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10/10/2007 | FRANCE | N°05/00181

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 10 octobre 2007, 05/00181


SD/MC/FB





COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4o chambre sociale



ARRET DU 10 Octobre 2007





Numéro d'inscription au répertoire général : 06/08084



ARRET no



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 NOVEMBRE 2006 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE BEZIERS

No RG05/00181





APPELANTE :



Société WISEAS MARKETING DIRECT

poursuites et diligences de son représentant légal

Mas du Chêne

34120 NEZIGNAN L' EVEQUE

Représentant : Me BERTRAND de

la SCP MAXIME ET DENIS BERTRAND (avocats au barreau de MONTPELLIER)







INTIMEE :



Madame Marjolaine Y...


...


34370 GIGEAN

Représentant : Me ARCELLA substituant la SCPA CAUSSE - DELPECH (avo...

SD/MC/FB

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4o chambre sociale

ARRET DU 10 Octobre 2007

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/08084

ARRET no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 NOVEMBRE 2006 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE BEZIERS

No RG05/00181

APPELANTE :

Société WISEAS MARKETING DIRECT

poursuites et diligences de son représentant légal

Mas du Chêne

34120 NEZIGNAN L' EVEQUE

Représentant : Me BERTRAND de la SCP MAXIME ET DENIS BERTRAND (avocats au barreau de MONTPELLIER)

INTIMEE :

Madame Marjolaine Y...

...

34370 GIGEAN

Représentant : Me ARCELLA substituant la SCPA CAUSSE - DELPECH (avocats au barreau de BEZIERS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 945-1 du nouveau Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 SEPTEMBRE 2007, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Pierre D'HERVE, Président et Mme Marie CONTE, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire, Monsieur Pierre D'HERVE ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Pierre D'HERVE, Président

Madame Marie CONTE, Conseiller

Madame Bernadette BERTHON, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON

ARRET :

- Contradictoire.

- prononcé publiquement le 10 OCTOBRE 2007 par Monsieur Pierre D'HERVE, Président.

- signé par Monsieur Pierre D'HERVE, Président, et par Mme Sophie LE SQUER, Greffier présent lors du prononcé.

*

**

FAITS ET PROCEDURE

Marjolaine Y... a été engagée par la SA WISEAS, société d'édition spécialisée dans la publication de "carnets" destinés aux professionnels du bâtiment, selon CDI, le 20 mai 1997 en qualité de chef d'édition non cadre, ses fonctions consistants à vendre des espaces publicitaires dans les carnets édités deux fois par an et distribués aux professionnels.

Au mois de septembre 2004, un différend a opposé l'employeur et les salariés de l'entreprise relatif à la méthode de calcul des congés payés.

Prétendant au paiement de rappels de prime d'ancienneté et de congés payés, Marjolaine Y... a, le 24 mars 2005, saisi le Conseil des Prud'hommes de Béziers qui, par jugement de départage de 22 novembre 2006, a condamné la SA WISEAS à lui payer les sommes de :

-430,27 € brut au titre de la prime d'ancienneté pour les années 1999,2000 et 2001,

-5761,36 € à titre d'indemnité de congés payés pour le période de 1998 à 2004,

-1000 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

La SA WISEAS a interjeté appel de cette décision.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par voie de conclusions écrites réitérées oralement à l'audience auxquelles il convient de se référer pour l'exposé complet de ses moyens et arguments, l'appelante sollicite le débouté de l'intimée de ses demandes, subsidiairement, la réduction de ses prétentions à une somme de 1754,23 € à titre de rappel d'indemnité de congés payés ; en toute hypothèse, à titre reconventionnel, sa condamnation au paiement des sommes de :

-1347,59 € à titre de remboursement sur trop perçu de prime d'ancienneté,

-18911,60 € à titre de remboursement sur indemnité de clause de non concurrence versée à tort,

outre la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

Elle soulève en premier lieu la prescription, en vertu des dispositions de l'article 2277 du Code Civil, des prétentions antérieures au 24 mars 2000, en précisant que tous les éléments débattus pour procéder au calcul des sommes réclamées ont toujours été connus de la salariée.

S'agissant de la prime d'ancienneté, elle soutient que cette prime a été versée, que la salariée ayant déjà bénéficié de la réduction du temps de travail, la prime mentionnée sur les bulletins de salaire ne pouvait être destinée à compenser l'absence de réduction du temps de Travail, qu' enfin les calculs proposés par la salariée sont faux, quant à l'assiette de calcul de la prime et au coefficient applicable.

Relativement à l'indemnité de congés payés elle estime ne pas avoir à inclure dans son assiette de calcul la prime sur le chiffre d'affaire des carnets vendus, dans la mesure où celle-ci ne correspond pas à l'activité personnelle de la salariée, mais au chiffre d'affaire global de carnet, comprenant outre le chiffre réalisé par celle-ci, les ventes des autres chefs d'édition.

Rappelant que la Cour d'Appel de Montpellier, dans une instance l'opposant à un autre salarié, a déclaré nulle la clause contractuelle de non concurrence, en raison de l'absence de contrepartie financière devant être réglée postérieurement à la rupture du contrat de travail, et du caractère dérisoire de l'indemnité incluse dans le salaire et représentant 8% de celui-ci, elle prétend au remboursement par la salariée de l'indemnité perçue pendant la durée de la relation contractuelle.

Marjolaine Y... conclut pour sa part à l'infirmation partielle du jugement et à la condamnation de l'employeur au paiement des sommes de :

-2674,11 € de rappel de prime d'ancienneté,

-5761,36 € d'indemnité compensatrice de congés payés sur la prime de carnet,

-305,05 € d'indemnité compensatrice de congés payés sur la prime d'objectif

-3.500 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du respect d'une clause de non concurrence illicite,

-1.500 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC

Relativement à la prescription soulevée par l'employeur, elle objecte que celle-ci n'a produit ses effets dans la mesure où, dans l'ignorance de sa qualification, son coefficient et son indice, elle s'est trouvée dans l'impossibilité de procéder au calcul des sommes qui lui étaient dues.

Elle observe que jusqu'en 2002, les bulletins de salaire ne font pas apparaître le paiement d'une prime d'ancienneté, alors qu'elle remplissait les conditions requises, et prétend qu'à compter de 2002 la prime dite d'ancienneté versée était en fait une prime de réduction de temps de travail.

Elle conteste les bases de calcul de l'indemnité de congés payés retenues par l'employeur qui n'a pas pris en compte dans l'assiette la prime dite de "carnet", estimant que cette prime correspondant bien à son activité professionnelle, devait être incluse dans l'assiette des congés payés, ainsi que la prime annuelle sur objectif.

S'agissant enfin de la clause de non concurrence elle soutient que l'employeur ne peut prétendre à la restitution des sommes versées en exécution d'une clause illicite, mais qu'en revanche le respect par le salarié d'une clause de non concurrence illicite lui cause nécessairement un préjudice dont il doit être indemnisé.

MOTIFS DE L ARRET

Sur la prescription

La prescription ne s'applique pas à la demande en paiement de prime d'ancienneté, la première année concernée étant en l'espèce l'année 2000, à compter de laquelle la salariée a rempli les conditions d'ancienneté requises pour en bénéficier.

Par ailleurs, la prescription de cinq ans prévue par l'article 2277 du Code Civil ne s'applique pas lorsque la créance même périodique, dépend d'éléments qui ne sont pas connus du créancier et qui, en particulier, doivent résulter de déclarations que le débiteur est tenu de faire.

En l'espèce les bulletins de salaire portant la mention des primes versées la salariée avait connaissance dés l'origine de la relation de travail, de l'absence d'inclusion de la prime de carnet et d'objectif dans l'assiette de calcul des congés payés. La prescription quinquennale a donc vocation à s'appliquer aux sommes antérieures au 24 mars 2000.

Sur la prime d'ancienneté

En relevant d'une part que la salariée remplissait les conditions d'attribution de cette prime dont elle n'a pas bénéficié au titre des années 2000 et 2001, d'autre part que la base de calcul de la dite prime est le salaire conventionnel, enfin qu'aucun élément ne permet d'établir que la prime d'ancienneté versée à compter de décembre 2002 constituait en réalité une prime de réduction de temps de travail, le premier juge a, par une exacte analyse des éléments de la cause, développé des motifs pertinents, que la Cour entend adopter pour confirmer sa décision sur ce point.

Sur les congés payés

La rémunération de Marjolaine Y..., comme celle des autres chefs d'édition, comportait une part fixe et une part variable composée de onze primes différentes.

Durant plusieurs années, l'indemnité de congés payés n'a été calculée que sur la part fixe. À la suite de la réclamation d'une salariée en septembre 2004, l'employeur, après consultation d'un cabinet d'avocats spécialisés, a réglé un rappel d'indemnité de congés payés en retenant certaines de ces primes, seule restant en litige l'inclusion dans la fixation de l'assiette du congés payés des primes de carnet et d'objectif.

Chaque chef d'édition doit éditer un carnet spécifique et vendre les publicités figurant à ce carnet et à ceux éditer par les autres chefs d'édition. Il reçoit une prime dite "prime CA perso" pour les publicités vendues par lui tant sur son carnet que sur ceux édités par les autres chefs d'édition et une prime dite "prime de carnet" pour les publicités de son carnet vendues tant par lui et que par les autres commerciaux.

Le chiffre d'affaire réalisé par son carnet provient donc, du moins en partie, de son travail d'édition du carnet qui lui est confié, la prime de carnet rémunérant ce travail.

Ainsi, contrairement à ce que soutient la SA WISEAS, cette prime dépend du travail du salarié à qui la réalisation du carnet a été confiée, et constitue un élément du salaire, peu important la globalisation de son mode de calcul.

Il en est de même de la prime d'objectif, dont le montant a, au demeurant été retenu, pour le calcul de l'assiette des congés payés en 1998 et 1999.

Les sommes réclamées par la salariée se fondent sur les primes effectivement versées par l'employeur et ne sont pas contestées en leur montant, sauf à tenir compte de la prescription.

Il convient donc de condamner l'employeur à payer à la salariée, à titre de rappel d'indemnité de congés payés, la somme de 3732,41 €.

Sur la clause de non concurrence

Une clause de non concurrence n'est licite que si elle est indispensable aux intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser une contrepartie financière.

Le contrat de travail stipule en l'espèce une clause de non concurrence sur la France entière pour une durée de 2 ans, et précise que le salaire de 9000 francs brut inclut l'indemnité de non concurrence à hauteur de 1000 francs par mois.

Or, la contrepartie financière de l'interdiction de concurrence a pour objet d'indemniser le salarié qui, après la rupture de son contrat de travail, est tenu d'une obligation qui limite ses possibilités d'exercer un autre emploi et son montant ne peut dépendre de la durée d'exécution du contrat ni son paiement intervenir après la rupture.

Par ailleurs le montant de l'indemnité équivalent environ à 8% du salaire après ajout des éléments variateurs est dérisoire compte tenu de la durée et de l'étendue de la clause.

Dés lors la clause contractuelle de non concurrence est nulle.

Une clause de non concurrence illicite cause au salarié qui la respecte un préjudice durant l'exécution du contrat de travail, en ce qu'il l'empêche de rechercher un autre emploi auprès d'une entreprise concurrente et, après l'expiration du contrat, limite ses possibilités de retrouver un autre emploi.

Marjolaine Y... a démissionné de son poste le 31 juillet 2006 pour suivre son concubin muté en Guadeloupe donc il ne saurait être prétendu qu'elle ne se situe pas en territoire français.

Compte tenu de la durée du contrat de travail, de la cessation, le 02 juillet 2007 de l'obligation de non concurrence et de l'absence de tout élément concret permettant d'apprécier les conséquences de cette clause sur les difficultés à trouver un autre emploi, il convient de réparer le préjudice causé par l'illicéité de cette clause par une indemnité de 2000 €.

Seul le salarié est recevable à invoquer la nullité de la clause de non concurrence.

L'employeur n'est donc pas admis à soutenir l'illicéité de la clause dans le but d'échapper aux conséquences financières de l'interdiction imposée par lui au salarié, ou a obtenir le remboursement des sommes par lui versées au salarié pendant la période où il a respecté l'interdiction contestée.

Il s'ensuit que la SA WISEAS doit être déboutée de sa demande reconventionnelle en remboursement des sommes versées à titre d'indemnisation de la clause de non concurrence.

Sur l'article 700 du NCPC

La SA WISEAS qui succombe en son appel doit être condamnée à payer à Marjolaine Y... la somme de 1000 € en application des dispositions de l'article 700 du NCPC.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement sauf en ses dispositions relatives au montant du rappel d'indemnité de congés payés.

Et statuant à nouveau :

Condamne la SA WISEAS à payer à Marjolaine Y... la somme de 3732,41 € à titre de rappel d'indemnité de congés payés.

Y ajoutant :

Condamne la SA WISEAS à payer à Marjolaine Y... la somme de 2000 € de dommages et intérêts pour stipulation d'une clause de non concurrence illicite,

Déboute la SA WISEAS de sa demande reconventionnelle,

Condamne la SA WISEAS à payer à Marjolaine Y... la somme de 1000 € en application des dispositions de l'article 700 du NCPC,

La condamne aux dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 05/00181
Date de la décision : 10/10/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-10-10;05.00181 ?
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