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18/11/2002 | FRANCE | N°02/03547

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 18 novembre 2002, 02/03547


Arrêt Mario X... FAITS ET PROCEDURE La procédure ayant donné lieu au jugement du Tribunal de commerce du 29 mai 2002 A la requête de la société Air Littoral, exerçant une activité de transport aérien et dont le siège social est à Montpellier, par ordonnance du 6 avril 2001 le Président du Tribunal de commerce de Montpellier : - ouvrait une procédure de conciliation, sur le fondement des articles L 611-3 et suivants du Code de commerce, - nommait Maîtres François Blanc et Olivier Fabre, administrateurs judiciaires comme conciliateurs avec pour mission, ultérieurement prorogée d

e trois mois, d'assister la société et ses dirigeants lors de la...

Arrêt Mario X... FAITS ET PROCEDURE La procédure ayant donné lieu au jugement du Tribunal de commerce du 29 mai 2002 A la requête de la société Air Littoral, exerçant une activité de transport aérien et dont le siège social est à Montpellier, par ordonnance du 6 avril 2001 le Président du Tribunal de commerce de Montpellier : - ouvrait une procédure de conciliation, sur le fondement des articles L 611-3 et suivants du Code de commerce, - nommait Maîtres François Blanc et Olivier Fabre, administrateurs judiciaires comme conciliateurs avec pour mission, ultérieurement prorogée de trois mois, d'assister la société et ses dirigeants lors de la mise en ouvre de plans de restructuration de nature à permettre la poursuite de l'activité de la société, la recherche de repreneurs ou d'acquéreurs, la présentation de la situation auprès des actionnaires et des pouvoirs publics et lors des éventuelles négociations qui s'en suivront. Le 30 juin 2001 la société Air Littoral et Marc Y... d'une part et la société SairLines d'autre part concluaient un protocole d'accord de règlement amiable que les parties avaient avec l'aide des conciliateurs décidé de conclure . Ce protocole valant aussi transaction, était soumis au droit français. Il organisait, entres autres, la cession au profit de Marc Y... des actions et obligations remboursables en actions d'Air Littoral, et d'autres mesures ( avances en compte courant, abandon de créances, prêts ) . Il était notamment prévu le versement par SairLines d'un prêt de 100.000.000 frs à compter du 20 septembre 2.000 remboursable in fine le 31 décembre 2003 ( sauf abandon de créance selon l'importance des fonds propres recueillis auprès d'investisseurs) . Conformément à l'article 6 de cet accord et en application des dispositions de l'article 613-4 VIII, le président du Tribunal de commerce homologuait ce protocole le 30 juin 2001. Le 1er octobre 2001, SAirLines et sa société mère SAirGroup, au motif que leur situation

financière s'était subitement dégradée à la suife des attentats du 11 septembre 2001. étaient placées sous l'empire d'une procédure de sursis concordataire par les juridictions suisses compétentes. La société SAirLines n'octroyait pas à Air Littoral le prêt prévu par le protocole du 30 juin 2001. De même la société Swissair, filiale de SAirLines réduisait de 50 % ses programmes de vols et ne poursuivait pas l'exécution du contrat d'affrètement qui la liait à Air Littoral. Par acte du 23 octobre 2001 la société Air Littoral et Marc Y... assignaient devant le Tribunal de commerce de Montpellier les sociétés SAirLines et SAir Group. ainsi que neuf des administrateurs de SAirGroup, dont Mario X..., en vue d'obtenir le paiement solidaire de la somme de 100.000.000 Francs en réparation du préjudice causé par une absence de paiement du prêt de 100.000.000 Francs prévu au protocole du 30 juin 2001. Mario X... avait en effet exercé à partir du mois de mars 2001 les fonctions de président du conseil d'administration de la société anonyme de droit suisse Sairgroup, société mère de la SA SairLines dont il était aussi administrateur. La société SairLines était seule, parmi les défendeurs, partie au protocole aussi l'assignation énonçait elle que la responsabilité de SairGroup et celle des dirigeants de cette société était engagée au motif que: En ne dotant pas, voire en privant SAirLines des moyens financiers nécessaires à l'exécution des engagements souscrits trois mois auparavant, SairGroup, société de tête du groupe SwissAir, dont le rôle a été décisif, sinon exclusif, dans la définition des conditions du retrait de sa filiale du capital d'Air Littoral, mais également ses dirigeants et ceux de SAirLînes ont engagé leur responsabilité envers Monsieur Marc Y... et Air Littoral". L'assignation revendiquait la compétence territoriale du tribunal au motif qu'à l'égard de SairLines il s'agissait d'une responsabilité contractuelle, le protocole stipulant une clause

compromissoire, et pour les autres au titre de la responsabilité délictuelle, se fondait sur l'article 5.3 de la Convention de Lugano du 16 septembre 1988 s'agissant du lieu du dommage. Au fond elle invoquait l'article 754 du Code des obligations suisses quant à la responsabilité engagée contre des administrateurs d'une société de droit suisse la SAirGroup et ses dirigeants. Les administrateurs contestaient tant la compétence territoriale que les prétentions à réparation car, selon eux, la responsabilité des administrateurs d'une société anonyme suisse, fondée sur l'article 754 précité, ne pouvait être recherchée, en cas de dommage indirect et si la société n'est pas en faillite au sens du droit suisse, ce qui était le cas de l'espèce. Ultérieurement les demandeurs invoquaient une responsabilité fondée sur la confiance, ou confiance déçue, notion de droit suisse de culpa in contrahendo ( faute consistant dans le fait même de contracter ) et sur la jurisprudence y afférente, tandis que les défendeurs exposaient que les conditions exigées par les tribunaux suisses n'étaient pas réunies. Par jugement du 29 mai 2002 le Tribunal de commerce - rejetait l'exception d'incompétence, celle d'irrecevabilité et celle de nullité, - vu notamment les articles 754 et suivants du code des obligations suisses constatait l'inexécution du protocole de règlement amiable du 30 juin 2001 par SairLines , - décidait que SairGroup et Mario X..., pris tant en sa qualité d'administrateur unique de SairLines qu'en sa qualité d'administrateur de SairGroup, ont engagé, à ce titre, leur responsabilité envers Air Littoral, - condamnait SairGroup in solidum avec SairLines à payer à Air Littoral la somme de 15.244.902 ä due par SairLines, - condamnait Mario X... à verser, in solidum avec SAirLines et SAirGroup, la somme de 15.244.902 ä, - assortissait cette décision de l'exécution provisoire car le versement de l'intégralité de la contribution financière de 850 millions de francs

constituait une condition essentielle et déterminante du protocole et conditionnait la bonne fin du plan de restructuration d'Air Littoral. Ceci au motif que "il est dès lors évident que le tribunal conclut que SAirGroup disposait d'un pouvoir effectif de direction et de contrôle de SAirLines, dont elle a largement usé en l'espèce et qu'elle a participé de façon déterminante et permanente à la formation de volonté de sa filiale" et que "il convient de relever que M.Corti, dont le rôle déterminant dans la cession d'Air Littoral a été mis en lumière, a fait, dans les semaines mêmes au cours desquelles les parties négociaient le protocole de règlement amiable, des déclarations rassurantes sur la situation financière du groupe Swissair (...). Ces agissements, dont on peut douter qu'ils n'aient pas été accomplis en concertation et avec l'aval du conseil d'administration de SAirGroup étaient de nature à susciter la confiance légitime d'Air Littoral et de M. Marc Y... que SAirGroup disposerait des moyens de veiller à ce que chacun des versements promis au titre de la contribution de 850 millions de francs soient effectués ponctuellement. Les dirigeants de fait et de droit de SAirLines devaient veiller avec d'autant plus de vigilance à la bonne et ponctuelle exécution du protocole que ce dernier avait pour objet d'éteindre tout responsabilité de leur groupe quant à la gestion passée d'Air Littoral et qu'ils ne pouvaient, ou n'auraient dû, ignorer les aléas de la situation financière du groupe Swissair; qu'en fait ils n'avaient à l'évidence pas pris les mesures propres à permettre à SAirLines de régler ponctuellement la dernière tranche de la contribution financière promise, puisque aussi bien il résulte des faits exposés au tribunal que moins de trois mois après la conclusion du protocole, les sommes ont fait défaut. Les défendeurs ont, par leur comportement déloyal, engagé leur responsabilité envers Air Littoral et M. Marc Y... en décevant la confiance qu'ils avaient

suscitée en ces derniers lors de la conclusion du protocole du 30 juin 2001." La formation était présidée par le président du Tribunal qui avait admis Air Littoral au bénéfice de la conciliation, et qui avait judiciairement homologué le protocole dont l'inexécution était poursuivie. Mario X... a formé appel de ce jugement et sollicité du Premier Président l'arrêt de l'exécution provisoire et par ordonnance du 17 juillet il était prescrit la consignation des sommes. L'appel est en cours. La seconde instance engagée à l'encontre de SAirlînes, et de SAirGroup et de ses administrateurs Air Littoral et Marc Y... assignaient le 22 janvier 2002, devant le même Tribunal de commerce les sociétés SAirLines, SAirGroup et leurs dirigeants respectifs, dont Mario X... en paiement d'une somme de 9.146.941 ä à titre de dommages intérêts, en réparation du préjudice qu'aurait subi Air Littoral du fait de la cessation du contrat d'affrètement conclu avec Swissair, contrairement aux termes du protocole du 30 juin 2001. Dans leurs premières conclusions les administrateurs de SairGroup ont développé les mêmes moyens d'incompétence du Tribunal, de nullité de l'assignation, et d'irrecevabilité des demandes formées sur le fondement de l'article 754 du Code des obligations que celles qu'ils avaient formées dans le cadre de la première instance, tandis que les demandeurs demandaient l'application des principes dégagés par le jugement précédent. Cette affaire était appelée et plaidée à l'audience publique du Tribunal le 26 juin 2002. La composition du Tribunal était différente de celle ayant statué par jugement du 29 mai 2002 et elle n'était pas présidée par le président du tribunal. A cette audience un incident survenait. Maître Olivier Fabre, qui avait été l'un des conciliateurs désignés par le président du tribunal de commerce à la procédure de conciliation d'Air Littoral, et en présence duquel avait été signé le protocole du 30 juin 2001, était présent dans la salle d'audience, revêtu de sa robe professionnelle.

Il prenait place dans la salle sur le siège situé immédiatement devant le pupitre en se plaçant entre les représentants des parties et le Tribunal. Alors que l'avocat de Mario X... plaidait et développait un de ses arguments, relatif aux modalités des négociations du protocole de règlement amiable du 30 juin 2001, Maître Olivier Fabre, à voix haute et intelligible, selon le requérant, démentait les propos tenus par cet avocat, la contraignant à s'interrompre . Il était donné acte, selon le plumitif d'audience, à cet avocat de l'intervention de Maître Fabre. Il était déposé à cette occasion des conclusions ainsi libellées : Donner acte à Monsieur X... de ce que, au cours de la plaidoirie, de Me Dezeuze devant le tribunal à l'audience du 26 juin 2002 , Me Olivier Fabre, mandataire de justice, qui n'est pas partie à la procédure et qui ne représente aucune partie, est intervenu, coupant la parole à Me Dezeuze, pour prétendre témoigner et réfuter les propos de Me Dezeuze. Monsieur X... se réserve de tirer toutes conséquences de cette violation des règles les plus élémentaires de procédure et des droits de la défense. Le lendemain 27 juin le même avocat de Mario X... écrivait au président du tribunal de commerce pour se plaindre de cette attitude qu'il qualifiait d'inadmissible . Mario X... déposait alors le 12 juillet, enregistrée au greffe le 15, une requête, fondée sur les articles 356 et suivants du nouveau Code de procédure civile et 6 de la Convention EDH, aux fins de renvoi devant une autre juridiction aux motifs que : - lors de l'instance en référé devant le premier président , plaidée le 10 juillet, pour obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire il avait obtenu confirmation qu'à la suite d'une requête de la société Air Littoral déposée le 25 juin 2002, le président du tribunal de commerce avait désigné, sur le fondement de l'article L 611-3, les mêmes mandataires Me Blanc et Me Fabre, pour, entre autres, assister la société dans le recouvrement

des sommes dues par les sociétés Sairgroup et Mario X..., - cette désignation, la veille de l'audience, ajoutée à l'intervention du président du tribunal qui avait jugé la première affaire, alors qu'il est intervenu dans le protocole, et ajoutée au comportement de Me Fabre comme retracée ci dessus, alors qu'il s'agit d'un auxiliaire de justice , démontre qu'il dispose maintenant d'éléments objectifs le conduisant légitimement à redouter que les conditions d'impartialité du tribunal de commerce ne soient pas réunies pour statuer sur cette seconde instance. Le président du tribunal de commerce s'est opposé à la demande au motif que selon les articles 342 et 356 du nouveau Code de procédure civile une telle demande ne pouvait être formée après la clôture des débats et qu'en tout état de cause l'indépendance de la juridiction toute entière ne pouvait être mise en cause. Les parties au litige de première instance ont été avisées de la date d'audience devant la Cour. La société requérante reprend oralement son argumentation en exposant que la requête est recevable et ses craintes justifiées. Les sociétés SairLines et Sair Group prétendent que le faisceau d'indices est précis et soutient la même demande que celle du requérant. Karl Wuthrich et Karl Roger Giroud, cocommissaires suisses au concordat aux sociétés SairLines et SairGroup, exposent également qu'ils nourrissent des doutes et des craintes. La société Air Littoral et Marc Y... confirment l'intervention de Me Fabre le jour de l'audience, et concluent au rejet de la requête. Conformément à l'article 359 du nouveau Code de procédure civile le dossier a été transmis au Ministère Public qui à l'audience s'en est rapporté à justice. MOTIFS Sur la recevabilité en la forme Attendu que, selon les pièces notamment le plumitif d'audience, il était donné acte à l'avocat de Mario X... de l'intervention de Maître Fabre à l'audience ; que selon les écritures déposées il sollicitait qu'il lui soit donné acte de ce que, au cours

de sa plaidoirie, à l'audience Me Olivier Fabre, mandataire de justice, qui n'était pas partie à la procédure et qui ne représentait aucune partie, était intervenu, lui coupant la parole pour prétendre témoigner et réfuter ses propos ; qu'il était précisé que Mario X... se réservait de tirer toutes conséquences de cette violation des règles les plus élémentaires de procédure et des droits de la défense ; Attendu que le lendemain 27 juin l'avocat de Mario X... écrivait au président du tribunal de commerce pour se plaindre ; Attendu qu'enfin il n'est pas discuté que lors de l'instance en référé devant le premier président pour obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement Mario X... a appris qu'à la suite d'une requête de la société Air Littoral déposée le 25 juin 2002, soit la veille , le président du tribunal de commerce avait désigné, sur le fondement de l'article L 611-3, les mêmes mandataires Me Blanc et Me Fabre, pour, entre autres, assister la société dans le recouvrement des sommes dues par les sociétés Sairgroup et Mario X... ; Attendu que, selon la jurisprudence, l'impartialité de la juridiction est un principe fondamental et une garantie, essentielle, de la Convention EDH en sorte que ce principe doit recevoir, dans tous les cas, application ; que cette situation ne peut recevoir exception que dans les cas où :

- la partie qui peut l'invoquer a renoncé volontairement à le faire, - les circonstances démontrent que la partie pouvait exercer ses droits car elle avait tous les éléments d'information en sa possession et s'en était alors abstenue en toute connaissance de cause; Attendu que Mario X... prétend qu'il a connu un des éléments objectifs, fondant son argumentation, postérieurement à la clôture des débats, et que cet élément vient corroborer ses réserves formulées par écrit devant la juridiction avant la clôture des débats ; Attendu que par le dépôt de telles conclusions les juges étaient parfaitement informés, avant la clôture des débats, que Mario X...,

qui n'était pas personnellement présent à l'audience, se réservait de donner une suite à cet incident en ce compris la possibilité de déposer la présente requête, celle-ci ne pouvant être mise en ouvre que par lui seul et non par son avocat; Attendu que, dès lors, les dispositions du nouveau Code de procédure civile, disposition de droit interne, ne sauraient y mettre obstacle ; Attendu que la requête est donc en la forme recevable ; Sur le bien fondé de la requête Attendu que l'impartialité au sens de l'article 6 OE 1 de la convention EDH s'apprécie selon une double démarche, la première consistant à essayer de déterminer la conviction personnelle du juge saisi, la seconde à s'assurer qu'il offrait des garanties suffisantes pour exclure à cet égard tout doute légitime ( arrêt Gautrin / France du 20 mai 1998 Recueil III p 1030 OE 58 ) ; que la première à savoir l'impartialité personnelle d'un magistrat se présume jusqu'à preuve du contraire ( arrêt Padovani / Italie du 26 février 1993 série A n° 257-B p 20 ), tandis que la seconde, dite impartialité fonctionnelle, ( arrêt Morel / France 6 juin 2.000 BICC 15 juillet 2.000 ) conduit à se demander, lorsqu'une juridiction collégiale est en cause , si indépendamment de l'attitude personnelle de tel ou tel de ses membres, certains fait vérifiables autorisent à mettre en cause l'impartialité de celle-ci en vérifiant si les appréhensions du justiciable peuvent passer pour objectivement justifiées ; Attendu que selon les éléments concordants fournis par les parties et leurs observations et précisions, alors que l'avocat de Mario X... plaidait et développait un de ses arguments, relatif aux modalités de négociations du protocole de règlement amiable du 30 juin 2001, Maître Olivier Fabre démentait les propos tenus par cet avocat, le contraignant à s'interrompre ; qu'il s'agissait de paroles prononcées par un auxiliaire de justice, revêtu de sa robe, et qui exerce les fonctions de mandataire de justice en ayant des contacts étroits avec

l'ensemble des magistrats consulaires du tribunal à l'occasion des procédures de prévention ou des procédures collectives ; Attendu qu'en considération de cette place éminente au sein du fonctionnement de la juridiction commerciale, et de l'autorité attachée à cette fonction, cette attitude ne peut qu'exercer une influence, s'agissant d'une procédure orale, sur les membres de la formation, siégeant à l'époque, étant observé d'une part que selon l'article L 611-6 du Code de commerce toute personne qui est appelée au règlement amiable est tenue au secret professionnel, en sorte que la révélation de propos est interdite, d'autre part que la plaidoirie d'un avocat ne peut jamais se voir interrompue, sous peine de violation des droits de la défense, en dehors du seul cas où lorsque la juridiction s'estime éclairée, le président fait alors cesser les plaidoiries selon les dispositions de l'article 440 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que par ailleurs, dans une affaire complexe et mettant en présence des intérêts très importants, le président du tribunal du commerce a désigné les conciliateurs lors de la procédure amiable, homologué le protocole d'accord après des discussions, dont il est peu vraisemblable qu'il en ait été complètement exclu en raison de leur ampleur et de leurs conséquences, et participé à la formation qui a jugé la première affaire, laquelle a statué sur l'inexécution dudit protocole ; Attendu que cette décision, assortie de l'exécution provisoire, est maintenant déférée à la formation compétente de la Cour de ce siège qui appréciera les prétentions de Mario X... ; qu'il convient néanmoins d'observer qu'à cette occasion le tribunal a retenu sa compétence territoriale, pour statuer sur la responsabilité délictuelle, en se fondant sur le lieu du dommage, celui-ci ayant été ressenti au lieu du siège social de la société Air Littoral, bien que le protocole soit gouverné par le droit français lequel désigne, en l'absence de clause contraire, le lieu du paiement

dont l'absence est à l'origine des difficultés; Attendu qu'enfin la veille de l'audience le 25 juin, sur le fondement de l'article L 611-3, les mêmes mandataires Me Blanc et Me Fabre étaient désignés sur requête pour, entre autres, assister la société Air Littoral dans le recouvrement des sommes dues par les sociétés Sairgroup et Mario X... ; que cette assistance dans le recouvrement confiée à Me Fabre pour les sommes dues à la suite d'une condamnation d'une décision de justice a été effectuée dans le cadre d'une procédure gracieuse par le même juge que celui qui a statué, alors que le contentieux, sur le principe même de la condamnation à paiement, était élevé depuis plusieurs mois pour l'ensemble du litige ; Attendu que dès lors l'ensemble des éléments invoqués et analysés ci dessus mettent en évidence des faits pouvant être qualifiés d'appréhensions objectivement justifiées de la part de Mario X... ; Attendu qu'en raison de l'importance pour la vie économique locale de cette affaire, de la complexité de celle-ci, et de l'excessive proximité d'auxiliaires de justice, il convient de rechercher une autre juridiction dans le ressort de la Cour mais située dans une région administrative différente ; Attendu que le tribunal de commerce de Rodez sera donc désigné comme juridiction de renvoi pour connaître de l'assignation délivrée par Air Littoral et Marc Y... le 22 janvier 2002, à l'encontre des sociétés SairLines, SairGroup et de leurs dirigeants respectifs, dont Mario X... en paiement d'une somme de 9.146.941 ä à titre de dommages intérêts, en réparation du préjudice subi du fait de la cessation du contrat d'affrètement conclu avec Swissair, contrairement aux termes du protocole du 30 juin 2001 ; Vu l'article 696 du nouveau Code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS LA COUR Déclare recevable la requête en la forme, Au fond la dit bien fondée, Renvoie la cause et les parties devant le tribunal de commerce de Rodez, juridiction de renvoi, pour connaître de

l'assignation délivrée par Air Littoral et Marc Y... le 22 janvier 2002, à l'encontre des sociétés SairLines, SairGroup et de leurs dirigeants respectifs, dont Mario X..., en paiement d'une somme de 9.146.941 ä à titre de dommages intérêts, en réparation du préjudice subi du fait de la cessation du contrat d'affrètement conclu avec Swissair, contrairement aux termes du protocole du 30 juin 2001, Dit qu'en application de l'article 97 du nouveau Code de procédure civile le dossier complet de la procédure devra être transmis par le greffier du tribunal de commerce de Montpellier à celui de Rodez , Dit qu'une copie du présent arrêt sera expédiée aux parties, au président du Tribunal de commerce de Montpellier et au président du Tribunal de commerce de Rodez , Dit que les dépens de l'instance en suspicion légitime suivront ceux de l'instance principale et devront être liquidés par le Tribunal de commerce de Rodez.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 02/03547
Date de la décision : 18/11/2002

Analyses

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME.

Selon la jurisprudence, l'impartialité de la juridiction est un principe fondamental et une garantie, essentielle, de la CEDH , qui doit recevoir dans tous les cas, application excepté lorsque la partie qui peut l'invoquer a renoncé volontairement à le faire ou lorsque les circonstances démontrent que la partie pouvait exercer ses droits car elle avait tous les éléments d'information en sa possession et s'en était alors abstenue en tout état de cause. Dès lors est recevable la requête de la partie qui prétend avoir connu des éléments objectifs, fondant son argumentation, postérieurement à la clôture des débats , et corroborant des réserves formulées par écrit devant la juridiction avant la clôture des débats, est recevable, les juges ayant été parfaitement informés par de telles conclusions que ce justiciable se réservait la possibilité de donner suite à cet incident .Peuvent être qualifiés d'appréhensions objectivement justifiées quant à l'impartialité de la juridiction commerciale appelée à statuer sur un second litige entre les mêmes parties et mettant en cause une absence d'un autre paiement fondé sur un même titre:- la participation du président de la juridiction au sein d'une première formation de jugement statuant sur l'inexécution d'un protocole d'accord alors que ce magistrat a participé à l'élaboration dudit protocole, l'a homologué, et a ainsi connu d'éléments confidentiels,- la désignation sur requête par le président de la juridiction, la veille de la seconde audience, de la désignation de deux mandataires de justice chargés d'assister l'une des parties dans le recouvrement de sommes allouées par le premierjugement, alors que ce jugement, qui avait reconnu sa compétence territoriale internationale, était frappé d'appel,- l'intervention d'un auxilliaire de justice interrompant lors de la seconde audience la plaidoirie d'un avocat d'une partie, alors que cet auxilliaire revêtu de sa robe, qui ne représente aucune partie et

exerce les fonctions de mandataire de justice, rôle éminent dans une juridiction commerciale, a révélé à cette occasion publiquement et dans une procédure orale des informations recueillies dans le cadre de l'article 616-6 du Code de commerce.


Références :

article 6-1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l' Homme

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2002-11-18;02.03547 ?
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