PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES Par acte reçu le 23 février 1943 par Maître EDARD, notaire à NIMES, Joseph X... a institué son épouse née Marguerite Y... donataire universelle des biens composant sa succession en l'absence d'héritiers réservataires. Joseph X... est décédé, sans enfants, le 11 septembre 1998. Marguerite Y... veuve X... est décédée à son tour le 24 décembre 1998 en l'état d'un testament olographe instituant pour sa légataire universelle Simone CHAZAL-MARTIN.Cette dernière a été envoyée en possession de son legs universel par ordonnance du juge du Tribunal de Grande Instance d'ALES du 13 avril 1999. Maître BLANC-POUJOL, notaire à SETE, a dressé le 16 septembre 1999 un acte de dépôt d'un testament olographe daté du 15 septembre 1983,par lequel feu Joseph X... a institué comme légataires universels ses neveux, Raymond X... et Laurette X... épouse Z.... ***** C'est dans ces conditions que Raymond X... et Laurette X... épouse Z... ont fait assigner, par acte du 14 février 2000, Simone A... devant le Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER aux fins de voir déclarer nulle l'attestation immobilière authentifiant le règlement successoral réalisé au profit de Mme A..., d'ordonner le partage et la liquidation de la communauté ayant existé entre M.BOUTEILLER et son épouse et de se voir envoyer en possession de la succession de feu Joseph X.... Par jugement rendu le 4 février 2003,le Tribunal a notamment : -
Constaté que le testament olographe établi par Joseph X... le 15 septembre 1983 a révoqué la donation entre époux consentie à Marguerite Y... épouse X... le 23 février 1943 ; -
Dit que le testament olographe établi par Joseph X... le 15 septembre 1983 a institué Raymond X... et Laurette X... épouse Z... légataires universels de Joseph X..., et, en conséquence, les envoie en possession ; -
Constaté que l'immeuble sis à SETE Section BO N°127 dépend pour partie de la succession de Joseph X... pour avoir été acquis par les époux X... -Y... le 29 juin 1965 pendant leur mariage et sous le régime de la communauté et, en conséquence : -
Déclaré nulle l'attestation immobilière dressée le 15 juin 1999 en l'étude de Maître D'ABRIGEON, notaire à ALES, et publiée à la conservation des hypothèques de MONTPELLIER en ce qu'elle atteste que ledit bien est la propriété de Mme A... seule ; -
Dit que Mme A... est tenue à la restitution des fruits et revenus de la succession de Joseph X... à compter du 24 décembre 1998; -
Ordonné l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la communauté ayant existé entre les époux B... ainsi que l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la succession de Joseph X... ; -
Ordonné une expertise aux fins de déterminer la consistance et la valeur de la communauté ayant existé entre les époux X... -Y... et, par voie de conséquence, de la succession de Joseph X... ; ***** Simone A... a régulièrement interjeté appel de cette décision. Par conclusions du 21 mai 2004,elle demande à la C..., réformant la décision querellée : -
De dire et juger, en l'état de la dénégation d'écriture qu'elle formule expressément qu'il existe un doute sérieux quant à l'authenticité de l'origine de l'acte comme émanant de M.Joseph X... ; -
De dire et juger, au surplus, que ce document est ambigu tant dans ses termes que dans ses conséquences implicites à l'égard des autres documents successoraux applicables ; -
De dire et juger, qu'eu égard à cette ambigu'té et en l'absence de date certaine permettant d'apprécier les conditions dans lesquelles
ce document a été rédigé, rien ne permet d'affirmer qu'il exprime une volonté claire et cohérente d'annuler la donation entre époux du 23 février 1943; -
De dire et juger, notamment, qu'aucune des dispositions contenues dans le texte testamentaire ne s'opposait à la mise en ouvre de la donation entre époux à la date du décès de Joseph X..., et qu'en particulier, le testateur n'a pas voulu qu'à cette date les neveux faussement désignés par lui comme futurs ou potentiels héritiers légaux, soit attributaires de la nue propriété de ses biens; -
De dire et juger qu'en aucun cas Raymond X... et Laurette X... épouse Z... n'ont été désignés comme légataires testamentaires directs de Joseph X...; -
De dire et juger que la désignation par Joseph X... de Raymond X... et Laurette X... épouse Z... comme légataires après le décès de son épouse constitue, en tout état de cause, un acte de substitution prohibé par l'article 896 du Code civil et, à ce titre, ne saurait faire de ces derniers des légataires réguliers; -
De rejeter, en conséquence, l'ensemble des demandes des intimés et de dire n'y avoir lieu à partage ni, a fortiori à une mesure d'expertise préalable à ce dernier ; Subsidiairement, -
Si le testament invoqué devait par impossible produire effet, de dire et juger que les fruits successoraux ne seront dus qu'à compter du jour où la décision de justice donnant effet au dit testament deviendra définitive ; En tous les cas, -
De condamner les intimés au paiement de la somme de 20.000,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ; ***** Raymond X... et Laurette X... épouse Z... ont notifié le 2 juin 2004 des écritures tendant à voir : -
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement querellé; Y
ajoutant, -
Condamner Simone A... au paiement de la somme de 1.200,00 Euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ; ***** M O T I FS DE LA D... À
Sur la validité du testament olographe daté du 15 septembre 1983 :
Maître BLANC-POUJOL, notaire à SETE, a dressé le 16 septembre 1999 un acte de dépôt d'un testament olographe dans lequel il est indiqué que feu Joseph X... " avait confié, de son vivant, à l'Etude dont est titulaire le Notaire soussigné, un testament en date du 15 septembre 1983,rédigé sur une feuille de papier blanche quadrillée et comportant douze ligne au recto uniquement, en sus de la signature, et ne comportant aucune rature. " L'appelante ne produit aux débats aucun élément susceptible de permettre de remettre en cause les mentions portées sur cet acte. Il sera rappelé, à cet égard, que le défaut d'inscription au Fichier Central des Dernières Volontés n'a aucune conséquence quant à la validité des dispositions testamentaires, cette inscription étant une faculté offerte aux notaires et non une obligation mise à leur charge. Le premier juge, par des motifs pertinents et circonstanciés que la C... fait siens, a retenu, après avoir procédé à la comparaison de la graphie de l'écriture du testament et celle de pièces émanant du de cujus versées aux débats par les parties, que ces documents étaient de la même main. En l'état de l'authenticité de l'écriture du testament, la date porté sur cet acte doit être tenue pour exacte, aucun moyen de preuve de la fausseté de cette date, ayant sa racine dans le testament lui-même, n'étant invoqué en l'espèce. Par ailleurs, rien ne permet, au vu des éléments produits aux débats, de mettre en doute, ainsi que le soutient Mme CHAZAL Y..., la santé physique et mentale du défunt au moment de la rédaction du document litigieux ; étant rappelé, sur ce point, que la charge de la preuve de l'insanité
d'esprit du testateur incombe à celui qui conteste la validité du testament. Enfin, il ne peut être tiré aucune conséquence de la découverte tardive du testament quant à sa validité. Il sera relevé que Joseph X... est décédé le 11 septembre 1998 et sa veuve trois mois plus tard (22 décembre 1998) sans que la succession de son époux ait été ouverte. L'acte de dépôt a été dressé par Maître BLANC-POUJOL le 16 septembre 1999, après qu'il ait eu connaissance du décès (cf. Extrait de l'acte de décès de Joseph X... délivré le 14 mai 1999 par la Mairie de SETE annexé au procès verbal de dépôt du testament). Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a dit que le testament établi le 15 septembre 1983 par feu Joseph X... doit être tenu pour valable. À
Sur la portée du testament : Il est constant que, préalablement au testament du 15 septembre 1983,le de cujus avait consenti à son épouse, le 23 février 1943, une donation, en l'absence de descendants en ligne directe, de la pleine propriété de tous les biens composant sa succession. L'institution contractuelle entre époux faite pendant le mariage est révocable. Elle constitue, comme le testament, une libéralité à cause de mort par laquelle le gratifié n'acquiert, au moment de l'acte, aucun droit sur les biens de l'instituant mais est seulement investi d'un titre successif. Une telle donation peut, dès lors, être révoquée par un legs ultérieur. Il appartient au juge, pour déterminer, si entre les dispositions d'une libéralité contractuelle de biens à venir entre époux et d'un testament postérieur, se rencontre l'incompatibilité ou la contrariété nécessaire pour entraîner l'annulation des dispositions antérieures par la libéralité nouvelle, d'interpréter la volonté du testateur et les termes de l'acte au regard des circonstances de la cause. Le testament olographe daté du 15 septembre 1983 est rédigé dans les termes suivants : " Ceci est mon testament, Je soussigné Joseph Henri
X..., né le 3 février 1901 à Trèves Gard, lègue à ma femme née Marguerite Inès Y... née à Alès le 10 avril 1910 tous mes biens en usufruit sa vie durant. A sa mort tous mes biens iront de plein droit à mes neveux directs Raymond X... et Laurette X... épouse André Z... E... testament annule tout précédent. Fait à Sète le 15 septembre 1983. " Il sera relevé, au préalable, que, dans cet acte, le de cujus révoque expressément tout testament antérieur. Le testateur indique qu'il lègue à sa femme, sa vie durant, l'usufruit de ses biens. Cette disposition est plus restrictive que celle qui instituait dans l'acte du 23 février 1943 l'épouse comme donataire de l'universalité des biens composant sa succession, la nue-propriété en étant exclue. L'objet du legs fait par Joseph X... à son épouse est parfaitement déterminé : Le de cujus ayant entendu la gratifier en usufruit seulement. La seule circonstance que le ou les bénéficiaires de la nue-propriété ne sont pas expressément désignés est sans influence sur la validité de ce legs. La première partie du testament est complétée et éclairée par la deuxième phrase qui dispose qu'à la mort de Mme X... la totalité des biens du de cujus " iront de plein droit " à ses neveux directs. Il ne peut être tiré de l'utilisation de la forme verbale du futur une quelconque restriction quant à l'étendue des droits que Joseph X... a entendu léguer à ses neveux. Une telle formulation a, en effet, pour but d'indiquer qu'à la mort de l'épouse, légataire de l'usufruit sa vie durant, Raymond X... et Laurette X... seront investis de la pleine propriété des biens légués (nue-propriété et usufruit). Il s'évince de ces constatations que de cujus a entendu gratifier son épouse en usufruit seulement, afin qu'après le décès de celle-ci la pleine propriété de ses biens revienne à son neveu et sa nièce institués nus-propriétaires. L'article 899 prescrit qu'un double legs en usufruit et en nue-propriété ne doit pas être regardé comme une
substitution et est valable. Tel est le cas en l'espèce, étant observé que le testament du 15 septembre 1983 constitue une double libéralité simultanée et que Mme X..., légataire de l'usufruit, n'est tenue ni d'une obligation de conserver ni d'une obligation de transmettre. Il y a lieu de confirmer également le jugement entrepris en ce qu'il a constaté que le testament olographe établi par Joseph X... le 15 septembre 1983 a révoqué la donation entre époux consentie à Marguerite Y... épouse X... le 23 février 1943 et a institué Raymond X... et Laurette X... épouse Z... comme légataires universels et les a, en conséquence, envoyés en possession. À
Sur les autres demandes des parties : Mme CHAZAL Y... est débitrice envers la succession des fruits et revenus qu'elle a perçus à son seul profit depuis son entrée en possession et rien ne conduit la C... à reporter la date à compter de laquelle les fruits successoraux seront dus. L'expertise préalable ordonnée par le premier juge aux fins de déterminer la consistance et la valeur de la succession de Joseph X... n'est pas discutée par les parties. Il serait inéquitable de laisser à la charge des consorts X..., l'ensemble des frais irrépétibles qu'ils ont du engager au cours de la présente instance. Mme CHAZAL Y..., sera donc condamné à leur payer, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile une indemnité de 1.000,00 Euros. Mme CHAZAL Y..., qui succombe en son appel, supportera les dépens.
P A R C E S M O T I F S La C... statuant publiquement et par arrêt contradictoire, Reçoit, en la forme, l'appel,
Confirme en toutes ses dispositions la décision déférée : Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires;
Y ajoutant, condamne Simone A... à payer à Raymond X... et Laurette X... épouse Z... la somme de Mille Euros (1.000,00 ä) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Condamne Simone A... aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP JOUGLA.
LE GREFFIER
LE PRÉSIDENT