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13/02/2008 | FRANCE | N°04/00468

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 13 février 2008, 04/00468


SD / BB / AP
COUR D' APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale

ARRET DU 13 Février 2008

Numéro d' inscription au répertoire général : 06 / 04940

ARRET no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 JUIN 2006 CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE MONTPELLIER
No RG04 / 00468

APPELANTE :

ME X... LIQUIDATEUR DE LA SAS IGS (INSPECTION GARDIENNAGE SECURITE)

...

44020 NANTES CEDEX 1
Représentant : Me PAQUE de la SELARL CORNET VINCENT SEGUREL (avocats au barreau de NANTES)

PARTIE INTERVENANTE VOLONTAIRE

Socié

té IGS INSPECTION GARDIENNAGE SECURITE pris en la personne de son mandataire ad' hoc M. Eric A...

Hotel d' Entreprise no 1- Parc ...

SD / BB / AP
COUR D' APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale

ARRET DU 13 Février 2008

Numéro d' inscription au répertoire général : 06 / 04940

ARRET no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 JUIN 2006 CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE MONTPELLIER
No RG04 / 00468

APPELANTE :

ME X... LIQUIDATEUR DE LA SAS IGS (INSPECTION GARDIENNAGE SECURITE)

...

44020 NANTES CEDEX 1
Représentant : Me PAQUE de la SELARL CORNET VINCENT SEGUREL (avocats au barreau de NANTES)

PARTIE INTERVENANTE VOLONTAIRE

Société IGS INSPECTION GARDIENNAGE SECURITE pris en la personne de son mandataire ad' hoc M. Eric A...

Hotel d' Entreprise no 1- Parc d' Activité deTournebride
44118 LA CHEVROLIERE
Représentant : Me PAQUE de la SELARL CORNET VINCENT SEGUREL (avocats au barreau de NANTES)

INTIMES :

Monsieur Gilles B...

...

34150 LA BOISSIERE
Représentant : la SCP ARMANDET LE TARGAT GELER (avocats au barreau de MONTPELLIER)

AGS (CGEA RENNES)
Immeuble Le Magister- 4 Cours Raphaël Binet
35069 RENNES CEDEX
Représentant : la SCP CHATEL- CLERMONT- TEISSEDRE TALON- BRUN (avocats au barreau de MONTPELLIER)

COMPOSITION DE LA COUR :

L' affaire a été débattue le 08 JANVIER 2008, en audience publique, Monsieur Pierre D' HERVE ayant fait le rapport prescrit par l' article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

Monsieur Pierre D' HERVE, Président
Madame Bernadette BERTHON, Conseiller
Madame Marie CONTE, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON

ARRET :

- Contradictoire.

- prononcé publiquement le 13 FEVRIER 2008 par Monsieur Pierre D' HERVE, Président.

- signé par Monsieur Pierre D' HERVE, Président, et par Mademoiselle Sophie LE SQUER, Greffier présent lors du prononcé.

*
**

FAITS ET PROCEDURE

La SARL INSPECTION GARDIENNAGE SECURITE dite IGS a été crée le 12 novembre 1991.

A compter du 1ER janvier 1993, Gilles B... a été embauché par ladite SARL suivant contrat à durée indéterminée en qualité de directeur de développement.

Le 18 janvier 1993, les associés de la SARL IGS cédaient leurs parts sociales dont 250 parts aux époux D... et 250 parts à Gilles B... lequel devenait gérant.

Le 11 février 2002, un protocole de cession organisait la vente par Gilles B... et les époux D... de leurs parts à une holding de reprise la SAS MAILSERVICES, le dit protocole prévoyant pour Gilles B... la promesse d' un contrat à durée indéterminée comme directeur commercial

Le même jour 11 février 2002 mais par un document distinct, il était spécifié qu' en cas de rupture du contrat de travail et quelqu' en soit la cause ou l' auteur, il serait alloué à Gilles B... une indemnité égale à 137 205 € avec garantie bancaire à première demande de la BNP signée le 26 février 2002.

Le 27 février 2002, intervenaient d' une part la cession des parts programmée pour laquelle Gilles B... recevait 610 032 € et d' autre part entre la SARL IGS devenue entre temps la SAS IGS et Gilles B... la signature d' un contrat de travail à durée indéterminée au profit de ce dernier en qualité de directeur de développement statut cadre niveau III échelon C moyennant un salaire annuel brut de 46 144, 15 € la première année puis de 68 602 €.

L' article 8 de ce contrat de travail prévoyait à la charge de Gilles B... une exclusivité de service et une confidentialité et l' article 9 édictait une clause de non concurrence sans contre partie financière pour le salarié.

Le 7 janvier 2004, la SAS IGS a convoqué par acte d' huissier, Gilles B... à un entretien préalable au licenciement pour le 14 janvier 2005 et l' a placé en mise à pied conservatoire.

Après déroulement de l' entretien, Gilles B... a été licencié par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 janvier 2004 ainsi libellée :

" Ayant eu connaissance de faits extrêmement graves vous concernant, nous vous avons convoqué, par lettre du 7 janvier 2004, à un entretien préalable à une éventuelle sanction pouvant aller jusqu' à un licenciement pour faute lourde, fixé au 14 janvier 2004,
Compte tenu de la gravité des faits retenus contre vous, nous vous avions, aux termes de cette même lettre, mis à pied à titre conservatoire jusqu' à l' issue de la procédure, c' est- à- dire jusqu' à la notification de la décision prise à la suite de l' entretien préalable.
Les explications recueillies auprès de vous lors de notre entretien ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits. Les investigations complémentaires que nous avons pu entreprendre depuis l' ont au contraire confirmée.
Nous avons en conséquence décidé de procéder à votre licenciement pour faute lourde pour les motifs suivants :
l / Nous vous rappelons que nous vous avions embauché en qualité de Directeur de développement avec pour mission notamment :
- " de participer à l' élaboration de la politique du développement de la Société,
- de définir des stratégies de recherches de nouveaux clients ;
- de contrôler l' efficacité des services de développement de la Société ;
- d' assurer le suivi technique et le règlement des litiges commerciaux susceptibles de se produire ".

A ce titre, vous aviez en charge, aux termes de votre contrat de travail, de " faire à la direction générale des propositions quant aux orientations à prendre en matière de politique de développement de la clientèle de la Société. De par vos avis et suggestions dans ce domaine, vous étiez étroitement associé à la détermination des objectifs dont vous devrez ensuite assurer la réalisation ".
Vous n' avez pourtant mis en place aucune opération de stratégie commerciale permettant de neutraliser les pertes enregistrées par la Société et par la suite de déployer des efforts importants de prospection commerciale.
2 / Outre le fait que vous n' avez, à ce jour, réalisé aucune de ces missions, il apparaît que vous avez volontairement dissimulé aux dirigeants de la Société un certain nombre d' informations reflétant la réelle situation économique de la Société.
Vous avez, en toute connaissance de cause, masqué la perte de quatre clients représentant plus de 60 000 euros, et ce alors même que la dénonciation des dits contrats était effective depuis plusieurs mois. Lorsque Messieurs Eric A... et Pascal F... vous ont réclamé les informations afférentes à ce manque de 60 000 euros de facturation, pour être mobilisés auprès de la BNP Factor et du CRCA, vous avez réitéré pendant plus de dix jours des allégations mensongères.
Vous avez été jusqu' à mettre en cause les intempéries dans l' Hérault pour expliquer les retards de pointage d' horaires effectués par les salariés sur les quatre chantiers concernés, et de fait, la facturation leur correspondant !
L' un des quatre contrats, pourtant déjà perdu, avait même fait l' objet de projection de développement de votre part, dont Monsieur Eric A... avait tenu informé en octobre 2003 les actionnaires et banquiers.
Vous avez par ailleurs fait état de la conclusion de prétendus contrats pour un montant de 110. 000 euros, avec comme échéances septembre et décembre 2003, et ce aux fins de compenser les pertes enregistrées. Vous ne cessez pourtant à ce jour de repousser lesdites échéances, ce qui nous force à nous interroger sur la véritable existence de ces contrats.
3 / Les courriers sensibles concernant la Société ont également été volontairement dissimulés, que ce soient vos correspondances avec certains clients mécontents ou des dossiers prud' homaux, dont certains anciens, dont l' existence même nous avait été dissimulée.
Nous avons découvert dans plusieurs dossiers clients des volumineux échanges de correspondance dont nousn' avons jamais été informés et dont la teneur ne laisse aucun doute sur l' absence totale de volonté de votre part d' adopter une attitude commerciale à leur égard.
Personne n' aurait agi autrement pour persuader ces clients de rompre leurs relations avec IGS.
En tout état de cause, la gravité des reproches formulés par ces clients et le contenu de leurs lettres aurait du d' autant plus vous pousser à multiplier les efforts commerciaux et de prospection.
Concernant les procédures prud' homales, nous avons à ce jour découvert sept dossiers en cours, dont vous ne nous avez jamais mentionné l' existence et dans lesquels vous vous êtes positionné en unique interlocuteur représentant IGS. Ces dossiers font apparaître des méthodes de gestion du personnel douteuses et il est clair que les intérêts d' IGS n' y ont pas été défendus comme ils auraient du l' être.
L' ensemble de ces dissimulations n' a manifestement eu pour unique objectif que de nuire aux intérêts de la Société.
4 / Il semble par ailleurs que vous développiez un projet professionnel personnel. L' analyse de vos notes de frais atteste en effet une volonté de votre part de maquiller vos déplacements.
Le développement de cette activité s' est en conséquence fait au détriment de la Société IGS et en violation de l' article 8 de votre contrat de travail, aux termes duquel vous vous êtes engagé à réserver l' exclusivité de vos services à la Société.
5 / Vous vous êtes octroyé en décembre 2003 un acompte de 4 000 euros, soit 90 % de votre salaire net, et ce en dépit de l' interdiction formulée dans une note de service.
Outre la violation des termes de ladite note de service, vous avez procédé à cette opération sans vous soucier de l' éventuelle insuffisance de provision bancaire sur les comptes de la Société.
Dans le même esprit, vous n' avez pas hésité à solliciter le paiement d' un treizième mois alors même que le montant de votre rémunération annuelle brute, d' un montant de 66 802 euros, était déjà dépassé de plus de 13 000 euros.
Tous ces agissements, réalisés dans le seul but de nuire gravement aux intérêts de la Société, sont inacceptables et rendent impossible votre maintien dans la Société.
Nous vous confirmons que nous considérons que ces faits sont constitutifs, individuellement et plus encore ainsi accumulés, d' une faute lourde, privative de toute indemnité. Votre période de mise à pied ne sera en conséquence pas rémunérée.
Votre licenciement prendra effet à compter de la première présentation de cette lettre.
Votre attestation Assedic, votre certificat de travail et votre solde de tout compte vous seront adressés dans les meilleurs délais. "

Le 26 février 2004, le Conseil de Prud' hommes de MONTPELLIER était saisi :
- d' une part par la SAS IGS aux fins d' obtenir des dommages et intérêts pour faute lourde et voir annuler la clause dite " golden parachute, (RG 04 / 468),
- d' autre part par le salarié lui même afin d' obtenir diverses indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (RG 04 / 470).

Le 5 janvier 2005, le Tribunal de Commerce de NANTES prononçait la liquidation judiciaire de la SAS IGS, étant précisé qu' a été désigné mandataire liquidateur Maître Philippe X... et mandataire ad hoc Eric A....

Par jugement en date du 12 juin 2006, la juridiction prud' homale section encadrement a :

- joint les deux instances,
- dit irrégulière la procédure de licenciement,
- condamné la SAS IGS à payer au salarié les sommes de :
- 6828, 96 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement,
- 8 536, 20 € à titre de solde d' indemnités de congés payés pour la période du 1er juin 2002 au 31 mai 2003
- débouté Gilles B... du surplus de ses demandes,
- débouté la SAS IGS de ses demandes en ce qui concerne la provision d' indemnités de préjudice,
- dit qu' il n' y a pas lieu d' ordonner d' expertise judiciaire,
- laissé les éventuels dépens à la charge des parties,
- dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Maître X... en qualité de liquidateur de la SAS IGS a le 12 juillet 2006 régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Le 13 juillet 2006 la Société IGS prise en la personne de son mandataire ad' hoc Eric A... désigné par le Tribunal de Commerce de NANTES déclarait au Greffe son intervention volontaire dans l' instance devant la Cour.

La présente Cour d' appel suivant arrêt du 27 mars 2007 a déclaré recevable en la forme l' appel principal de Maître X... en qualité de liquidateur de la SAS IGS et celui incident de Gilles B..., au fond a sursis à statuer dans l' attente du dépôt du rapport d' expertise ordonné par le Tribunal de Commerce d' AVIGNON le 24 novembre 2006 (dans l' instance pendante devant ce tribunal, le liquidateur ayant poursuivi la Société SECURIPLUS en concurrence déloyale).

Le rapport de Thierry H... expert judiciaire désigné par le Tribunal de Commerce sus dit a été déposé le 28 septembre 2007 au greffe de la juridiction commerciale.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans leurs dernières conclusions, Maître Philippe X... ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS IGS et la Société IGS pris en la personne de son mandataire ad hoc Eric A... intervenante volontaire, demandait à la Cour de réformer partiellement le jugement déféré, dire l' intimé irrecevable et mal fondé en toutes ses réclamations, dire le licenciement pour faute lourde bien fondé, constater l' obligation qui pèse sur Gilles B... de réparer les préjudices qu' il a causés à la société IGS conformément aux dispositions de son contrat de travail, le condamner à payer une somme minimale de 1. 142 560 € à titre de dommages et intérêts ainsi que 15 000 € sur le fondement de l' article 700 du Code de Procédure Civile outre les dépens.

Ils soutiennent que Gilles B... et les époux D... ont mis en oeuvre un processus frauduleux visant à vider la société IGS de sa substance et ce au bénéfice de la Société SECURIPLUS qui a été créée le 13 décembre 2002, qu' ils ont détourné la clientèle, fait supporter par
l' IGS les dépenses de SECURIPLUS mis tout en oeuvre afin de détruire IGS, démarcher les salariés d' IGS afin que ceux- ci mettent en oeuvre des procédures pud' homales à l' encontre d' IGS (en proposant même les services gratuits de leur avocat).

Ils tiennent à souligner que la Société MAILSERVICES acquéreur de titres de la Société IGS et qui n' a eu aucune remontée de dividendes de la Société IGS par suite de ce processus frauduleux, n' a pu rembourser son emprunt souscrit pour l' achat des titres et a fait l' objet d' un redressement judiciaire du 8 décembre 2004 converti en liquidation judiciaire le 7 juin 2006.

Ils précisent par ailleurs que la Société MAILSERVICES a engagé au civil une procédure de résiliation judiciaire de la cession des titre pendant au civil devant la présente Cour, que la Société IGS a assigné la Société SECURIPLUS devant le Tribunal de Commerce d' AVIGNON lequel le 24 novembre 2006 a reconnu les agissements déloyaux de cette dernière et a ordonné une expertise de laquelle il ressort que le chiffre d' affaires détourné en 2003 et 2004 s' élève à plus de 700 000 euros.

Ils s' opposent à la prétendue irrégularité de procédure au motif que les seules déclarations de Fabrice I... qui est également impliqué dans le processus de détournement et des destructions préalablement exposé ne sont pas probantes.

Ils font valoir par ailleurs que l' intention de nuire aux intérêts de l' entreprise caractérisant la faute lourde est établie tout démontrant une corrélation entre le lancement par Gilles B... de sa Société SECURIPLUS et le soin apporté par ce dernier pour à la fois ne rien faire qui puisse arranger la siuation de la Société IGS dans le respect de son contrat et tout faire pour ce qui pourrait la précipiter vers sa ruine en violation de son contrat.

Ils ajoutent que la réclamation au titre de la " golden parachute " doit être rejetée ne concernant en aucune façon la Société IGS et s' agissant d' un engagement de la Société MALUSERVICES vis à vis de Gilles B....

Ils s' insurgent sur la demande de 100 000 € pour licenciement abusif et vexatoire, qu' ils qualifient de provocante et honteuse, ainsi que sur les tentatives de diversion du salarié, lançant des accusations infondées à l' encontre des associés de la Société MAILSERVICES qui étaient caution à titre personnel de la dite société et n' avaient aucun intérêt à la " piller " ;

Ils excluent enfin toute litispendance au titre de la réparation de leur préjudice.

Aux termes de ses écritures, Gilles B... conclut :

- à la confirmation du jugement déféré en ce qu' il a alloué un mois de salaire pour l' irrégularité de la procédure (6828, 86 €) et une indemnité compensatrice de congés payés de 8536, 20 €,
- à sa réformation pour le surplus réclamant la condamnation de la Société IGS et de son liquidateur au paiement en sus de :

* 100 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et motifs diffamatoires portant atteinte à son honneur et sa probité,
* 20 486, 87 € bruts à titre d' indemnité compensatrice de préavis et 2048, 68 € bruts pour les congés payés afférents,
* 4552, 64 € bruts à titre d' indemnité compensatrice de congés payés acquis du 1er juin 2003 au 14 janvier 2004,
* 5463, 16 € bruts à titre de rappel de salaire sur la mise à pied et 546, 31 € pour les congés payés afférents,
* 8109, 37 € à titre d' indemnité légale de licenciement,
* 137 205 € au titre de l' indemnité conventionnelle de rupture avec intérêts au taux légal à compter du 11 février 2004, la dite indemnité étant directement liée à la relation de travail,
*5000 € sur la base de l' article 700 du Code de Procédure Civile outre les dépens.

Il sollicite par ailleurs que les dites condamnations soient portées au passif de la liquidation de la Société IGS, que l' arrêt soit déclaré opposable à l' AGS- CGEA de RENNES dans les limites de sa garantie, que l' appelante soit déboutée de sa demande d' indemnisation arguant à titre infiniment subsidiaire au cas où une faute lourde serait retenue que le préjudice maximum subi par cette dernière qui pourrait lui être imputé ne saurait excéder 120 423 €.

Il rappelle que l' exigence d' un grief précis entraîne que celui- ci soit établi antérieurement ou à tout le moins, de façon contemporaine à la date d' envoi de la lettre de licenciement et estime donc que le 4 ème grief ne répond pas à cette exigence, que les pièces versées au débat ne suffisent pas à rapporter la preuve de la réalité des autres faits allégués de sorte que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Il invoque le rapport d' expertise déposé le 28 septembre 2007 dont les conclusions sont contraires à la thèse de l' appelant et considère que ce ne sont pas les six clients (pour un portefeuille de 60) travaillant avec SECURIPLUS durant l' année 2003 qui sont à l' origine de la déconfiture de la SAS IGS mais bien plutôt la gabegie orchestrée par Eric A... et Pascal F..., dirigeants d' IGS.

L' AGS- CGEA de RENNES tout en relevant les conditions dans lesquelles la communication du rapport de Monsieur H... a été réalisée 8 jours avant l' audience, sollicite au principal qu' il soit fait droit à l' argumentation soutenue par les organes de la procédure collective et que le salarié soit débouté de ses demandes.

Subsidiairement, au cas d' application de l' article L. 122- 14- 4 du Code du travai l elle conclut à ce que les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse soient limités à 41 000 € en l' absence de justificatif de préjudice et non cumulable avec l' indemnité pour irrégularité de procédure s' en rapportant sur les indemnités de préavis, de licenciement, de rappel de salaire et de congés payés.

Elle s' oppose à l' octroi du paiement de l' indemnité contractuelle de rupture, le salarié qui ne peut percevoir deux fois la même indemnité, devant justifier du non paiement par l' organisme bancaire chargé de s' en acquitter.

Elle rappelle que le plafond pouvant être garanti au titre de la créance résultant de l' exécution du contrat de travail est fixé à 58 368 €.

Pour plus ample exposé, la Cour renvoie expressément aux écritures déposées par chaque partie et réitérées oralement à l' audience.

SUR CE

I. Sur le licenciement

1o Sur la régularité de la procédure

Au vu des déclarations faites par Fabrice I... sur sommation interpellative, qu' aucun motif en l' état des pièces produites ne permet d' écarter, il apparaît que les dirigeants de la Société IGS ont annoncé à d' autres salariés de l' entreprise leur décision de licencier Gilles B... avant que ce dernier n' ai été entendu dans le cadre de l' entretien préalable.

Considérant qu' une telle annonce constitue une irrégularité de procédure qui ne prive pas néanmoins la rupture d' une cause réelle et sérieuse, il doit être octroyé au salarié une indemnité pour procédure irrégulière à hauteur de 6828, 96 € comme fixé par les premiers juges.

2o Sur le fond

La faute grave se définit comme la faute qui résulte d' un fait ou d' un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d' une importance telle qu' elle rend impossible le maintien du salarié dans l' entreprise pendant la durée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l' employeur.

La faute lourde exige en sus la preuve de l' intention de nuire du salarié.

En l' état, l' employeur à qui incombe la charge de la preuve démontre non seulement la faute grave mais également la faute lourde de Gilles B....

En effet, au vu des nombreuses pièces versées au débat par l' employeur et ainsi que le jugement déféré le relève sans extrapolation mais par des motifs pertinents que la Cour adopte, les griefs suivants visés dans la lettre de licenciement qui fixe la limite du litige sont parfaitement établis à savoir le grief no 1 le manque de mise en place de proposition et de stratégie commerciale, le no 2 le manque de facturation de 60 000 € et le mensonge sur la signature des prétendus contrats à échéance de septembre 2003 à décembre 2003, le no 3 pour la dissimulation de courriers sensibles, le no 4 pour la violation de l' article 8 du contrat de travail par le développement d' une activité concurrente.

Par contre, il n' y a pas lieu de retenir comme l' ont à juste titre décidé les premiers juges ni la dissimulation de procès prud' homaux (compris dans le 3ème grief) dès lors que le salarié n' était que directeur de développement et non gestionnaire du personnel et le 5ème grief concernant l' acompte sur salaire et la sollicitation d' un treizième mois.

S' agissant du grief no 4, il convient d' ajouter que si la rédaction du premier paragraphe de l' énoncé de ce grief pourrait susciter le doute par
les mots employés, il s' avère que dans le deuxième paragraphe l' employeur énonce de façon claire précise et sans ambiguïté ce qu' il reproche au salarié à savoir le développement d' une activité professionnelle extérieure faite au détriment de la Société IGS en violation de l' article 8 de son contrat de travail qui prévoyait expressément une obligation d' exclusivité de service avec interdiction d' occuper aucune autre occupation professionnelle rémunérée ou non salariale ou même non concurrente et un engagement à respecter la confidentialité la plus absolue.

Or il n' est pas contesté ni contestable que Gilles B... pendant qu' il était au service de la SAS IGS a bien créé la SARL SECURIPLUS en décembre 2002 et a dès févirer 2003 (contrat de gardiennage signé avec la SARL VEDIS) agi pour le compte de cette société en la développant mais en détournant ainsi la clientèle de la Société IGS, ce que cette dernière ne pouvait soupçonner ne l' ayant découvert que juste avant d' engager la procédure de licenciement.

Au demeurant, il est permis de constater que dans le cadre de l' expertise judiciaire réalisée par Monsieur H... produite au débat, Gilles B... qui représentait la SARL SECURIPLUS a admis le détournement de clientèle au préjudice de la Société IGS à tout le moins pour six clients.

En l' état ce grief est déterminant de la faute lourde.

S' agissant de la création d' une entreprise dans le même secteur d' activité (et donc concurrente à celle dont il venait de vendre les parts pour 610 000 € et dont il était salarié soumis à une clause d' exclusivité) et eu égard aux actes avérés de détournements de clientèle dont il a été l' instigateur, l' intention de nuire de Gilles B... est amplement démontrée.

Au surplus, il ne peut être tiré la moindre conséquence du fait que les parties aient pu en octobre 2003 envisagé différentes propositions en vue d' un protocole d' accord, dès lors que les dites propositions n' ont jamais été acceptées et sont devenues caduques et que surtout en octobre 2003, la Société IGS avait seulement constaté une dégradation de la situation mais n' avait pas découvert les détournements dont elle avait fait l' objet et qui lui ont été relevé fin 2003 début 2004.

Dans ces conditions, la confirmation du jugement déféré qui a déclaré la faute lourde du salarié justifiée, s' impose.

En conséquence, les demandes à titre de dommages et intérêts au titre des indemnités de préavis ou de licenciement ou de rappel de salaire pour la mise à pied consécutive ne peuvent être que rejetées.

II. Sur les autres demandes

1o Sur les congés payés

Là encore la décision prud' homale qui a alloué au salarié la somme de 8536, 30 € à titre de solde d' indemnité de congés payés pour la période du 1er juin 2002 au 31 mai 2003 doit être confirmée.

En effet, en application de l' article L. 223- 14 du Code du Travail, la faute lourde prive le salarié de l' indemnité de congés payés seulement sur la période en cours lors du licenciement.

En conséquence, et en l' absence d' autres observations des appelants sur la période admise et eu égard au bulletin de salaire de décembre 2003, il ne peut être octroyé à l' intimé que la somme sus visée.

2o Sur la réclamation au titre de l' indemnité de rupture contractuelle

En l' état, il est constant que par un deuxième protocole d' accord en date du 11 février 2002 une indemnité de rupture à hauteur de 137 205 € a été prévu au bénéfice de Gilles B....

Toutefois, outre le fait que la dite indemnité était prévue seulement en cas de rupture du contrat de travail à compter du 24ème mois suivant la signature des actes de cession de titre, délai non échu à la date du licenciement, il apparaît au principal que le dit protocole n' a été conclu qu' entre la Société MAILSERVICES et Gilles B... et consécutivement au protocole concernant la cession des titres et non avec la Société IGS dans le cadre du contrat de travail liant cette dernière à Gilles B..., contrat qui n' en fait nullement état.

Dans ces conditions, comme le soulèvent les appelant s cette réclamation du salarié est bien irrecevable.

Le jugement déféré qui a rejeté cette demande sera donc confirmé.

3o Sur les dommages et intérêts réclamés par l' employeur.

En droit, la responsabilité du salarié ne peut se trouver engagée à l' égard de l' employeur que pour faute lourde.

En l' espèce, compte tenu de ce que la faute lourde de Gilles B... a été reconnue, la réclamation de l' employeur à titre de dommages et intérêts est donc recevable.

Sur le fond, il apparaît que la Société IGS a subi un préjudice certain suite au comportement du salarié qualifié de faute lourde laquelle repose principalement sur le fait volontaire de détournement de clientèle au profit de la SARL SECURIPLUS qu' il avait lui même créé.

Le rapport d' expertise de Monsieur H... produit au débat révèle que l' incidence de détournements de clientèle opéré par SECURIPLUS sur le compte d' IGS a consisté à une perte d' exploitation de 264 557 € (soit 107 320 € pour 2003 et 157 237 € pour 2004).

Même si en conclusion de son rapport, l' expert judiciaire exclut que le dépôt de la déclaration de cessation des paiements du 5 janvier 2005 par IGS soit la conséquence des détournements de clientèle opéré par la SECURIPLUS, pour autant, le liquidateur de la Société IGS est bien fondé à mettre en jeu la responsabilité de Gilles B..., puisque ce dernier en sa qualité de salarié d' IGS est impliqué dans ce détournement de clientèle qu' il a lui même mis en place.

En l' état, des pièces versées au débat dont le rapport susvisé, l' indemnisation du préjudice subi par la Société IGS à mettre à la charge de Gilles B... doit être fixé à la somme de 120 423 € montant que ce dernier vise lui même dans ses propres écritures sur l' infiniment subsidiaire et qui correspond aux pertes d' exploitation subies par l' IGS du fait des détournements de clientèle, de l' année 2003 et de janvier 2004 période où Gilles B... était salarié.

Par contre, l' indemnisation supérieure à la dite somme ne peut être que rejetée, n' étant pas, en l' espèce justifiée.

En effet, elle dépasse le cadre de la relation de travail dans lequel intervient le présent litige et concerne les rapports entre la Société IGS et la SARL SECURIPLUS objet de l' action en concurrence déloyale pendant devant le tribunal de commerce d' AVIGNON étant observé qu' aucune exception de litispendance n' a été à ce titre formalisée.

Au surplus, il convient de relever que la présente juridiction saisie d' un litige prud' homal n' a pas compétence pour apprécier l' éventuelle responsabilité des dirigeants de la SAS IGS dans la déconfiture de la dite société ni de cette dernière dans la liquidation de la SAS MAILSERVICES.

4o Sur les demandes annexes

Eu égard à la procédure collective dont la SAS IGS fait l' objet, la créance du salarié ci dessus précisée est seulement fixée et ne peut faire l' objet de condamnation contrairement aux mentions portées au dispositif du jugement déféré qui sera réformé sur ce point.

La garantie de l' AGS devra jouer sur cette créance.

Par contre au vu du résultat du présent litige, il n' y a pas lieu de faire application sur l' article 700 du Code de Procédure Civile et il convient de partager les dépens par moitié entre le salarié et l' employeur, ceux mis à la charge de l' employeur étant déclaré frais privilégiés de liquidation judiciaire.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Vu l' arrêt de ce siège en date du 27 mars 2007,

Réforme le jugement déféré en ce qu' il a condamné la SAS IGS à payer à Gilles B... des indemnités de congés payés et procédure irrégulière et a rejeté la demande de dommages et intérêts du liquidateur ès qualités,

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe la créance de Gilles B... à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la SAS INSPECTION GARDIENNAGE SECURITE aux sommes suivantes :

* 6828, 96 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement,
* 8536, 20 € à titre de solde d' indemnité de congés payés pour la période du 1er juin 2002 au 31 mai 2003,

Dit le présent arrêt opposable à l' AGS- CGEA de RENNES laquelle devra garantir la créance de Gilles B... ci- dessu fixée dans les limites légales et réglementaires,

Condamne Gilles B... à payer à Maître Philippe X... ès qualités de liquidateur de la SAS IGS la somme de 120 423 € à titre de dommages et intérêts,

Dit n' y avoir lieu à application de l' article 700 du Code de Procédure civile,

Dit que les dépens sont partagés par moitié, l' une à la charge de Gilles B..., l' autre déclarée frais privilégiés de liquidation judiciaire de la SAS IGS.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 04/00468
Date de la décision : 13/02/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Montpellier


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-02-13;04.00468 ?
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