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18/11/2009 | FRANCE | N°08/00027

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 18 novembre 2009, 08/00027


JONCTION avec le no 09/2335











BR/RVM/BR

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4o chambre sociale



ARRÊT DU 18 Novembre 2009





Numéro d'inscription au répertoire général : 09/02246



ARRÊT no



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 MARS 2009 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE RODEZ

No RG08/00027





APPELANTE ET INTIMEE :



COMMUNE DE CONQUES

prise en la personne de son Maire Philippe X...


Le Bourg

12320 CONQUES>
Représentant : Me MOLINIER (Barreau de Montpellier) substituant Me Christiane .RANDAVEL (avocat au barreau de RODEZ)





INTIMEE ET APPELANTE :



Madame Anne-Marie Z...


...


11120 GINESTAS

Représentant : la SCP C...

JONCTION avec le no 09/2335

BR/RVM/BR

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4o chambre sociale

ARRÊT DU 18 Novembre 2009

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/02246

ARRÊT no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 MARS 2009 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE RODEZ

No RG08/00027

APPELANTE ET INTIMEE :

COMMUNE DE CONQUES

prise en la personne de son Maire Philippe X...

Le Bourg

12320 CONQUES

Représentant : Me MOLINIER (Barreau de Montpellier) substituant Me Christiane .RANDAVEL (avocat au barreau de RODEZ)

INTIMEE ET APPELANTE :

Madame Anne-Marie Z...

...

11120 GINESTAS

Représentant : la SCP CABINET DESNOYER & Associés (avocats au barreau de VALENCE)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 OCTOBRE 2009, en audience publique, Monsieur Régis VOUAUX-MASSEL, Président ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

Monsieur Régis VOUAUX-MASSEL, Président

Madame Bernadette BERTHON, Conseillère

Monsieur Eric SENNA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Brigitte ROGER

ARRÊT :

- Contradictoire.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de Procédure civile ;

- signé par Monsieur Régis VOUAUX-MASSEL, Président, et par Mme Brigitte ROGER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

**

EXPOSE DU LITIGE

Mme Anne-Marie Z... a été embauchée par la commune de CONQUES, représentée par son maire Philippe X..., selon contrat à durée déterminée d'accompagnement à compter du 15 septembre 2006 pour une durée de 6 mois au en qualité de chargée du développement culturel et de communication moyennant un salaire mensuel brut de 1505,17€.

Le 16 mars 2007, un deuxième contrat d'accompagnement à l'emploi a été conclu pour une nouvelle durée de 6 mois, soit jusqu'au 17 septembre 2007.

Par courrier du 14 septembre 2007, la salariée a été informée du non renouvellement de son contrat du fait d'une réponse négative de l'ANPE.

Poursuivant la requalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée, la salariée a saisi le Conseil de prud'hommes de Rodez le 23 février 2008, lequel par jugement de départage du 20 janvier 2009, a dit que la salariée a été bénéficiaire d'une promesse d'embauche non suivie d'effet et a condamné la Commune de CONQUES à payer à Mme Anne-Marie Z... les sommes de 9000€ à titre de dommages et intérêts et 3000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La commune de CONQUES et Mme Z... ont interjeté régulièrement appel de cette décision.

La Commune de CONQUES demande à la Cour de réformer le jugement en ce qu'il a dit que la salariée a été bénéficiaire d'une promesse d'embauche non suivie d'effet et l'a condamnée à payer à Anne-Marie Z... les sommes de 9000€ à titre de dommages et intérêts, et de le confirmer en ce qu'il débouter la salariée de ses demandes tendant à la requalification de ses contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée et de sa demande en paiement d'heures supplémentaires. Elle sollicite la condamnation de la salariée à lui verser une indemnité de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait notamment valoir que la lettre du 8 décembre 2005 constitue, tout au plus une offre d'emploi, mais en aucun cas une promesse d'embauche.

Elle affirme que les actions d'accompagnement et de formation, dans le cadre des contrats d'accompagnement à durée déterminée, n'avaient pas de caractère obligatoire et que son contrat n'a pas été détourné de son but d'insertion professionnelle.

Elle conteste la réalisation par la salariée d'heures supplémentaires ainsi que la demande de frais de déplacement, ainsi que celle visant au remboursement du matériel personnel de la salariée, disant avoir toujours mis à sa disposition les moyens nécessaires à l'accomplissement de sa tâche.

Dans des écritures développées oralement à l'audience et auxquelles la Cour renvoie expressément pour un exposé complet de ses moyens, Mme Anne-Marie Z... demande à la Cour de confirmer le jugement en ce qu'il a dit qu'elle avait été bénéficiaire d'une promesse d'embauche non suivie d'exécution et de réformer le jugement pour le surplus et en conséquence de requalifier ses contrats en contrat à durée indéterminée.

Elle sollicite en conséquence, à titre principal, la condamnation de la Commune de CONQUES à lui payer les sommes de :

- 1536,11€ à titre d'indemnité de préavis et 153,61 € de congés payés y afférents

-1536,11€ à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement

-1536,11€ à titre d'indemnité de requalification

-9216,66€ à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive.

Elle prétend en effet que compte tenu de ses deux ans de bénévolats, d'une promesse de contrat à durée indéterminée dans un courrier du 8 décembre 2005, du défaut d'action d'accompagnement et de formation dans ses contrats et au surplus de l'embauche postérieure de trois personnes aux mêmes fonctions, ses contrats doivent être requalifiés en contrat à durée indéterminée de sorte que la rupture de son contrat est abusive.

A titre subsidiaire, elle sollicite la condamnation de la Commune de CONQUES au paiement de la somme de 12.442,49 € en réparation du préjudice subi du fait fautif de la Commune tendant à laisser croire à un emploi pérenne et à une embauche définitive, au sens des dispositions des articles 1382 et suivants du Code civil.

En ce qui concerne l'exécution de son contrat de travail, Mme Z... sollicite le paiement d'heures supplémentaires à hauteur de 3.323,38 €, outre 332,34 € au titre des congés payés y afférents. Elle demande par ailleurs pour l'utilisation de son matériel informatique personnel et les consommables une somme de 3.424,28 € à titre de dédommagement. Elle estime avoir subi un préjudice financier en raison des nombreux déplacements qu'elle a dû effectuer avec son véhicule personnel et sollicite à ce titre une somme de 1.500 €.

Enfin, Mme Z... sollicite la condamnation de la Commune de CONQUES à lui payer la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et la confirmation de l'allocation de la somme de 3.000 € sur le même fondement en première instance.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande en paiement d'heures supplémentaire et de remboursement de frais

Aux termes de l'article L3171-4 du Code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utile.

Il est de principe également que s'il résulte que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à l'une des parties et que l'employeur doit fournir au juge des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Il est constant, en l'espèce, qu'aux termes des deux contrats à durée déterminée successifs qu'elle a conclus avec la Commune de CONQUES, Mme Z... devait effectuer 35 heures par semaine (pour une rémunération mensuelle brute de 1.505,17 €). Il n'est pas contesté non plus qu'aucune heure supplémentaire ne lui a été réglée.

Or, Mme Z... qui a été embauchée par la Commune de CONQUES en qualité de chargée du développement culturel et de la communication a décrit de manière détaillée les différentes activités qui lui étaient confiées, versant à l'appui de sa description diverses pièces justificatives et attestations, desquelles il résulte qu'elle était en charge de :

-La publication des bulletins bimestriels d'information de la Commune, sur lesquels elle figure comme « responsable de la publication », impliquant reportages, rédaction d'une grande partie des articles, conception et mise en page.

-L'animation et la contribution apportées à de très nombreuses manifestations culturelles

-La prise en charge avec une collègue des visites nocturnes de l'abbatiale, la collègue attestant de ce que Mme Z... effectuait en général toutes les visites des week-ends du vendredi au dimanche soir, un document émanant de la Commune dénombrant 4.676 entrées visites à la charge de Mme Z... pour 2007 ;

-La tenue par roulement du gîte municipal comportant l'entretien des locaux, la réception des clients, les encaissements des nuitées et le suivi des réservations.

Mme Z... a établi un décompte précis des heures effectuées, faisant ressortir par semaine les heures supplémentaires accomplies de la semaine 38 à la semaine 41 de l'année 2006 et de la semaine 4 à la semaine 35 de l'année 2007.

Alors que Mme Z... fournit incontestablement des éléments de nature à étayer sa demande, force est de constater que la Commune, en dépit des exigences légales, ne fournit aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par la salariée, alors que si l'employeur critique à présent la qualité du travail accompli par Mme Z..., il ne peut que reconnaître, au vu des pièces produites, que celle-ci a bien réalisé l'ensemble des tâches décrites. En particulier la Commune ne fournit aucune indication sur les horaires accomplis par Mme Z... comme journaliste, responsable de l'animation de manifestations culturelles, guide en charge des visites nocturnes notamment le week-end et tenue par roulement du gîte communal.

Il convient dans ces conditions de faire droit à la demande en paiement d'heures supplémentaires formée par Mme Z... et de lui allouer, au vu du décompte qu'elle a fourni, la somme, majorations comprises, de 3.323,38 € bruts, outre celle de 332,33 € bruts au titre des congés payés y afférents. Le jugement entrepris sera réformé en conséquence.

Par contre, c'est à juste raison qu'au vu des débats et des pièces produites, le premier juge a débouté Mme Z... de sa demande de remboursement de matériel personnel - dépenses qu'elle a engagées à sa seule initiative -, alors qu'il est établi qu'était mis à sa disposition tout le matériel nécessaire et notamment informatique, à l'accomplissement de ses activités. C'est à bon droit également que le premier juge a relevé que Mme Z... ne justifiait d'aucun frais de déplacement et ne pouvait dès lors prétendre à un quelconque remboursement de ce chef.

Sur la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée

Alors que Mme Z... faisait valoir qu'aucune action d'accompagnement ou de formation n'avait été prévue et que les deux contrats successifs avaient été détournés de leur objectif premier, à savoir l'insertion professionnelle, le premier juge a par des motifs pertinents que la Cour adopte dans leur intégralité, pu, à juste titre, estimer notamment que les actions d'accompagnement et de formation peuvent être prévues sans avoir de caractère obligatoire et donc sans affecter la validité de ces conventions et considérer que Mme Z... était en conséquence mal fondée à solliciter la requalification de ces contrats en un contrat à durée indéterminée. Il convient de confirmer le débouté de Mme Z... de l'ensemble des demandes d'indemnisation qu'elle faisait découler d'une telle requalification.

Sur la promesse d'embauche

La demanderesse se prévaut du courrier que lui a adressé le 8 décembre 2005 le Maire de la Commune de CONQUES et qui est ainsi libellé :

«Suite à vos différentes contributions au service de la commune, je vous confirme que je compte sur vous pour un emploi à durée indéterminée, soit pour prendre la relève de la direction du Centre Européen soit pour vous occuper des actions culturelles de la Mairie à la rentrée de septembre/octobre 2006. Toutefois, pour une bonne gestion de la Mairie, nous pourrions d'abord passer un contrat aidé. Un pied à terre à Dadon permettra d'assurer le bulletin municipal en attendant ».

Or, cet engagement de confier à Mme Z... un emploi à durée indéterminée pour s'occuper des actions culturelles de la commune (où Mme Z..., diplômée en histoire de l'art et ayant une longue expérience professionnelle de journaliste – cf. curriculum vitae - était intervenue jusque là comme bénévole) était corroboré par la signature le 15 septembre 2006 d'un contrat d'accompagnement à l'emploi, ainsi que le prévoyait in fine le courrier précité. Ce contrat aidé corroborant l'engagement de confier à terme un emploi à durée indéterminée à Mme Z... en fixait la nature exacte des fonctions dévolues, le niveau de rémunération et les conditions générales de l'emploi.

C'est cet engagement ferme de lui confier un emploi à durée indéterminée qui déterminait précisément Mme Z... à signer en septembre 2006 le contrat aidé, puis un second d'une nouvelle durée de 6 mois le 16 mars 2007 (la Commune invoquant et continuant à invoquer dans ses écritures son endettement important l'obligeant à recourir à ce type de contrat) et à quitter définitivement sa région d'origine pour s'installer d'abord provisoirement puis durablement à CONQUES, engageant pour ce faire des frais.

Le non respect par l'employeur de l'engagement ainsi pris et la rupture brutale des relations contractuelles lorsque l'ANPE refusait la mise en place d'un troisième contrat aidé, sont constitutifs d'une faute qui engage la responsabilité de la Commune sur le fondement de l'article 1382 du Code civil à raison du préjudice qui en est résulté pour Mme Z....

Ce préjudice, compte tenu de l'âge de la salariée (56 ans), de son niveau de compétence, de son investissement personnel et des frais qu'elle a été amenée à engager, a été justement apprécié par le premier juge à la somme de 9.000 €.

Il est équitable au sens de l'article 700 du Code de procédure civile d'allouer à Mme Z... une indemnité à titre de contribution aux frais, non compris dans les dépens, qu'elle a dû exposer pour assurer sa défense.

La Commune de CONQUES qui succombe à l'instance, sera débouté de la demande qu'elle a présentée sur le même fondement et sera tenue aux dépens.

DECISION

Par ces motifs,

La Cour,

Ordonne la jonction des procédures inscrites au Répertoire Général sous les numéros 09/02246 et 09/02335

Déclare recevables en la forme les appels respectivement interjetés par la Commune de CONQUES et par Mme Z... ;

Au fond, confirme le jugement du Conseil de prud'hommes de RODEZ en toutes ses dispositions, excepté en ce qu'il a débouté Mme Z... de ses demandes en paiement d'heures supplémentaires et de congés payés y afférents ;

Et statuant à nouveau de ce dernier chef,

Condamne la Commune de CONQUES à verser à Mme Anne-Marie Z... les sommes de 3.323,38 € bruts, outre celle de 332,33 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

Condamne en outre la Commune de CONQUES à verser à Mme Z... une indemnité de 3.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile (en ce compris le montant alloué sur le même fondement par le premier juge) ;

Condamne la Commune de CONQUES aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 08/00027
Date de la décision : 18/11/2009

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Rodez


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2009-11-18;08.00027 ?
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