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21/11/2007 | FRANCE | N°06/00437

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 21 novembre 2007, 06/00437


BR/DP/BB
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale

ARRET DU 21 Novembre 2007



Numéro d'inscription au répertoire général : 07/03642



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 MAI 2007 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE PERPIGNAN
No RG06/00437


APPELANT :

Monsieur Daniel X...


...

66000 PERPIGNAN
Représentant : Maître MALAVIALLE de la SCPA MALAVIALLE (avocats au barreau de PERPIGNAN)


INTIMEE :


EURL GARCIA & FILS
prise en la personne de son représentant légal
2, avenue du 8 Ma

i 1945
66700 ARGELES SUR MER
Représentant : Maître DE TORRES de la SCPA DE TORRES - PY (avocats au barreau de PERPIGNAN)


COMPOSITION DE LA COUR :


En app...

BR/DP/BB
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale

ARRET DU 21 Novembre 2007

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/03642

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 MAI 2007 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE PERPIGNAN
No RG06/00437

APPELANT :

Monsieur Daniel X...

...

66000 PERPIGNAN
Représentant : Maître MALAVIALLE de la SCPA MALAVIALLE (avocats au barreau de PERPIGNAN)

INTIMEE :

EURL GARCIA & FILS
prise en la personne de son représentant légal
2, avenue du 8 Mai 1945
66700 ARGELES SUR MER
Représentant : Maître DE TORRES de la SCPA DE TORRES - PY (avocats au barreau de PERPIGNAN)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 945-1 du nouveau Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 OCTOBRE 2007, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Bernadette BERTHON, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire, Madame Bernadette BERTHON ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre
Madame Marie CONTE, Conseiller
Madame Bernadette BERTHON, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Brigitte ROGER

ARRET :

- Contradictoire.

- prononcé publiquement le 21 NOVEMBRE 2007 par Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre.

- signé par Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre, et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, Greffier présent lors du prononcé.

*
* *

FAITS ET PROCEDURE

Daniel X... a été embauché par l'EURL GARCIA & FILS, à compter du 2 février 2004, en qualité d'ouvrier.

Par lettre du 09 mai 2006, le salarié, par l'intermédiaire de son conseil, a indiqué à l'employeur que, n'ayant pas été payé de son salaire d'avril 2004, estimant avoir été réglé en retard de son salaire de mars et que l'employeur entend modifier unilatéralement son contrat de travail, en lui imposant de se rendre tous les matins au dépôt, il était dans l'obligation de le Conseil de prud'hommes aux fins de constater la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur.

Daniel X... a saisi, le 10 mai 2006, le Conseil de prud'hommes de Perpignan, lequel, suivant jugement du 15 mai 2007, a débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes et condamné Daniel X... aux dépens.

Daniel X... a, le 29 mai 2007, régulièrement relevé appel de ce jugement.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Daniel X... demande à la Cour de réformer le jugement déféré, de dire la rupture du contrat de travail imputable à l'EURL GARCIA & FILS et de condamner cette dernière à lui payer les sommes de :

-2.600 euros à titre d'indemnité de préavis,
-300 euros à titre d'indemnité de licenciement,
-1.300 euros à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,
-8.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-169, 21 euros à titre de solde de salaire et de congés payés,
-720 euros à titre de prime de vacances,
-1.500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,
Il sollicite en outre le paiement des intérêts de ces sommes à compter de la demande devant le Conseil de prud'hommes ainsi que les entiers dépens.

Il soutient que l'employeur n'a pas respecté ses obligations légales( à savoir de cotiser à la Caisse de Congés Payés du Bâtiment et des Travaux Publics, de le déclarer à la Sécurité Sociale), et contractuelles (obligation de paiement du salaire, en retard en mars et en avril 2006, des heures supplémentaires, de la prime de vacances et des congés payés). Il ajoute que l'employeur lui a imposé, dans le seul but de le gêner, de se rendre tous les matins au dépôt, alors qu'il avait pour habitude de se rendre directement sur le chantier et que d'autres salariés n'y étaient pas obligé.

Il considère ainsi que la rupture du contrat de travail est imputable à l'employeur et non à lui. Il indique à ce titre qu'il n'a manifesté aucune intention claire et non équivoque de démissionner et qu'il n'a jamais été véritablement absent à compter du 25 avril 2006 mais mis en congés jusqu'au 10 mai.

L'EURL GARCIA & FILS conclut à la confirmation du jugement déféré, en conséquence, à la constatation que Daniel X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail, à la qualification de celle-ci en démission, au débouté du salarié de l'ensemble de ses demandes et à sa condamnation au paiement des sommes de 650 euros à titre de dommages-intérêts pour non respect des 15 jours de préavis, de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle fait valoir que les moyens du salarié à l'appui de sa prise d'acte sont infondés. A ce titre, elle indique que l'avertissement du 10 mars 2006, pour ne pas avoir nettoyé correctement la toiture de l'immeuble, est parfaitement justifié et ne vient pas répondre à la prétendue demande d'heures supplémentaires. Sur les prétendus retards de paiement des salaires, elle conteste avoir payé en retard le salaire de mars 2006 et pour celui d'avril, le salarié ayant cessé de travailler le 24 avril et engagé une procédure prud'homale le 10 mai 2006, il ne peut soutenir que le retard a motivé la prise d'acte de rupture de son contrat de travail. Sur les heures supplémentaires, elle allègue que le salarié a pour la première fois formulé une demande le 07 avril et que, dès le 20 avril, elle régularisait intégralement le paiement des heures supplémentaires.

Concernant la prétendue modification du contrat de travail, elle précise qu'elle lui avait demandé, comme à l'ensemble des salariés, de se présenter tous les matins au dépôt afin de pouvoir constituer les équipes envoyées sur les chantiers et que c'est le salarié qui a refusé de venir travailler. Elle nie en outre les accusations d'harcèlement physique et moral du salarié. S'agissant des cotisations à la Caisse des Congés Payés et la déclaration à la Sécurité Sociale, elle soutient qu'elle a rempli ses obligations, qu'au demeurant, le salarié, qui ne réclame aucune somme à ce titre et a été payé de tous ses droits, n'a subi aucun préjudice, et qu'en soulevant ces moyens uniquement en cours de procédure, ils ne pouvaient motiver sa prise d'acte. Sur le paiement de la prime de vacances, elle estime que le salarié ne remplit pas les conditions de son obtention.

Elle considère ainsi que la rupture du contrat, à l'initiative du salarié, qui a cessé son emploi à compter du 24 avril, en l'absence de faute de l'employeur, s'analyse en une démission.

Pour plus ample exposé, la Cour renvoie expressément aux écritures déposées par chaque partie et réitérées oralement à l'audience.

SUR CE,

Sur la rupture du contrat de travail :

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.

En l'espèce, Daniel X..., qui a pris acte de la rupture de son contrat de travail, par lettre du 09 mai 2006, puis en saisissant le Conseil de prud'hommes aux fins que soit constaté la rupture de son contrat aux torts de l'employeur, fait grief à ce dernier de ne lui avoir pas payé des heures supplémentaires. Il ressort des pièces versées aux débats que l'employeur a régularisé le paiement desdites heures le 20 avril 2006, ce qui n'est pas contesté par le salarié, soit avant la prise d'acte de la rupture. Ce grief ne peut donc être la cause de la prise d'acte postérieure et doit donc être écarté.

Daniel X... reproche également à l'employeur la modification de son contrat de travail, du fait que ce dernier l'a obligé à se rendre tous les matins au dépôt. Ce grief ne saurait être retenu dans la mesure où cette modification du lieu de travail dans le même secteur géographique, au demeurant imposée à tous les salariés, comme cela ressort des attestations produites par l'employeur, ne constitue pas une modification du contrat de travail mais relève du pouvoir de direction de l'employeur.

Concernant la prime de vacances, l'article 5.25 de la Convention collective du bâtiment, applicable en l'espèce, conditionne l'octroi de cette indemnité à l'exercice pour le salarié ouvrier d'au moins 1675 heures de travail au cours de l'année de référence dans une ou plusieurs entreprises du bâtiment ou des travaux publics. En l'espèce, la lecture des bulletins de salaire de Daniel X... fait apparaître au cours de l'année précédant la rupture de son contrat un nombre d'heures travaillées inférieures au minimum requis par la Convention collective afin de d'avoir droit au paiement d'une primes de vacances. Ce grief ne peut également être retenu.

En revanche, le manquement de l'employeur à son obligation légale de cotisation à la Caisse de Congés Payés du Bâtiment et des Travaux publics est caractérisé. En effet, des lettres dudit organisme, notamment du 19 mars et 10 octobre 2007 et du 13 juin et 05 octobre 2006, font ressortir que l'employeur n'est pas à jour de ses cotisations et qu'aucune n'aurait été acquittée depuis le 1er mai 2005. De même, un document de la Caisse Régionale d'Assurance Maladie du Languedoc Roussillon montre que l'employeur n'est également pas à jour de ses cotisations d'assurance maladie. Ce dernier prouve uniquement qu'il est immatriculé auprès de ces organismes mais n'apporte aucun élément pour démontrer qu'il s'est régulièrement acquitté de ses cotisations.

Pour les salaires de mars et d'avril 2006, il existe un léger retard pour le mois de mars 2006, le salarié ayant perçu son salaire mi-mars pour le premier ; pour celui d'avril 2006, il ne lui a été intégralement payé qu'en juillet 2006, ce retard étant en partie admis par l'employeur dans ses écritures.

Ces retards, ajoutés à celui dans le paiement des heures supplémentaires, même si la situation a été régularisée, ainsi que le manquement de l'employeur à ses obligations légales justifient la prise d'acte de Daniel X... de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur. Cette rupture doit donc produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ce qui entraîne la réformation du jugement déféré.

Sur les conséquences de la rupture :

Compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération mensuelle versée au salarié (1.300 euros bruts), de son âge (24 ans au moment de la rupture), de sa capacité à retrouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et son expérience professionnelle et de son ancienneté dans l'entreprise (2 ans et trois mois), et de l'effectif de celle-ci (moins de 11 salariés), la Cour, en application de l'article L. 122-14-5 du Code du travail, condamne l'EURL GARCIA & FILS à payer à Daniel X... la somme de 6.000 euros à titre de dommages-intérêts toutes causes de préjudices confondues.

Au vu de la solution du litige, de l'ancienneté supérieure à deux ans de Daniel X... et de la Convention collective du bâtiment, applicable en l'espèce, l'EURL GARCIA & FILS sera condamné à lui payer la somme de 2.600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, correspondant à deux mois de salaire, et 300 euros à titre d'indemnité de licenciement. Au contraire, l'employeur sera débouté de sa demande reconventionnelle au titre du préavis.

Sur les demandes annexes :

Au vu de ce qui précède, la demande de Daniel X... au titre de la prime de vacances doit être rejetée.

Sur les congés payés réclamés par le salarié, il ressort des pièces versées aux débats, notamment de ses bulletins de salaire et de son attestation ASSEDIC, qu'il a été intégralement rempli de ses droits.

Il est inéquitable de laisser à la charge de l'appelant les frais irrépétibles exposés par lui en première instance et en cause d'appel. L'EURL GARCIA & FILS sera donc à ce titre condamné à payer à Daniel X... la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

L'EURL GARCIA & FILS, qui succombe en partie, sera débouté de sa demande sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile et sera tenue aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

En la forme, reçoit l'appel de Daniel X...,

Au fond, infirme le jugement déféré ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,:

Dit que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par Daniel X... s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne l'EURL GARCIA & FILS à payer à Daniel X... les sommes :
-6.000 euros à titre de dommages-intérêts toutes causes e préjudices confondues,
-2.600 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
-300 euros à titre d'indemnité de licenciement,
-1.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,

Dit que ces sommes sauf celle au titre des frais irrépétibles porteront intérêts au taux légal à compter du 12 mai 2006 date de la convocation de l'employeur devant la juridiction prud'homale.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne l'EURL GARCIA & FILS aux dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 06/00437
Date de la décision : 21/11/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Perpignan


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-11-21;06.00437 ?
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