1re Chambre, Section C
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 MARS 2007
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE
N° RG : 04 / 00944
APPELANTE :
Madame Marie- Jeanne X... épouse Y...
née le 06 Septembre 1942 à MONCEAUX SUR DORDOGNE (19400)
de nationalité française
...
représentée par la SCP AUCHE- HEDOU, AUCHE AUCHE, avoués à la Cour
assistée de Me Pierre CHARPY, avocat au barreau de NARBONNE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2007 / 10592 du 09 / 10 / 2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)
INTIME :
Monsieur Gilbert Y...
né le 26 Octobre 1939 à METZ
de nationalité Française
...
représenté par la SCP GARRIGUE- GARRIGUE, avoués à la Cour
assisté de Me BELLOTTI, avocat au barreau de NARBONNE
ORDONNANCE DE CLOTURE DU 19 Mars 2008
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 25 MARS 2008, en chambre du conseil, Monsieur Patrice COURSOL ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Patrice COURSOL, Président
Monsieur Philippe DE GUARDIA, Vice- Président placé
Madame Stéphanie HEBRARD, Vice- Présidente placée
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Monique AUSSILLOUS
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Patrice COURSOL, Président, et par Mme Monique AUSSILLOUS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par jugement du 21 mars 2007, auquel il convient de se référer pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions des parties, de ses motifs et de son dispositif, le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de NARBONNE a :
- prononcé le divorce des époux Y... aux torts partagés,
- ordonné les mesures accessoires (publicité, opérations de liquidation des intérêts patrimoniaux des époux)
- condamné M. Gilbert Y... à payer à Mme Marie- Jeanne X... une prestation compensatoire de 15 000 €,
- débouté les parties pour le surplus de leurs demandes,
- fait masse des dépens et dit qu'ils seraient supportés par moitié par chacune des parties.
Mme X... a régulièrement interjeté appel de cette décision le 17 juillet 2007.
Dans ses dernières conclusions du 6 février 2008 auxquelles il est référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, elle sollicite le prononcé du divorce aux torts exclusifs de son époux et sa condamnation au règlement d'une prestation compensatoire de 48 000 €.
Elle invoque le comportement tyrannique et violent de son mari envers elle constituant des manquements graves et répétés aux obligations du mariage ainsi que l'importance des revenus de ce dernier comparé à la faiblesse des siens.
Dans ses dernières conclusions du 4 janvier 2008 auxquelles il est référé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions, M. Y... sollicite le prononcé du divorce aux torts exclusifs de son épouse.
Il lui reproche d'avoir quitté le domicile conjugal au mois d'avril 2004 pour ne plus assumer ses obligations au titre du devoir de secours, l'abandonnant malgré ses graves problèmes de santé (à lui).
Il considère que du fait de l'insuffisance des revenus au regard de ses charges, il n'est pas en mesure d'acquitter la moindre prestation compensatoire.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 mars 2008.
MOTIFS
Attendu qu'hormis une phrase de style faisant référence à « l'intégralité des pièces versées au débat », le jugement du 21 mars 2007 ne comporte pas la moindre analyse par le 1er Juge des griefs invoqués par les époux l'un contre l'autre ;
Que le jugement sera donc annulé pour défaut de motivation ;
SUR LE DIVORCE PROPREMENT DIT
Attendu que l'ancien article 242 du Code civil, applicable en l'espèce, énonce que le divorce peut être demandé par un époux pour des faits imputables à l'autre lorsque ces faits constituent une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage et rendent intolérable le maintien de la vie commune ;
Qu'en l'espèce, il résulte des attestations (attestations Z..., A..., B..., C...) et du certificat médical du 10 avril 2004 versés aux débats par Mme X... que son époux, M. Y..., a eu un comportement tyrannique et violent à son égard, allant jusqu'à la frapper et à jeter ses effets personnels sur la chaussée, l'obligeant à quitter le domicile conjugal pour se réfugier chez un enfant né d'un précédent lit ;
Que ces faits constituent des violations graves et renouvelées des obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ;
Que le départ du domicile conjugal de Mme X... étant dû à l'attitude fautive de son époux, celui- ci n'est pas fondé à le lui reprocher ;
Que le divorce sera donc prononcé aux torts exclusifs de M. Y..., le jugement étant réformé en ce qu'il l'a prononcé aux torts partagés ;
SUR LA PRESTATION COMPENSATOIRE
Attendu que les articles 270 et 271 anciens du Code civil, applicables en l'espèce, édictent que l'un des époux peut être tenu, malgré la fin du devoir de secours, de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans leurs conditions de vie respectives et que celle- ci est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle- ci dans un avenir prévisible ;
Qu'en l'espèce, les revenus de Mme X..., qui étaient lorsque le Juge aux Affaires Familiales a statué constitués par le R. M. I, sont constitués par une pension de 223, 04 € par mois (valeur octobre 2007) ;
Que, même si elle doit pouvoir prétendre au minimum vieillesse qui est légèrement supérieur, ses revenus resteront très inférieurs à ceux de Monsieur Y..., également retraité, qui sont de 2 604. 06 € par mois, somme qui dépasse largement ses frais de séjour en établissement spécialisé nécessité par son état de santé (de l'ordre de 1 500 € par mois), le décompte qu'il produit faisant état de charges s'élevant prétendument à plus de 2 990 € par mois n'étant pas convaincant, notamment parce qu'il y inclut des dépenses qui ont disparu car elles étaient afférentes à un bien immobilier dont il indique dans ses conclusions qu'il l'a vendu et que la pension au titre du devoir de secours servie à Mme X... va disparaître du fait du prononcé du divorce ;
Que, nonobstant le fait que Mme X... est propriétaire d'un bien immobilier dont la valeur avait été estimée par un notaire à 105 000 € en octobre 2005, portée à 122 000 € par l'intéressée en cours d'instance, M. Y... ne fournissant aucun élément convaincant permettant de retenir la valeur de 250 000 € qu'il lui attribue, l'importance de la différence de revenus entre les parties crée une disparité en défaveur de l'épouse rendant recevable et bien fondée sa demande de prestation compensatoire ;
Attendu que le mariage aura duré 22 ans ;
Que Mme X... est née le 6 septembre 1942 et M. Y... le 26 octobre 1939 ;
Qu'aucun enfant n'est né de leur union ;
Qu'il résulte du dossier que Mme X... a quitté son emploi et ses proches pour suivre pour son mari à NARBONNE, ce qui a eu des incidences sur le montant de sa retraite ;
Que comme cela a déjà été relevé, elle est propriétaire d'un bien immobilier, tandis que M. Y... n'en revendique aucun ;
Qu'en cet état, il convient de fixer à la somme de 48 000 € le montant de prestation compensatoire que M. Y... devra verser à Mme X...
Attendu que l'article 275-1 alinéa 1er ancien du Code civil prévoit que lorsque le débiteur n'est pas en mesure de verser le capital dans les conditions prévues par l'article 275, le juge fixe les modalités de paiement du capital, dans la limite de huit années, sous forme de versements mensuels ou annuels indexés selon les règles applicables aux pensions alimentaires ;
Qu'en l'espèce au regard de sa situation financière, Monsieur Y... ne peut pas verser le capital de 48 000 euros en une seule fois ;
Que ce capital sera versé par mensualités, indexées, de 500 € sur 8 ans ;
POUR LE SURPLUS
Attendu que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, étant observé s'agissant de Mme X... qu'elle a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et qu'elle ne justifie pas de débours non pris en charge à ce titre ;
Que les dépens de 1re instance et d'appel seront à la charge de M. Y... ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après débats en chambre du conseil,
Déclare l'appel recevable en la forme,
Annule le jugement du 21 mars 2007 pour défaut de motivation sur la cause du divorce,
Statuant à nouveau,
Prononce le divorce des époux Y... / X... aux torts exclusifs de M. Y...,
Précise en vue des formalités obligatoires de publicité en marge des actes de naissance et de l'acte de mariage des époux que :
- M. Gilbert Gérard Y... est né le 26 octobre 1939 à METZ (57000),
- Mme Jeanne X... est née le 6 septembre 1942 à MONTCEAUX SUR DORDOGNE (19400),
- le mariage a été célébré à CAMBRAI (59), le 26 juin 1986
Commet M. le Président de la Chambre des Notaires de l'Aude ou son délégataire pour procéder à la liquidation des droits patrimoniaux des époux sous le contrôle de M. Le président du Tribunal de Grande Instance de NARBONNE ou son délégataire pour faire rapport en cas de difficultés.
Dit qu'en cas d'empêchement des Juges et Notaire commis, il aura procédé à leur remplacement par ordonnance du Président du Tribunal de Grande Instance,
Déclare recevable et bien fondée la demande de prestation compensatoire de Mme X...
Condamne Monsieur Y... à payer à Mme X... un capital de 48 000 € à ce titre,
Dit qu'il pourra s'en acquitter par versements mensuels sur une période de 8 ans,
Dit que ces mensualités seront indexées sur la variation de l'indice des prix à la consommation des ménages urbains, série France entière, publié par l'I. N. S. E. E., et révisées annuellement le 1er janvier de chaque année à la diligence du débiteur, avec pour base l'indice du mois de l'exigibilité de la première mensualité, et pour indice multiplicateur l'indice du mois de janvier de la révision,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Condamne M. Y... aux dépens de 1re instance et d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile,
Constate que Mme X... bénéficie de l'aide juridictionnelle totale.