COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1re Chambre Section A2
ARRET DU 06 MAI 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 07/00953
Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 DECEMBRE 2006 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER N° RG 04/2687
APPELANTE :
SNC CMD MARKETING, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social10 Parc Club du Millénaire, 1025 rue Henri Becquerel 34000 MONTPELLIER,représentée par la SCP ARGELLIES - WATREMET, avoués à la Courassistée de la SCP ALCADE et associés, avocats au barreau de MONTPELLIERsubstituée par Me LE NGOC THO, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
Monsieur le DIRECTEUR DES SERVICES FISCAUX DE L'HERAULTCentre Administratif Chaptal34081 MONTPELLIER CEDEXreprésenté par la SCP SALVIGNOL - GUILHEM, avoués à la Courassisté de Madame FALGUIER, inspectrice des impôts
ORDONNANCE DE CLOTURE DU 27 Mars 2008
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 01 AVRIL 2008, en audience publique, Madame Sylvie CASTANIE ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Christian TOULZA, PrésidentMadame Sylvie CASTANIE, ConseillerMonsieur Richard BOUGON, Conseillerqui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Monique AUSSILLOUS
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Christian TOULZA, Président, et par Mme Monique AUSSILLOUS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * *
FAITS - PROCÉDURE - MOYENS et PRÉTENTIONS des PARTIES :
La SNC CMD MARKETING fait l'acquisition, selon acte notarié du 3 août 1992, d'un appartement situé 42, rue Saint-Lazare à MONTPELLIER (Hérault), moyennant le prix de 330 000 F. Cette société ayant indiqué dans l'acte qu'elle faisait cette acquisition en sa qualité de marchand de biens et s'étant engagée à revendre le bien, objet de la vente, dans un délai de quatre ans de son acquisition, elle a bénéficié d'un régime fiscal de faveur dans l'acquittement de droits limités à la taxe de publicité foncière, au taux de 0, 60 %. L'administration fiscale considérant que la SNC CMD MARKETING n'avait pas déclaré exercer l'activité de marchand de biens dans le délai d'un mois à compter du commencement des opérations, lui a notifié, le 7 juillet 1998, la déchéance du régime de faveur. Elle a émis un avis de mise en recouvrement le 5 décembre 2001 pour un montant total de 91 401 F (13 933, 99 €), soit 59 351 F au titre des droits et 32 050 F au titre des intérêts de retard.
La SNC CMD MARKETING, dont la réclamation auprès de l'Administration a été rejetée par une décision du 8 mars 2004, a saisi, selon acte du 7 mai 2004, le Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER, lequel, statuant par jugement du 19 décembre 2006, l'a déboutée de l'ensemble de ses prétentions et l'a condamnée aux dépens et à payer à l'Administration des Impôts la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La SNC CMD MARKETING relève appel de ce jugement selon déclaration au greffe du 7 février 2007.
Dans ses dernières écritures déposées le 21 mars 2008, la SNC CMD MARKETING conclut à la réformation du jugement entrepris, au rejet des demandes de l'Administration Fiscale et à la condamnation de celle-ci à lui payer la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle se prévaut du contenu de la doctrine administrative 8 A 242 mise à jour le 15 novembre 2001 sous la référence 8 A 442 qui apporte des précisions sur le respect des conditions édictées par l'article 852 du Code Général des Impôts et notamment sur la déclaration d'existence. Cette doctrine, qui est parfaitement opposable au Service en vertu de l'article L 80 A du Livre des Procédures Fiscales, prévoit que le bénéfice du régime spécial est tout d'abord subordonné à la condition que l'acquéreur justifie qu'il a satisfait aux prescriptions de l'article 852 du Code Général des Impôts (déclaration d'existence, tenue d'un répertoire) et que cette justification résulte en pratique d'une déclaration insérée dans l'acte d'acquisition et soumise au contrôle de l'Administration. Or, l'acte du 3 août 1992 mentionne cette déclaration d'existence. C'est à tort que le premier Juge a considéré que cette indication était impropre à valoir déclaration d'existence au sens de l'article 852 précité. Dès lors qu'il y a eu déclaration dans l'acte de vente et que cette déclaration a été portée à la connaissance du Service, l'acte ayant été dûment enregistré, il doit être jugé que la déclaration d'existence de l'activité de marchand de biens a été faite dans l'acte du 3 août 1992 conformément à la doctrine administrative et qu'elle est en droit de bénéficier du régime de faveur institué par l'article 1115 du Code Général des Impôts.
Dans ses dernières écritures déposées le 7 mars 2008, l'Administration des Impôts, représentée par le Directeur des Services Fiscaux de l'Hérault, conclut à la confirmation du jugement, à la condamnation de l'appelante aux dépens de première instance et d'appel et au paiement de la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.La mention de l'acte, selon laquelle l'acquéreur indique qu'il a fait sa déclaration d'existence au Service des Impôts de MONTPELLIER EST, ne satisfait pas aux exigences de l'article 852-1 du Code Général des Impôts. Les statuts de la SNC CMD MARKETING déposés le 5 février 1991, et donc antérieurement à l'acte, ne faisaient pas état, dans la description de l'objet social, de l'activité de marchand de biens, laquelle n'a été adjointe que le 3 juillet 1996 avec effet au 6 juillet 1995. Il est acquis qu'au jour de l'achat, le 3 août 1992, et dans le mois qui a suivi, la SNC CMD MARKETING n'avait pas vocation à être marchand de biens. La doctrine administrative que celle-ci lui oppose pour sa défense est sans incidence sur le litige. L'Administration n'a pas voulu dire, contrairement à l'interprétation erronée qu'en fait le contribuable, que la mention portée dans l'acte remplaçait la déclaration générale d'existence de marchand de biens et dispensait donc celui-ci de l'obligation de déclarer son existence en cette qualité selon les modalités habituelles.
L'ordonnance de clôture est en date du 27 mars 2008.
SUR CE,
L'article 1115 du Code Général des Impôts qui prévoit la possibilité pour le marchand de biens de ne pas avoir à acquitter la T.V.A. immobilière en bénéficiant d'un régime de faveur en matière de droits d'enregistrement, dispose que, « sous réserve des dispositions de l'article 1020, les achats effectués par les personnes qui réalisent les affaires définies au 6 de l'article 257 sont exonérés des droits et taxes de mutation à condition :a/ d'une part, qu'elles se conforment aux obligations particulières qui leur sont faites par l'article 290 ;b/ d'autre part, qu'elles fassent connaître leur intention de revendre dans un délai de quatre ans ».
L'application de ce texte est subordonné, selon les termes de l'article 290 du Code Général des Impôts, au respect des obligations édictées à l'article 852 du même code qui dispose que « les personnes qui réalisent les affaires définies au 6 de l'article 257 doivent :1/ En faire la déclaration dans le délai d'un mois à compter du commencement de leurs opérations auprès du service de l'administration dont dépend leur établissement et, le cas échéant, à chacune de leurs succursales ou agences ;2/ Tenir un répertoire à colonnes, non sujet au timbre, présentant, jour par jour, sans blanc ni interligne et par ordre de numéros, tous les mandats, promesses de vente, actes translatifs de propriété et, d'une manière générale, tous actes se rattachant à la profession de marchand de biens ».
L'acte d'achat du 3 août 1992 énonce en l'espèce, au paragraphe « DÉCLARATIONS pour l'ADMINISTRATION », que :« L'acquéreur déclare faire cette acquisition en sa qualité de marchand de biens et s'engage à revendre l'immeuble acquis dans un délai de quatre ans de ce jour. Il déclare en outre que la présente acquisition constitue pour lui une opération de la nature de celles définies par l'article 257-6 du Code Général des Impôts, comme ne concourant pas à la production et à la commercialisation d'immeubles neufs. « Il précise qu'il a fait sa déclaration d'existence au Service des Impôts de MONTPELLIER-EST, et qu'il se conforme aux obligations particulières résultant des dispositions de l'article 290 du Code Général des Impôts, et spécialement qu'il tient les répertoires imposés par l'article 852 dudit Code. »
C'est à tort que la SNC CMD MARKETING, se prévalant de la doctrine administrative référencée 8 A 442 disposant que « le bénéfice du régime spécial est tout d'abord subordonné à la condition que l'acquéreur justifie qu'il a satisfait aux prescriptions de l'article 852 du Code Général des Impôts (déclaration d'existence et tenue de répertoire) et que cette justification résulte en pratique d'une déclaration insérée dans l'acte d'acquisition et soumise au contrôle de l'administration », soutient par une fausse interprétation de cette doctrine que la mention précitée de l'acte notarié a la valeur de la déclaration d'existence prévue à l'article 852-1.
L'Administration n'a pas, en effet, voulu remplacer, dans sa doctrine relative à l'application de l'article 852 du Code Général des Impôts, la déclaration générale d'existence de marchand de biens par une mention portée dans l'acte et dispenser ainsi les marchands de biens de leur obligation de déclaration selon les modalités habituelles. Les énonciations de l'acte ne sont, au sens de la doctrine administrative, qu'un élément de justification de l'accomplissement des deux formalités légales pour lesquelles l'Administration doit procéder à des recherches complémentaires pour en apprécier l'exactitude.
La déclaration d'existence prévue par l'article 852 ne peut donc résulter des seules mentions de l'acte d'achat.
Or, il est acquis en l'espèce que si la SNC CMD MARKETING a bien respecté les règles relatives à la tenue d'un répertoire de marchand de biens, elle n'a pas, contrairement à ce qu'elle a indiqué dans l'acte d'acquisition, effectué une déclaration d'existence séparée.
À cette date, elle n'avait d'ailleurs pas vocation à être marchand de biens, et donc à se déclarer en tant que tel, puisque ce n'est que le 3 juillet 1996, avec effet au 6 juillet 1995, qu'a été adjointe à l'objet de la société l'activité de marchand de biens, laquelle ne figurait pas dans les statuts initiaux datés du 23 janvier 1991 et déposés le 5 février suivant.
C'est donc à bon droit que le premier Juge, dont la décision sera confirmée dans toutes ses dispositions, a considéré que la SNC CMD MARKETING était déchue du régime de faveur qui lui avait été accordé et qu'elle devait être déboutée de l'ensemble de ses prétentions.
La SNC CMD MARKETING, qui succombe en son appel, doit être déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile et condamnée, par considération d'équité, à payer à l'Administration des Impôts, représentée par le Directeur des Services Fiscaux de l'Hérault, la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,
CONFIRME le jugement entrepris dans toutes ses dispositions et Y AJOUTANT :
DÉBOUTE la SNC CMD MARKETING de sa demande en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
CONDAMNE la SNC CMD MARKETING à payer à l'Administration fiscale, représentée par le Directeur des Services de l'Hérault, la somme de 1 500 € (mille cinq cents euros) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
CONDAMNE la SNC CMD MARKETING aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de la S.C.P. SALVIGNOL - GUILHEM, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.