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21/04/2009 | FRANCE | N°08/1267

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Ct0050, 21 avril 2009, 08/1267


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1re Chambre Section A2
ARRET DU 21 AVRIL 2009
Numéro d'inscription au répertoire général : 08 / 01267
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 SEPTEMBRE 2007 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BÉZIERS No RG 05 / 0436

APPELANTE :
Madame Marguerite X... épouse Y...... 34500 BEZIERS représentée par la SCP AUCHE-HEDOU, AUCHE AUCHE, avoués à la Cour assistée de Me DELFAU-BARDY, avocat au barreau de BEZIERS

INTIMES :
Monsieur Patrick Y... né le 06 Septembre 1953 à BEZIERS (34500) de nationalité Française... 34500

BEZIERS représenté par la SCP CAPDEVILA-VEDEL-SALLES, avoués à la Cour

Madame Marie-José Y... n...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1re Chambre Section A2
ARRET DU 21 AVRIL 2009
Numéro d'inscription au répertoire général : 08 / 01267
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 SEPTEMBRE 2007 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BÉZIERS No RG 05 / 0436

APPELANTE :
Madame Marguerite X... épouse Y...... 34500 BEZIERS représentée par la SCP AUCHE-HEDOU, AUCHE AUCHE, avoués à la Cour assistée de Me DELFAU-BARDY, avocat au barreau de BEZIERS

INTIMES :
Monsieur Patrick Y... né le 06 Septembre 1953 à BEZIERS (34500) de nationalité Française... 34500 BEZIERS représenté par la SCP CAPDEVILA-VEDEL-SALLES, avoués à la Cour

Madame Marie-José Y... née le 06 Septembre 1961 à BEZIERS (34500) de nationalité Française... 34290 SERVIAN représentée par la SCP CAPDEVILA-VEDEL-SALLES, avoués à la Cour

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 26 Février 2009
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 03 MARS 2009, en audience publique, Madame Sylvie CASTANIE ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Christian TOULZA, Président Madame Sylvie CASTANIE, Conseiller Monsieur Hervé BLANCHARD, Conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Monique AUSSILLOUS
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Christian TOULZA, Président, et par Mme Monique AUSSILLOUS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS-PROCÉDURE-MOYENS et PRÉTENTIONS des PARTIES :
Selon acte notarié en date des 14, 17 et 21 février 1992, les époux Claude Y...- Marguerite X... font donation en avancement d'hoirie à leurs quatre enfants, Patrick, Christian, Marie-José épouse Z... et Bruno, de la nue-propriété des 10. 000 parts de la S. C. I. « LE DANUBE Y... », avec réserve d'usufruit au profit de Claude Y..., immédiatement reversible, à son décès, sur la tête et au profit de son épouse qui accepte. Les époux Y... sont également propriétaires de 10. 000 parts dans cette société.
Les associés de la S. C. I. « LE DANUBE Y... », réunis en Assemblée Générale ordinaire le 18 août 2003, donnent tout pouvoir à Hugues Y... et à Marguerite X... veuve Y... à l'effet de vendre un ensemble immobilier comprenant hangar et bâtiment à usage commercial avec terrain autour, situé à BÉZIERS, route de Pézenas, moyennant le prix de 710. 000, 00 euros.
Selon acte authentique reçu par Maître B..., Notaire à CAZOULS-LES-BÉZIERS le 21 novembre 2003, la S. C. I. « LE DANUBE Y... », représentée par Hugues Y... et par Marguerite X... veuve de Claude Y..., vend le bien précité à la SCI LE POULAIN au prix convenu de 710. 000, 00 euros.
Maître B... remet à Maguy Y..., selon bordereau portant en tampon la date du 28 novembre 2003, la somme de 355. 000, 00 euros représentant la moitié du prix de vente.
Par jugement en date du 3 septembre 2007, le Tribunal de grande instance de BÉZIERS, saisi par Patrick Y... et par Marie-José Y... selon acte du 15 février 2005, condamne Marguerite X... veuve Y... à payer à Patrick Y... et à Marie-José Y..., à chacun, la somme de 106. 500, 00 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 15 février 2005, et la somme de 2. 000, 00 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Marguerite X... veuve Y... relève appel de ce jugement, selon déclaration au greffe enregistrée le 22 février 2008.
Dans ses dernières écritures déposées le 23 juin 2008, Marguerite X... veuve Y... conclut à l'infirmation du jugement entrepris dans toutes ses dispositions, au rejet des demandes de Patrick Y... et de Marie-José Y... et à leur condamnation à lui payer la somme de 10. 000, 00 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 20. 000, 00 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens. Elle se prévaut de l'article 621 du Code civil, dans sa nouvelle rédaction résultant de la loi du 23 juin 2006, et soutient qu'en l'espèce, l'accord de l'ensemble des héritiers Y... pour que l'usufruit qu'elle détenait sur les parts de la S. C. I. soit reporté sur le prix de vente du bien, ne fait aucun doute. Elle en veut pour preuve l'Assemblée Générale de la S. C. I. « LE DANUBE Y... » du 18 août 2003, les chèques remis par le notaire aux deux gérants de la S. C. I., par ailleurs usufruitiers des parts sociales, et enfin son absence de renonciation à l'usufruit sur le prix de vente.

Dans leurs dernières écritures déposées le 31 octobre 2008, Marie-José Y... et Patrick Y... concluent à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné Marguerite Y... à payer la valeur de la nue-propriété et à sa réformation en ce qui concerne le montant des sommes mises à la charge de cette dernière au titre de la valeur de la nue-propriété. Marguerite Y... doit, en définitive, être condamnée à régler à chacun d'eux la somme de 53. 250, 00 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 21 novembre 2003 jusqu'au parfait paiement. Elle doit en outre être condamnée à leur payer la somme de 20. 000, 00 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 3. 000, 00 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est en date du 26 février 2009.

SUR CE :

L'article 621 du Code civil, dans sa rédaction résultant de la loi du 23 juin 2006, visé par Marguerite Y... dans ses écritures, selon lequel, en cas de vente simultanée de l'usufruit et de la nue-propriété d'un bien, le prix se répartit entre l'usufruit et la nue-propriété selon la valeur respective de chacun de ces droits, sauf accord des parties pour reporter l'usufruit sur le prix, est sans application en l'espèce.

L'article 47 de la loi précitée fixe, en effet, l'entrée en vigueur de cette disposition au 1er janvier 2007.
Or, il est constant que l'acte de cession litigieux à l'issue duquel le notaire a remis le prix de vente de l'immeuble vendu aux usufruitiers des parts sociales de la S. C. I. « LE DANUBE Y... » est en date du 21 novembre 2003, de sorte que le texte nouveau est sans effet à son égard.
Selon l'article 617 du Code civil, « l'usufruit s'éteint (...) par la perte totale de la chose sur laquelle l'usufruit est établi ».
La vente d'un bien démembré conclue avec un acheteur unique par le nu-propriétaire en ce qui concerne la nue-propriété et par l'usufruitier en ce qui concerne l'usufruit, équivaut à la perte juridique de la chose au sens de l'article 617 précité.
Cette vente conjointe par l'usufruitier et le nu-propriétaire produit son effet translatif de la pleine propriété, de sorte que l'usufruit prend fin et que le prix de vente doit être partagé entre le nu-propriétaire pour la valeur de la nue-propriété et l'usufruitier pour la valeur de l'usufruit.
Deux pleines propriétés portant, chacune, sur une partie du prix sont ainsi substituées à un usufruit et à une propriété.
Cette règle n'étant pas d'ordre public, les parties peuvent convenir d'un report de l'usufruit sur le prix de vente, l'usufruit se transformant alors en quasi-usufruit.
Aucun élément objectif du dossier ne permet d'affirmer que les nus-propriétaires sont convenus avec l'usufruitière, ainsi que le soutient inexactement Marguerite Y..., de reporter l'usufruit sur le prix de vente.

L'Assemblée générale ordinaire des associés de la S. C. I. « LE DANUBE Y... » en date du 18 août 2003, curieusement signée seulement par les gérants de la société, usufruitiers, et non par les associés nus-propriétaires, dispose que tous les associés sont unanimes pour accepter le projet de vente et donner tous pouvoirs à Hugues Y... et à Marguerite Y... pour signer tous actes nécessaires à la régularisation de cette opération.

Cette résolution exprime l'accord des associés pour vendre le bien considéré mais pas pour que le prix soit encaissé exclusivement par les usufruitiers.
Il ne peut être davantage déduit du fait que les nus-propriétaires n'ont pas recherché la responsabilité du notaire qui a remis les fonds issus de la vente aux seuls usufruitiers, qu'ils ont par là même accepté expressément que ces derniers conservent l'intégralité des fonds sur lesquels leur usufruit se serait reporté.
C'est donc à juste titre que le premier Juge, considérant, enfin, que le produit de la vente d'un immeuble soumis à un usufruit ne peut être assimilé à un fruit au sens de l'article 582 du Code civil donnant à l'usufruitier le droit d'en jouir, a estimé que Patrick Y... et Marie-José Y... étaient fondés à réclamer le paiement de leur part de nue-propriété, qu'il a toutefois inexactement fixée, pour chacun, à la somme de 106. 500, 00 €.
Patrick Y... et Marie-José Y... font, en effet, eux-mêmes valoir que le notaire a remis à Marguerite Y... la somme de 355. 000, 00 €, représentant la moitié du prix de vente (710. 000, 00 €). Celle-ci, née le 12 janvier 1935, était âgée, au moment de l'acte litigieux en date du 21 novembre 2003, de 68 ans. La valeur de son usufruit s'élevait donc à 40 % et celle de la nue-propriété, par voie de conséquence, à 60 %. Il s'ensuit que la part revenant au nu-propriétaire sur la vente de l'immeuble s'élevait à 213. 000, 00 € (350. 000, 00 € x 60 %). Marguerite Y... ayant quatre enfants nus-propriétaires, la part de chacun s'élève à 53. 250, 00 € (213. 000, 00 € : 4).

Le jugement entrepris, confirmé dans son principe, doit, en revanche, être réformé sur le montant des sommes allouées aux intimés.

Celles-ci seront majorées des intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation, soit le 15 février 2005, et non à compter de celle de l'acte litigieux.
Marguerite Y... qui succombe en son appel, doit être déboutée de ses demandes en paiement de dommages et intérêts et en application de l'article 700 du Code de procédure civile et condamnée, par considération d'équité, à payer à Patrick Y... et à Marie-José Y... la somme de 2. 000, 00 € en application de ce texte.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,
CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a dit que Marguerite Y... était débitrice sur le prix de vente, de la valeur correspondant à la nue-propriété, et en ce qu'il l'a condamnée à payer à Patrick Y... et à Marie-José Y... la somme de 2. 000, 00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
RÉFORME le jugement entrepris pour le surplus et CONDAMNE Marguerite X... veuve Y... à payer à Patrick Y... et à Marie-José Y..., à chacun, la somme de 53. 250, 00 € (cinquante-trois mille deux cent cinquante euros), outre les intérêts au taux légal à compter du 15 février 2005.
DÉBOUTE Marguerite Y... de ses demandes en paiement de dommages et intérêts et en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
CONDAMNE Marguerite Y... à payer à Patrick Y... et à Marie-José Y... la somme de 2. 000, 00 € (deux mille euros) en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
CONDAMNE Marguerite Y... aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la S. C. P. CAPDEVILA-VEDEL SALLES, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Ct0050
Numéro d'arrêt : 08/1267
Date de la décision : 21/04/2009

Analyses

USUFRUIT - Vente - Vente de l'usufruit et de la nue-propriété - Vente simultanée - Effet - Prix total - Répartition proportionnelle à la valeur comparative de l'usufruit et de la nue-propriété - /JDF

L'article 621 du Code civil, dans sa rédaction résultant de la loi du 23 juin 2006, selon lequel, en cas de vente simultanée de l'usufruit et de la nue-pro- priété d'un bien, le prix se répartit entre l'usufruit et la nue-propriété selon la va- leur respective de chacun de ces droits, sauf accord des parties pour reporter l'usufruit sur le prix, ne s'applique pas à un acte de vente antérieur à l'entrée en vigueur de la loi. Selon l'article 617 du Code civil l'usufruit s'éteint (...) par la perte totale de la chose sur laquelle l'usufruit est établi. La vente d'un bien démembré est une perte au juridique au sens de l'article précité. Dès lors, la vente conjointe par l'usufruitier et le nu-propriétaire produit son effet translatif de la pleine propriété, de sorte que l'usufruit prend fin et que le prix de vente doit être partagé entre le nu-propriétaire pour la valeur de la nue- propriété et l'usufruitier pour la valeur de l'usufruit. Deux pleines propriétés port- ant chacune, sur une partie du prix sont ainsi substituées à un usufruit et à une propriété. Le produit de la vente d'un immeuble soumis à un usufruit, ne peut donc pas être assimilé à un fruit au sens de l'article 582 du Code civil donnant à l'usufruitier le droit d'en jouir


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Béziers, 03 septembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2009-04-21;08.1267 ?
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