COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1re Chambre Section D
ARRET DU 25 JUIN 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 08 / 01571
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 OCTOBRE 2007
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER
N° RG : 05 / 1546
APPELANTS :
Monsieur André X...
...
représenté par la SCP NEGRE- PEPRATX- NEGRE, avoués à la Cour
assisté de Me Philippe CALAFELL, avocat au barreau de MONTPELLIER
Madame Louis X...
...
représentée par la SCP NEGRE- PEPRATX- NEGRE, avoués à la Cour
assistée de Me Philippe CALAFELL, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
Madame Myriam Z... épouse A...
née le 11 Novembre 1951 à LIAUSSON
...
représentée par Me Michel ROUQUETTE, avoué à la Cour
assistée de Me Cyrille CAMILLERAP substituant la SCP DE CABISSOLE, avocats au barreau de MONTPELLIER
ORDONNANCE DE CLOTURE du 23 Mai 2008
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 28 MAI 2008, en audience publique, Mme Gisèle BRESDIN ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
M. Mathieu MAURI, Président de Chambre
M. Jean- Marc ARMINGAUD, Conseiller
Mme Gisèle BRESDIN, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Hélène LILE PALETTE
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par M. Mathieu MAURI, Président de Chambre.
- signé par M. Mathieu MAURI, Président de Chambre, et par Mme Hélène LILE PALETTE, greffière présente lors du prononcé.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Monsieur André X... et Monsieur Louis X... venant aux droits de Monsieur Louis X... sont propriétaires d'un local à usage de commerce situé... à CLERMONT L'HERAULT.
En vertu d'un bail sous seing privé, les locaux ont été loués à Madame Myriam Z... épouse A... à compter du 1er mai 1980 pour se terminer le 30 avril 1989 pour y exercer son activité commerciale de traiteur.
Ce bail s'est poursuivi ensuite par tacite reconduction. Le 6 juillet 2004, les consorts X... ont, par pli recommandé avec accusé de réception, adressé à Madame Myriam A... une lettre par laquelle ils lui " révisaient le loyer " pour le porter à 504 €, " en application des articles 26 et 27 du décret du 30 septembre 1953 " et " en vertu du bail sous seing privé en date du 01 / 05 / 1980 ".
Madame A... a adressé aux consorts X... un avenant au bail à compter du 1er juillet 2004 aux mêmes conditions que précédemment, sauf le prix du loyer qu'elle fixait à 504 € par mois.
Le 9 septembre 2004, Madame X... a été convoquée pour établir un état des lieux de sortie du local qu'elle occupait depuis le 1er mai 1980. L'huissier Maître C... a demandé au bailleur de comparaître sur les lieux litigieux ; l'huissier a constaté un état d'abandon des lieux appartenant aux consorts X....
Par acte d'huissier du 2 novembre 2004, les consorts X... ont notifié à Madame Myriam Z... épouse A... une mise en demeure d'avoir à justifier de l'exploitation de son activité commerciale, du garnissement des locaux avec des objets, mobiliers, matériels et marchandises en valeur suffisante pour garantir le paiement du loyer et l'exécution des conditions du bail, du bon entretien des lieux, du paiement des charges et contributions personnelles et professionnelles, de l'assurance et du paiement des primes. L'acte reproduisait la clause résolutoire insérée au contrat de bail.
Par courrier officiel de son conseil en date du 19 novembre 2004, Madame A... a produit une attestation d'assurance pour l'année 2004 concernant un commerce à CLERMONT L'HERAULT ainsi que les justificatifs de paiement de la taxe professionnelle.
Par acte extra- judiciaire du 18 janvier 2005, Madame A... a demandé le renouvellement de son bail commercial en date du 1er mai 1980 qui s'est poursuivi au- delà de sa durée contractuelle sans que le propriétaire ait donné congé ou que le locataire ait demandé le renouvellement.
Par acte extra- judiciaire du 14 février 2005, les consorts X... ont répondu que la preneuse ne justifiait pour les locaux leur appartenant d'une inscription au Registre du Commerce et des Sociétés de CLERMONT L'HERAULT ou à la Chambre des métiers, qu'elle ne justifiait pas avoir exploité un fonds de commerce depuis plus de trois ans avant la date de renouvellement du bail, qu'elle ne pouvait donc pas bénéficier du droit au renouvellement prévu par le Décret du 30 septembre 1953 devenu L. 145 du nouveau Code de commerce. Ils ont donc sollicité la remise des clés du local.
Par procès- verbal du 25 février 2005, Maître D..., Huissier de justice, s'est présenté sur les lieux et a constaté que les rideaux métalliques étaient en mauvais état, que les vitrines étaient sales et poussiéreuses. Il a en outre relevé que de la rue le local semblait n'être pas occupé ni entretenu depuis plusieurs mois. Une voisine lui a déclaré que depuis son arrivée 5 mois auparavant, le local est fermé.
Par assignation en date du 8 mars 1995, les Consorts X... ont saisi le Tribunal pour voir constater que Madame Myriam Z...
A... n'a pas droit au statut des baux commerciaux faute d'exploiter les lieux depuis plus de trois ans.
A titre reconventionnel, Madame X... a sollicité le versement d'une indemnité d'éviction.
Par acte d'huissier en date du 14 avril 2005, Madame Myriam Z... épouse A... a notifié sa libération des lieux loués à la suite du refus de renouvellement du bailleur contestant même à Madame A... le bénéfice du statut des baux commerciaux.
Par le jugement dont appel du 3 octobre 2007, le Tribunal de grande instance de MONTPELLIER a, tenant le non- renouvellement du bail commercial concédé à la locataire Madame A..., estimé que celle- ci bénéficie des dispositions du décret de 1953 devenu l'article L. 145-1 du Nouveau Code de commerce et bénéficier ainsi du droit de percevoir une indemnité d'éviction. Le Tribunal a donné acte à Madame A... de ce qu'elle a quitté les lieux et a débouté les consorts X... de leur demande en paiement d'une indemnité d'occupation. Le Tribunal a avant- dire droit ordonné une mesure d'expertise sur le montant de l'indemnité d'éviction, renvoyé à la mise en état et a prononcé le sursis sur les autres demandes et les dépens.
Les consorts X..., appelants, demandent à la Cour dans leurs conclusions du 22 mai 2008 de : " Infirmer la décision déférée, statuant à nouveau, vu la mise en demeure et le bail, dire et juger que dans le délai d'un mois, Madame A... ne s'est pas libérée de l'ensemble de ses obligations rappelées dans le commandement du 2 novembre 2004 en prouvant qu'un fonds est exploité dans les lieux loués, que les locaux sont garnis ; constater que Madame A... n'invoque aucun moyen pour justifier de la non- exploitation des locaux ; constater que le bail liant les parties est résilié ; ordonner l'expulsion de la requête ainsi que de tous occupants de son chef avec au besoin le concours de la Force Publique ;
A titre subsidiaire, constater que Madame A..., demanderesse au paiement de l'indemnité d'éviction, ne rapporte pas la preuve d'exploiter réellement un fonds de commerce dans les locaux objet du litige, plus de trois ans avant le terme du bail,
A défaut ;
Sur l'indemnité d'éviction, constater que Madame A... n'a aucun fonds de commerce exploité dans les locaux objet du litige,
Dire non fondée la demande de Madame A... à venir réclamer le paiement d'une indemnité d'éviction ; tenant le PV de constat de restitution des lieux, constater que les locaux n'ont pas été abandonnés en parfait état, condamner Madame A... à payer aux concluants la somme de 5. 232, 96 €, la condamner à payer 3. 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens... ".
Madame Myriam Z... épouse A..., intimée, demande à la Cour dans ses conclusions du 11 mars 2008 de : " confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel, condamner les consorts X... à payer à Madame Myriam A... la somme de5000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, les condamner aux dépens d'appel... ".
L'ordonnance de clôture est en date du 23 mai 2008.
MOTIFS
Attendu que c'est par des motifs pertinents et adoptés que le Tribunal a jugé que la preuve de l'exploitation par Madame Myriam Z... épouse A... de son commerce de rotisserie- traiteur pendant les trois années précédant la demande de renouvellement du bail est rapportée par les pièces qui sont au dossier, notamment : la sommation délivrée le 17 septembre 2002 d'avoir à fermer l'ouverture entre le local loué et le local voisin qui avait été pratiquée pour exploiter le fonds de commerce sur une seule et même surface ; les factures d'électricité et de téléphone produites aux débats établissant une consommation normale des lieux loués, identiques pour les années 2001, 2002 et 2003 ; l'inscription au registre du commerce et des sociétés de l'établissement situé... à CLERMONT L'HERAULT, avec la mention qu'il est toujours actif et ce depuis le 13 mai 1980 ; les avis d'imposition sur le revenu- bénéfices industriels et commerciaux- concernant Madame A... Myriam ... à CLERMONT L'HERAULT, faisant apparaître un bénéfice imposable en 2001, 2002 et 2003 ; que cette démonstration de l'activité dans les lieux loués vient démentir tout arrêt d'activité ou encore transfert d'activité allégués mais non démontrés par les bailleurs : le seul constat externe dressé par l'huissier le 25 février 2005 ou encore la déclaration d'une voisine sans autre précision que celle de son arrivée 5 mois auparavant sont insuffisants à rapporter une telle preuve ; qu'au vu des pièces soumises aux débats, Madame A... a déféré de façon satisfactoire au commandement du 2 novembre 2004 visant la clause résolutoire insérée dans le bail commercial ;
Attendu qu'en cause d'appel, les appelants reprennent leur argumentation et leurs pièces déjà produites en première instance ; tous éléments qui ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation des premiers Juges ; qu'il suffit d'ajouter que les consorts X... ont eux- mêmes pris l'initiative de notifier le 6 juillet 2004 une révision du bail conformément aux dispositions des articles 26 et 27 du décret du 30 septembre 1953, avant de prétendre quelques mois plus tard, de façon contradictoire et sans fondement au regard des éléments ci- dessus retenus, que Madame Myriam A... n'aurait pas droit à la propriété commerciale ;
Attendu en conséquence que le jugement est confirmé en ce qu'il dit et juge que Madame Myriam Z... épouse A... a droit au paiement de l'indemnité d'éviction à la suite du refus de renouvellement du bail que lui ont notifié les bailleurs, conformément aux dispositions de l'article L. 145-14 du Code de commerce ;
Attendu que pas plus qu'en première instance, la Cour ne dispose d'éléments suffisants pour fixer l'indemnité d'éviction revenant à Madame A... qui réclame à ce titre une somme de 90. 000 € ; que dans ces conditions le jugement est confirmé en ce qu'il ordonne avant-dire droit une mesure d'expertise, avec renvoi des parties devant les premiers Juges pour la suite de la procédure et en ouverture du rapport d'expertise ;
Attendu que le jugement est également maintenu en ce qu'il a constaté que Madame A... a quitté les lieux avec remise des clés après la sommation délivrée le 14 avril 2005 et en conséquence a dit n'y avoir lieu d'ordonner l'expulsion ni à paiement d'une indemnité d'occupation ;
Attendu par ailleurs que le procès- verbal de constat d'huissier en date du 23 août 2005 et le devis du 15 octobre 2005 d'un montant de 5. 262, 96 € non accompagnés d'une facture sont insuffisants à établir qu'il y aurait eu une restitution des lieux en mauvais état imputable à la locataire après plus de 15 années d'occupation ; que cette demande des consorts X... est donc réservée en fin de procédure par confirmation du jugement sur ce point ;
Attendu que les consorts X..., qui succombent en leur appel, sont condamnés aux dépens ; qu'en outre, il y a lieu de mettre à leur charge une somme au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile dans les termes du dispositif ci- après ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
CONFIRME le jugement attaqué en toutes ses dispositions,
Y AJOUTANT,
RENVOIE les parties devant le Tribunal pour la suite de la procédure et en ouverture du rapport d'expertise,
CONDAMNE Monsieur André X... et Monsieur Louis X... à payer à Madame Myriam Z... épouse A... la somme de 1. 200 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
CONDAMNE Monsieur André X... et Monsieur Louis X... aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.