle-même personnellement effectué au sein de l'entreprise. Le mémoire de 47 pages que Melle X... a rédigé à l'issue du deuxième stage consécutif tend à établir au contraire qu'elle a reçu, sous la direction de son maître de stage, une formation complète sur tous les aspects de l'activité de l'entreprise Elle écrit notamment en page 34 : « Ma mission dans ce cabinet s'est déroulée sur près de trois mois. Ayant le statut de chargé de recherche, ce poste m'a permis d'assister à la fois aux entretiens avec les consultants et les candidats, d'assister à quelques réunions avec les clients, de participer à la rédaction des rapports confidentiels, et des comptes rendus d'entretien. Surtout il me permettait d'être aux premières loges de la sélection en amont, celle réalisée avant la présentation des candidats aux clients et donc de pouvoir examiner les CV des candidats non retenus. Enfin j'étais régulièrement au contact du client et des candidats engagés dans le processus de sélection et pouvais assister aux différentes phases de négociations entre les trois protagonistes ». Les exemples concrets et détaillés dont Melle X... émaille son mémoire lorsqu'elle aborde toutes les étapes de l'intervention du cabinet de consultant, n'ont été rendus possibles que par le fait qu'elle a pu assister au déroulement du processus dans son ensemble,- ce qui cadre mal avec son affectation sur un poste se limitant à des tâches d'exécution, tel qu'elle l'allègue actuellement. Elle ne fournit pas davantage de témoignages, alors que l'entreprise démontre que Melle X... a largement sollicité à cette fin les autres stagiaires de l'époque, l'entreprise produisant, pour sa part le témoignage de M. Z... qui indique au contraire, après avoir observé que Melle X... avait cherché à le déstabiliser, qu'à la différence de la plupart des entreprises qui confient des tâches rébarbatives aux stagiaires, il a eu, au sein du cabinet RIVIERE, une formation complète et constructive sur tous les plans.

C'est dès lors à juste titre que le premier juge a rejeté la demande de Melle X... aux fins de requalification de son stage en contrat de travail, ainsi que ses demandes subséquentes. Il convient toutefois de le réformer en ce sens qu'il n'y avait pas lieu de se déclarer incompétent, mais de prononcer le débouté de Melle X....

De son côté, la partie intimée ne justifie nullement d'un quelconque abus de la part de Melle X... dans l'exercice de son droit d'ester en Justice et d'exercer les voie de recours légalement admissibles. Elle sera déboutée de la demande qu'elle a formée sur le fondement de l'article 559 du Code de procédure civile.

Il n'est pas non plus inéquitable, au sens de l'article 700 du Code de procédure civile de laisser à chacune des parties la charge des frais, non compris dans les dépens, qu'elles ont pu exposer pour assurer leur défense.

DECISION

Par ces motifs,

La Cour,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit que les conventions de stage concernées ne peuvent être qualifiées de contrat de travail ;

Le réformant pour le surplus et statuant à nouveau,

Déboute Melle Emeline X... de l'intégralité de ses demandes ;

Déboute la SAS RIVIERE CONSULT & ASSOCIES de sa demande reconventionnelle ;

Dit n'y avoir lieur à application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne Melle X... aux dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 07/01066
Date de la décision : 25/11/2009

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Montpellier


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-11-25;07.01066 ?
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