COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1o Chambre Section AO1
ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2007
Numéro d'inscription au répertoire général : 07 / 338
Décision déférée à la Cour : Jugement du 7 OCTOBRE 2004
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE
No RG 02 / 1345
APPELANTS :
Monsieur Pierre X...
né le 17 Juin 1930 à SAN CLEMENTE (Espagne)
de nationalité française
...
11100 BAGES
représenté par la SCP DIVISIA-SENMARTIN, avoués à la Cour
assisté de la SCP GOUIRY MARY CALVET BENET, avocats au barreau de NARBONNE
Madame Raymonde Y...épouse X...
née le 12 Décembre 1932 à NARBONNE (11100)
de nationalité française
...
11100 BAGES
représentée par la SCP DIVISIA-SENMARTIN, avoués à la Cour
assistée de la SCP GOUIRY MARY CALVET BENET, avocats au barreau de NARBONNE
INTIMEES :
Madame Françoise Z...
née le 8 Août 1961 à NARBONNE (11100)
de nationalité française
...
11100 BAGES
représentée par la SCP JOUGLA-JOUGLA, avoués à la Cour
assistée de la SCP PECH DE LACLAUSE GONI, avocats au barreau de NARBONNE
G. F. A. Z...,
prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social sis
...
11100 BAGES
représentée par la SCP JOUGLA-JOUGLA, avoués à la Cour
assistée de la SCP PECH DE LACLAUSE GONI, avocats au barreau de NARBONNE
COMMUNE DE BAGES,
prise en la personne de son Maire en exercice, domicilié en cette qualité
Hôtel de Ville
11100 BAGES
représentée par la SCP JOUGLA-JOUGLA, avoués à la Cour
assistée de la SCP PECH DE LACLAUSE GONI, avocats au barreau de NARBONNE
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 18 OCTOBRE 2007
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 OCTOBRE 2007, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nicole FOSSORIER, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Nicole FOSSORIER, Président
Madame Sylvie CASTANIE, Conseiller
Monsieur Claude ANDRIEUX, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Josiane MARAND
ARRÊT :
-contradictoire,
-prononcé publiquement par Madame Nicole FOSSORIER, Président,
-signé par Madame Nicole FOSSORIER, Président, et par Mademoiselle Marie-Françoise COMTE, greffière présente lors du prononcé.
* * *
* *
Vu l'arrêt mixte rendu le 10. 1. 2006 par cette Cour saisie de l'appel du jugement du Tribunal de Grande Instance de Narbonne en date du 7. 10. 2004, par lequel elle a dit que la commune de BAGES n'est pas propriétaire du chemin situé entre les parcelles 1236 des époux B...et 1237 des époux X...et a sursis à statuer sur la demande en désenclavement formée par le GFA Z...et Madame Z...jusqu'à ce qu'une solution soit donnée sur la limite séparative des parcelles des époux X...et des époux B...;
Vu les conclusions d'appel principal notifiées le 17. 10. 2007, par les époux X...qui demandent de juger non fondé le nouveau moyen développé par Madame Z...et le GFA Z..., de surseoir à statuer tenant le pourvoi formé par Monsieur et Madame B...à l'encontre de l'arrêt rendu par la Cour d'Appel de MONTPELLIER le 10 octobre 2006,
Subsidiairement, de constater que le GFA Z...et Madame Z...ne justifient nullement d'un état d'enclave ou d'une issue insuffisante leur permettant de réclamer un droit de passage sur le fonds X...cadastré B 1237, car leurs parcelles 1239 et 1240 ont un accès sur la voie publique, de juger en tout cas qu'ils ne prouvent pas que le trajet le plus court et le moins dommageable doit s'exercer sur la parcelle de Monsieur et Madame X...et de rejeter leurs prétentions ;
Très subsidiairement, de condamner le GFA Z...et Madame Z...au paiement d'une indemnité de 30. 000 euros proportionnée au dommages subis par leur fonds ;
de les condamner ainsi que la Commune de BAGES au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de frais et honoraires non compris dans les dépens ;
Vu les conclusions notifiées le 16. 10. 2007, par Madame Z..., le GFA Z...et la Commune de BAGES qui demandent de juger que les parcelles cadastrées B 1239 et 1240 sont enclavées et que les premiers sont fondés à revendiquer un droit de passage par le chemin matérialisé dans le rapport d'expertise entre les propriétés B...et X..., de condamner les époux X...au paiement de la somme de 8 000 euros à titre de frais et honoraires non compris dans les dépens ;
Subsidiairement, d'ordonner une expertise judiciaire.
SUR QUOI :
Le pourvoi dirigé par les époux B...contre l'arrêt rendu par cette Cour le 10 octobre 2006, dans la procédure les opposant aux époux X..., a fait l'objet d'une ordonnance constatant sa déchéance. En conséquence aucun motif ne justifie qu'il soit sursis à statuer sur le seul problème du désenclavement restant à trancher, opposant les époux X...au GFA Z...et à madame Z....
Les parcelles du GFA Z...ont une surface de 1ha 02ca 50ca et de 6a (CF. Rapport page 17), ce qui implique pour le traitement, l'entretien de la vigne et les vendanges, leur accès par des engins agricoles assez volumineux, et avec remorque notamment en période de vendanges. Un témoin a fait état devant l'expert, de l'emploi d'une benne de 4 tonnes. Par ailleurs, aux termes de l'acte constitutif du GFA établi par maître C..., le siège du GFA et les bâtiments d'exploitation sont à BAGES.
Il résulte des vérifications de l'expert, monsieur D..., et du plan cadastral que les parcelles numéros 1239 et 1240 ont accès sur un chemin rural désigné ABCD par l'angle nord-ouest de la vigne. Il n'est
en revanche relevé aucun autre accès possible au sud, ni à l'ouest en raison d'un important talus boisé, longé à son sommet par un fossé. L'expert affirme, sans être démenti, que si le chemin rural No 409 figure sur le plan cadastral, il n'existe plus et n'a même pas été invoqué par les parties (CF. Rapport page 23). Le chemin numéro 411 qui y aboutit est donc sans intérêt pour la desserte des parcelles 1239 et 1240.
Or, au vu des photographies annexées au rapport d'expertise, et des constatations de l'expert, le chemin de terre rural pour sa partie délimitée par les points BCD, plus ou moins empierré, est à « angle très aigu et présente une rampe terminale descendante très pentue » au niveau de son intersection avec le chemin rural de Narbonne à BAGES. Etant ajouté que ce dernier n'est lui-même pas très large et ne permet pas d'y faire des manoeuvres aisées pour s'y engager (CF. Photographie No 13 annexée au rapport), il en résulte que le chemin rural n'est à cet endroit pas praticable sans danger pour des véhicules lourds avec remorque ou benne. L'expert relate page 23 de son rapport que les profil et angle du chemin présentent un danger réel lors de la circulation des engins agricoles à pleine charge, ce que confirment les nombreuses attestations établies dans les formes légales, remises à l'expert.
Son défaut d'élargissement par la commune qui impliquerait d'ailleurs pour elle une partie d'une parcelle limitrophe ou d'exproprier le propriétaire, est étranger au GFA Z.... Si l'huissier mandaté par monsieur X...estime à vue d'oeil le 10 Août 2007 que le chemin laisse la place pour tourner, ses photographies numéros 12 et 13 qui ne montrent d'ailleurs pas la faible largeur du chemin de Narbonne à BAGES, prouvent que les lieux n'ont pas changé depuis le rapport d'expertise et que l'angle aigu et la pente du chemin rural sont restés identiques. Son appréciation ne saurait démentir les vérifications de l'expert. Il est suffisamment établi que le trajet ABCD est insuffisant pour des techniques actuelles d'exploitation des parcelles Numéros 1239 et 1240, qui sont enclavées.
Il résulte des divers documents produits, de la situation des lieux ainsi que de la configuration de la parcelle No 1237 des époux X...
telle qu'elle apparaît sur les photographies annexées au procès-verbal de constat d'huissier produit par eux et au rapport d'expertise, que la voie la plus courte et la moins dommageable pour désenclaver les parcelles Z..., est un chemin à peu près rectiligne, situé sur la parcelle No 1237 entre un mur de soutènement d'une hauteur d'environ un mètre qui délimite la partie plantée en vigne de la parcelle des époux X..., et la ligne divisoire de cette parcelle avec la propriété B...située en contre-bas. Il correspond à l'ancien chemin qualifié de « service » qui a une large entrée sur la route départementale, parfaitement décrit par l'expert et le constat d'huissier du 22. 5. 2003. S'il n'est au vu du procès-verbal de constat du 10 Août 2007, plus entretenu du fait qu'il n'est plus emprunté, les époux X...en ayant interdit l'accès en 2003, il n'est pas démontré que sa remise en état soit compliquée. Aucune mesure complémentaire d'expertise n'est ainsi justifiée.
Au surplus, le GFA Z...invoque la prescription non pas d'une servitude de passage mais de son assiette, ce qui n'est qu'un moyen nouveau venant à l'appui de sa demande de désenclavement. Il justifie par les multiples attestations produites qu'il passait par la parcelle X..., sur le chemin sus-visé, pour cultiver sa vigne d'autant plus qu'il était considéré comme un chemin de service communal depuis 1949 au moins. Le tronçon B-C du chemin rural envahi par la végétation n'était d'ailleurs plus utilisé, au vu de la photographie aérienne de 1954 (cf. Rapport page 19). En conséquence le désenclavement des parcelles numéros B 1239 et 1240 se fera sur la parcelle numéro 1237, par cet ancien chemin.
Quant à la demande en dédommagement des époux X..., présentée en application de l'article 682 du code civil, non seulement ce chemin a depuis de nombreuses années été utilisé comme passage pour desservir notamment la parcelle des époux X..., mais encore sa configuration et sa situation en bordure de la parcelle des époux X...font qu'il ne peut servir à rien d'autre qu'au passage. La valeur du terrain d'assiette ne peut pas être retenue comme celle d'un terrain cultivable. Aucune gêne ne résulte pratiquement pour les époux X...de son utilisation par le GFA Z..., sinon en ce qu'il y passera quelques fois par an. Compte tenu de sa longueur (75 mètres environ au vu du plan cadastral au 1 / 2500e) et des éléments sus-visés, la Cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour évaluer l'indemnité compensatrice du dommage occasionné par le passage à la somme de CENT CINQUANTE euros.
Les dépens non liquidés par le précédent arrêt, supportés par des époux X...d'une part, le GFA Z...et madame Z...d'autre part sont laissés à la charge de chaque partie et les frais d'expertise de monsieur D...seront partagés par moitié entre elles. En effet, si les frais de désenclavement sont logiquement à la charge de celui dont le fonds en bénéficiera et qui doit d'ailleurs indemniser la partie adverse, l'opposition des époux X...à accepter que l'assiette du désenclavement passe sur leur parcelle et les obstacles mis par eux, dans les circonstances très particulières de ce litige, justifient de laisser leurs dépens non encore liquidés à leur charge. Il est de même équitable que chaque partie supporte les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés, en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La demande en paiement de frais et honoraires non compris dans les dépens dirigée par les époux X...contre la Commune de BAGES a été rejetée par le précédent arrêt.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement, par décision contradictoire, en dernier ressort,
Vu l'arrêt rendu le 10. 1. 2006,
Au fond, dit que les parcelles cadastrées section B numéros 1239 et 1240 sises commune de BAGES, appartenant au GFA Z...et à madame Z..., sont enclavées ;
Dit que leur désenclavement se fera sur la parcelle cadastrée section B numéro 1237, fonds servant, l'assiette du passage étant située sur le chemin matérialisé par les points E-F sur le plan cadastral annexe 3b du rapport d'expertise judiciaire de monsieur D...;
Condamne le GFA Z...et madame Z...à payer aux époux X...la somme de CENT CINQUANTE euros à titre d'indemnité de désenclavement ;
Rejette les autres demandes ;
Dit que chaque partie gardera à sa charge les entiers dépens non liquidés par le précédent arrêt qu'elle a exposés et partage les frais d'expertise judiciaire de monsieur D...par moitié entre les époux X...d'une part, le GFA Z...et madame Z...d'autre part.