Madame Micheline X... épouse Y... DE BORNIER, Messieurs Jacques et Philippe X... (les consorts X...), héritiers de Claire X..., ont assigné le directeur des services fiscaux de l'Hérault pour obtenir décharge des droits et pénalités mis en recouvrement à raison de la réintégration dans l'actif successoral de la défunte d'une somme correspondant à une dette d'emprunt de 1 111 125,69 F inscrite au passif de la succession. Par jugement rendu le 2 septembre 2003, auquel il est expressément référé pour un exposé complet des faits et de la procédure antérieure, le Tribunal de Grande Instance de Montpellier a débouté les consorts X... de l'intégralité de leurs demandes et les a condamnés aux dépens, en retenant que la procédure de redressement engagée par l'administration fiscale à leur encontre était régulière en la forme et bien fondée. Les consorts X... ont interjeté appel le 3 octobre 2003. Vu les dernières conclusions d'appel notifiées le 2 août 2005 aux fins d'infirmation du jugement entrepris, par lesquelles les consorts X... soutiennent : - à titre principal, que la procédure est entachée d'irrégularité de fond, en raison du défaut de motivation des notifications de redressement, notamment en ce qu'elles ne visent pas les articles 578 et 606 du Code civil, 768 et 777 du Code général des impôts, ce qui entraîne la nullité du redressement et la décharge des impositions réclamées, - à titre subsidiaire, que les avis de mise en recouvrement des 09 et 28 février 1995, et les mises en demeure des 28 février et 08 mars 1995 sont nuls, faute d'indications suffisantes conformes à l'article R.256-1 du Livre des procédures fiscales quant aux éléments de calcul des droits et des pénalités de retard, de sorte qu'il convient de prononcer la décharge desdits droits, pénalités et intérêts de retard, - à titre encore plus subsidiaire, et au fond, que les travaux entrepris par l'usufruitière correspondent à son obligation
d'entretien et à la nécessité de conservation de l'immeuble, et non à des travaux de grosses réparations incombant aux propriétaires au sens de l'article 606 du Code civil, de sorte que les redressements notifiés sont infondés, et qu'il y a lieu de condamner la DGI à rembourser à chacun des requérants les sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire, avec intérêt au taux légal à compter du versement, et à payer en outre la somme de 4 000 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, Enfin, et à titre infiniment subsidiaire, les consorts X... demandent que soit ordonnée une expertise aux fins de déterminer, parmi les travaux réalisés, la part de ceux qui relèvent de l'entretien, des améliorations, et des grosses réparations. Vu les dernières conclusions notifiées le 17 décembre 2004 par le Directeur des services fiscaux de l'Hérault, qui demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris et condamner les consorts X... aux entiers dépens ainsi qu'à une somme de 2 000 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. SUR QUOI L'article L.57 du Livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à l'époque des faits, stipule qu'en cas de redressement, l'administration adresse au contribuable une notification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Il est constant qu'en application de ce texte, l'administration fiscale est tenue de préciser dans la notification, le fondement du redressement en droit comme en fait, et spécialement de mentionner les textes sur lesquels elle s'appuie concernant la cause et les conséquences du redressement, de telle sorte que le contribuable puisse prendre position en toute connaissance de cause. En l'espèce, les consorts X... considèrent que les notifications adressées les 14 et 15 juin 1994 sont insuffisamment motivées en droit, dans la mesure notamment où ne sont pas cités les articles 768
et 777 du Code général des impôts (CGI) relatifs aux dettes admises au passif de la succession et au tarif applicable aux droits de mutation à titre gratuit. Il ressort des termes de la notification du redressement contesté que celui-ci trouve son origine dans la non admission au passif de la succession de Claire X... d'un prêt obtenu par la défunte pour financer des travaux dans des appartements donnés à ses neveux et héritiers en nue-propriété et dont elle avait l'usufruit. Or, l'article 768 du CGI, au chapitre des dispositions spéciales aux successions, en énonçant sous le titre "passif déductible" que "les dettes à la charge du défunt sont déduites lorsque leur existence au jour de l'ouverture de la succession est dûment justifiée par tous modes de preuve compatibles avec la procédure écrite", édicte les règles de déductibilité des dettes en matière successorale, ce dont il s'évince qu'il régit l'imposition réclamée. En effet, l'administration fiscale, en considérant qu'il n'était pas justifié de ce que l'emprunt déclaré au passif de la succession de Claire X... constituait une dette à la charge de la défunte, a nécessairement fait application de ce texte, sans toutefois le viser. Dès lors, en l'absence de référence à l'article 768 du CGI, qui constitue au cas d'espèce le fondement légal du redressement, l'administration fiscale n'a pas mis les redevables en mesure de discuter les notifications de redressement en toute connaissance de cause conformément à l'article L.57 du LPF, de sorte que ces notifications sont nulles et de nul effet. Par voie de conséquence, il y a lieu d'infirmer le jugement déféré, d'annuler les avis de mise en recouvrement en date des 31 janvier et 13 février 1995, et d'ordonner à l'administration des impôts de rembourser à chacun des requérants les sommes versées en exécution provisoire du jugement dont appel. Par application de l'article 1153 du Code civil, lesdites sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la
signification, valant mise en demeure, de la présente décision ouvrant droit à restitution. En application de l'article 696 du nouveau code de procédure civile, les entiers dépens doivent être mis à la charge de l'administration des impôts. PAR CES MOTIFS, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Infirme le jugement déféré, et, statuant à nouveau, Annule les avis de mise en recouvrement contestés, Condamne le Directeur des services fiscaux de l'Hérault à restituer aux consorts X... les sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement déféré, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt, Déboute les parties de leurs demandes respectives sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, Condamne le Directeur des services fiscaux de l'Hérault aux entiers dépens d'appel, qui seront distraits par la SCP ARGELLIES, TRAVIER, WATREMET, avoués, dans les conditions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. LE GREFFIER
LE PRESIDENT