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20/02/2008 | FRANCE | N°07/05046

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 20 février 2008, 07/05046


SD / JLP

COUR D' APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale

ARRET DU 20 Février 2008

Numéro d' inscription au répertoire général : 07 / 05046

ARRET no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 JUILLET 2007 CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE RODEZ
No RGF06 / 00115

APPELANT :

Monsieur Jean- René X...


...

82400 GASQUES
Représentant : la SCP SABATTE- L' HOTE (avocats au barreau de TOULOUSE)

INTIMEE :

SA RAGT SEMENCES, prise en la personne de son représentant légal en exercice
Rue Emile S

ingla
Site de Bourran- BP 3357
12033 RODEZ
Représentant : Me GARCIA substituant la SELAFA BARTHELEMY & ASSOCIES (avocats au barreau de TOUL...

SD / JLP

COUR D' APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale

ARRET DU 20 Février 2008

Numéro d' inscription au répertoire général : 07 / 05046

ARRET no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 JUILLET 2007 CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE RODEZ
No RGF06 / 00115

APPELANT :

Monsieur Jean- René X...

...

82400 GASQUES
Représentant : la SCP SABATTE- L' HOTE (avocats au barreau de TOULOUSE)

INTIMEE :

SA RAGT SEMENCES, prise en la personne de son représentant légal en exercice
Rue Emile Singla
Site de Bourran- BP 3357
12033 RODEZ
Représentant : Me GARCIA substituant la SELAFA BARTHELEMY & ASSOCIES (avocats au barreau de TOULOUSE)

COMPOSITION DE LA COUR :

L' affaire a été débattue le 14 JANVIER 2008, en audience publique, Monsieur Daniel ISOUARD ayant fait le rapport prescrit par l' article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre
Monsieur Jean- Luc PROUZAT, Conseiller
Monsieur Philippe DE GUARDIA, Vice- Président placé

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON

ARRET :

- Contradictoire.

- prononcé publiquement le 20 FEVRIER 2008 par Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre.

- signé par Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre, et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, Greffier présent lors du prononcé.

*
* *
Jean- René X... a été embauché à compter du 1er juillet 1984 par la SA RAGT Semences et occupait, en dernier lieu, un poste de chef des ventes régional au salaire brut mensuel de 4882, 68 euros, son emploi étant classé cadre, coefficient 450, selon la grille de classification de la convention collective nationale de la meunerie.

Courant 2005, la société RAGT Semences a envisagé la suppression d' une trentaine d' emplois pour motif économique et établi un projet de licenciement collectif incluant le plan de sauvegarde de l' emploi (PSE) prévu à l' article L 321- 4- 1 du code du travail, lequel a été approuvé par le comité d' entreprise lors d' une réunion du 12 août 2005.

Monsieur X... a été licencié par lettre recommandée avec demande d' avis de réception en date du 22 septembre 2005, aux motifs suivants :

(…) En ce qui concerne les motifs de ce licenciement, il s' agit de ceux qui ont été exposés au comité d' entreprise de l' UES de RAGT au cours des réunions des 6 juillet, puis 9 et 12 août 2005.

La décision qui entraîne la suppression de votre poste est liée aux difficultés économiques consécutives à la crise du maïs français que traverse l' entreprise.

Le résultat net du groupe est passé de 4, 6 millions d' euros en 2002 / 2003, à 3, 1 en 2003 / 2004 pour se transformer en une perte de 1, 6 millions d' euros en 2004 / 2005.

Sous les différentes pressions économiques et agro- environnementales, la sole de maïs a diminué de 8 % en France : le désherbage rendu plus onéreux et plus complexe du fait de la suppression de l' Atrazine, l' interdiction des traitements de semences insecticides, facteurs de production et sources de valeur ajoutée pour l' ensemble de la chaîne, l' incapacité à développer des innovations telles les maïs résistants à la pyrale ou les maïs résistants à des herbicides totaux moins coûteux et plus efficaces, les mesures de rétorsion sur l' utilisation de l' eau pour l' irrigation, se cumulent pour lourdement pénaliser le maïs.

Cette baisse est également associée à une diminution des prix dans un contexte de compétition exacerbée.

Le groupe RAGT n' échappe pas à cet environnement et se retrouve même particulièrement exposé du fait de la part prépondérante (70 %) du marché français dans son activité.

Cette situation a conduit l' entreprise à engager une restructuration destinée à rétablir sa compétitivité se traduisant entre autre par la suppression de votre poste de travail, à savoir chef de ventes région grand sud.

Dans le cadre de notre obligation de reclassement, nous vous avons proposé le 17 août 2005 plusieurs solutions de reclassements au sein des sociétés du groupe.

Vous disposiez jusqu' au 3 septembre 2005 d' un délai de réflexion pour nous faire connaître votre position.

Vous nous avez fait savoir que vous postuliez au poste de responsable grands comptes par courrier du 1er septembre 2005. En conséquence et conformément à notre lettre du 7 septembre 2005, monsieur A... vous a précisé le 16 septembre 2005 les conditions de rémunérations relatives à ce poste de reclassement (salaire brut mensuel de 3600 € / classe intéressement 3 mois).

Vous avez, le 19 septembre 2005, décliné par téléphone cette proposition, ce qui nous conduit à vous notifier par la présente votre licenciement pour motif économique (…)

Contestant le bien fondé de son licenciement, monsieur X... a saisi le conseil de prud' hommes de Rodez qui, par jugement du 6 juillet 2007, l' a débouté de l' ensemble de ses demandes.

Il a régulièrement relevé appel, le 17 juillet 2007, de ce jugement.

En l' état des conclusions qu' il a déposées et soutenues oralement à l' audience, monsieur X... en sollicite l' infirmation et demande à la cour de :

- dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et abusif,

- condamner la société RAGT Semences à lui payer les sommes de :
• 162 960, 00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
• 1215, 00 euros de rappel de salaire au titre de l' indemnité de bureau,
• 970, 01 euros à titre de rappel de prime à la création d' entreprise prévu dans le PSE,
• 3000, 00 euros sur le fondement de l' article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, il fait essentiellement valoir que :

- les chiffres dont se prévaut la société RAGT Semences démontrent certes un ralentissement de son activité et une perte sur l' exercice clôturé le 30 juin 2005, mais au niveau du groupe, les comptes consolidés font apparaître un résultat d' exploitation positif, ce dont il résulte que la réalité des difficultés économiques invoquées est contestable,

- ces difficultés ont été passagères puisque les chiffres du marché sont en évolution à compter de l' exercice 2006 / 2007,

- le cabinet d' expertises SYNDEX, mandaté par le comité d' entreprise, a, par ailleurs, révélé que la restructuration de l' organisation commerciale et marketing était en réalité la traduction d' un souhait de réduire les coûts salariés pour adapter la structure à un marché en perte brutale de valeur, la suppression des postes n' étant ainsi destinée qu' à réaliser des économies,

- la société RAGT Semences n' a pas satisfait à son obligation de reclassement dès lors qu' elle s' est contentée, sans procéder à une recherche individualisé, de lui proposer les postes vacants contenus dans le PSE, lesquels étaient tous des postes déqualifiés par rapport au poste qu' il occupait.

La société RAGT Semences conclut, pour sa part, à la confirmation du jugement et à la condamnation de monsieur X... à lui payer la somme de 3000, 00 euros en remboursement de ses frais irrépétibles.

Elle soutient en substance que :

- les difficultés économiques rencontrées par le groupe étaient bien réelles et provenaient d' une baisse des ventes de maïs observée depuis 2003, ce qui rendait nécessaire sa restructuration afin de sauvegarder sa compétitivité,

- malgré la stabilisation opérée aujourd' hui grâce aux mesures prises dans le cadre du plan de restructuration, la situation du groupe reste précaire,

- les propositions faites initialement au titre du livre IV ont été améliorées par la définition de mesures autres que les licenciements, s' étant notamment traduites par une baisse importante des frais de publicité, de missions et de téléphone,

- 15 postes de reclassement ont été proposés à monsieur X... par courriers des 17 et 26 août 2005, postes qu' il a cependant refusés.

MOTIFS DE LA DECISION :

Le rapport du cabinet d' expertises comptables SYNDEX établi en août 2005 à la demande du comité d' entreprise, conclut que le groupe RAGT (RAGT Plateau central, GRUEL FAYER, RAGT Génétique, RAGT Semences et RAGT 2N) traverse de réelles difficultés économiques, liées à la crise du maïs français.

Il résulte de ce rapport qu' après une forte croissance de 1999 à 2002, le chiffre d' affaires du groupe a stagné en 2003 et 2004 avant de baisser de 5 % en 2005 et que le résultat d' exploitation, après être passé de 11 millions d' euros en 2002 à 6, 2 millions d' euros en 2004, a chuté à 2, 4 millions d' euros en 2005, seuil qui ne permet plus de couvrir les frais financiers du groupe ; selon l' analyse des comptes consolidés faite par le cabinet SYNDEX, la baisse du résultat d' exploitation observée de 2004 à 2005 s' est traduite, compte tenu d' une perte exceptionnelle de 1, 5 million d' euros due au coût du PSE de GRUEL FAYER, par un résultat net correspondant à une perte de 1, 6 million d' euros.

Cette analyse, effectuée notamment sur la base des prévisions pour 2005, doit être corrigée au vu des comptes de l' exercice clos le 30 juin 2005, dont il résulte un résultat d' exploitation de 4 millions d' euros (et non de 2, 4 millions d' euros), soit une baisse de 36 % du résultat d' exploitation par rapport à 2004 et une perte de 333 000, 00 euros.

Le cabinet SYNDEX retient également que la baisse du résultat d' exploitation consolidé est étroitement liée à celle de l' activité « semences », dont le chiffres d' affaires qui s' établissait en 2002 et 2003 à respectivement 9, 3 et 9, 8 millions d' euros, soit 85 et 89 % du chiffre d' affaires du groupe, a atteint 4, 9 millions d' euros en 2004 puis 1, 9 million d' euros en 2005, soit un effondrement de 7, 9 millions d' euros en deux ans ; ce phénomène provient de la baisse des ventes de maïs (- 27 % en deux ans) générant une perte de marge brute de 12, 5 millions d' euros entre 2003 et 2005, consécutive à la forte réduction du marché français du maïs, qui peut s' expliquer, selon le cabinet d' expertises comptables, par différentes pressions économiques et environnementales (interdiction de l' Atrazine, du Gaucho et du Régent ; mesure de rétorsion sur l' utilisation de l' eau ; baisse des prix orchestrée notamment par Monsanto).

Même si le résultat déficitaire du groupe RAGT en 2005 procède, pour une large part, de la comptabilisation d' une perte exceptionnelle au cours de l' exercice clos le 30 juin 2005, les éléments fournis établissent bien l' existence de difficultés économiques réelles, appréciées par rapport non à la société RAGT Semences mais au groupe auquel elle appartient, se caractérisant par une baisse de plus de 60 % (11 millions à 4 millions d' euros) du résultat d' exploitation du groupe de 2002 à 2005, due à la crise du maïs français.

Ces difficultés, loin d' être passagères, ont entraîné une dégradation progressive du chiffre d' affaires sur une période de quatre ans (2002- 2005) et l' examen des comptes consolidés du groupe RAGT arrêtés au 30 juin 2006 démontre que ces difficultés ont perduré malgré les mesures de restructuration mises en oeuvre ; le résultat d' exploitation du groupe s' est en effet élevé à- 183 000, 00 euros en 2006, nonobstant un bénéfice de 244 000, 00 euros.

Il ne peut dès lors être soutenu que la suppression de l' emploi de monsieur X... ne procède pas de difficultés économiques suffisamment importantes et durables et n' a d' autre but que de permettre à la société RAGT Semences de réaliser des économies.

Dans le cadre de ses recherches de reclassement, la société RAGT Semences a, par ailleurs, proposé au salarié 13 des 32 postes disponibles, tels que définis dans le PSE, correspondant à des emplois classés agent de maîtrise ou cadre, proposition faite par courrier du 17 août 2005 auquel se trouvaient annexées les fiches de poste décrivant les caractéristiques des emplois et leur localisation ; elle lui a également, par courrier du 26 août 2005, proposé un poste créé de responsable grands comptes « jardin et animalerie », accompagné de la fiche de poste correspondante.

Monsieur X... a, par lettre du 1er septembre 2005, refusé les propositions portant sur des postes de catégorie inférieure (sic) mais a postulé au poste de responsable grands comptes sous réserve du maintien de son salaire actuel ; la société RAGT Semences a, dans un premier temps, refusé d' accéder à la demande du salarié, par courrier du 7 septembre 2005, avant de lui proposer le 16 septembre suivant, par l' intermédiaire de son supérieur hiérarchique (Gildas A...) dont l' attestation est versée aux débats, de porter à 3600, 00 euros bruts le montant de son salaire mensuel, offre que l' intéressé a finalement décliné.

Le fait que lui aient été proposés des postes disponibles figurant dans le PSE, ne permet pas d' affirmer que l' employeur ne s' est pas livré à une recherche de reclassement individualisée, alors que les postes de reclassement correspondent pour la plupart à des postes d' encadrement de catégorie identique, même s' ils correspondent à un coefficient de rémunération inférieur, et qu' ont été adressées au salarié les fiches de postes décrivant la nature des fonctions, la localisation de l' emploi et les conditions de rémunération.

La société RAGT Semences a ainsi satisfait à son obligation de reclassement.

Le licenciement de monsieur X... repose donc sur une cause réelle et sérieuse au regard des dispositions de l' article L 321- 1 du code du travail, ainsi que l' a justement retenu le premier juge.

En congé de reclassement à compter du 2 octobre 2005 pour une durée de 9 mois, monsieur X... qui n' avait plus d' activité professionnelle durant cette période, n' apparaît pas fondé à obtenir le paiement d' un rappel au titre de la prime dite « de bureau », prime liée à l' exécution effective de la prestation de travail.

Le PSE prévoit enfin l' attribution d' une aide forfaitaire de 12 500, 00 euros à la création ou à la reprise d' entreprise (article 2. 5), payable sur présentation d' un justificatif attestant de l' immatriculation de l' entreprise au RCS ou au registre des métiers ; en l' occurrence, monsieur X... qui, ayant créé une SARL dénommée « agence Canelle » spécialisée dans le conseil aux entreprises, a perçu la somme de 12 500, 00 euros (bruts) ou 11 529, 99 euros déduction faite de la CSG et de la CRDS, n' est pas non plus fondé à prétendre qu' un rappel lui est dû sur le montant de l' aide.

Le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé dans toutes ses dispositions et monsieur X... qui succombe, condamné aux dépens d' appel.

L' équité ne commande pas toutefois qu' il soit fait application, au profit de la société RAGT Semences, des dispositions de l' article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme dans toutes ses dispositions le jugement rendu le 6 juillet 2007 par le conseil de prud' hommes de Rodez,

Condamne monsieur X... aux dépens d' appel,

Dit n' y avoir lieu à l' application, au profit de la société RAGT Semences, des dispositions de l' article 700 du code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 07/05046
Date de la décision : 20/02/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Rodez


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-02-20;07.05046 ?
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