COUR D' APPEL DE MONTPELLIER
4 chambre sociale
ARRET DU 05 Septembre 2007
Numéro d' inscription au répertoire général : 06 / 08291
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 DECEMBRE 2006 CONSEIL DE PRUD' HOMMES DE SETE
No RGF05 / 00257
APPELANTE :
SARL ORCA MARINE, prise en la personne de son représentant légal en exercice,
25 Chemin de Saint Henri- BP 181
13382 MARSEILLE CEDEX 16
Représentant : Me Gisèle CARREGA (avocat au barreau de MARSEILLE)
(bénéficie d' une aide juridictionnelle Totale numéro 2007 / 001391 du 30 / 04 / 2007 accordée par le bureau d' aide juridictionnelle de MONTPELLIER)
INTIME :
Monsieur Mohamed Y...
...
...
Représentant : Me Fabien MARTELLI (avocat au barreau de MONTPELLIER)
(bénéficie d' une aide juridictionnelle Partielle numéro 2007 / 001391 du 19 / 03 / 2007 accordée par le bureau d' aide juridictionnelle de MONTPELLIER)
COMPOSITION DE LA COUR :
L' affaire a été débattue le 14 JUIN 2007, en audience publique, M. Louis GERBET ayant fait le rapport prescrit par l' article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
M. Louis GERBET, Président
Madame Myriam GREGORI, Conseiller
Monsieur Jean- Luc PROUZAT, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Sophie LE SQUER
ARRET :
- Contradictoire.
- prononcé publiquement le 05 SEPTEMBRE 2007 par M. Louis GERBET, Président.
- signé par M. Louis GERBET, Président, et par Mme Sophie LE SQUER, Greffier présent lors du prononcé.
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FAITS ET PROCEDURE :
Mohamed Y... a été engagé en qualité de mécanicien par la SARL ORCA MARINE en 2005, d' abord par contrats de mission par l' intermédiaire de la société de travail temporaire OMTT puis, à compter du 2 mai 2005, par un contrat de travail intitulé « contrat de chantier (durée déterminée) », ledit contrat de travail indiquant qu' il exercerait ses fonctions sur le chantier « PORT DE LA CONDAMNINE » à MONACO.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 7 septembre 2005 la SARL ORCA MARINE le convoquait à un entretien préalable pour le 14 septembre suivant, en vue de son éventuel licenciement.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 16 septembre 2005, Mohamed Y... se voyait notifier son licenciement en ces termes :
« … Suivant contrat de travail à durée déterminée du 25 avril 2005, notre société vous a engagé à compter du 2 mai 2005, en qualité de mécanicien.
A cet effet, vous nous avez produit un CV justifiant de votre capacité professionnelle, indiquant que vous étiez apte à effectuer des réfections de moteurs, boîtes automatiques et circuits hydrauliques d' engins, de groupe diesel, de treuils de grues, d' engins de travaux publics.
Durant la période d' essai, il ne nous a pas été possible de vérifier l' état complet de vos connaissances par rapport à vos prétentions.
Par la suite, nous avons constaté qu' en ce qui concerne les engins, domaine essentiel pour lequel vous avez été engagé, vos connaissances étaient insuffisantes, si bien que nous sommes dans l' obligation de recourir fréquemment à notre mécanicien de Marseille.
Vous comprendrez aisément que nous ne pouvons assumer des charges supplémentaires du fait de vos connaissances nettement insuffisantes dans l' emploi que vous occupez.
Vous cesserez donc toute activité à l' issue du préavis d' un mois qui vous est dû, soit le 16 octobre 2005 … ».
Le 8 novembre 2005, Mohamed Y... a saisi le Conseil de Prud' hommes de SETE aux fins de voir juger abusive la rupture de son contrat de travail et d' obtenir paiement de dommages et intérêts.
Par décision en date du 7 décembre 2006 le Conseil de Prud' hommes a condamné la SARL ORCA MARINE à payer au salarié les sommes de 21 600, 00 euros pour licenciement abusif et de 1500, 00 euros sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La SARL ORCA MARINE a relevé appel de ce jugement.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES :
Par conclusions écrites réitérées oralement à l' audience, la SARL ORCA MARINE expose que le poste de mécanicien offert à Mohamed Y... l' a été pour la durée du chantier du Port de la Condamine, qu' il s' agit d' un contrat de chantier ayant, par nature, une durée indéterminée, et que le salarié ne peut se prévaloir, pour prétendre qu' il s' agit d' un contrat à durée déterminée, de la mention figurant au titre du contrat de travail.
Elle soutient que le licenciement est intervenu pour une cause réelle et sérieuse, à savoir l' insuffisance professionnelle de Mohamed Y..., et ce en contradiction avec les qualifications qu' il prétendait avoir au moment de son embauche.
Elle ajoute que lors des embauches de Mohamed Y... en qualité d' intérimaire, il n' avait été chargé que de petits travaux sous la direction du mécanicien de l' entreprise.
Elle demande par conséquent à la Cour d' infirmer la décision entreprise, de débouter Mohamed Y... de l' intégralité de ses prétentions et de le condamner au paiement d' une somme de 2000, 00 euros sur le fondement de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
En réplique, Mohamed Y... soutient avoir été engagé par contrat de travail à durée déterminée ne comportant ni son motif ni son terme et dont la rupture n' est pas intervenue en conformité avec les dispositions de l' article L 122- 3- 8 du Code du Travail.
Il demande par conséquent à la Cour de confirmer le jugement dont appel en son principe en ce qu' il déclare ladite rupture abusive, mais de porter à la somme de 25 000, 00 euros le montant des dommages et intérêts à lui allouer.
A titre subsidiaire, il entend voir requalifier la relation de travail en un contrat à durée indéterminée, voir juger infondé son licenciement dans la mesure où, après une période d' essai, l' employeur ne peut faire état d' une insuffisance professionnelle, et voir condamner la SARL ORCA MARINE à lui payer les sommes de 4000, 00 euros au titre de l' indemnité de requalification et de 25 000, 00 euros à titre de dommages et intérêts.
Il sollicite en tout état de cause la somme de 1500, 00 euros par application des dispositions de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
MOTIFS DE LA DECISION :
Le contrat de travail conclu pour la durée d' un chantier est un contrat à durée indéterminée à moins qu' il ne soit conclu dans l' un des cas énumérés à l' article L 122- 1- 1 du Code du Travail.
En l' espèce, le contrat de travail liant les parties est intitulé " contrat de chantier " et vise expressément le chantier « PORT DE LA CONDAMNINE » à MONACO.
Malgré l' indication " (durée déterminée) " il ne peut en aucun cas être qualifié de contrat à durée déterminée dans la mesure où il ne comporte aucune clause ou mention visant les cas de recours énoncés à l' article L 122- 1- 1.
Il s' agit par conséquent d' un contrat, par nature, à durée indéterminée dont il convient d' examiner la rupture.
L' insuffisance professionnelle, lorsqu' elle est alléguée comme fondant un licenciement, doit reposer sur des éléments concrets dont l' employeur doit faire la démonstration.
En l' espèce, Mohamed Y... a été engagé en qualité de mécanicien avec une rémunération brute mensuelle de 2950, 00 euros correspondant à une catégorie d' ouvriers bénéficiant d' une large autonomie dans la réalisation du travail.
Or, il ressort des pièces du dossier, tant des attestations versées au débat que des relevés téléphoniques et des relevés kilométriques des déplacements de Monsieur CORSO mécanicien à MARSEILLE, que celui- ci était contraint, très fréquemment, soit de se déplacer sur le site de MONACO sur lequel Mohamed Y... était en poste, soit de répondre à des appels téléphoniques de ce dernier, éléments démontrant que Mohamed Y... ne disposait pas de la compétence lui permettant d' exercer ses fonctions avec l' autonomie nécessaire telle que laissée entendre par son curriculum vitae.
Par ailleurs, si Mohamed Y... avait déjà travaillé pour le même employeur en qualité d' intérimaire, il apparaît qu' il ne l' a été que sur une très courte période (du 21 mars au 30 avril 2005) et pour l' exécution de travaux à MARSEILLE consistant en maintenance et entretien d' une barge et de matériel de levage.
Il convient par conséquent de juger que l' employeur démontre des faits justifiant le licenciement du salarié pour insuffisance professionnelle, d' infirmer la décision entreprise et de débouter Mohamed Y... de l' intégralité de ses prétentions.
Il n' y a pas lieu en la cause à application des dispositions de l' article 700 du Nouveau Code de procédure Civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort et après avoir délibéré,
En la forme, reçoit l' appel principal de la SARL ORCA MARINE.
Au fond,
réforme le jugement déféré et statuant à nouveau sur l' ensemble des demandes :
- JUGE que Mohamed Y... a été engagé par contrat de chantier, contrat de travail à durée indéterminée dès l' origine par nature ;
- JUGE le licenciement de Mohamed Y... fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
- Deboute Mohamed Y... de l' intégralité de ses prétentions ;
DIT n' y avoir lieu en la cause à application de l' article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
CONDAMNE Mohamed Y... aux éventuels dépens d' appel.