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25/04/2007 | FRANCE | N°06/00384

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 25 avril 2007, 06/00384


SLS / LG / CM
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4 chambre sociale

ARRET DU 25 Avril 2007



Numéro d'inscription au répertoire général : 06 / 06546

ARRET no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 OCTOBRE 2006 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE PERPIGNAN
No RG06 / 00384



APPELANT :

Monsieur Henri Marcel Chabanne Y...


...

34000 MONTPELLIER
Représentant : la SCPA PARRAT VILANOVA ARCHAMBAULT LLATI (avocats au barreau de PERPIGNAN)

INTIMEE :

Association DES OEUVRES DE PLEIN AIR DES JEUNESS

ES LAIQUES ET REPUBLICAINES
La Mauresque-Cap Gros
66660 PORT VENDRES
Représentant : Me BEYNET de la SELAFA CAPSTAN BARTHELEMY (avocats au bar...

SLS / LG / CM
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4 chambre sociale

ARRET DU 25 Avril 2007

Numéro d'inscription au répertoire général : 06 / 06546

ARRET no

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 OCTOBRE 2006 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE PERPIGNAN
No RG06 / 00384

APPELANT :

Monsieur Henri Marcel Chabanne Y...

...

34000 MONTPELLIER
Représentant : la SCPA PARRAT VILANOVA ARCHAMBAULT LLATI (avocats au barreau de PERPIGNAN)

INTIMEE :

Association DES OEUVRES DE PLEIN AIR DES JEUNESSES LAIQUES ET REPUBLICAINES
La Mauresque-Cap Gros
66660 PORT VENDRES
Représentant : Me BEYNET de la SELAFA CAPSTAN BARTHELEMY (avocats au barreau de MONTPELLIER)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 MARS 2007, en audience publique, M. Louis GERBET ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

M. Louis GERBET, Président
Madame Bernadette BERTHON, Conseiller
Mme Marie CONTE, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Sophie LE SQUER

ARRET :

-Contradictoire.

-prononcé publiquement le 25 AVRIL 2007 par M. Louis GERBET, Président.

-signé par M. Louis GERBET, Président, et par Mme Sylvie DAHURON, Greffier présent lors du prononcé.

*
**

FAITS ET PROCEDURE

Chabanne Y... a été recruté par contrat à durée indéterminée, à compter du 15 septembre 1993, en qualité d'éducateur spécialisé, par l'association Institut médico-technique " La Mauresque " (l'association IME LA MAURESQUE), en application de la convention collective nationale du 15 mars 1966.

Par courrier en date du 1er avril 2003, l'association IME LA MAURESQUE informe le salarié que : " La présente pour vous confirmer que votre contrat de travail est suspendu à compter du 25 mars 2003, et ce jusqu'à date indéterminée ".

Par courrier en date du 11 juin 2003, Chabanne Y... informe son employeur que : " Suite à notre rencontre ce jour, je vous confirme mon désir de réintégrer mon poste de travail dès que possible ".

Par courrier en date du 18 juin 2003, Chabanne Y... indique à son employeur que " pour ce qui est de la remise d'un document relatif à mon absence, je vous précise que vous avez été informer de mon indisponibilité, puisque votre courrier du 1er avril 2003 montre que vous avez accepter la suspension de mon contrat sans réserve et sans délai. "

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 18 juin 2003, l'association IME LA MAURESQUE indique au salarié : " j'ai pris acte de la suspension de votre contrat de travail, compte tenu de votre incarcération, mais vous comprendrez bien que je dois disposer d'un document officiel attestant de la durée et de la fin de cette détention provisoire, et qui marque la reprise de votre activité salariée à plein temps et de nos obligation respectives. "

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 25 juin 2003, l'association IME LA MAURESQUE convoque Chabanne Y... à un entretien préalable à un licenciement pour faute grave le 3 juillet 2003.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 25 juin 2003, présentée le 4 juillet 2003, Chabanne Y... informe son employeur " j'ai transmis les documents officiels à mon avocat pour déterminer le document justifiant mon dossier qui répondrai le mieux à votre demande et à la situation ".

Le 3 juillet 2003, Chabanne Y... remet à son employeur un certificat de présence émanant de la maison d'arrêt de Périgueux, en date du 10 juin 2003, indiquant qu'il " a été présent du 27 mars 2003 au 10 juin 2003 ".

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 5 juillet 2003,

Y... se voit notifier son licenciement pour faute grave dans les termes suivants :

" Comme suite à l'entretien que nous avons eu le 03 juillet 2003, en application de l'article L. 122-14 du Code du Travail, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave et ceci pour les motifs exposés lors de cet entretien, a savoir :
Le 11 juin 2003, vous avez demandé à occuper à nouveau votre poste de travail en qualité d'éducateur spécialisé au sein de notre association alors que votre contrat de travail avait été suspendu, suite à votre incarcération depuis le 25 mars 2003.
Nous vous avons alors demandé de nous transmettre immédiatement un document officiel attestant de la durée et de la fin de cette période de suspension pour détention. Par lettre du 19 juin 2003, nous avons dû vous relancer.
Devant votre refus de nous transmettre le moindre document et compte tenu de la gravité de la situation, nous avons été contraints de vous convoquer à un entretien préalable à un éventuel licenciement sans préavis ni indemnité.
Ce n'est que lors de l'entretien préalable le 3 juillet 2003 que vous nous avez finalement remis un certificat de présence de l'administration pénitentiaire attestant de votre incarcération du 27 mars au 10 juin 2003, certificat pourtant daté du 10 juin 2003 !
Votre refus de justification atteste pour le moins d'une volonté de ne pas respecter votre obligation de loyauté résultant de votre contrat de travail et qui implique de justifier de toute absence.
Compte tenu de la responsabilité éducative que requiert votre fonction et de la fragilité des enfants accueillis au sein de notre institution dont certains sont en voie de pré délinquance, il nous paraît manifestement impossible de maintenir votre contrat de travail.
En effet, votre retour dans l'établissement a causé un trouble important au sein du personnel et des jeunes handicapés que nous accueillons en raison de la légitime inquiétude suscitée par la révélation de votre incarcération et des faits qui en étaient à l'origine.
Votre rôle d'autorité et de nécessaire exemplarité auprès d'enfants et d'adolescents, qui permet seul de gérer les personnes à charge au sein de notre établissement, est réduit à néant.
Ce licenciement prenant effet immédiatement, nous vous adressons, par courrier séparé, le solde de votre compte, votre certificat de travail et l'attestation destinée à l'ASSEDlC. "

Chabanne Y... a saisi le Conseil de Prud'hommes de Perpignan aux fins de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse, de condamner l'association IME LA MAURESQUE à la remise d'une attestation ASSEDIC, d'un bulletin de paye conforme à la décision à intervenir, sous astreinte de 50 € par jour de retard, d'ordonner l'exécution provisoire et de la condamner au paiement des sommes suivantes :

-50. 000 € au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-4. 690, 66 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 469, 06 € pour les congés payés y afférent,
-11. 726, 55 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
-1. 000 € au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.
Par jugement en date du 4 octobre 2006, le Conseil de prud'hommes de Perpignan a jugé le licenciement parfaitement justifié du fait qu'il n'a pas justifié en temps utile des motifs de la détention et pour avoir porté atteinte au bon fonctionnement de l'entreprise, a débouté Chabanne Y... de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné à payer à l'association IME LA MAURESQUE la somme de 200 € au titre de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens.

Chabanne Y... a régulièrement interjeté appel de cette décision.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions écrites auxquelles il convient de se référer pour l'exposé complet de ses moyens et arguments, demande à la Cour de réformer le jugement et de condamner l'association IME LA MAURESQUE au paiement des sommes déjà demandées en première instance et à 1. 500 € au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Il prétend que l'employeur ne pouvait ignorer le motif de son absence, sa détention provisoire, que son retard dans la communication du document adéquat est justifié par sa volonté de ne pas violer le secret de l'instruction et non par son refus de justifier de son absence, d'où la remise du certificat de présence à la maison d'arrêt uniquement le jour de son entretien préalable.
Il affirme en outre que la révélation de l'incarcération au personnel et aux jeunes de l'association ne peut être le fait que de son employeur, s'agissant de faits intervenus dans une autre ville.
Il réfute l'existence d'un trouble dans l'entreprise, qu'au contraire, membre de la communauté des harkis, il était très apprécié de ses collègues et des jeunes sous sa responsabilité, qu'il ne lui a d'ailleurs pas été interdit dans le cadre du contrôle judiciaire de ne plus travailler à leur contact.

En réplique, l'association IME LA MAURESQUE sollicite de la Cour de confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Perpignan en toutes ses dispositions, de dire et juger le licenciement de Chabanne Y... justifié par une faute grave et de condamner Chabanne Y... au paiement de 2. 000 € au titre de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Elle prétend que le salarié a manqué à son obligation de loyauté en obtenant la suspension de son contrat de travail au motif de sa détention provisoire, sans lui remettre de justificatif de son absence, contrairement au règlement intérieur, aux engagements en tant qu'établissement social et à la Convention collective applicable qui exige de tout salarié la justification de toute absence dans un délai de 2 jours.
En outre, elle prétend qu'alors que ce dernier souhaitait réintégrer son poste, il a fourni tardivement un document insuffisant, ce dernier ne donnant pas de précision sur la justification de son absence, notamment sur l'existence éventuelle d'un contrôle judiciaire, alors que la mission du salarié est l'éducation de jeunes handicapés.

Elle soutient que son absence a causé un trouble caractérisé dans l'entreprise, la durée de son absence ne lui ayant pas été communiquée et provoquant des difficultés pour le remplacer et une perturbation chez les enfants.
Elle affirme en outre ne pas être à l'origine de la révélation de l'incarcération du salarié et d'une quelconque violation de sa vie privée, ce que reconnaît le salarié lui-même dans ses conclusions en affirmant que son employeur ne connaissait pas le motif de son incarcération au moment de son licenciement, mais que plusieurs salariés ont été entendus, les gendarmes se sont déplacés sur les lieux, ainsi que des associations de défense des harkis intervenus le 3 juillet 2003 à la demande du salarié selon elle, créant ainsi un trouble qu'il lui appartenait de faire cesser. Enfin, elle prétend que la condamnation définitive du salarié en date du 22 novembre 2005 met en exergue son manque de probité pendant plusieurs années envers la collectivité nationale, causant nécessairement un trouble au sein de l'association en raison de la mission particulière qui lui est impartie.

SUR CE, LA COUR

Sur le licenciement pour faute grave :

Il appartient à l'employeur de prouver la faute grave qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de fait imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

En l'espèce, l'absence du salarié a caractérisé un trouble dans l'organisation et le fonctionnement de l'entreprise par l'absence de production dans un délai raisonnable d'un justificatif précisant la durée de son absence contrairement à la convention collective applicable, justificatif que le salarié n'a fourni que le 3 juillet 2003, date de l'entretien préalable au licenciement, alors qu'il datait du 10 juin 2003, faisant ainsi preuve d'un manquement manifeste à son obligation de loyauté envers son employeur.

En outre, la révélation de l'incarcération du salarié, dont le salarié ne rapporte pas la preuve d'être imputable à son employeur, a causé un trouble objectif caractérisé au sein de l'association, s'agissant d'un éducateur à qui il appartenait de donner l'exemple aux jeunes handicapés envers qui il avait des obligations renforcées d'éducation et en raison de l'atteinte à la crédibilité et à l'image de cet établissement spécialisé envers les familles et les organismes de tutelle.

Par conséquent, le licenciement de Chabanne Y... est fondé sur faute grave.

Sur les conséquences de la rupture :

Il convient par conséquent de débouter Chabanne Y... de l'ensemble de ses demandes.

Sur l'article 700 du Nouveau code de procédure civile :

L'équité commande qu'il ne soit pas fait application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

Qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de l'association IME LA MAURESQUE.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort et après avoir délibéré,

En la forme,

Reçoit Chabanne Y... en son appel,

Au fond,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 06/00384
Date de la décision : 25/04/2007
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Perpignan


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2007-04-25;06.00384 ?
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