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01/07/2008 | FRANCE | N°07/00697

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Ct0255, 01 juillet 2008, 07/00697


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre
ARRET DU 1er JUILLET 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 00697
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 DECEMBRE 2006 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

APPELANTE :
Madame Marie X... née le 1er juillet 1942 à MAUGUIO (34130) de nationalité française...... 34110 FRONTIGNAN représentée par la SCP ARGELLIES-WATREMET, avoués à la Cour assistée de Me LAURENT substituant la SCP SCHEUER-VERNHET et ASSOCIES, avocats au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :
LES CAVES DE FRONTIGNAN,

société coopérative, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès q...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre
ARRET DU 1er JUILLET 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 00697
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 DECEMBRE 2006 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

APPELANTE :
Madame Marie X... née le 1er juillet 1942 à MAUGUIO (34130) de nationalité française...... 34110 FRONTIGNAN représentée par la SCP ARGELLIES-WATREMET, avoués à la Cour assistée de Me LAURENT substituant la SCP SCHEUER-VERNHET et ASSOCIES, avocats au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :
LES CAVES DE FRONTIGNAN, société coopérative, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social 14, Avenue du Muscat BP 136 34110 FRONTIGNAN représentée par la SCP DIVISIA-SENMARTIN, avoués à la Cour assistée de Me BEAUSSIER de la SCP MELMOUX-PROUZAT-GUERS, avocats au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLOTURE du 2 juin 2008 révoquée par une ordonnance du 5 juin 2008 qui a clôturé l'affaire à nouveau.
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 05 JUIN 2008, en audience publique, M. Guy SCHMITT ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
M. Guy SCHMITT, Président Madame Annie PLANTARD, Conseiller Mme Noële-France DEBUISSY, Conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Melle Colette ROBIN
ARRET :
- contradictoire
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par M. Guy SCHMITT, Président, et par Mlle Colette ROBIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Marie X... a été adhérente à La SCA Frontignan Coopérative spécialisée sur le marché du " Muscat de Frontignan ", au cours des années 1976 à 1988. En 1995, Marie X... est revenue auprès de la coopérative et a signé, le 22 août 1995, une convention de vinification et conditionnement, d'une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction, puis le 2 avril 1996, a adhéré à nouveau à la coopérative. Un nouveau contrat de vinification et conditionnement a été conclu, le 23 juin 1997, et un protocole d'accord a été établi le 13 mars 2000, pour faire le point sur les tarifs et les comptes.
Par la suite, les parties ont échangé des courriers sur des récriminations soulevées par madame X... ; par lettre du conseil de celle-ci, du 24 août 2000, elle a fait connaître à la coopérative qu'elle estimait que les manquements à ses obligations contractuelles, dont la coopérative supporte la responsabilité, justifie la cessation définitive des relations entre les parties.
D'autres échanges de courriers ont suivi, et ont abouti à une lettre adressée par Marie X..., à la coopérative, le 20 novembre 2000, soulignant les désaccords, et concluant à la dénonciation du contrat de vinification et de conditionnement, du 23 juin 1997, ainsi qu'à celle de l'adhésion du 2 avril 1996. La coopérative a répondu par lettre du 29 novembre que madame X... était seule responsable de la rupture du contrat du 23 juin 1997, du fait d'un apport partiel de ses récoltes, et prenait acte de la résiliation de l'engagement du 2 avril 1996, en précisant qu'il prendra effet au 31 décembre 2005.
Considérant que madame X... n'a pas dénoncé le contrat d'adhérent, en bonne et due forme, la Coopérative a assigné Marie X..., par acte du 20 novembre 2002, en paiement de la somme de 173 364 euros outre intérêts légaux, représentant à hauteur de 85 923 euros, le montant de sa participation aux frais fixes, sur le fondement de l'article 7-6 de l'engagement, et de 87 441 euros au titre des pénalités de non-apport sur le fondement de l'article 7-7 du même acte.
Par jugement du 13 décembre 2006, le tribunal de grande instance de Montpellier a condamné Madame X... à payer à la Coopérative de Frontignan une somme de 20 000 euros, avec intérêts légaux à compter de l'assignation et application de l'article 1154 du code civil, ainsi que celle de 1 000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile. Il a retenu que la dénonciation de l'engagement était tardive, et que le refus de la coopérative de prendre en considération la dénonciation était légitime, que le décompte des frais fixes est succinct et pas étayé par des documents justificatifs, et que les demandes d'indemnisation sont excessives.
Marie X... a relevé appel de ce jugement, dont elle demande l'infirmation, pour que la cour :
- déboute la coopérative de Frontignan de sa demande au motif principal que son retrait est régulier, et subsidiaire, qu'il a été effectué conformément aux dispositions contractuelles, et à l'interprétation qu'il convenait de faire de ces dispositions
-condamne la coopérative de Frontignan à lui payer la somme de 50 000 euros en réparation des fautes délictuelles et abus de droit commis
-annule les délibérations du conseil d'administration des 14 janvier et 12 juin 2002
- constate au besoin la résiliation judiciaire de la convention liant les parties aux torts de la SCA
-condamne la coopérative de Frontignan à lui payer la somme de 100 000 euros, au titre de ses inexécutions contractuelles, et de ses pratiques restrictives de concurrence
-condamne la coopérative de Frontignan au paiement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La coopérative de Frontignan demande la réformation de la décision déférée du chef la condamnation au paiement des pénalités, et sollicite qu'elle soit portée à la somme de 173 364 euros avec intérêts légaux à compter de la date de l'assignation introductive d'instance, et qu'il soit fait application des articles 1153 et 1154 du code civil ; subsidiairement, elle demande la confirmation pure et simple du jugement.
SUR QUOI
Le 2 avril 1996, Marie X... a souscrit un engagement d'apport de ses récoltes de vin à la coopérative de Frontignan, pour une durée de cinq ans, renouvelable par tacite reconduction, étant précisé que le décompte de la première année interviendra à partir de la récolte 1996. Devant le premier juge, le débat sur la régularité du retrait a été fondé sur la lettre de rupture, émanant de Marie X..., du 20 novembre 2000, dont le tribunal a considéré, ainsi que la coopérative de Frontignan, qu'elle était hors délai et que le contrat avait été reconduit tacitement, justifiant ainsi l'application des pénalités demandées par la coopérative de Frontignan. Devant la cour, et par ses ultimes conclusions déposées le 4 juin 2008, la veille de l'audience, admises au débat, par suite de la révocation de l'ordonnance de clôture, d'accord entre les parties, Marie X... a invoqué une lettre recommandée avec accusé de réception de son conseil, du 24 août 2000, mettant fin définitivement aux relations entre les parties.
C'est avec juste raison que la coopérative de Frontignan fait valoir dans ses écritures actualisées, au vu de cet élément, que la preuve de l'envoi de cette lettre et de sa réception n'est pas rapportée, malgré son importance capitale, qu'aucun courrier échangé entre les parties n'évoque cette lettre, et que l'on peut s'interroger sur l'intérêt de la lettre de rupture du 20 novembre 2000. Ces observations sont tout à fait pertinentes, et excluent que cette lettre puisse être considérée comme ayant une valeur probante de retrait régulier, dont le défaut de prise en considération par la coopérative serait constitutif d'un abus de la part de celle-ci, justifiant la demande de dommages et intérêts à hauteur de 50 000 euros, de surcroît.
La lettre de rupture de l'adhésion à la coopérative à prendre en considération est donc celle du 20 novembre 2000, claire quant à son objet, dont la coopérative de Frontignan soutient qu'elle est tardive, ce que Marie X... conteste, en faisant valoir que le point de départ ne résulte pas clairement des mentions de l'engagement d'adhésion, ambiguës, qui exigent une interprétation, ne pouvant conduire qu'à dire que l'engagement est entré en vigueur à compter de l'exercice 1997, de sorte qu'il prenait fin en 2001, et que la rupture intervenue au mois de novembre 2000 l'a été dans les délais.
Il est exact que l'imprimé d'adhésion n'a pas été rempli en totalité, et laisse des blancs. Cependant, il précise que la date d'adhésion est le 2 avril 1996 et que le décompte de la première année sera établi à partir de la récolte 1996. Ces mentions ne laissent pas de place pour une interprétation, en dépit des rubriques de l'imprimé non remplies. La prise en compte de la récolte de l'année 1996, pour le premier décompte, implique nécessairement que l'engagement a commencé en 1996, sinon, l'obligation d'apport de la récolte de l'année 1996 serait hors engagement et ne pourrait pas être inclus dans le décompte. La volonté des parties est suffisamment exprimée en ce sens.
Il est constant que l'exercice de la coopérative suit l'année civile. En conséquence, le temps de l'engagement a duré pendant les années 1996, 1997, 1998, 1998 1999, et 2000. Il devait être dénoncé trois mois au moins avant la fin de l'exercice 2000, or il l'a été à un mois et quelques jours. La dénonciation est donc tardive, et en application des dispositions contractuelles, l'engagement a été reconduit tacitement pour une période de cinq années, ainsi que le premier juge en a décidé.
Selon les articles 7-6 et 7-7 des statuts, le conseil d'administration pourra décider de mettre à la charge de l'associé coopérateur n'ayant pas respecté tout ou partie de ses engagements, une participation aux frais fixes restant à la charge des producteurs, ainsi que une ou plusieurs des sanctions suivantes : 10 % de la valeur des quantités qui auraient dû être livrées et 10 % de la valeur des quantités apportées en cas de livraisons non conformes aux dispositions du règlement intérieur. A ce titre, la coopérative de Frontignan demande paiement, respectivement, des sommes de 85 923 euros et 87 441 euros.
Marie X... conteste cette demande, en soulevant la nullité des conseils d'administration du 14 janvier 2002 et 12 juin 2002, dont le premier en particulier ne fixe pas les sanctions devant être lui être appliquées, n'a pas statué sur l'application de la participation de la pénalité pour non-apport, et a donc violé ses droits de la défense et le principe du contradictoire, et alors que de plus, la signification de la sanction ne l'a pas informée des voies de recours, et qu'elle ne justifie pas de l'existence d'un registre spécial, coté et paraphé par le président, sur lequel sont portées les délibérations. La coopérative de Frontignan considère que la procédure suivie est régulière.
L'article 7-7 des statuts prévoit que le conseil d'administration devra, avant de se prononcer sur les sanctions pour non-apport de récolte, mettre en demeure l'intéressé de fournir des explications. Marie X... a été convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 janvier 2002, pour être entendue en ses explications, sur le non-apport de sa récolte de l'année 2001. Elle n'a pas comparu devant le conseil d'administration du 14 janvier 2002, qui a décidé de lui appliquer les pénalités de non-apport au titre des récoltes 2001 et suivantes. Le conseil d'administration du 12 juin 2002 a fixé le montant des pénalités aux sommes de 85 923 euros au titre des de la participation aux frais fixes, et de 87 441 euros au titre des dommages et intérêts. Le montant de ces pénalités lui a été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 juin 2002.
La procédure suivie est donc régulière, du moins pour la sanction liée au non-apport, la décision du conseil d'administration ayant été précédée d'une convocation dont Marie X... a accusé réception. Les statuts ne prévoient aucune disposition pouvant servir de fondement aux autres moyens de nullité soutenus par Marie X..., en particulier, qui prévoiraient l'obligation de préciser les modalités de calcul des pénalités appliquées. Il convient d'ajouter que l'application de l'article 7-6, sur la participation aux frais fixes, n'est pas conditionnée par la convocation devant le conseil d'administration, et que l'examen des procès-verbaux des conseils d'administration fait apparaître qu'ils sont établis sur des feuilles cotées et paraphées par le tribunal de commerce. Les décisions du conseil d'administration n'encourent donc aucune nullité.
Le premier juge a prononcé condamnation au paiement des pénalités, à hauteur de 20 000 euros, globalement, en retenant que la demande de participation aux frais fixes, fondée sur un décompte, était dépourvue de justifications comptables permettant sa vérification, et que la demande de pénalités pour non-apport était manifestement excessive. La coopérative de Frontignan reprend le montant de ses demandes initiales à titre principal, soit la somme de 173 364 euros, au total, et demande subsidiairement la confirmation du jugement.
La demande au titre des frais fixes supportés par la coopérative n'a pas été décidée par le conseil d'administration. Les dispositions de l'article 7-6 stipulent, en effet, que sauf cas de force majeure, le conseil d'administration pourra décider de mettre une quote-part à la charge du coopérateur défaillant, au titre de sa participation aux frais fixes restant à la charge de la collectivité des coopérateurs. Le conseil d'administration du 14 janvier 2002 n'a pris sa décision que sur la base du non-apport des récoltes et n'a pas visé l'application d'une participation aux frais fixes. La demande à ce titre doit être rejetée. La demande en paiement de pénalités du chef de non-apport est prévue par les statuts pour sanctionner l'inexécution des engagements par le coopérateur, et pour un montant de 10 % soit des quantités qui auraient dues être livrées, soit 10 % de la valeur des quantités apportées, non conformes au règlement intérieur. Le juge, peut réduire cette pénalité, ainsi que le premier juge en a décidé, et la somme de 20 000 euros, allouée, ne mérite pas d'être augmentée.
Marie X... soutient encore que la coopérative de Frontignan a commis des fautes dans l'exécution de ses prestations, à savoir facturation de livraison de bouteilles de vin à des tiers, clients non coopérateurs, à des prix moins élevés que ceux qui lui sont facturés, constituant une pratique discriminatoire et restrictive de concurrence, incompatible avec le principe de libre concurrence, et en fourniture de quantités importantes de vin, impropres à la vente, remplacées par des produits de mauvaise qualité. Selon elle, ces fautes manifestent une intention de nuire. Elle considère que, quand bien même le retrait ne serait pas intervenu dans les délais statutaires, il aurait été justifié par ces fautes, et en tout état de cause la résiliation s'imposait. Elle demande à ce titre l'allocation de la somme de 100 000 euros, à titre de dommages et intérêts.
Il convient de rappeler que Marie X... était liée à la coopérative de Frontignan par un contrat d'adhésion à la coopérative et par un contrat de vinification et de conditionnement. Les fautes alléguées paraissent se rattacher aux comptes entre les parties, en tout cas elles ne sont pas susceptibles d'être qualifiées de manquement aux obligations découlant du contrat de vinification et de conditionnement. Le premier juge avait noté l'ambiguïté de la demande, et retenu qu'il pourrait s'agir d'une exception d'inexécution, compte tenu des termes dans lesquels le litige se présentait devant lui. Devant la cour, elle est toujours obscure, et pourrait être effectivement interprétée comme une exception d'inexécution ; en tout cas, en l'état des explications et des pièces justificatives, elle ne vise pas des faits susceptibles de constituer des manquements à des obligations tirées du contrat de vinification et de conditionnement et d'entraîner sa résiliation judiciaire.
Le jugement doit être confirmé. Marie X..., qui succombe, doit supporter la charge de frais exposés par la coopérative de Frontignan, et non compris dans les dépens, à hauteur de 2 000 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme la décision déférée.
Y ajoutant
Condamne Marie X... à payer à la coopérative de Frontignan la somme de 2 000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la même aux dépens, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Ct0255
Numéro d'arrêt : 07/00697
Date de la décision : 01/07/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Montpellier, 13 décembre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2008-07-01;07.00697 ?
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