COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1re Chambre Section A2
ARRET DU 07 OCTOBRE 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 07/06509
Décision déférée à la Cour : Arrêt du 26 SEPTEMBRE 2007 rendu par la COUR DE CASSATION sous le N° RG 1024 fs-d suite à l'arrêt du 07 FEVRIER 2006 rendu par la Cour d'Appel de MONTPELLIER sous le N° RG 04/06193 suite au jugement du 08 NOVEMBRE 2004 rendu par le Tribunal de Grande Instance de BEZIERS sous le N° RG 02/00447
APPELANTE :
SARL BATISSEURS DU SOLEIL, prise en la personne de son Gérant en exercice, domicilié en cette qualité au siège social sis
7 boulevard Duguesclin
34544 BEZIERS
représentée par la SCP GARRIGUE -GARRIGUE, avoués à la Cour
assistée de Me PHALIPPOU, avocat au barreau de BEZIERS
INTIMES :
Monsieur Jean-Louis Y...
né le 12 Août 1945 à PARIS
...
92320 CHATILLON
représenté par la SCP DIVISIA - SENMARTIN, avoués à la Cour
assisté de Me GELER, avocat au barreau de MONTPELLIER
Madame Jacqueline A... épouse Y...
née le 23 Avril 1943 à PARIS
...
92320 CHATILLON
représentée par la SCP DIVISIA - SENMARTIN, avoués à la Cour
assistée de Me GELER, avocat au barreau de MONTPELLIER
ORDONNANCE DE CLOTURE DU 04 Septembre 2008
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 09 SEPTEMBRE 2008, en audience publique, Monsieur Hervé BLANCHARD ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Christian TOULZA, Président
Madame Sylvie CASTANIE, Conseiller
Monsieur Hervé BLANCHARD, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Monique AUSSILLOUS
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Christian TOULZA, Président, et par Mme Monique AUSSILLOUS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
VU le jugement rendu le 8 novembre 2004 par le Tribunal de Grande Instance de BEZIERS qui a, entre autres dispositions, jugé Monsieur B... responsable de l'inexécution de la vente des parcelles de terre sise à CRUZY aux époux Y..., constaté la caducité du contrat de construction de maison individuelle et condamné la SARL LES BATISSEURS DU SOLEIL à rembourser aux époux Y... la somme de 6356,11 € et à leur payer la somme de 1 800€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Vu l'appel interjeté par la SARL LES BATISSEURS DU SOLEIL le 16 décembre 2005,
Vu l'arrêt de la Cour d'Appel de MONTPELLIER rendu le 7 février 2006 qui a confirmé dans toutes ses dispositions le jugement dont appel,
Vu l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 26 septembre 2007 qui a cassé dans toutes ses dispositions l'arrêt du 7 février 2006 et renvoyé la cause et les parties devant la Cour d'Appel de MONTPELLIER autrement composée,
Vu les dernières conclusions de l'appelant en date du 2 avril 2008 qui demande à la Cour de réformer le Jugement déféré en ce qu'il a constaté la caducité du contrat de construction, et l'a condamné au remboursement d'une somme de 6.356,11€. Il demande la condamnation des époux Y... à lui payer la somme de 12.712,22 euros T.T.C, ainsi que les intérêts au taux légal de cette somme depuis la mise en demeure du 29 Mai 2001 et 1.500 € sur le fondement de l'Article 700 du Code de Procédure Civile,
Aux motifs que :
il s'agissait d'une vente ferme et définitive dont les époux Y... pouvaient obtenir l'exécution forcée.
Monsieur B... avait bien la capacité juridique d'aliéner le bien aux termes de l'acte de donation-partage du29 décembre 1978 ;
les honoraires de l'architecte correspondent au travail effectué par Monsieur C... en sa qualité d'architecte et il fallait l'appeler en cause ;
elle a accompli ses obligations contractuelles dont l'obtention du permis de construire, il lui est du non seulement l'acompte versé mais également les sommes correspondant à ses diligences soit 6.356,11 € T.T.C ainsi que 5 % d'indemnité.
Par dernières conclusions en date du 21 avril 2008 les époux Y... demandent :
La confirmation du jugement en ce qu'il condamne la S.A.R.L BATISSEURS DU SOLEIL à leur rembourser la somme de 6 356,11 € avec intérêts de droit, à leur payer 1 800 € au titre de l'article 700 du C.P.C. et aux dépens de l'instance.
Et accueillant leur appel incident, la condamnation de la S.A.R.L BATISSEURS DU SOLEIL à leur payer la somme de 3 049 € avec intérêts de droits et celle de 850 € par application de l'article 700 du C.P.C. avec distraction au profit de la SCP d'avoué.
Aux motifs que :
leur consentement avait été vicié lors de la signature du C.C.M.I (contrat de construction de maison individuel) dans la mesure où ils croyaient bénéficier d'une condition suspensive concernant l'acquisition du terrain.
L'article 4-1 du C.C.M.I, prévoyant les conditions suspensives et résolutoires, ne leur impartissait de poursuivre l'exécution forcée et, en l'absence de transfert de propriété, le C.C.M.I est devenu sans cause et sans objet au sens de l'article 1126 du Code Civil ; le C.C.M.I supposant implicitement au travers de la condition d'acquisition le transfert de propriété.
La non réalisation d'une ou des conditions suspensives ne leur était pas imputable comme cela a été jugé en première instance de manière définitive. Ils estiment en conséquence que l'article 4-2 du contrat prévoyant cette hypothèse ne peut trouver application et que le contrat ne peut être résilié à leur tort et les pénalités ne peuvent leur être appliquées.
La S.A.R.L BATISSEURS DU SOLEIL n'a pas fait appel de la disposition condamnant Monsieur B... pour inexécution fautive de la vente des parcelles de terres. Le principe de l'autorité de la chose jugée portant sur la résiliation du contrat de vente entraine la résiliation du contrat de construction.
Le C.C.M.I était prévu avec fourniture de plan et cette prestation n'ayant pas été réalisée malgré l'encaissement d'un acompte celui-ci devait leur être remboursé même si c'était à l'architecte de les dresser.
SUR CE :
Il est constant que Monsieur B... a, par compromis signé le 12 mai 2000, vendu aux époux Y... une parcelle de terrain à bâtir sise à CRUZY cadastrée section AC no 207 et 208 pour le prix de 102 550 euros.
Il est établi par ailleurs que, par contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans en date du 7 décembre 2000, les époux Y... se sont engagés auprès de la société Bâtisseurs Du Soleil à faire édifier leur immeuble par cette dernière au prix forfaitaire de 833 867 F.
Ce C.C.M.I dans ses conditions générales, (article 1.4) stipulait que la construction sera édifiée sur un terrain dont le maître de l'ouvrage « déclare être propriétaire, ou pour lequel il bénéficie d'un compromis de vente ».
Contrairement à ce que prétendent les époux Y... aucune distinction ayant pu les induire en erreur n'est faite entre la qualité de propriétaire et celle de bénéficiaire d'un compromis de vente dans la mesure où l'emploi de l'adverbe « ou » indique bien que les effets de droit à l'égard du C.C.M.I sont équivalents dans les deux cas de figure évoqués.
Par ailleurs, le chapitre B des CONDITIONS PARTICULIERES vise comme condition suspensive l' « Acquisition du terrain en cas de promesse de vente ».
Aucune erreur ayant vicié leur consentement ne peut être invoquée par les époux Y..., le contrat, dans ses conditions générale et particulières, faisant bien la différence entre compromis de vente et promesse de vente en y attachant des effets de droit différents ce qui ne devait pas échapper à un contractant normalement avisé.
Il était clairement stipulé dans le compromis de vente que l'acte liait définitivement les parties.
Les conditions suspensives au profit de l'acquéreur, à savoir l'obtention d'un prêt, d'un permis de construire, d'un arrêté d'alignement et de purge de tous les droits de préemption publics, ont toutes été remplies.
Monsieur B... avait bien la capacité d'aliéner son bien dans la mesure où il n'y avait pas de clause l'interdisant dans l'acte de donation partage.
Comme le rappelle la Cour de Cassation la vente était donc parfaite et par conséquence les conditions résolutoires prévues à l'article 4-1 du Ce C.C.M.I ont toutes été réalisées comme cela a d'ailleurs été constaté dans le document en date du 7 décembre 2000, intitulé « NOTIFICATION DE LEVEE DES CLAUSES SUSPENSIVES » ; document signé par la Société Architecte Bâtisseur et Madame Y... pour le Maître de l'ouvrage.
L'autorité de la chose jugée n'a aucun effet de droit sur le présent litige dans la mesure où le jugement du 8 novembre 2004 ne fait que constater l'inexécution du contrat de vente sans remettre en cause sa validité. Il rappelle d'ailleurs dans ses motivations (page 3) que l'acte liait définitivement les parties et que les conditions suspensives y figurant le sont au seul profit de l'acquéreur.
Dans un contrat synallagmatique l'obligation de chacun des contractants trouve sa cause dans l'obligation de l'autre ; Il est constant que cette cause existait bien à la formation du contrat qui avait par ailleurs un objet clairement déterminé à savoir la construction d'une maison individuelle.
S'agissant d'un contrat à exécution successive, le fait que la maison ne puisse plus être construite du fait de la non réalisation du transfert de propriété est sans effet sur la validité du contrat initial sans qu'il soit besoin d'examiner son caractère fautif ou non. Cela justifie seulement que les époux Y... n'aient pas à payer l'intégralité du prix convenu si la maison avait été construite mais seulement les sommes correspondant aux travaux réalisés et aux éventuelles pénalités.
Il résulte de ces constatations que le contrat de construction de maison individuelle était valide, que ses clauses suspensives ayant toutes été réalisées, il doit être exécuté. Le jugement sera réformé.
Le contrat prévoyait un prix forfaitaire et définitif de 833 867 F auquel il faut retrancher une moins value de 25 000 F (avenant du 5 mars 2001) pour le règlement directe par les époux Y... de l'assurance dommage-ouvrage, soit un prix de 808 867F (123 310,97 €).
Etaient prévu le versement de 5% du prix à la délivrance de l'attestation de garantie de remboursement et 5% à l'obtention du permis de construire. La NOTIFICATION DE LEVEE DES CLAUSES SUSPENSIVES signée par le Maître de l'ouvrage rappelle que les versements de fonds prévus à la levée des clauses suspensives sont définitivement acquis à la société.
Par ailleurs l'article 4-2 des conditions générales du C.C.M.I stipule que « la résiliation du contrat par le Maitre de l'ouvrage (en application de l'article 1974 du Code civil) entraîne l'exigibilité en plus des sommes correspondant à l'échelonnement des paiements d'une indemnité forfaitaire… »
Ces sommes sont bien dues puisque ces phases étaient exécutées au moment de la résolution du contrat par les époux Y... et représentent 10 % du contrat soit 12 331 €.
Les époux ont payé la somme de 6 356,11 € représentant 5 % du contrat initial, ils restent donc à devoir 5 974,89 € au titre des travaux réalisés.
La SARL LES BATISSEURS DU SOLEIL demande en outre une indemnité forfaitaire de 5% du prix total en visant deux dispositions de l'article 4.2 sus cité qui prévoit :
pour la première une indemnité forfaitaire de 5% du prix total en cas de non réalisation d'une condition suspensive imputable au maître de l'ouvrage (article 1178 du Code Civil)
pour la seconde une indemnité de 10% du solde du contrat en cas de résiliation du contrat par le Maître de l'ouvrage (article 1794 du Code Civil)
Ces deux dispositions bien que visées toutes deux par La SARL LES BATISSEURS DU SOLEIL sont alternatives et non cumulatives puisque correspondant à des situations juridiques différentes.
Les conditions suspensives ayant été réalisées, le problème de la faute et de leur imputabilité soulevé par les époux Y... est sans intérêt pour la solution du litige, la première disposition de l'article 4.2 ne pouvant s'appliquer.
Par contre le contrat ayant été résilié par eux, la deuxième disposition de l'article 4.2 du contrat qui ne fait que contractualiser les dispositions de l'article 1794, doit s'appliquer, la cause de la résiliation étant sans effets juridiques en l'espèce.
La SARL LES BATISSEURS DU SOLEIL pouvait demander une indemnité de 10% du solde du contrat soit 11 097€. Elle demande une somme moindre ce qui est son droit. Il y a lieu de faire droit à la demande d'indemnité de 6 356,11€.
Les époux Y... seront donc condamnés à payer à la SARL LES BATISSEURS DU SOLEIL les sommes de 5 974,89 € et 6 356,11 € soit un total de 12 331 € outre intérêts au taux légal à compter du 29 Mai 2001date de mise en demeure et déboutés de leur demande en remboursement de la somme de 6 356,11 €.
La somme de 3 049 € dont les époux Y... demandent la condamnation en paiement à l'encontre de la S.A.R.L BATISSEURS DU SOLEIL correspond à ce qu'ils ont payé à l'architecte qui n'est pas attrait à la présente procédure et ne peut être confondu avec la S.A.R.L BATISSEURS DU SOLEIL même s'il en est le gérant. Le fait que le C.C.M.I prévoyait la fourniture de plan est sans incidence puisqu'en tout état de cause il n'a pu être exécuté au delà de la phase d'obtention du permis de construire.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la S.A.R.L BATISSEURS DU SOLEIL les frais irrépétibles non compris dans les dépens. Il y a lieu de condamner les époux Y... à lui payer la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du C.P.C.
Ceux qui succombent doivent supporter les dépens. Les époux Y... seront donc condamnés aux entiers dépens de l'instance.
PAR CES MOTIFS, LA COUR
Statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
EN LA FORME
Déclare l'appel recevable,
AU FOND :
Réforme la décision déférée en ce qu'elle a constaté la caducité du contrat de construction de maison individuelle et condamné la S.A.R.L BATISSEURS DU SOLEIL à payer aux époux Y... la somme de 6 356,11 €.
Et statuant de nouveau :
Condamne Monsieur et Madame Y... Jean-Louis à payer à la S.A.R.L BATISSEURS DU SOLEIL la somme de DOUZE MILLE TROIS CENT TRENTE ET UN EUROS (12 331 €) outre intérêts au taux légal à compter du 29 Mai 2001.
Déboute Monsieur et Madame Y... Jean-Louis de l'ensemble de leurs demandes.
Condamne Monsieur et Madame Y... Jean-Louis à payer à la S.A.R.L BATISSEURS DU SOLEIL la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1 500 €) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du C.P.C.
Condamne Monsieur et Madame Y... Jean-Louis aux dépens de l'instance.