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19/12/2007 | FRANCE | N°07/02426

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 19 décembre 2007, 07/02426


BR / JLP
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale

ARRET DU 19 Décembre 2007



Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 02426

ARRET no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 MARS 2007 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE CARCASSONNE
No RGF 04 / 241


APPELANT :

Monsieur Christian X...


...

11300 MALRAS
Représentant : Maître SINSOLLIER de la SCP SINSOLLIER-LAVIELLE (avocats au barreau de NARBONNE)


INTIMEE :


SARL GTI SYSTEMES prise en la personne de son gérant r>Rue de l'Industrie
Z. A. de Sautès
11800 TREBES
Représentant : Maître PEILLET de la SELARL ISOUX (avocats au barreau de TOULOUSE)


COMPOSITION DE ...

BR / JLP
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale

ARRET DU 19 Décembre 2007

Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 02426

ARRET no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 MARS 2007 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE CARCASSONNE
No RGF 04 / 241

APPELANT :

Monsieur Christian X...

...

11300 MALRAS
Représentant : Maître SINSOLLIER de la SCP SINSOLLIER-LAVIELLE (avocats au barreau de NARBONNE)

INTIMEE :

SARL GTI SYSTEMES prise en la personne de son gérant
Rue de l'Industrie
Z. A. de Sautès
11800 TREBES
Représentant : Maître PEILLET de la SELARL ISOUX (avocats au barreau de TOULOUSE)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 NOVEMBRE 2007, en audience publique, Monsieur Daniel ISOUARD ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre
Madame Myriam GREGORI, Conseiller
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Brigitte ROGER

ARRET :

-Contradictoire.

-prononcé publiquement le 19 DECEMBRE 2007 par Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre.

-signé par Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre, et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, Greffier présent lors du prononcé.

*
* *
Christian X... a été embauché à compter du 1er février 1991 en qualité d'assistant de direction par la SARL GTI Systèmes, société ayant pour activité la conception, la fabrication et la commercialisation de systèmes automatisés à usage pédagogique.

Le 5 avril 2004, il a été convoqué à un entretien préalable à son éventuel licenciement économique pour le 16 avril suivant à 10 heures.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 10 mai 2004, la société GTI Systèmes lui a notifié son licenciement en ces termes :

(…) nous sommes contraints, avec beaucoup de regrets, de procéder à votre licenciement pour un motif économique.

Celui-ci est justifié par les éléments suivants :

• Une baisse importante du chiffre d'affaires en 2003 (-28,4 %) qui a suivi celle enregistrée en 2002 (-16,5 %).
• Pour la seule année 2003, le résultat net se solde par un déficit de 75 927 €.
• Les perspectives sont incertaines et inquiétantes. Nous n'avons aucune visibilité sur le marché qui se réduit considérablement et qui n'est plus porteur pour notre type de fabrications.
• A ces perspectives, s'ajoute l'attentisme qui va s'ensuivre avec la mise en place des régions.
• Ne pouvant plus supporter une masse salariale représentant 25,50 % de notre production, sans compromettre l'avenir de la société et des emplois restants, nous nous voyons contraints de ne pas pouvoir conserver votre poste de responsable commercial.

Tous ces motifs nous conduisent à supprimer votre poste.

Comme nous vous l'indiquions dans la lettre de convocation à entretien préalable, aucune solution de reclassement n'a pu être trouvée (…)

A la suite de son licenciement, monsieur X... a saisi le conseil de prud'hommes de Carcassonne qui, après avoir ordonné une expertise sur le rappel d'heures supplémentaires réclamé par celui-ci, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes par un jugement du 14 mars 2007.

Ayant régulièrement relevé appel, le 4 avril 2007, de ce jugement, monsieur X... en sollicite l'infirmation et demande à la cour de condamner la société GTI Systèmes à lui payer les sommes de :

-73 500,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-16 519,42 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires,
-1651,94 euros à titre d'indemnité de congés payés y afférente,
-14 700,00 euros à titre de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé,
-3000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Au soutien de son appel, il fait essentiellement valoir que :

-l'employeur ne justifie pas avoir procédé à une tentative effective de reclassement avant l'engagement de la procédure de licenciement, se contentant d'indiquer qu'eu égard à la taille de l'entreprise, le reclassement était impossible,
-il n'établit pas davantage l'existence de difficultés économiques au jour du licenciement, alors que l'activité avait repris en 2004 et qu'existaient des perspectives de développement économique, notamment un projet de marché de 194 000,00 euros avec la Slovaquie,
-l'existence d'un lien de causalité entre les difficultés économiques invoquées et la suppression de son poste n'est pas non plus justifiée,
-la convention relative au versement d'une indemnité de « déplacement éloignement » qu'il a personnellement signée le 14 novembre 2003 vise à indemniser la pénibilité liée aux déplacements et n'inclut pas une rémunération forfaitaire des heures supplémentaires.

La société GTI Systèmes conclut, pour sa part, à la confirmation du jugement et à la condamnation de monsieur X... à lui payer la somme de 3000,00 euros en remboursement de ses frais irrépétibles.

Elle soutient pour l'essentiel que :

-les difficultés économiques rencontrées, liées à une baisse significative de son chiffre d'affaires en 2003 par rapport aux années 2001 et 2002 et à sa situation déficitaire lors de la clôture des comptes au 31 décembre 2003, étaient bien réelles à la date du licenciement et le fait que l'entreprise ait réalisé un chiffres d'affaires de 86 205,00 euros en 8 mois en 2004, ne laissait pas apparaître la perspective d'une amélioration conséquente,
-il a donc été nécessaire de réorganiser l'entreprise en supprimant le poste de responsable commercial de monsieur X..., dont les tâches ont été désormais assumées par la direction,
-le licenciement n'a été prononcé qu'après une recherche de reclassement au sein de l'entreprise,
-une convention de forfait avait été mise en place prévoyant la rémunération d'éventuelles heures supplémentaires réalisées du fait des déplacements, ce que reconnaît expressément monsieur X... dans une lettre adressée à la direction en décembre 2000.

MOTIFS DE LA DECISION :

1-le licenciement et ses conséquences :

Il résulte, en premier lieu, de l'article L 321-1 du code du travail que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque le reclassement de l'intéressé sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord express du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient, les offres de reclassement proposés devant être écrites et précises.

En l'occurrence, il ressort du registre du personnel produit aux débats que lors de l'engagement de la procédure de licenciement, la société GTI Systèmes comptait seulement 14 salariés, à savoir un directeur technique, un ingénieur, un assistant de direction (responsable commercial), trois techniciens supérieurs dont un à temps partiel, deux techniciens d'atelier, un technicien d'études et de développement, trois secrétaires dont une à temps partiel, un magasinier et un monteur mécanicien ; monsieur X... dont le poste de responsable commercial était supprimé ne pouvait être reclassé sur des postes de directeur technique, d'ingénieur ou de technicien, sans rapport avec sa qualification, ni sur des emplois de catégorie inférieure dont aucun n'était vacant ; spécialisée dans la création de systèmes automatisés à usage pédagogique, la société GTI Systèmes ne faisait pas, non plus, partie d'un groupe ; dans son courrier du 5 avril 2004 le convoquant à l'entretien préalable, elle indiquait ainsi à monsieur X... avoir procédé à une recherche active et individualisée de reclassement dans l'entreprise mais n'avoir trouvé aucune solution alternative (sic).

Eu égard à la structure de la société GTI Systèmes et à la nature spécifique de son activité et de ses emplois, aucune possibilité de reclassement interne n'était envisageable, ainsi que l'a retenu à juste titre le premier juge.

Il est, par ailleurs, de principe que la réorganisation de l'entreprise peut constituer un motif économique de licenciement au sens de l'article L 321-1 sus visé, si elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité.

En page 8 de ses conclusions d'appel, monsieur X... relève, en effet, que dans la lettre de licenciement, la société GTI Systèmes a prétendu que la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise nécessitait la suppression de son poste, la société ne pouvant plus supporter une masse salariale représentant 25,50 % de sa production, sans compromettre l'avenir de la société et des emplois restants.

A l'examen des diverses pièces communiquées, il apparaît à cet égard que :

-le chiffre d'affaires de la société GTI Systèmes en 2003 (1 084 071,00 €) a été inférieur de 28 % à celui réalisé en 2002 (1 514 848,00 €) et de 40 % à celui de 2001 (1 814 949,00 €), avec un montant de dépenses en personnel relativement élevé (324 494,00 €) et une rentabilité (rapport chiffre d'affaires / nombre de salariés) la plus faible depuis le début d'exploitation de l'entreprise en 1991,

-le chiffre d'affaire ainsi réalisé en 2003 est d'un niveau équivalent à celui de 1996, alors que l'entreprise ne comptait que 8 salariés,

-lors de la clôture de l'exercice clos le 31 décembre 2003, le résultat comptable a été une perte de 75 927,00 euros dont une perte exceptionnelle de 35 825,00 euros enregistrée sur une cession de matériel et prototype, soit une perte d'exploitation de 40 102,00 euros,

-la trésorerie de l'entreprise reste positive en 2003 (346 769,00 €) mais accuse une baisse par rapport à 2002, liée à la diminution sensible du chiffre d'affaires,

-le planning de facturation édité le 16 avril 2004 ne laissait entrevoir qu'un accroissement prévisionnel du chiffre d'affaires de 198 200,00 euros par rapport à 2003,

-au 30 août 2004, la société GTI Systèmes avait réalisé, au titre des marchés obtenus sur appels d'offres auprès de l'Etat et des collectivités territoriales, un chiffre d'affaires de 86 205,00 euros sur 8 mois, soit un chiffre comparable à celui de 2003, mais ce résultat n'était pas significatif d'une réelle reprise de l'activité puisque les montants de marchés obtenus en 2001 et 2002 s'établissaient, respectivement, à 606 929,00 et 497 512,00 euros.

La baisse significative du chiffre d'affaires observée en 2003, la diminution de la trésorerie qui en est résulté, la perte d'exploitation enregistrée lors de la clôture de cet exercice comptable notamment liée à des dépenses en personnel élevées et l'absence de réelles perspectives de redressement économique pour 2004, constituaient pour la société GTI Systèmes autant d'indicateurs de difficultés économiques prévisibles, justifiant une réorganisation de l'entreprise afin d'en sauvegarder la compétitivité ; l'employeur a donc pu décider, dans le cadre de son pouvoir de direction, de supprimer le poste de responsable commercial en s'attribuant directement les tâches dévolues au titulaire de ce poste et de conserver les emplois de techniciens.

Le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé en ce qu'il a considéré le licenciement de monsieur X... comme fondé sur une cause réelle et sérieuse.

2-le rappel d'heures supplémentaires :

Dans le cadre de ses fonctions de responsable commercial, monsieur X... effectuait de fréquents déplacements à l'occasion desquels il n'était, de fait, astreint à aucun horaire particulier, hormis d'accomplir ses prestations en fonction des horaires d'ouverture des divers établissements scolaires ou universitaires visités ou du salon « Educatec » se tenant chaque année à Paris au mois de novembre, sur lequel il tenait un stand.

A l'appui de sa demande de rappel d'heures supplémentaires, l'intéressé a fourni un décompte pour la période du 21 novembre 1999 au 17 mars 2004, établi à partir de cahiers personnels, qui correspond toutefois aux seules journées de déplacement ; de plus, ce décompte ne mentionne pas son horaire effectif de travail, mais l'amplitude de sa journée de travail avec l'indication de temps de trajet et de repas fixés forfaitairement.

Tenant son imprécision, ce décompte est insuffisant en tant que tel pour étayer sa demande en paiement d'un rappel d'heures supplémentaires.

En toutes hypothèse, il résulte d'une convention datée du 2 février 2003, signée par monsieur X... le 14 novembre suivant, qu'une indemnité de « déplacement éloignement » d'un montant forfaitaire de 76,22 euros par jour, s'ajoutant aux frais exposés, était versée aux salariés pour les sorties courantes d'un jour, de plusieurs jours jusqu'à la semaine entière ; il en ressort également que la proposition de l'employeur, faite lors d'une réunion du 6 janvier 2003, de rembourser les déplacements au cas par cas au réel n'a pas été acceptée par le personnel, lequel a sollicité le maintien de l'indemnité forfaitaire sauf pour les opérations incluant des dimanches et / ou jours de fête, et qu'il a donc été proposé par la société GTI Systèmes le versement d'une indemnité forfaitaire journalière revalorisée à 78,00 euros pour les déplacements en semaine et l'indemnisation au réel pour les déplacements incluant les dimanches et jours de fête, étudiée au cas par cas avec le salarié.

Cette convention à laquelle monsieur X... a adhéré établit l'existence d'un forfait de 76,22 euros par jour, porté ensuite à 78,00 euros par jour, pour la rémunération des heures supplémentaires effectuées à l'occasion des déplacements, à l'exclusion, du moins à partir de 2003, des déplacements comprenant des dimanches et jours de fête ; l'intéressé ne peut sérieusement contester la portée d'une telle convention puisqu'il avait lui-même écrit à l'employeur, dans un courrier du 16 décembre 2000, avoir toujours considéré la prime de déplacement comme un forfait concernant les heures supplémentaires réalisées.

Il résulte des énonciations du rapport d'expertise, déposé le 14 septembre 206 par monsieur D..., que de juin 1999 à juin 2004, le salarié a perçu 16 519,42 euros sous l'intitulé « prime de déplacement » et 2723,12 euros sous l'intitulé « heures supplémentaires », cette dernière rémunération correspondant au déplacements occasionnés par le salon « Educatec » incluant des dimanches.

L'indemnité de « déplacement éloignement » fixée à 76,22 euros puis à 78,00 euros par jour représente bien, compte tenu du taux horaire pratiqué, une rémunération forfaitaire d'environ 4 heures supplémentaires par jour, majorations comprises, qui n'est pas défavorable au salarié ; celui-ci ne fournit d'ailleurs aucun élément précis de nature à chiffrer les heures supplémentaires réellement effectués à l'occasion de ses déplacements professionnels.

Le jugement ne peut dès lors qu'être confirmé en ce qu'il a débouté monsieur X... de sa demande en paiement d'un rappel d'heures supplémentaires.

3-l'indemnité réclamée pour travail dissimulé :

La preuve de l'exécution d'heures supplémentaires non mentionnées sur les bulletins de paie, n'étant pas rapportée, monsieur X... ne saurait prétendre au paiement de l'indemnité prévue à l'article L 324-11-1 ; il convient donc de confirmer le jugement qui l'a débouté d'une telle demande.

4-les dépens et l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile :

Au regard de la solution apportée au règlement du litige, monsieur X... doit être condamné aux dépens d'appel, mais sans que l'équité commande l'application, au profit de la société GTI Systèmes, des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme dans toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 mars 2007 par le conseil de prud'hommes de Carcassonne,

Condamne monsieur X... aux dépens d'appel,

Dit n'y avoir lieu à l'application, au profit de la société GTI Systèmes, des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 07/02426
Date de la décision : 19/12/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Carcassonne


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-12-19;07.02426 ?
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