CA MONTPELLIER 1re A1 17 MARS 2009
- X... C/ Y...
- RG 2007.7372
PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu le jugement rendu le 6 novembre 2007 par le Tribunal de Grande Instance de PERPIGNAN, qui a annulé la vente immobilière passée le 20 juillet 2001 devant maître Jacques Z..., notaire à MILLAS, entre Valérie Y..., Bryan Y... et Guy X..., ordonné la restitution du terrain par les consorts Y... à Guy X..., en l'état où il se trouve actuellement, et la restitution par Guy X... à leur profit du prix de vente de 22 867,35 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2001 ; mis hors de cause Maître Jacques Z... ; condamné Guy X... à payer aux consorts Y... la somme globale de 5 702,14 € à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, et celle de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ; condamné les consorts Y... à payer à Maître Jacques Z... la somme globale de 2 000 € sur le même fondement, et condamné Guy X... aux dépens de l'instance, y compris les frais de restitution de l'immeuble comprenant les frais de publication ; ordonné la communication du jugement au bureau de la conservation des hypothèques par la partie la plus diligente ; rejeté toute demande plus ample ou contraire, y compris l'appel en garantie du notaire par monsieur X... ;
Vu l'appel régulièrement interjeté par Guy X... et ses conclusions du 29 février 2008 tendant, à titre principal, à débouter les consorts Y... de l'intégralité de leurs demandes et les condamner à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens en ce compris les frais de mainlevée des inscriptions prises de leur chef ; à titre subsidiaire, constater qu'il s'en remet à justice sur la demande d'annulation de la vente du 20 juillet 2001 et sur la demande de restitution de la chose et du prix en découlant, débouter les consorts Y... du surplus de leurs demandes, condamner Maître Z... à le relever et garantir de toutes les conséquences dommageables découlant pour lui de l'annulation de ladite vente et de toutes condamnations prononcées à son encontre au profit des consorts Y... en principal, intérêts, frais et accessoires à l'exception de la condamnation à restituer le prix de vente ; condamner les consorts Y... à procéder avant toute restitution du terrain à sa remise dans l'état qui était le sien au jour de la vente ; ordonner la mainlevée aux frais de Maître Z... de tout privilège, hypothèque, sûreté et plus généralement de toute inscription prise sur l'immeuble litigieux du chef des consorts Y... ; condamner Maître Z... à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC aux entiers dépens en ce compris les frais de mainlevée des inscriptions prises du chef des consorts Y... ;
Vu les conclusions notifiées le 1er juillet 2008 par les consorts Y..., tendant à confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf à condamner Monsieur X... à leur payer la somme de 10 127,36 euros au titre des préjudices financier et moral ; le condamner au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens ;
Vu les conclusions notifiées le 9 juin 2008 par Maître Jacques Z..., tendant à confirmer le jugement, constater qu'au moment de la passation de l'acte il avait en sa possession une note de renseignement d'urbanisme et un certificat d'urbanisme positif, et que le PPRN en cours d'approbation et non définitif n'était pas mentionné sur le certificat d'urbanisme ; que dès lors il n'a pas manqué à son devoir d'information et débouter en conséquence les parties de leur demande à son égard ; dans tous les cas, constater que la demande en remboursement du prix de vente constitue un préjudice non indemnisable par le notaire qui n'a pas reçu le prix et débouter les consorts Y... de leur demande à cet égard ; condamner les succombants à verser une somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens ;
MOTIVATION
SUR LA DEMANDE D'ANNULATION DE LA VENTE
Force est de constater avec le premier juge que les époux Y..., qui avaient acheté le 20 juillet 2001 un terrain à bâtir, se sont retrouvés avec un terrain inconstructible par l'effet de l'arrêté du 12 avril 2001 approuvant le plan de prévention des risques naturels et pris antérieurement à la vente, et qu'ils se sont heurtés à un rejet de leur demande de permis de construire déposée le 30 septembre 2002.
Nul se saurait sérieusement prétendre que les acquéreurs ne tenaient pas la constructibilité du terrain pour qualité substantielle et qu'ils auraient consenti à l'achat s'ils avaient pu soupçonner qu'il leur serait interdit de construire la maison qu'ils voulaient y bâtir.
Leur consentement a manifestement été vicié par une erreur induite par la délivrance d'un certificat d'urbanisme délivré par la Mairie le 4 mai 2001 admettant la possibilité de bâtir, sans que ce certificat ni l'acte notarié ne fasse une allusion quelconque à l'arrêté du 12 avril 2001. Or les époux Y..., qui demeuraient en Grande-Bretagne, n'avaient aucun moyen d'en connaître l'existence.
Il ne peut être fait valoir utilement que la délivrance d'un certificat d'urbanisme leur rendait inopposable l'arrêté du 12 avril 2001 et que le permis de construire leur aurait été accordé s'ils l'avaient demandé dans le délai d'un an, alors que nul n'a attiré leur attention au moment de la vente sur le fait qu'en raison d'un arrêté préfectoral préexistant, il leur serait définitivement impossible de réaliser leur projet dans le cas où ils laisseraient passer ce délai, et qu'ils ont été ainsi privés de cette information essentielle.
Dès lors c'est à bon droit que le premier juge, tirant les conséquences de l'erreur sur la substance ayant vicié leur consentement, a annulé la vente immobilière conclue par acte authentique du 20 juillet 2001 en application de l'article 1110 du Code Civil.
SUR LES CONSEQUENCES DE L'ANNULATION DE LA VENTE
Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a, en conséquence de l'annulation de la vente, ordonné les restitutions croisées du terrain à Guy X... et du prix de vente aux époux Y..., en observant que ces derniers ne sont pas tenus cependant de remettre le terrain en son état antérieur, et ne pourraient être redevables que d'une indemnité, en l'espèce non réclamée, pour la dépréciation qui pourrait éventuellement résulter des transformations qu'ils y ont réalisées.
L'effet rétroactif de cette annulation interdit au vendeur d'obtenir une indemnité correspondant à la seule occupation de l'immeuble, tout comme elle interdit à l'acquéreur de prétendre bénéficier d'intérêts au taux légal courant depuis la vente. C'est donc seulement à compter du jugement que doivent courir les intérêts assortissant la condamnation de Monsieur X... à la restitution du prix.
SUR LES DEMANDES DE DOMMAGES-INTERETS
Au vu des justifications produites par les époux Y..., le premier juge a justement évalué à la somme de 5 702,14 € le montant de leur préjudice matériel et moral. Ils ne justifient pas d'un préjudice plus important ou distinct.
C'est à bon droit qu'il a condamné Monsieur X... au paiement de cette indemnité. En effet, il a été nécessairement informé de l'élaboration du plan de prévention des risques par l'enquête publique qui s'est déroulée du 8 novembre 2000 au 8 décembre 2000 dans le village même où il réside. Ainsi que le premier juge l'observe avec justesse, un plan de prévention des risques comporte des impacts si importants en matière d'urbanisme que son élaboration ne peut passer inaperçue de la population. De même, il ne peut sérieusement prétendre avoir ignoré l'arrêté préfectoral du 12 avril 2001 qui a approuvé ce plan et a été publié dans le journal local dès le mois d'avril 2001 et affiché en mairie du 19 avril 2001 au 20 juin 2001. En s'abstenant de signaler aux acquéreurs et au notaire le déclassement du terrain proposé à la vente du fait de ces dispositions réglementaires, il a fait preuve d'une réticence fautive, préjudiciable aux époux Y... qui ont engagé des frais en croyant possible la réalisation de leur projet.
De même, il convient d'approuver l'analyse par laquelle le premier juge a rejeté en revanche les demandes principale et récursoire dirigées contre le notaire, en considérant qu'en possession d'une note et d'un certificat d'urbanisme récents confirmant la possibilité de construire, il ne lui appartenait pas de faire des investigations contre ces documents administratifs officiels et non équivoques auxquels il était fondé à accorder toute confiance ; que contrairement au vendeur, il n'est pas justifié qu'il ait pu être informé de l'enquête publique et de l'arrêté préfectoral approuvant le plan de prévention des risques, sauf à exiger de lui qu'il prenne lecture quotidienne des affiches en mairie ou des annonces légales.
Le jugement sera donc entièrement confirmé de ces chefs.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré, sauf sur le point de départ des intérêts au taux légal assortissant la condamnation de Guy X... au paiement de la somme de 22 867,35 € et statuant à nouveau de ce seul chef, dit que ces intérêts courront à compter du jugement.
Y ajoutant, condamne Guy X... à payer aux consorts Y... la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Dit n'y avoir lieu à autre application de ce texte.
Condamne Guy X... aux dépens d'appel et dit qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de Procédure Civile.