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13/12/2006 | FRANCE | N°1993

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Ct0015, 13 décembre 2006, 1993


DV/DICOUR D'APPEL DE MONTPELLIER4 chambre sociale

ARRET DU 13 Décembre 2006

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/02232

ARRET no
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 FEVRIER 2006 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MONTPELLIER No RG04/00417

APPELANTES :

SARL WAVELIGHT LASER prise en la personne de son représentant légal en exercice,AM WOLFSMANTEL 4691058 ERLANGEN (ALLEMAGNE)Représentant : Me COUNES substituant la SCP WEISSBERG - GAETJENS - ZIEGENFEUTER et ASSOCIES (avocats au barreau de PARIS)

Société WAVELIGHT LASER TECHNOLOG

IE AGD 91058 ERLANGENAM WOLFSMANTEL - 5 ALLEMAGNEReprésentant : Me COUNES substituant la SCP WEISSBER...

DV/DICOUR D'APPEL DE MONTPELLIER4 chambre sociale

ARRET DU 13 Décembre 2006

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/02232

ARRET no
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 FEVRIER 2006 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MONTPELLIER No RG04/00417

APPELANTES :

SARL WAVELIGHT LASER prise en la personne de son représentant légal en exercice,AM WOLFSMANTEL 4691058 ERLANGEN (ALLEMAGNE)Représentant : Me COUNES substituant la SCP WEISSBERG - GAETJENS - ZIEGENFEUTER et ASSOCIES (avocats au barreau de PARIS)

Société WAVELIGHT LASER TECHNOLOGIE AGD 91058 ERLANGENAM WOLFSMANTEL - 5 ALLEMAGNEReprésentant : Me COUNES substituant la SCP WEISSBERG - GAETJENS - ZIEGENFEUTER et ASSOCIES (avocats au barreau de PARIS)

INTIMEE :
Madame Danielle Y......34500 BEZIERSReprésentant : Me Fabien .MARTELLI (avocat au barreau de MONTPELLIER)

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 15 NOVEMBRE 2006, en audience publique, Monsieur Daniel ISOUARD ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Daniel ISOUARD, Président de ChambreMadame Bernadette BERTHON, ConseillerMme Marie CONTE, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Dominique VALLIER

ARRET :
- Contradictoire.

- prononcé publiquement le 13 DECEMBRE 2006 par Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre.
- signé par Monsieur Daniel ISOUARD, Président de Chambre, et par Mme Sophie LE SQUER, Greffier présent lors du prononcé.
** *

EXPOSÉ DU LITIGE :

La société WAVELIGHT, société de droit allemand dont l'activité consiste en la vente de matériel laser destiné aux secteurs médical et esthétique, a engagé le 24 janvier 2002, comme cadre dirigeant, Madame Danielle Y... avec pour fonctions de collaborer à la création d'une filiale française de cette société puis d'en assurer la direction opérationnelle.
Le 13 mai 2002, Madame Y... est passée au service de la société WAVELIGHT Laser, filiale française de la société WAVELIGHT de droit allemand.
Par lettre du 6 février 2004, la société WAVELIGHT Laser a licencié Madame Y... pour faute grave lui reprochant de nombreuses dépenses personnelles réglées avec la carte de crédit de la société.

Par jugement du 21 février 2006, le conseil de prud'hommes de Montpellier a condamné la société WAVELIGHT de droit allemand à payer à Madame Y... les sommes de :- 60 000 euros de dommages-intérêts pour licenciement abusif,- 51 154, 10 euros d'indemnité compensatrice de préavis et de 5 115, 11 euros d'indemnité de congés payés afférente,- 102 308, 21 euros d'indemnité de licenciement,- 2 990, 56 euros de rappel de salaire pour la période de mise à pied,- 1 500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Le 27 mars 2006, la société WAVELIGHT et la société WAVELIGHT Laser ont interjeté appel de cette décision. Elles sollicitent son infirmation, le débouté de Madame Y... de ses prétentions et sa condamnation au paiement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.
Elles soutiennent que cette salariée a utilisé à de nombreuses reprises la carte de crédit qui lui avait été remise afin de régler ses frais professionnels pour des dépenses personnelles, que ce comportement succédant à des remontrances relatives au montant des commissions qu'elle s'était versé, constitue une faute grave.
Subsidiairement, elles demandent le rejet de la demande en dommages-intérêts en raison du motif réel et sérieux du licenciement et soulignent l'absence de préjudice. Elles prétendent que les indemnités de préavis et de licenciement doivent être cantonnées aux sommes respectives de 46 410, 96 euros et 92 821, 92 euros et que la demande d'indemnité de congés payés est dénuée de fondement.
Formant appel incident, Madame Y... conclut à la condamnation solidaire des sociétés WAVELIGHT et WAVELIGHT Laser à lui payer les sommes de :- 306 924, 63 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,- 12 007, 58 euros d'indemnité compensatrice de congés payés,- 51 154, 10 euros d'indemnité de préavis,- 5 115, 41 euros d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,- 102 308, 21 euros d'indemnité de licenciement,- 2 950, 56 euros der rappel de salaire relatif à la mise à pied,- 2 000 euros par application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Tout d'abord, elle argue de la tardiveté de la sanction car la maison mère recevait chaque mois les documents comptables.

Ensuite, après avoir rappelé que seuls les faits énoncés à la lettre de licenciement peuvent être invoqués pour justifier celui-ci, ce qui n'est pas le cas de deux d'entre eux figurant aux conclusions des sociétés WAVELIGHT, elle nie l'utilisation de sa carte de crédit professionnelle pour des dépenses personnelles et prétend que son ancien employeur ne rapporte pas cette preuve qui lui incombe.

* ** * ** *

MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur le licenciement :
Il ressort des articles L. 122-14-2 et L. 122-14-3 du Code du travail que le licenciement d'un salarié doit reposer sur une cause réelle et sérieuse énoncée par la lettre de licenciement.
La faute grave se définit comme celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis. Sa preuve incombe à l'employeur.
La lettre de licenciement du 6 février 2004 énonce :"Il résulte de cet audit (du 22 janvier 2004) que vous avez fait supporter à la société, à de nombreuses reprises, des dépenses personnelles, ce que nous ne pouvons pas tolérer ; nous pouvons à ce titre citer par exemple :. Des frais de restauration ou d'hébergement ne pouvant être liés à votre activité professionnelle (par exemple les samedi ou dimanche 15.11, 12.10, 22.06, 21.06, 26.04, 12.04, 13.04, 30.03, 15.03, 01.03, 22.02, 02.02, 12.01.2003, 29.12, 28.12, 15.12.2002, séjour du 28.06 au 02.07.2003, ...) ;. Une prise en charge par la société de factures de votre téléphone privé ou l'utilisation du téléphone de la société à des fins privées (par exemple factures personnelles France Télécom -15.11, 15.09 et 28.06.2003-, factures société des 17.10 et 22.08.2003 - appels vers l'Italie, appels des Etats-Unis-) ;. Des locations de véhicules (du vendredi 10.10 au lundi 13.10.2003, du vendredi 05-09 au mardi 10.09, du vendredi 09.05 au dimanche 11.05, du vendredi 28.03 au samedi 29-03 - conducteur Mr Y... Alain-) ;. Des dépenses d'entretien courant et des cadeaux (sous-vêtements - 01-12-2003-, cigarettes -02.11.2003-, produits d'hygiène -09.01.2003-, accessoires photo -24.12.2003-, fleurs -11.01.2003, ...) ;. Du matériel informatique (Palm et accessoires le 13.02.2003)."

Madame Y... se prévalant des dispositions de l'article L. 122-44 du Code du travail qui énonce qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, expose que les dépenses reprochées sont antérieures de plus de deux mois à la convocation du 26 janvier 2004 à l'entretien préalable au licenciement et que son employeur les connaissait car tous les mois les factures de la société WAVELIGHT Laser étaient adressées à la maison mère.
Mais l'examen des factures ne permettait d'apprécier que la réalité des dépenses sans connaître leur affectation et sans distinguer celles générées par l'activité sociale et celles qui correspondraient à des frais personnels de Madame Y.... Cette distinction qui exige des recoupements n'a pu être faite que par l'audit financier réalisé le 22 janvier 2004.
Ainsi la société WAVELIGHT n'a eu connaissance de faits qu'elle invoque que moins de deux mois avant l'engagement des poursuites disciplinaires ; celles-ci ne souffrent d'aucune irrégularité quant à leur date.
La société WAVELIGHT produit le rapport d'audit daté du 3 février 2004 et les justifications des dépenses qu'il relève comme n'entrant pas dans le cadre de sa gestion.
À l'exception de la location d'un véhicule au Maroc du 9 au 11 mai 2003 visé par la lettre de licenciement contrairement à ce qu'elle soutient, d'une location de véhicule du 5 au 10 septembre 2003 et du repas du 15 novembre 2003, Madame Y... ne produit aucun élément montrant que les dépenses effectuées sur le compte de la société WAVELIGHT Laser se rapportaient à l'activité de cette société.
Pour la plupart, ces dépenses ont été effectuées le samedi ou le dimanche et s'il arrivait à Madame Y... de travailler ces jours-là où ses clients (médecins, esthéticiennes) étaient libres, rien ne démontre une activité fréquente les fins de semaine et notamment les jours de leur engagement.
Existent des communications téléphoniques pour une somme certes modeste de 9, 35 euros à destination de l'Italie et d'Israël alors qu'aucun client ne se trouve dans ces deux pays. Également ont été passées sur le compte social des communications téléphoniques des Etats-Unis où Madame Y... se trouvait en vacances vers la France ; elle prétend que même durant ses congés elle continuait en rester en relation avec ses clients, mais leur nombre (une cinquantaine en sept jours) ne permet pas de retenir cette assertion que rien n'appuie.
La dépense de lingerie bien que modeste (15, 20 €) n'a aucune explication professionnelle.
Rien n'accrédite non plus les autres assertions de Madame Y... relatives au caractère professionnel des dépenses reprochées.
L'engagement par un salarié sur le compte de son employeur de dépenses étrangères aux charges de l'entreprise et relatives à des besoins personnels constitue un manquement grave à ses obligations.
Cette gravité s'avère en l'espèce renforcée par l'existence d'une précédente mise en garde courant 2003 sur le montant des avances sur commissions que Madame Y... s'était accordé obligeant une modification du contrat de travail, par l'importance de ses fonctions qui exigent de la rigueur et par la nationalité étrangère de la maison mère rendant plus faciles les dissimulations.
Ainsi les agissements de Madame Y... constituent une faute grave.
En conséquence, ses demandes relatives aux dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au préavis et à l'indemnité de congés payés sur préavis, à l'indemnité de licenciement et au paiement des jours de mise à pied doivent être rejetées.
Sur l'indemnité compensatrice de congés payés :
Le licenciement pour faute grave ne fait pas perdre au salarié son droit aux congés payés.
Madame Y... réclame une indemnité compensatrice de congés payés de 12 007, 38 euros.
Lors son licenciement a été établi un décompte des sommes lui restant dues prenant en compte une indemnité de congés payés de 10 268, 54 euros. La société WAVELIGHT Laser ne fournit aucun élément relatif au calcul de cette somme.
Au contraire, Madame Y... produit un décompte des salaires perçus durant la totalité de la période de travail, du nombre de jours de congés payés acquis et pris et de la somme restant due pour chacune des trois périodes ouvrant droit à ces congés. Ce décompte circonstancié conforme aux dispositions sur les congés payés, ne fait l'objet d'aucune critique de la part de l'employeur.
Ainsi les droits à congés payés restant dus pour la période travaillée se chiffrent à la somme de 12 007, 38 euros. Madame Y... n'ayant perçu lors de son licenciement que la somme de 10 268, 54 euros reste créancière de 1 738, 84 euros à laquelle la société WAVELIGHT Laser, son employeur seul débiteur de cette somme lors du licenciement, doit être condamné à lui payer avec intérêts à compter du 2 mai 2005, date de dépôt des conclusions de Madame Y... chiffrant pour la première fois cette demande.

L'équité commande de laisser à la charge de chacune des parties le montant de ses frais non compris dans les dépens.

Succombant à l'essentiel de ses demandes, Madame Y... doit être condamnée aux dépens.
* ** * ** *

PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;
Réforme le jugement du 21 février 2006 du conseil de prud'hommes de Montpellier ;
Statuant à nouveau :
Déclare le licenciement de Madame Y... fondé sur une faute grave ;
Déboute Madame Y... de ses demandes relatives à son licenciement ;
Condamne la société WAVELIGHT Laser à payer à Madame Y... la somme de 1 738,84 euros de solde d'indemnité compensatrice de congés payés avec intérêts à compter du 2 mai 2005 ;
Rejette les demandes au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;
Condamne Madame Y... aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Ct0015
Numéro d'arrêt : 1993
Date de la décision : 13/12/2006

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Montpellier, 21 février 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2006-12-13;1993 ?
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