ARRET N°R.G : 02/00038 Conseil de prud'hommes narbonne10 décembre 2001CommerceLEMOINEC/S.A. BOURGEY MONTREUIL CHIMIEMJS/CC
COUR D'APPEL DE MONTPELLIERCHAMBRE SOCIALEARRET DU 05 NOVEMBRE 2002APPELANT :Monsieur Gérard LEMOINELotissement Les Garrigues11800 LAURE X... : la SCP FORNAIRON ä VAYSSIE (avocats au barreau de NARBONNE)(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2002/004882 du 03/06/2002 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)INTIMEE :S.A. BOURGEY MONTREUIL CHIMIE prise en la personne de son représentant légalAvenue de LascosZ.I. Sud ä BP 4613691 MARTIGUESReprésentant : la SCP BOURLAND CIRERA CABEE BIVER (avocats au barreau de CARCASSONNE)COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :M. Louis GERBET, PrésidentMme Marie ä José SONNEVILLE, ConseillerMme Christine DEZANDRE, ConseillerGREFFIER :Mme Chantal COULON, Greffier,DEBATS :A l'audience publique du 01 Octobre 2002, où l'affaire a été mise en délibéré au05 Novembre 2002ARRET :
Contradictoire, prononcé et signé par M. Louis GERBET, Président, à l'audience publique du 05 Novembre 2002, date indiquée à l'issue des débats assisté de Mme COULON, greffier, qui a signé le présent arrêt..** *
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS DES PARTIES Gérard LEMOINE a été embauché par la société BOURGEY MONTREUIL CHIMIE en qualité de conducteur routier suivant contrat à durée indéterminée à compter du 1° juin 1988; il a été licencié le 19 octobre 2 000 pour faute grave ; estimant ce licenciement abusif, il a saisi le Conseil des Prud'hommes de NARBONNE, lequel a rendu le 10 décembre 2001 un jugement le déboutant de l'ensemble de ses demandes.Gérard LEMOINE a
régulièrement relevé appel de cette décision pour obtenir le paiement des sommes suivantes :ä dommagesäintérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 39 600 eurosä indemnité de préavis : 3 354 eurosä indemnité de congés payés afférents : 335 eurosä indemnité de licenciement : 4 192 eurosä article 700 du code de procédure civile :
1500 euros,ä à titre subsidiaire : dommagesäintérêts pour repos compensateur : 7 212 euros Il soutient qu'il a été victime d'un accident de la circulation le 9 mai 2 000, le camion qu'il conduisait s'étant renversé sur une bretelle d'autoroute ; qu'il a été licencié plus de 9 mois après ces faits, alors que l'employeur en avait eu tout de suite connaissance, l'infraction de défaut de maîtrise ayant fait l'objet d'un procès verbal en date du 19 mai 2 000 ; que celuiäci ne saurait soutenir n'en avoir eu connaissance que le 28 août 2000, alors qu'il a convoqué le salarié à deux reprises auparavant pour un entretien préalable, le 17 mai et le 3 juillet 2000 ; que la prescription des faits reprochés était donc acquise ; que par ailleurs l'employeur ne rapporte pas la preuve de la faute grave invoquée, aucun élément ne permettant de démontrer que la vitesse était excessive ou qu'il y ait eu défaut de maîtrise; il ajoute qu'il a fait analyser les disques transmis par l'employeur et que les repos compensateurs non pris n'apparaissent pas sur les bulletins de salaires.La société BOURGEY MONTREUIL CHIMIE demande à la Cour de confirmer le jugement déféré, et de condamner l'appelant à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; elle expose la chronologie des faits, et de la procédure de licenciement, et fait valoir que le salarié a reconnu sa pleine et entière responsabilité dans l'accident lors de l'entretien préalable, acceptant même de démissionner ; que celleäci résulte de la lecture du procès verbal de gendarmerie dressé après l'accident ; que s'agissant du transport de produits dangereux
la vitesse excessive est inadmissible et justifie le licenciement pour faute grave ; elle ajoute que l'appelant, convoqué une première fois le 3 juillet, a demandé luiämême le report de l'entretien préalable en raison de son état de santé ; que depuis l'accident il ne s'est jamais écoulé un délai de 2 mois sans que soit maintenue l'action disciplinaire ; qu'elle n'a été certaine de la faute commise qu'à la lecture du procès verbal de l'accident le 28 août 2000 ; en ce qui concerne le repos compensateurs, elle estime que l'appelant a été rempli de ses droits, comme le démontrent les bulletins de paie.MOTIFS DE LA DECISIONAttendu que la lettre de notification du licenciement pour faute grave en date du 19 octobre 2 000 énonce les griefs suivants : ä " vitesse excessiveä manque de maîtrise du véhicule ayant entraîné un accident le 9 mai 2 000 sur l'Autoroute A63, dont le coût non repris par l'assurance est supérieur à 400 KF. "sur la prescription :Attendu qu'en application de l'article L 122ä44 du code du travail les faits dont l'employeur a eu connaissance plus de deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement sont prescrits ; que ce délai n'est ni suspendu ni interrompu pendant une période de suspension du contrat de travail pour accident ou maladie; que la date de la convocation à l'entretien préalable marque l'engagement de la procédure de licenciement, qui interrompt le délai de prescription ; qu'un nouveau délai de deux mois commence alors à courir à compter de cette date.Qu'en l'espèce les faits étant en date du 9 mai 2 000, l'employeur a convoqué le salarié à l'entretien préalable une première fois par courrier en date du 17 mai 2000, puis une deuxième fois par courrier en date du 3 juillet, une troisième fois par courrier en date du 8 septembre, et enfin le 14 septembre; que l'employeur déclare que la date de l'entretien préalable a été repoussée en raison de l'état de santé du salarié, blessé lors de l'accident, et verse aux débats un courrier de celuiäci en date du 10
juillet 2000 qui en demande effectivement le report.Que si les deux premières convocations ont bien interrompu le délai de prescription, il s'est toutefois écoulé plus de deux mois entre le seconde et la troisième, soit entre le 3 juillet et le 8 septembre 2000 ; que faute d'avoir reconvoqué le salarié dans le délai de deux mois à compter de la convocation en date du 3 juillet 2000, la prescription des faits reprochés est devenue acquise. Que s'il a la possibilité, pour éviter la prescription, de rapporter la preuve qu'il n'a eu connaissance des faits que postérieurement, l'employeur ne saurait prétendre en avoir été dans l'ignorance jusqu'au 28 août 2 000, par la seule production du bordereau de transmission du procès verbal de gendarmerie, qui porte le tampon d'arrivée du 28 août 2000 au cabinet MOLTER, assureur du véhicule ; qu'il a en effet convoqué dès le 17 mai le salarié en vue d'une " sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement ", et qu'il verse à son propre dossier un article paru dans la presse locale décrivant en détail l'accident ; que le courrier du 30 août 2000 destiné à l'inspection du travail où il relate luiämême les faits, y compris le défait de maîtrise et la vitesse excessive, en se référant aux conclusions de " l'ensemble des intervenants : gendarmerie, employés d'autoroute, représentant de BM CHIMIE, et du propriétaire de la marchandise... " montre que l'employeur était au courant des circonstances précises de l'accident, et de leur gravité, sans permettre de s'assurer de la date à laquelle remonte cette connaissance des faits. Qu'enfin si le délai de deux mois est suspendu en cas de poursuites pénales, aucun élément au dossier n'en fait état, que ce soit à l'initiative du Parquet ou d'une partie civile.Attendu que dans ces conditions les faits, prescrits, ne pouvant donner lieu à une sanction disciplinaire, le licenciement se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse, et le jugement déféré sera réformé en ce sens.Attendu que
la Cour trouve dans les explications des parties, les pièces du dossier, l'ancienneté du salarié, la taille de l'entreprise et les circonstances du licenciement les éléments suffisant pour chiffrer à la somme de 11 000 euros le montant des dommagesäintérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il sera également fait droit aux demandes en paiement du préavis, des congés payés afférents et de l'indemnité de licenciement. Attendu que le premier juge a justement estimé que la demande au titre des repos compensateurs n'était pas justifiée, après examen des pièces versées au dossier, en particulier les bulletins de salaires et les courriers échangés entre les parties ; qu'il sera confirmé sur ce point.Attendu qu'il parait inéquitable de laisser à la charge de l'appelant la part des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens pour un montant de 1000 euros.PAR CES MOTIFSLA COURStatuant publiquement et contradictoirement, Déclare l'appel de Gérard LEMOINE recevable,Au fond,Le dit partiellement bien fondé,Réforme le jugement déféré,Dit que les faits étant prescrits le licenciement se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse,Condamne la société BOURGEY MONTREUIL CHIMIE à lui payer les sommes de : ä dommagesäintérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : ONZE MILLE (11 000) eurosä indemnité de préavis : 3 354 eurosä indemnité de congés payés afférents : 335 eurosä indemnité de licenciement : 4 192 eurosä article 700 du code de procédure civile : 1000 euros,Confirme le jugement déféré en ses autres dispositions, notamment sur le rejet de la demande au titre des repos compensateurs, Met les dépens à la charge de l'intimée. LE GREFFIER,
LE PRESIDENT,Arrêt n°
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