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14/05/2008 | FRANCE | N°06/01130

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 14 mai 2008, 06/01130


COUR D' APPEL DE MONTPELLIER 4o chambre sociale

ARRET DU 14 Mai 2008



Numéro d' inscription au répertoire général : 07 / 05386



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 JUILLET 2007 CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE PERPIGNAN
No RG06 / 01130

APPELANTE :

Madame Pascale X...


...


...

Représentant : Maître SABATTE de la SCP SABATTE- L' HOTE (avocats au barreau de TOULOUSE)

INTIMEE :

CHAMBRE DE COMMERCE ET D' INDUSTRIE DE PERPIGNAN ET DES P. O.
prise en la personne de son représentant

légal en exercice
Palais Consulaire
Quai de Lattre de Tassigny- BP 941
66020 PERPIGNAN CEDEX
Représentant : Maître GEOFFROY Romain substit...

COUR D' APPEL DE MONTPELLIER 4o chambre sociale

ARRET DU 14 Mai 2008

Numéro d' inscription au répertoire général : 07 / 05386

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 JUILLET 2007 CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE PERPIGNAN
No RG06 / 01130

APPELANTE :

Madame Pascale X...

...

...

Représentant : Maître SABATTE de la SCP SABATTE- L' HOTE (avocats au barreau de TOULOUSE)

INTIMEE :

CHAMBRE DE COMMERCE ET D' INDUSTRIE DE PERPIGNAN ET DES P. O.
prise en la personne de son représentant légal en exercice
Palais Consulaire
Quai de Lattre de Tassigny- BP 941
66020 PERPIGNAN CEDEX
Représentant : Maître GEOFFROY Romain substituant la SCP DILLENSCHNEIDER (avocats au barreau de MONTPELLIER)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 945- 1 du Code de Procédure civile, l' affaire a été débattue le 25 MARS 2008, en audience publique, les parties ne s' y étant pas opposées, devant Madame Marie CONTE, Conseiller, chargée d' instruire l' affaire, Madame Marie CONTE ayant fait le rapport prescrit par l' article 785 du Code de Procédure Civile.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre
Madame Bernadette BERTHON, Conseiller
Madame Marie CONTE, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Brigitte ROGER

ARRET :

- Contradictoire.

- prononcé publiquement le 14 MAI 2008 par Madame Marie CONTE, Conseiller

- signé par Madame Marie CONTE, conseiller en ayant délibéré, en l' absence du Président empêché et par Mademoiselle Sylvie DAHURON greffier.

*
**

FAITS ET PROCEDURE

Pascale X... a été engagée par la Chambre de Commerce et d' Industrie de PERPIGNAN et des Pyrénées Orientales (CCI de PERPIGNAN) à compter du 1er avril 1990 et occupait en dernier lieu un poste d' agent de trafic à l' aéroport de PERPIGNAN.

Elle a bénéficié de divers arrêts de travail, du 15 novembre 2004 au 28 août 2006.

Dans la perspective d' une reprise de travail, elle a été soumise, les 4 et 19 septembre 2006 à deux examens successifs du médecin du travail qui, après étude des postes au sein de l' entreprise, l' a déclarée inapte à son poste d' agent de trafic mais apte à un poste d' hôtesse de passage et / ou d' accueil.

Elle a été replacée en arrêt de travail par son médecin traitant du 20 septembre au 19 octobre 2006.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 5 octobre 2006, la CCI de PERPIGNAN a mis la salariée en demeure de lui faire connaître sous 48 heures, à peine de constatation de l' abandon de poste, si elle acceptait ou non de reprendre son travail au poste d " hôtesse d' information passage " au sein de l' aéroport de PERPIGNAN, celui- ci lui ayant été proposé le 19 septembre conformément aux préconisations du médecin du travail.

Le 7 octobre 2006, Pascale X... a informé son employeur de son refus du poste de reclassement proposé.

Le 13 octobre 2006, la CCI de PERPIGNAN l' a mise, une seconde fois en demeure de reprendre son poste lui indiquant qu' à défaut elle s' exposait à une constatation d' abandon de poste sans procédure disciplinaire.

Par courrier du 19 octobre 2006, la salariée a réitéré son refus d' être reclassée dans le poste d' hôtesse d' information passage " comportant des tâches identiques à celles du poste pour lequel elle avait été déclarée inapte ", et a mis son employeur en demeure de reprendre le paiement de ses salaires à défaut d' avoir rompu le contrat de travail.

Le 23 octobre 2006, la CCI de PERPIGNAN a révoqué la salariée de ses fonctions pour abandon de poste par lettre recommandée avec accusé de réception libellée en ces termes :

" 1. d' une part, vous avez commis un abandon de poste alors que vous étiez prévenue de ses conséquences : vous n' avez pas repris votre poste malgré deux mises en demeure indiquant clairement qu' un abandon de poste pourrait vous être reproché, sans procédure disciplinaire préalable (courriers des 5 octobre 2006 et du 13 octobre 2006).
2. d' autre part, votre abandon de poste n' est pas justifié par votre inaptitude, puisque la CCI vous a placée sur le poste pour lequel le Médecin du travail vous jugeait apte et que, en tout état de cause, vous refusez par principe tout reclassement, comme l' exposait déjà votre époux lors de la réunion le 29 août 2006, date à laquelle vous n' étiez pas encore inapte (cf. votre courrier daté du 7 octobre 2006).
En conséquence, je suis aujourd' hui contraint de vous révoquer pour abandon de poste. La révocation pour abandon de poste est effective dès réception de la présente lettre. "

Par arrêt du 19 septembre 2007, la Chambre Sociale de la Cour d' Appel a confirmé l' ordonnance de la formation de référé du Conseil de Prud' hommes de PERPIGNAN en date du 24 janvier 2007 en ce qu' elle s' est déclarée compétente pour connaître du litige, et la réformant pour le surplus, a condamné la CCI de PERPIGNAN à payer à Pascale X..., à titre provisionnel la somme de 11 000 € à valoir sur le montant des salaires échus depuis le 20 octobre 2006 et la somme de 1000 € sur le fondement de l' article 700 du Code de Procédure Civile, et dit n' y avoir lieu à référé quant aux demandes relatives à la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 24juillet 2007, le Conseil de Prud' hommes de PERPIGNAN, saisi le 6 décembre 2006 par Pascale X..., s' est déclaré compétent pour connaître du litige, a qualifié la rupture du contrat de travail en licenciement pour cause réelle et sérieuse et a condamné la CCI de PERPIGNAN à payer à la salariée les sommes de :

- 6276 € d' indemnité compensatrice de préavis,
- 627, 60 € de congés payés y afférents et a débouté celle- ci de sa demande de rappel de salaire.

Pascale X... a interjeté appel de cette décision.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par voie de conclusions écrites réitérées oralement à l' audience auxquelles il convient de se référer pour l' exposé complet de ses moyens et arguments, l' appelante sollicite à titre principal :
- le prononcé de la résiliation du contrat de travail aux torts de l' employeur
- la condamnation de celui- ci au paiement des salaires échus du 23 octobre 2006 à la notification de l' arrêt à intervenir, déduction faite des provisions perçues à la suite de la procédure de référé
- de la somme de 6276 € d' indemnité compensatrice de préavis
- de la somme de 627, 60 € de congés payés afférents
- de la somme de 32 097 € d' indemnité de licenciement
- de 75 312 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- de la somme de 3000 € sur le fondement de l' article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle fait valoir en premier lieu que seuls les agents des Chambres de Commerce qui ne sont pas affectés à un service public industriel et commercial, ont la qualité d' agents publics, que l' activité de l' aéroport de PERPIGNAN relève d' un service public industriel et commercial, qu' étant affectée au sein de l' aéroport à l' accueil des passagers, elle participait à l' activité industrielle et commerciale de la CCI et n' avait donc pas la qualité d' agent public.

Elle soutient par ailleurs que le courrier du 23 octobre 2006 notifiant sa révocation pour abandon de poste n' a ni la nature, ni les effets d' un licenciement, l' employeur s' étant volontairement placé hors du champ des articles L. 122- 24- 4 et suivants du Code du Travail.

Elle estime en revanche que le refus par l' employeur de faire application des dispositions légales relatives à l' inaptitude physique des salariés et de reprendre le versement des salaires dans le délai d' un mois après le deuxième avis d' inaptitude constituent de la part de l' employeur des manquements graves à ses obligations, justifiant la résiliation à ses torts du contrat de travail.

Elle invoque à titre subsidiaire la nullité du licenciement, motivé par l' état de santé du salarié.

A titre plus subsidiaire encore, elle considère que si le courrier du 23 octobre 2006, valait licenciement, cette mesure est dénuée de cause réelle et sérieuse, dans la mesure où tout salarié déclaré inapte à son poste a la possibilité de refuser une proposition de reclassement.

La CHAMBRE DE COMMERCE ET D' INDUSTRIE DE PERPIGNAN conclut pour sa part à titre principal par voie d' appel incident au débouté de la salariée de l' ensemble de ses demandes, subsidiairement à la confirmation du jugement entrepris, en toute hypothèse à la condamnation de Pascale X... au paiement de la somme de 1000 € sur le fondement de l' article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle objecte en premier lieu que le courrier du 23 octobre 2006, par lequel elle a manifesté sa volonté de rompre la relation de travail, produit les effets d' un licenciement.

Elle relève que l' absence injustifiée de la salariée est constitutive d' une faute grave.

MOTIFS DE L' ARRET

Sur la compétence de la juridiction prud' homale

Les chambres de commerce et d' industrie sont des établissements publics administratifs dont certains services gèrent un service public industriel et commercial ; si leurs agents qui ne sont pas affectés au service industriel et commercial qu' elles gèrent ont la qualité d' agents publics, tel n' est pas le cas, à l' exception du directeur ou du chef de la comptabilité publique ayant la qualité de comptable public, de leurs employés qui sont affectés au service public industriel et commercial.

En l' occurrence, la CCI, concessionnaire de l' aéroport de Perpignan, ne peut soutenir que les services d' assistance aéroportuaires dont elle assure la gestion, relèvent de l' exécution d' un service public administratif, alors que de tels services sont également susceptibles d' être gérés par des entreprises privées, que l' exploitation de l' aéroport, bien que soumise à une autorité de tutelle, ne se trouve pas assujettie aux règles de la comptabilité publique et que ses ressources proviennent pour l' essentiel de la perception des redevances visées à l' article R 224- 2 du code de l' aviation civile, pour les services rendus aux exploitants d' aéronefs et à leurs prestataires de service à l' occasion de l' utilisation des équipements de l' aéroport.

Recrutée le 1er avril 1990 par la CCI de Perpignan, madame X... occupait, en dernier lieu, un emploi d' agent de trafic aéroportuaire et était chargée à ce titre de coordonner les équipes au sol pendant l' escale des avions, de gérer les éventuels problèmes entravant leur départ et d' assurer la répartition des charges dans les soutes ; dès lors qu' elle se trouvait affectée au service public industriel et commercial que constitue l' aéroport de Perpignan, géré par la CCI, elle n' avait pas la qualité d' agent public, ce dont il résulte que le litige l' opposant à la CCI relève de la compétence du juge judiciaire.

Sur la rupture du contrat de travail

Suivant courrier recommandé avec accusé de réception du 23 octobre 2006, la CCI a notifié à la salariée sa révocation immédiate pour abandon de poste, manifestant ainsi de façon parfaitement claire son intention de rompre dès réception dudit courrier la relation de travail. Ce courrier s' analyse en une lettre de licenciement.

Il s' ensuit d' une part que la demande de résiliation est sans objet, la rupture étant consommée depuis le 23 octobre 2006, d' autre part que Pascale X... ne peut prétendre qu' au paiement des seules rémunérations échues au cours de la période comprise entre le 19 octobre 2006 (un mois après la deuxième visite de reprise) et le 23 octobre 2006 (date de la rupture du contrat de travail).

La salariée qui a perçu à ce titre à la suite de la procédure de référé, au cours de laquelle il n' a manifestement pas été fait état du courrier de révocation du 23 octobre 2006, la somme de 11 000 € dont la CCI ne réclame pas le remboursement, a été remplie de ses droits au paiement d' un rappel de salaire.

Sur la légitimité de la rupture du contrat de travail

Le licenciement est fondé sur l' abandon de poste, résidant dans le refus de la salariée, malgré mise en demeure, de prendre le poste d' hôtesse Information Passage proposé par l' employeur en reclassement.

Il ressort de la correspondance échangée entre les parties que Pascale X... a expliqué son refus en contestant la compatibilité du poste proposé, avec les recommandations du médecin du travail ;

Ainsi, aux termes d' une lettre du 19 octobre 2006, elle estime que le poste proposé " correspond au moins pour partie à un poste pour lequel elle a été déclarée inapte " dans la mesure où elle assurait, avant son arrêt de travail, des tâches incluant le passage et l' accueil.

Or, dans l' hypothèse où le salarié conteste la compatibilité du poste auquel il est affecté avec les recommandations du médecin du travail, il incombe à l' employeur de solliciter à nouveau l' avis de ce dernier, sur la compatibilité du poste proposé avec les aptitudes physiques du salarié. Dans l' affirmative, et si le salarié persiste dans son refus, il appartient alors à l' employeur d' en tirer les conséquences, soit en formulant de nouvelles propositions de reclassement, soit en procédant au licenciement du salarié.

En procédant au licenciement de la salariée sans solliciter à nouveau l' avis du médecin du travail, l' employeur a enfreint les dispositions de l' article L. 241- 10 du Code du Travail.

Le licenciement est dès lors dénué de cause réelle et sérieuse.

La décision déférée mérite en conséquence infirmation sur ce point.

Sur les conséquences du licenciement

Le jugement doit être confirmé en ce qu' il a alloué à la salariée une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents.

Compte tenu de son ancienneté (plus de quinze ans) de sa rémunération mensuelle (2139, 31 €) et des éléments soumis à l' appréciation de la Cour, le préjudice subi par la salariée du fait de l' illégitimité de son licenciement doit être évalué à la somme de 25000 €.

Pascale X... est par ailleurs en droit de prétendre au paiement d' une indemnité de licenciement s' élevant, en vertu de l' article 34 bis du statut des Chambres de commerce, dont l' application n' est pas en l' espèce contestée par l' employeur à la somme de 32 097 € représentant quinze mois de salaire.

Sur l' article 700 du Code de Procédure Civile

La CCI de PERPIGNAN tenue aux dépens doit être condamnée à payer à Pascale X... la somme de 1000 € au titre des frais non taxables par elle exposés dans le cadre de la présente procédure.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement sauf en ses dispositions relatives à la légitimité du licenciement,

Et statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la CHAMBRE DE COMMERCE ET D' INDUSTRIE DES PYRENEES ORIENTALES à payer à Pascale X... la somme de 25000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Y ajoutant,

Condamne la CHAMBRE DE COMMERCE ET D' INDUSTRIE DESPYRENEES ORIENTALES à payer à Pascale X... la somme de 32 097 € à titre d' indemnité de licenciement,

Condamne la CHAMBRE DE COMMERCE ET D' INDUSTRIE DES PYRENEES ORIENTALES à payer à Pascale X... la somme de 1000 € en application des dispositions de l' article 700 du Code de Procédure Civile,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 06/01130
Date de la décision : 14/05/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Perpignan


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-05-14;06.01130 ?
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