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06/02/2008 | FRANCE | N°06/01016

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 06 février 2008, 06/01016


SLS / DI
COUR D' APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale

ARRET DU 06 Février 2008



Numéro d' inscription au répertoire général : 07 / 04643

ARRET no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 JUIN 2007 CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE PERPIGNAN
No RG06 / 01016



APPELANTE :

SAS LES CRUDETTES
poursuites et diligences de son Président en exercice
ZI Saint Barthelémy
45110 CHATEAUNEUF SUR LOIRE
Représentant : Me William TROUVE (avocat au barreau de PARIS)

INTIME :

Monsieur Antoine X...




...

66300 THUIR
Représentant : la SCP RENAUD QUINIOU PORCHER- MOREAU MILPIED (avocats au barreau de NANTES)

COMPOSITION DE LA COUR : ...

SLS / DI
COUR D' APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale

ARRET DU 06 Février 2008

Numéro d' inscription au répertoire général : 07 / 04643

ARRET no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 JUIN 2007 CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE PERPIGNAN
No RG06 / 01016

APPELANTE :

SAS LES CRUDETTES
poursuites et diligences de son Président en exercice
ZI Saint Barthelémy
45110 CHATEAUNEUF SUR LOIRE
Représentant : Me William TROUVE (avocat au barreau de PARIS)

INTIME :

Monsieur Antoine X...

...

66300 THUIR
Représentant : la SCP RENAUD QUINIOU PORCHER- MOREAU MILPIED (avocats au barreau de NANTES)

COMPOSITION DE LA COUR :

L' affaire a été débattue le 18 DECEMBRE 2007, en audience publique, Monsieur Daniel ISOUARD ayant fait le rapport prescrit par l' article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre
Madame Marie CONTE, Conseiller
Monsieur Eric SENNA, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sophie LE SQUER

ARRET :

- Contradictoire.

- prononcé publiquement le 06 FEVRIER 2008 par Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre.

- signé par Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre, et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, Greffier présent lors du prononcé.

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EXPOSÉ DU LITIGE :

La société Agrofet aux droits de laquelle se trouve actuellement la société Les Crudettes dont l' activité consiste en l' élaboration et la commercialisation de végétaux prêts à l' emploi, a embauché à compter du 12 août 1996 Monsieur Antoine X... comme responsable national achats. Celui- ci a été promu le 1er janvier 2004 directeur de l' usine de Perpignan et a été chargé à compter d' octobre 2004 de la création d' une usine en Espagne, gérée par la société Tallo Verde, filiale de la société Les Crudettes.

Monsieur X... a été licencié le 29 juin 2006 avec préavis de six mois, son employeur lui reprochant une insuffisance professionnelle caractérisée par son incapacité à remplir les missions de coordination et de pilotage ainsi que la détermination des actions à mettre en place imposées par la réalisation du projet de l' usine espagnole.

Par jugement du 21 juin 2007, le conseil de prud' hommes de Perpignan a condamné la société Les Crudettes à payer à Monsieur X... les sommes de :
- 16 828 euros de prime de fin d' année 2006,
- 9 527, 18 euros de prime président,
- 2 635, 52 euros d' indemnité de congés payés sur ces primes,
- 100 000 euros de dommages- intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
à refaire un solde de tout compte et l' attestation Assedic sous astreinte de 50 euros par jour de retard ainsi que de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées à Monsieur X... dans la limite de six mois.

Le 4 juillet 2007, la société Les Crudettes a interjeté appel de cette décision. Elle sollicite sa réformation, le débouté de Monsieur X... de l' ensemble de ses demandes et sa condamnation à lui rembourser les sommes réglées en vertu de l' exécution provisoire (primes de fin d' année et président, congés payés).

Elle allègue qu' elle ne pouvait maintenir sa confiance à Monsieur X... dès lors que celui- ci ne maîtrisait pas complètement ses dossiers, n' était pas en mesure de rendre compte avec suffisamment de précision de son action, n' avait pas une vision claire de la stratégie à tenir pour le futur et s' avérait incapable de coordonner et d' animer son équipe ainsi que de diriger ses collaborateurs.

Formant appel incident, Monsieur X... conclut à la confirmation des condamnations prononcées avec élévation à la somme de 220 000 euros des dommages- intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à la condamnation de la société Les Crudettes à lui payer la somme de 40 000 euros de dommages- intérêts pour préjudice moral avec intérêts capitalisés à compter du jugement attaqué outre une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Contestant les insuffisances reprochées, il allègue de la complexité du projet qui lui avait été confié et de sa bonne réalisation.

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MOTIFS DE LA DÉCISION :

La société Les Crudettes fonde l' insuffisance professionnelle de Monsieur X... sur une présentation insuffisante du compte- rendu d' activité 2005, sur la préparation insuffisante du plan d' actions 2006, sur la préparation insuffisante du comité directeur Espagne du 24 février 2006 et sur son incapacité à gérer l' ensemble des aspects du projet espagnol.

Sur la présentation insuffisante du compte- rendu d' activités 2005 :

Le compte rendu d' activité de l' année 2005 présenté par Monsieur X... à la réunion du 25 novembre 2005 était un projet comme cela ressort des écritures de la société Les Crudettes. Il se présente sur une forme synthétique alors que son employeur aurait préféré un compte rendu plus analytique sans cependant lui avoir donné d' instruction précise en ce sens, celui élaboré pour l' ensemble de la société Les Crudettes ne pouvant servir d' exemple car aucune comparaison utile ne peut exister entre un compte rendu d' un projet de création d' une usine en Espagne et l' activité commerciale d' une entreprise en France. Le document fourni a été retravaillé par l' ensemble de l' équipe dirigeante et rien n' établit que Monsieur X... ait rédigé plusieurs versions successives de ce projet sans qu' aucune ne soit satisfaisante.

Contrairement à ce que prétend l' employeur, après cette réunion Monsieur X... n' a pas reconnu qu' il devait s' améliorer.

Lors de l' évaluation professionnelle qui a eu lieu quelques jours plus tard aucune remarque n' a été faite sur cette insuffisance du compte rendu, ce qui n' aurait été le cas si elle présentait l' importance que lui attribue la société Les Crudettes qui ne peut utilement alléguer l' arrivée récente d' un nouveau supérieur, celui- ci étant présent à la réunion du 25 novembre 2005.

Sur la présentation insuffisante du plan d' action 2006 :

Là aussi, Monsieur X... a présenté un plan d' action qui a été complété étant relevé d' une part que qu' il ne peut lui être reproché de ne pas avoir respecté sa feuille de route qui ne contient aucune instruction précise, et d' une part que si le plan définitif est plus détaillé, ses principaux éléments figurent dans sa première version.

Sur la préparation insuffisante du comité de direction Espagne du 24 février 2006 :

La société Les Crudettes prétend que Monsieur X... est arrivé à la réunion du 24 février 2006 avec des éléments embryonnaires voire inexistants pour certains processus et sans présentation formalisée.

Aucun élément n' appuie ces griefs et notamment pas le compte- rendu de cette réunion qui ne contient aucune mention relative à cette défaillance.

Pour caractériser celle- ci, la société Les Crudettes se fonde sur un courriel de Madame Z..., responsable administratif et financier de la société Tallo Verde qui se plaint que Monsieur X... ne lui a demandé que le 22 février 2006 de lui transmettre le fichier renseigné.

Il s' agit d' une demande de transmission de documents dont la proximité avec la réunion du 24 février 2006 ne suffit pas à établir un défaut d' organisation.

Sur l' incapacité à gérer l' ensemble des aspects du projet espagnol :

À l' appui du reproche de l' incapacité de gérer l' ensemble des aspects du projet espagnol, la société Les Crudettes prétend d' abord que Monsieur X... n' a mis à la disposition de leurs utilisateurs les outils de gestion (analyse des marges par client et par produit) disponibles depuis janvier 2006 qu' à la mi- fin 2006.

Monsieur X... prétend avoir réclamé ces chiffres sans jamais les obtenir.

S' il est exact que les ordres du jour des différentes réunions et leur comptes rendus ne portent pas mention d' une telle demande, la société Les Crudettes ne peut sans se contredire prétendre que ces outils de gestion avaient été donnés à Monsieur X... et lui reprocher de ne pas les avoir demandés.

La nécessité de les diffuser aux utilisateurs avant la mi- mai 2006 n' est pas explicitée.

Les autres griefs portent sur une insuffisance de maîtrise des dossiers.

La société Les Crudettes invoque d' abord une mauvaise analyse des clauses de non- concurrence. En réalité Monsieur X... s' est inquiété de l' absence de clause de non- concurrence sur certains contrats de travail et a commis une erreur en citant l' un de ces contrats qui en stipulait une. Il s' agit d' une méprise sans conséquence.

Elle lui reproche également d' avoir pris un engagement commercial avec une société alors qu' il avait été décidé de ne pas travailler avec elle. D' une part rien n' atteste de manière suffisante la décision de ne pas conclure avec cette société et d' autre part la date où le contrat avec elle a été passé reste inconnue, de sorte qu' il ne peut être vérifié s' il est intervenu avant ou après cette décision prise selon l' employeur le 28 avril 2006.

La société Les Crudettes se plaint d' une mauvaise organisation d' une réunion qui n' a pu se tenir. Cette réunion a été fixée le 1er juin pour le 5 juin 2006 et ce délai de 5 jours n' apparaît pas manifestement trop bref. L' échec de cette réunion provient du fait que le 5 juin est jour férié en Catalogne, région où travaillait un des participants et qu' un autre de ces participants rencontrait des problèmes de santé qui empêchait tout déplacement. Il s' agit de circonstances dont Monsieur X... n' avait pas connaissance et elles ne révèlent pas une insuffisance professionnelle.

Les différentes critiques formées à l' encontre de Monsieur X..., même si certaines apparaissent partiellement fondées, doivent s' apprécier au vu du projet dont la réalisation lui avait été confiée. Il s' agissait de la création d' une usine en Espagne au profit de la société Tallo Verde, filiale de la société Les Crudettes, qui jusqu' à cette date n' exerçait qu' une activité de distribution.

Cette mission était particulièrement complexe car elle exigeait d' un ressortissant étranger de mener à bien l' aspect technique, financier et commercial du projet. Ces difficultés impliquaient nécessairement certaines imperfections sur quelques points.

Mais Monsieur X... a mené à bien le projet confié et l' usine prévue a été construite sans qu' il soit soutenu un dépassement des délais ou des actions insuffisantes pour son ouverture, son bon fonctionnement et la commercialisation des produits.

Ainsi les manquements reprochés à Monsieur X... ne dépassent pas ceux inhérents à la réalisation d' un projet complexe et n' ont pas porté atteinte à sa réalisation.

Ils ne sauraient constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Compte tenu de l' ancienneté de Monsieur X... (10 ans), de son salaire (8 203, 20 € primes incluses), de son âge (48 ans) et de sa faculté à retrouver un autre emploi en raison de sa formation et de son expérience professionnelle, les premiers juges ont exactement évalué le préjudice résultant de l' absence de cause réelle et sérieuse de licenciement.

Monsieur X... ayant atteint les résultats qui lui avaient été impartis, la société Les Crudettes ne peut objecter leur absence de réalisation pour s' opposer au paiement des primes de fin d' année et président. Ces primes s' avèrent dues.

Monsieur X... appuie sa demande de dommages- intérêts pour préjudice moral sur le fait que son employeur aurait recherché à le remplacer dès le début de l' année en publiant une annonce pour recruter son successeur, d' avoir effacé son nom de l' organigramme et d' avoir refusé le report d' une demi- heure de l' entretien préalable à son licenciement.

Mais rien ne démontre que l' offre d' emploi invoquée par Monsieur X... provient de la société Les Crudettes, l' identité de l' entreprise recruteuse restant inconnue ; l' effacement du nom de Monsieur X... de l' organigramme concernait aussi de celui des autres personnes y figurant, la société Les Crudettes désirant un organigramme avec seulement les fonctions et non pas les personnes les exerçant ; l' heure de fixation de l' entretien préalable appartient à l' employeur étant noté qu' en l' espèce la société Les Crudettes a pris en charge les frais de déplacement et n' a pas refusé de régler une nuit d' hôtel si celle fixée par elle (9 heures) ne permettait pas à Monsieur X... de s' y rendre en quittant son domicile le matin même.

Aucun de ces faits n' établit une faute de la société Les Crudettes à l' égard de Monsieur X... et ne peut constituer un préjudice moral distinct. Celui- ci doit être débouté de sa demande de ce chef.

La confirmation du jugement attaqué s' impose.

Il convient de rappeler que les sommes allouées par les premiers juges porteront l' intérêt à compter de la date du jugement conformément à l' article 1153- 1 du code civil ainsi que le réclame Monsieur X... avec capitalisation année par année à compter dudit jugement.

Succombant à son recours, la société Les Crudettes doit être condamnée à payer à Monsieur X... la somme de 1 500 euros au titre de l' article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

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PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme le jugement du 21 juin 2007 du conseil de prud' hommes de Perpignan ;

Rappelle que les sommes allouées porteront l' intérêt légal à compter du jugement avec capitalisation année par année ;

Y ajoutant :

Condamne la société Les Crudettes à payer à Monsieur Antoine X... la somme de 1 500 euros au titre de l' article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

Condamne la société Les Crudettes aux dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 06/01016
Date de la décision : 06/02/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Perpignan


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-02-06;06.01016 ?
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