COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1re Chambre Section AO1
ARRÊT DU 1er JUILLET 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 2895
Décision déférée à la Cour : Jugement du 1er MARS 2007
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE
No RG 05 / 00914
APPELANTE :
La SARL « LES EMBRUNS »
au capital social de 8000 € inscrite sous le RCS n° 447 585 605 43, représentée en la personne de sa gérante en exercice, en cette qualité au siège social sis
43 boulevard des Embruns
11560 FLEURY D'AUDE
représentée par la SCP DIVISIA-SENMARTIN, avoués à la Cour
INTIMES :
Monsieur Paul Daniel X...
né le 7 Juillet 1943 à LA TRONCHE (38700)
de nationalité française
...
11560 SAINT PIERRE LA MER
représenté par la SCP GARRIGUE-GARRIGUE, avoués à la Cour
assisté de la SCP PECH DE LACLAUSE-GONI-GUILHEM, avocats au barreau de NARBONNE substitué par Me Christian GUILHEM
Madame Milagros Y...
A... épouse X...
née le 13 Février 1945 à SAN ROQUE (Espagne)
de nationalité française
...
11560 SAINT PIERRE LA MER
représentée par la SCP GARRIGUE-GARRIGUE, avoués à la Cour
Monsieur Gilbert André B...
né le 06 Février 1951 à AMBLAINVINNES
de nationalité Française
...
60570 ANDEVILLE
représenté par la SCP AUCHE-HEDOU, AUCHE AUCHE, avoués à la Cour
assisté de Me Bruno BLANQUER, avocat de la SCP BLANQUER-GIRARD
Madame Marie Luz C...
née le 3 Mai 1950 à CONCELHOS FEREIRA (Portugal)
de nationalité française
...
78300 POISSY
représentée par la SCP AUCHE-HEDOU, AUCHE AUCHE, avoués à la Cour
ORDONNANCE de CLÔTURE du 22 MAI 2008
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le MARDI 27 MAI 2008 à 14 Heures, en audience publique, Madame Sylvie CASTANIÉ, Conseiller ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Madame Nicole FOSSORIER, Président
Madame Sylvie CASTANIÉ, Conseiller
Monsieur Claude ANDRIEUX, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Melle Marie-Françoise COMTE
ARRÊT :
- contradictoire,
- prononcé publiquement par Madame Nicole FOSSORIER, Président,
- signé par Madame Nicole FOSSORIER, Président, et par Mademoiselle Marie-Françoise COMTE, Greffier présent lors du prononcé.
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* *
FAITS-PROCÉDURE-MOYENS et PRÉTENTIONS des PARTIES :
Les époux X... achètent aux consorts B...- C..., selon acte authentique du 16 juillet 2004, le lot 244 en nature de pavillon individuel portant le numéro 543 sur le plan, avec les 483 / 100 000e des parties communes, et le lot 309 en nature de parking portant le numéro 1543 sur le plan et les 4 / 100 000ème des parties communes, lesdits lots dépendant d'un ensemble immobilier en copropriété situé à SAINT-PIERRE LA MER, Commune de FLEURY d'AUDE (Aude), dénommée Résidence « LES EAUX VIVES II », moyennant le prix de 84 000 €. La superficie de la partie privative du lot 244 soumis à la loi du 18 décembre 1996, dite loi Carrez, est de 34, 06 m². Elle résulte d'une attestation établie par la S. A. R. L. « LES EMBRUNS », agence immobilière du Golfe, le 17 juin 2004.
Le Tribunal de Grande Instance de NARBONNE, saisi par les acquéreurs d'une action en réduction du prix, sur le fondement de l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965, en raison d'un déficit de surface de 6, 28 m², et statuant par un jugement du 1er mars 2007 :
dit que la surface de la véranda doit être exclue de la superficie du lot 244,
et, avant dire droit sur l'action en réduction proportionnelle du prix, ordonne une mesure d'expertise à l'effet de déterminer le métrage de la surface du lot 244, conformément à l'article 4 du décret du 17 mars 1967, de préciser la superficie de la véranda et d'indiquer la surface du pavillon, déduction faite de la surface de la véranda.
La S. A. R. L. « LES EMBRUNS » relève appel de ce jugement selon déclaration au greffe déposée le 25 avril 2007.
Dans ses dernières écritures déposées le 20 mars 2008, la S. A. R. L. « LES EMBRUNS » conclut à la réformation du jugement entrepris, au rejet des demandes des époux X... et des consorts B...- C... et à leur condamnation au paiement de la somme de 5 000, 00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Elle fait valoir que les Assemblées Générales des copropriétaires qui ont eu lieu en 2002 et en 2003, et donc avant l'acte de vente litigieux, ont décidé de modifier la répartition des charges en raison des extensions réalisées par les copropriétaires, en ce compris celle pratiquée par les vendeurs, ayant eu pour effet de transformer la terrasse, qui était une partie commune à usage privatif, en véranda habitable, et donc en partie privative. L'Assemblée Générale du 5 août 2004 à laquelle assistait Paul X... qui venait d'acquérir le bien, a décidé de mandater un Notaire à l'effet de procéder à la modification de l'état descriptif de division, ce qui a eu lieu selon acte authentique du 17 août 2005. La surface de la véranda doit donc être comprise dans le calcul de la surface privative.
Dans leurs dernières écritures déposées le 7 novembre 2007, les consorts B...- C... concluent, au principal, à la réformation du jugement en ce qu'il a dit que la surface de la véranda ne devait pas être comprise dans le mesurage, au rejet des demandes adverses et à la condamnation des époux X... à leur payer la somme de 2 000, 00 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile. La véranda est, en effet, matériellement intégrée dans l'appartement, de sorte que sa superficie doit nécessairement être prise en compte.
Ils demandent subsidiairement, à supposer, ce qui n'est pas démontré, que la surface résultant des modalités de calcul prévues par la loi Carrez et le décret du 17 mars 1967, soit inférieure de plus de 5 % à la surface mentionnée dans l'acte, qu'il soit jugé, au visa de l'article 1147 du code civil, que la S. A. R. L. « LES EMBRUNS » qui a effectué le mesurage critiqué, a commis une faute en intégrant la superficie d'une partie commune à usage privatif et qu'elle soit condamnée au paiement de dommages et intérêts d'un montant équivalent à celui de la condamnation prononcée à leur encontre au profit des époux X.... Leur préjudice correspond à la perte d'une chance de vendre leur bien à la somme minimum de 84 000, 00 €, initialement convenue entre les parties à l'acte. Ils demandent, en outre, que la S. A. R. L. « LES EMBRUNS » soit condamnée à leur payer la somme de 2 000, 00 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Dans leurs dernières écritures déposées le 1er avril 2008, les époux X... concluent, au principal, à la condamnation des consorts B...- C... à leur payer la somme de 14 575, 50 €, représentant la diminution du prix de vente proportionnelle à l'écart entre la surface déclarée (34, 06 m ²) et la surface réelle (27, 78 m²), soit 6, 28 m², c'est-à-dire 18, 45 %.
Ils demandent que la S. A. R. L. « LES EMBRUNS », agent immobilier professionnel qui a manifestement ignoré les principes élémentaires en la matière et qui a donné une information erronée ayant eu pour effet d'influencer leur consentement, soit condamnée, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, à leur payer la somme de 3 000, 00 € à titre de dommages et intérêts.
Ils demandent que leurs adversaires soient condamnés in solidum à leur payer la somme de 3 000, 00 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Ils concluent enfin, subsidiairement, à la mise en oeuvre d'une mesure d'expertise.
L'ordonnance de clôture est en date du 22 mai 2008.
SUR CE :
L'article 46 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa rédaction issue de la loi du 18 décembre 1996, dite loi Carrez, dispose que « toute promesse unilatérale de vente ou d'achat, tout contrat réalisant ou constatant la vente d'un lot ou d'une fraction de lot mentionne la superficie de la partie privative de ce lot ou de cette fraction de lot ».
Il est établi, en l'espèce, que la véranda litigieuse, en nature, à l'origine, de terrasse, et qui constituait donc alors indiscutablement une partie commune à jouissance exclusive d'un copropriétaire, a été ensuite couverte, close et transformée en surface habitable.
Les époux X... ne sont pas fondés à se prévaloir du moyen tiré du fait que l'Assemblée Générale du 5 août 2004 qui s'est prononcée sur la modification de la base de répartition des charges consécutives aux constructions faites par les copropriétaires sur ces parties communes à usage privatif, est postérieure à leur acquisition intervenue selon acte du 16 juillet 2004, de sorte qu'elle ne peut leur être opposée.
Il est établi, en effet, par les pièces versées aux débats, que l'Assemblée Générale des copropriétaires a, dès le 5 août 2002, adopté, dans sa résolution n° 8, le principe de cette modification et que celle du 17 juillet 2003 a établi, sur la base du relevé des extensions effectuées, une nouvelle grille de répartition annexée au procès-verbal dont il résulte que le pavillon n° 543 qui a une surface ajoutée de 13, 50 m voit ses tantièmes passer de 483 à 636.
Les copropriétaires de la résidence, réunis en Assemblée Générale, ont donc manifesté, dès 2003, dans des conditions de vote qui n'ont fait l'objet d'aucun recours, leur volonté de prendre acte de la modification de la composition des lots et de procéder en conséquence à une nouvelle répartition des charges.
Le modificatif de l'état descriptif de division a été formalisé dans un acte authentique du 17 août 2005, régulièrement publié.
Le fait que la modification de l'état descriptif de division ait été formalisée tardivement par rapport au titre de propriété des époux X... du 16 juillet 2004, ne constitue pas un argument opérant. La publicité est essentiellement destinée à l'information des tiers, ce que ne sont pas les époux X..., acquéreurs, venant aux droits de leurs vendeurs.
Les époux X... étaient informés, au moment où ils sont devenus propriétaires, que l'Assemblée Générale avait, dans les conditions de majorité requise, manifesté par deux fois, en 2002 et 2003, sa volonté de modifier la composition des lots et celle-ci leur est donc opposable.
Les époux X... qui ont d'ailleurs, par la suite et plus précisément en novembre 2006, mis en vente leur villa en flattant dans une annonce « sa belle véranda habitable », ne sont pas fondés à soutenir que celle-ci ne fait pas partie de la superficie de la partie privative du lot au sens de la loi Carrez, et même qu'ils ignoraient qu'elle en fît partie.
Le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il a exclu la surface de la véranda de la partie privative du lot n° 543.
Les époux X... doivent en conséquence être déboutés de toutes leurs demandes formées à l'encontre de leurs vendeurs dont l'appel en garantie dirigé contre la S. A. R. L. « LES EMBRUNS » est donc sans objet.
Les époux X... qui succombent, doivent être déboutés de leur demande en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et condamnés, par considération d'équité, à payer aux consorts B...- C... et à la S. A. R. L. « LES EMBRUNS » la somme de 1 500, 00 € à chacun.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,
INFIRME le jugement entrepris dans toutes ses dispositions et statuant à nouveau :
DÉBOUTE les époux X... de toutes leurs demandes.
DIT l'appel en garantie formé par les consorts B...- C... contre la S. A. R. L. « LES EMBRUNS » sans objet.
DÉBOUTE les époux X... de leur demande en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
CONDAMNE les époux X... à payer aux consorts B...- C... et à la S. A. R. L. « LES EMBRUNS » la somme de 1 500, 00 € (mille cinq cents euros), à chacun, en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
CONDAMNE les époux X... aux dépens de première instance et d'appel avec, pour ces derniers, droit de recouvrement direct au profit des avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.