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08/04/2008 | FRANCE | N°05/149

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 08 avril 2008, 05/149


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2o chambre

ARRET DU 08 AVRIL 2008

Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 00321

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 NOVEMBRE 2006
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MILLAU
No RG 05 / 149

APPELANT :

Monsieur Jean- Marie X...

né le 15 Août 1950 à NAMUR (BELGIQUE)
de nationalité Belge

...


...

représenté par la SCP SALVIGNOL- GUILHEM, avoués à la Cour
assisté de la SCP CALAUDI- RAMAHANDRIARIVELO- BEAUREGARD, avocats au barreau de MONTPELLIER



INTIMEE :

Madame Brigitte Y...


...


...

représentée par la SCP TOUZERY- COTTALORDA, avoués à la Cour
assistée de Me Nicolas GALLON...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2o chambre

ARRET DU 08 AVRIL 2008

Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 00321

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 NOVEMBRE 2006
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MILLAU
No RG 05 / 149

APPELANT :

Monsieur Jean- Marie X...

né le 15 Août 1950 à NAMUR (BELGIQUE)
de nationalité Belge

...

...

représenté par la SCP SALVIGNOL- GUILHEM, avoués à la Cour
assisté de la SCP CALAUDI- RAMAHANDRIARIVELO- BEAUREGARD, avocats au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

Madame Brigitte Y...

...

...

représentée par la SCP TOUZERY- COTTALORDA, avoués à la Cour
assistée de Me Nicolas GALLON, avocat au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 06 Mars 2008

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 MARS 2008, en audience publique, M. Guy SCHMITT, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

M. Guy SCHMITT, Président
M. Hervé CHASSERY, Conseiller
Mme Noële- France DEBUISSY, Conseiller
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Melle Colette ROBIN

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par M. Guy SCHMITT, Président, et par Melle Colette ROBIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exerçant en qualité de masseur- kinésithérapeute à titre libéral depuis 1991 dans le petit village de BROQUIES en AVEYRON, Brigitte Y... a, en février 2004 fait paraître une annonce de recrutement d'un assistant.

Elle a (le contrat n'est pas daté) signé avec Jean- Marie X... qui venait de BELGIQUE, un contrat " d'assistant masseur- kinésithérapeute ".

Il était prévu que Jean- Marie X... effectue les soins sur les patients présentés par Brigitte Y... ou sur les personnes prenant directement rendez- vous avec lui et reçoive directement les honoraires dus par ses patients.

Il devait exercer sa profession sous sa propre responsabilité professionnelle, s'assurant lui- même pour cela et supporter ses charges fiscales. Il devait aussi reverser à Brigitte Y... propriétaire de toutes les installations mises à sa disposition, 30 % des honoraires par lui perçus et hors TVA, celle- ci étant à la charge de Brigitte Y....

Il était prévu que le contrat puisse être rompu par l'une ou l'autre partie avec préavis d'un mois par LRAR. Il était aussi prévu qu'en cas de cessation de son activité avec Brigitte Y..., Jean- Marie X... s'interdisait d'exercer sa profession dans un rayon de 25 kms durant 2 ans et, en cas de non respect de cette clause, paierait à Brigitte Y... l'équivalent de la dernière année de chiffre d'affaires.

Au 4ème et dernier article du contrat, il était enfin prévu qu'en cas de difficulté dans l'exécution ou l'interprétation de leur contrat, les parties demanderaient " l'arbitrage d'un syndicat professionnel ou d'un conseil juridique avant toute action en justice ".

Le contrat a pris effet le 1er juillet 2004 mais des difficultés sont intervenues entre les associés et Jean- Marie X... a cessé de se présenter au cabinet à compter du 15 septembre 2004 soit 2 mois et demi plus tard.

Par courrier du 20 septembre 2004 Brigitte Y... a rompu le contrat la liant à Jean- Marie X.... Celui- ci a rapidement ouvert un cabinet à SAINT IZAIRE distant de BROQUIES de 9 km. Ceci ressort d'un constat d'huissier dressé le 15 février 2005.

Par acte du 3 mars 2005 Brigitte Y... a fait assigner Jean- Marie X... devant le Tribunal de Grande Instance de MILLAU pour entendre dire que celui- ci avait engagé sa responsabilité contractuelle en interrompant son activité d'assistant masseur- kinésithérapeute sans respecter le préavis et les formalités prescrites dans le contrat et en s'établissant dès le mois d'octobre 2004 à son compte à moins de 25 km de son cabinet ; pour obtenir 88 050 euros à titre de dommages et intérêts ; pour qu'injonction soit faite à Jean- Marie X... de cesser son activité professionnelle dans un rayon de 25 km avec astreinte et enfin pour obtenir 1 500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement du 15 novembre 2006, la juridiction saisie :

- a rejeté la fin de non recevoir de Jean- Marie X... qui soutenait que son adversaire n'avait saisi aucune instance de conciliation avant l'assignation devant le Tribunal ;

- a dit que la clause de non concurrence était régulière ;

- a constaté que Jean- Marie X... l'avait manifestement violée ;

- a condamné le kinésithérapeute à payer à Brigitte Y... la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- a constaté que la demande de condamnation de Jean- Marie X... à cesser son activité sous astreinte était sans objet ;

- a ordonné l'exécution provisoire ;

- a condamné Jean- Marie X... à verser à Brigitte Y... la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Jean- Marie X... a interjeté appel de cette décision le 15 janvier 2007.

Il a notifié ses conclusions le 15 mai 2007. Brigitte Y... y a répondu par conclusions notifiées le 13 décembre 2007.

Le 5 mars 2008, soit la veille de l'ordonnance de clôture, Jean- Marie X... a notifié de nouvelles conclusions comprenant outre ses premières écritures, une réplique aux conclusions de son adversaire portant sur des éléments factuels et surtout une demande nouvelle de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice lié au harcèlement dont il aurait été victime.

Il a demandé aussi que son adversaire soit déboutée de sa demande de fermeture de son cabinet sous astreinte parce que la clause litigieuse est échue depuis plus de 2 ans.

Il a produit 3 pièces nouvelles.

Brigitte Y... a demandé le rejet de ces conclusions et pièces nouvelles signifiées et communiquées tardivement.

Sur l'incident :

Entre le 13 décembre 2007, jour de notification des conclusions et pièces de Brigitte Y... et l'ordonnance de clôture du 6 mars 2008, il s'est déroulé près de 3 mois qui ont largement laissé le temps à Jean- Marie X... de répliquer aux conclusions de son adversaire sans attendre le dernier jour possible, interdisant toute réplique à celle- ci.

Ce procédé déloyal qui viole le principe du contradictoire doit être sanctionné par le rejet des conclusions et pièces tardives de Jean- Marie X....

Au fond :

Selon Jean- Marie X..., la collaboration entre kinésithérapeute s'est normalement déroulée jusqu'à ce que le 13 septembre 2004 Brigitte Y... décide de vendre son cabinet à un tiers.

Désorienté et affecté, il a subi des incidents cardiaques confirmés par plusieurs arrêts de travail à compter du 15 septembre 2007.

Il conteste la régularité de la procédure en l'absence de saisine d'un syndicat professionnel ou d'un conseil juridique avant toute action en justice.

Il dénie cette valeur à le réunion organisée en présence du Docteur A... médecin du village et du maire de BROQUIES ceux- ci ne pouvant pas être impartiaux. IL demande que les prétentions de Brigitte Y... soient de ce fait déclarées irrecevables.

Il prétend subsidiairement au fond que le contrat signé avec Brigitte Y... est un contrat de travail salarié et non un contrat de collaboration et que dès lors la clause de non concurrence du contrat est illicite en l'absence de toute compensation financière.

Il existe, dit- il, une disproportion des obligations issues de la clause de non concurrence et en tout état de cause de une disproportion concernant le montant de la clause litigieuse.

IL n'a pas volé la clientèle de Brigitte Y... ; il n'est pas prouvé que le chiffre d'affaires de celle- ci ait diminué. La durée de l'activité n'a été que de deux mois et demi.

S'il devait y avoir une pénalité elle devrait être réduite à l'euro symbolique.

Il demande en tout état de cause 2 000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Brigitte Y... reproche à Jean- Marie X... sa négligence tant à l'égard de ses obligations contractuelles qu'administratives.

Elle lui reproche de l'avoir discréditée et d'avoir capté sa clientèle.

Elle soutient avoir manifesté sa bonne volonté en participant à la réunion tenue en présence du Docteur A... et du maire de BROQUIES le 17 septembre 2004.

Elle invoque la violation de la clause de non concurrence incluse au contrat.

Elle affirme avoir voulu respecter la phase de tentative de conciliation préalable à toute action en justice telle que définie au contrat mais en vain parce que l'ordre des kinésithérapeutes n'était pas encore créé à l'époque et qu'elle a subi un échec en s'adressant à son syndicat professionnel qui est aussi celui de son adversaire, la Fédération Française des Masseurs Kinésithérapeutes Rééducateurs (FFMKR).

Elle a demandé conseil à la sous- préfecture de l'AVEYRON et une médiation au Procureur de la République mais en vain.

En tout état de cause la phase de conciliation a bien eu lieu avec le médecin et le maire de BROQUIES.

Elle soutient que le contrat n'imposait pas aux parties de procéder à un arbitrage préalable mais seulement de formuler une demande d'arbitrage avant tout recours en justice.

Elle affirme par ailleurs que le contrat est bien une convention d'exercice libéral. La rupture du contrat est consécutif au comportement fautif de Jean- Marie X.... Il n'y a pas ajoute- t- elle de disproportion de la clause de non concurrence. De surcroît l'indemnité contractuelle prévue en cas de rupture fautive n'est pas elle non plus disproportionnée.

Elle insiste sur le comportement déloyal de Jean- Marie X... à son égard, sur la façon dont il l'a sans cesse dénigrée auprès de la clientèle. Il a porté atteinte à sa réputation. Elle estime que cette attitude dans le but de détourner sa clientèle justifie que son indemnisation soit portée à la somme de 88 050 euros.

Elle demande ainsi confirmation du jugement sauf en ce qui concerne les dommages et intérêts qui lui ont été accordés. Elle réclame aussi l'interruption de l'activité de Jean- Marie X... dans un rayon de 25 km sous astreinte et 3 000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

SUR CE :

A l'article 4 du contrat liant les parties intitulé CONCILIATION il est prévu ceci :
" Dans le cas où des difficultés surgiraient dans l'exécution ou l'interprétation de leur contrat, les parties demanderont l'arbitrage d'un syndicat professionnel ou d'un conseil juridique avant toute action en justice ".

Cette disposition est claire et sans équivoque. Elle impose aux parties avant toute action en justice, le recours à un arbitrage. L'autorité devant y procéder est désignée. Il s'agit d'un syndicat professionnel ou d'un conseil juridique.

Ceci exclut que la réunion du 17 septembre 2004 initiée par le Docteur A... et le maire de BROQUIES puisse être assimilée à une tentative d'arbitrage. La bonne volonté de ces personnes n'est pas en cause ni les efforts pour tenter de concilier les parties. Mais la volonté des deux kinésithérapeutes a été de soumettre leur possible différend à un arbitrage spécifique.

A cet égard le courrier du 20 octobre 2004 adressé par Brigitte Y... à Jean- Marie X... n'est qu'intentionnelle. Son courrier du 24 octobre suivant à Maître B... du service juridique de la FFMKR est une demande de conseil.

Le courrier de son avocat à la FFMKR daté du 15 février 2005 est une sollicitation. La réponse du service juridique de celle- ci est un conseil de rapprochement avec un conciliateur régional aux fins de tentative de conciliation.

Il n'y a eu aucune suite à cette proposition malgré le nom avancé d'Alain C... à BEZIERS.

Brigitte Y... n'en justifie pas sinon par un courrier du 10 mars 2005 resté apparemment sans réponse.

L'ordre des masseurs- kinésithérapeutes n'était par ailleurs pas créé en septembre 2006 comme un courrier du conseil départemental de cet ordre le démontre.

Brigitte Y... a effectivement saisi le Procureur de la République de MILLAU mais pour demander conseil et une intervention éventuelle.

Les conseils juridiques en tant que tels n'existent plus mais le terme lui- même permet une extension de compétence, en tant que personne désignée pour arbitrer un litige, à d'autres professionnels du Droit.

Aucune initiative en ce sens n'a été prise, aucune réunion organisée avec une date et une heure déterminées en présence d'un tel conciliateur n'a été tenue.

Ce n'est que dans ce cas que l'éventuel refus de Jean- Marie X... de s'y soumettre aurait pu être constaté.

La phase de conciliation n'a pas été respectée. Elle n'a pas été mise en oeuvre dans les termes du contrat.

Ceci rend irrecevable l'action en justice de Brigitte Y.... Le jugement doit être réformé en ce sens.

En application de l'article 700 du Code de Procédure Civile l'intimée versera la somme de 1 000 euros à Jean- Marie X....

Succombant elle sera condamnée aux entiers dépens ce qui la prive du bénéfice de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Reçoit en la forme l'appel interjeté,

Rejette les conclusions et pièces tardives de Jean- Marie X...,

Dit l'appel bien fondé,

En conséquence réforme la décision attaquée,

Déclare irrecevable l'action en justice de Brigitte Y...,

La condamne à payer à Jean- Marie X... la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

La déclare irrecevable en cette demande,

La condamne aux entiers dépens, ceux d'appel étant recouvrés en application de l'article 699 du Code de Procédure Civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 05/149
Date de la décision : 08/04/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Millau


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-04-08;05.149 ?
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