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06/02/2008 | FRANCE | N°05/00167

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 06 février 2008, 05/00167


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4e chambre sociale

ARRET DU 06 Février 2008

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/04290

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 SEPTEMBRE 2006 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE CARCASSONNE
N° RG 05/00167



APPELANTE :

Mademoiselle Coralie X...


...

92120 MONTROUGE
Représentant : la SCP CHEBBANI & SOLIGNAC (avocats au barreau de TOULOUSE)

INTIMEE :

COMMUNE DE BRAM
prise en la personne de son représentant légal
Rue du Chanoine Andrieu
11150 BRAM
Représent

ant : Me Raymond LABRY (avocat au barreau de TOULOUSE)



COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 DECEMBRE 2007, en audience publ...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4e chambre sociale

ARRET DU 06 Février 2008

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/04290

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 SEPTEMBRE 2006 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE CARCASSONNE
N° RG 05/00167

APPELANTE :

Mademoiselle Coralie X...

...

92120 MONTROUGE
Représentant : la SCP CHEBBANI & SOLIGNAC (avocats au barreau de TOULOUSE)

INTIMEE :

COMMUNE DE BRAM
prise en la personne de son représentant légal
Rue du Chanoine Andrieu
11150 BRAM
Représentant : Me Raymond LABRY (avocat au barreau de TOULOUSE)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 DECEMBRE 2007, en audience publique, Monsieur Daniel ISOUARD ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre
Madame Myriam GREGORI, Conseiller
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON

ARRET :

- Contradictoire.

- prononcé publiquement le 06 FEVRIER 2008 par Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre.

- signé par Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre, et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, Greffier présent lors du prononcé.

*
* *
FAITS ET PROCEDURE :

Coralie X... a été engagée par la Commune de BRAM, en qualité d'agent de développement culturel, à compter du 1er décembre 2002 dans le cadre d'un contrat emploi jeune à durée déterminée à échéance au 30 novembre 2007.

Le 20 septembre 2004 l'employeur lui adressait le courrier suivant:

"Au cours de l'entretien du vendredi 17 septembre 2004, je vous ai rappelé qu'aux termes de l'article 8 de votre contrat de travail, vous étiez tenue au secret professionnel ainsi qu'à la discrétion professionnelle et je vous ai averti que le non respect de cette clause équivalait à une faute, passible de sanctions.
Vous m'avez ensuite menacé d'emporter avec vous le fichier informatisé de la bibliothèque, pour le cas où vous mettriez un terme à votre contrat. Je vous ai confirmé que vous n'en aviez pas le droit. Le travail d'informatisation faisait partie de votre mission et cela figure en clair dans la convention de création de poste conclue avec l'Etat, dont vous trouverez une copie ci-joint. Ce fichier ne vous appartient pas et toute tentative de le dérober ou de le détériorer est répréhensible.
Lors de l'entretien, je vous avais engagée à mûrement réfléchir une initiative dans ce sens dont les conséquences pouvaient être lourdes pour vous. Malgré ce, vous avez confirmé quelques minutes plus tard à une adjointe votre volonté de partir avec ce fichier. Vous n'avez tenu aucun compte de ces mises en garde, puisque je vous ai surprise, devant témoins, vendredi 17/09/2004 au soir, après la fermeture de la bibliothèque au public, avec une personne étrangère au service, en train de graver le contenu du disque dur de l'ordinateur de la bibliothèque municipale.
Du moment qu'il y a altération du lien de confiance mutuelle et du contrat moral conclu entre nous, j'ai pris la décision, en regard de la faute, de rompre immédiatement votre contrat de travail, comme la loi m'y autorise, sans attendre la date anniversaire.
Vous serez convoquée dans les prochains jours pour l'entretien réglementaire avant licenciement. En attendant, vous êtes placée en position de congé annuel...".

Par lettre en date du 22 septembre 2004, la Commune de BRAM la convoquait à un entretien préalable pour le 28 septembre suivant, en vue de son éventuel licenciement et lui notifiait, le 24 septembre, une mise à pied conservatoire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 6 octobre 2004, Coralie X... se voyait notifier son licenciement pour faute grave en ces termes :

"Au cours de l'entretien préalable que nous avons eu le mardi 28 septembre 2004, vous avez été informée que nous envisagions une mesure de licenciement disciplinaire à votre égard.
Les explications recueillies auprès de vous lors de cet entretien ne nous ont pas permis de modifier notre intention, nous sommes dès lors contraints de vous notifier votre licenciement pour faute grave pour les raisons suivantes :
Le vendredi 17 septembre 2004 à 15 h 30, la municipalité refusant à bon droit d'accéder à votre demande de titularisation, vous avez menacé le Maire de supprimer sur le réseau informatique de la bibliothèque toute l'informatisation que vous aviez mise en place à compter de votre embauche.
Le Maire vous a vivement dissuadée d'y procéder, vous avisant que de tels agissements sont constitutifs d'une faute professionnelle d'une gravité suffisante pour légitimer une procédure de licenciement.
Le même jour, à 17 h 30, vous avez réitéré vos menaces devant Madame Claudie Y..., Adjointe au Maire, qui vous a également rappelé que le fait de s'emparer et d'emporter avec soi le fichier informatique de la bibliothèque constituait une faute professionnelle.
En dépit de ces avertissements, vous avez mis vos menaces à exécution ledit vendredi 17 septembre à 19 h 05, lors même que vous n'étiez plus censée vous trouver sur votre lieu de travail.
En effet, nous vous avons prise sur le fait, assistée d'un tiers, en train de graver sur un CD-Rom le contenu du disque dur de l'ordinateur de la bibliothèque et vous avez emporté le CD-Rom avec vous.
D'une part, vous ne pouvez ignorer que vous vous êtes rendue coupable d'insubordination fautive en refusant de vous conformer aux consignes et directives données par votre hiérarchie.
D'autre part, vous vous êtes livrée à des manœuvres strictement prohibées par les dispositions sociales en vous arrogeant le droit de saisir des documents propres à la bibliothèque.
Egalement, vous n'êtes pas sans savoir que les documents informatiques que vous avez copiés sont tirés de logiciels protégés, savoir ELECTRE et ATALANTE.
Enfin, vous avez manifestement manqué à votre obligation professionnelle de secret à laquelle vous êtes tenue, et ce au mépris de l'article 8 de votre contrat de travail.
Les conséquences de vos agissements rendent dès lors impossible la poursuite de votre activité d'agent de développement culturel au sein de la Commune de BRAM, et ce même pendant la période de préavis.
Aussi, nous vous notifions par la présente votre licenciement immédiat, sans préavis ni indemnité...".

Le 12 mai 2005 Coralie X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de CARCASSONNE aux fins de voir juger injustifiée la rupture anticipée de son contrat à durée déterminée et d'obtenir paiement de diverses sommes notamment à titre de dommages et intérêts, indemnité de fin de contrat et indemnité compensatrice de congés payés.

Par décision en date du 19 septembre 2006 le Conseil de Prud'hommes a jugé que les motifs de la rupture du contrat de travail étaient bien constitutifs d'une faute grave et a débouté Coralie X... de l'intégralité de ses prétentions.

Coralie X... a relevé appel de ce jugement.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Par conclusions écrites réitérées oralement à l'audience, Coralie X... expose que la lettre qui lui a été adressée le 20 septembre 2004 constitue la véritable rupture, par l'employeur, du contrat de travail et que les motifs qui y sont évoqués doivent seuls être pris en compte pour en examiner le bien-fondé.

Elle soutient que les motifs de cette rupture ne sont pas sérieux, tenant le fait qu'elle n'a jamais eu l'intention de détruire l'informatisation de la bibliothèque ni de soustraire quelque fichier que ce soit mais seulement de procéder à une sauvegarde de son travail et d'en conserver une preuve.

Elle demande à la Cour d'infirmer la décision entreprise, de juger abusive la rupture anticipée de son contrat de travail à durée déterminée et de condamner la Commune de BRAM à lui payer les sommes de :

- 43 859, 98 euros à titre de dommages et intérêts au titre de ladite rupture
- 1 154, 21 euros pour non respect de la procédure de licenciement
- 512, 22 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés
- 4 000, 00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral
- 1 500, 00 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

En réplique, la Commune de BRAM soutient que Coralie X..., déçue de la réponse négative faite à sa demande de titularisation, a indiqué qu'elle se trouvait contrainte de rechercher un emploi mieux rémunéré et qu'elle était résolue à ne pas céder le travail informatique qu'elle avait réalisé et à l'emporter avec elle ; que malgré les mises en garde qui lui étaient faites elle avait entrepris d'exécuter, hors des horaires d'ouverture de la bibliothèque en présence de son ami, une opération de "gravage" des fichiers informatiques au moyen d'un CD-Rom mais avait été surprise par le premier adjoint au maire et le technicien maintenance.

Elle fait valoir que la salariée a reçu la lettre de convocation à l'entretien préalable antérieurement à la lettre du 20 septembre 2004 et que la procédure de licenciement est parfaitement régulière.

Elle entend démontrer que les faits qui lui sont reprochés sont établis et qu'ils constituent une faute grave et demande à la Cour de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions.

Elle sollicite enfin l'allocation d'une somme de 1 500, 00 euros par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure Civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la date de rupture du contrat de travail :

En application des dispositions de l'article L 122-14 du code du travail, l'employeur qui envisage de licencier un salarié doit, avant toute décision, convoquer l'intéressé par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre à un entretien préalable.

Force est de constater que par lettre en date du 20 septembre 2004, postée le 21 septembre, l'employeur écrivait à Coralie X... : "j'ai pris la décision, en regard de la faute, de rompre immédiatement votre contrat de travail" et que, contrairement à ce que soutient la Commune de BRAM, la lettre de convocation à entretien préalable a été remise postérieurement à la salariée, soit le 22 septembre suivant.

C'est ainsi à juste titre que Coralie X... soutient que la rupture de son contrat de travail est en date du 20 septembre 2004 et qu'elle est irrégulière comme ne respectant pas la procédure imposée par l'article sus-visée du code du travail.

Il convient par conséquent de faire droit à sa demande en paiement d'une indemnité pour non respect de la procédure de licenciement et de lui allouer la somme réclamée de 1 154, 21 euros.

Sur le bien-fondé de la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée :

La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

En l'espèce, dans sa lettre de rupture du contrat de travail en date du 20 septembre 2004, l'employeur fait grief à Coralie X... d'avoir, malgré ses mises en garde, été "surprise, devant témoins, vendredi 17/09/2004 au soir, après la fermeture de la bibliothèque au public, avec une personne étrangère au service, en train de graver le contenu du disque dur de l'ordinateur de la bibliothèque municipale".

Les faits sont établis par les pièces du dossier et l'allégation de Coralie X... suivant laquelle elle n'entendait que procéder à une sauvegarde de son travail est contredite par l'attestation du technicien, Monsieur Z....

Tenant les dispositions légales relatives à la protection des logiciels et données informatiques, le comportement de Coralie X... doit recevoir la qualification de faute grave et c'est à juste titre que le Conseil de Prud'hommes l'a déboutée de l'intégralité de ses prétentions du chef du licenciement.

Sur la demande au titre des congés payés :

La Commune de BRAM ne conteste pas que la salariée pouvait prétendre à une indemnité de congés payés d'un montant de 1308, 64 euros ; elle soutient toutefois que Coralie X... a été remplie de ses droits.

Force est de constater cependant qu'elle ne démontre pas lui avoir versé ladite somme en son intégralité. Il convient par conséquent de faire droit à cette demande de Coralie X... et de lui allouer la somme réclamée de 512, 22 euros comme lui restant due de ce chef.

Sur les frais irrépétibles :

Il n'y a pas lieu en la cause à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure Civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort et après avoir délibéré,

En la forme, reçoit l'appel principal de Coralie X....

Au fond,

confirme le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que le licenciement de Coralie X... était bien fondé sur une faute grave et en ce qu'il a débouté cette dernière de l'intégralité de ses prétentions de ce chef ;

Y AJOUTANT :

- CONSTATE que la procédure de licenciement est irrégulière et que la salariée n'a pas été intégralement remplie de ses droits au titre des congés payés ;

- CONDAMNE la Commune de BRAM à payer à Coralie X... les sommes de :

- 1 154,21 euros à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement ;
- 512,22 euros au titre du reliquat de l'indemnité compensatrice de congés payés ;

DIT n'y avoir lieu en la cause à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE Coralie X... aux éventuels dépens d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 05/00167
Date de la décision : 06/02/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Carcassonne


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-02-06;05.00167 ?
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