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16/09/2002 | FRANCE | N°01/2762

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 16 septembre 2002, 01/2762


FAITS ET PROCÉDURE

Pour recouvrer un arriéré de cotisations dû par Monsieur X... Y..., la caisse de la mutualité sociale agricole des Pyrénées Orientales a retenu en totalité à compter du 1er janvier 1996, les arrérages de la pension vieillesse servie à l'intéressé. Par requête en date du 18 octobre 1996, Monsieur X... Y... a saisi le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Perpignan d'une demande tendant à la détermination de la fraction insaisissable de sa retraite et au remboursement de celle-ci depuis le 1er janvier 1996. Par jugement du 20 janvier 19

97, le juge de l'exécution a sursis à statuer sur les demandes et a ad...

FAITS ET PROCÉDURE

Pour recouvrer un arriéré de cotisations dû par Monsieur X... Y..., la caisse de la mutualité sociale agricole des Pyrénées Orientales a retenu en totalité à compter du 1er janvier 1996, les arrérages de la pension vieillesse servie à l'intéressé. Par requête en date du 18 octobre 1996, Monsieur X... Y... a saisi le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Perpignan d'une demande tendant à la détermination de la fraction insaisissable de sa retraite et au remboursement de celle-ci depuis le 1er janvier 1996. Par jugement du 20 janvier 1997, le juge de l'exécution a sursis à statuer sur les demandes et a adressé au tribunal des affaires de sécurité sociales des Pyrénées Orientales une question préjudicielle relative à l'application, en cette matière, des règles de droit commun concernant la fraction insaisissable des rémunérations du travail. Le 05 juin 1997, le tribunal des affaires de sécurité sociale a considéré que la compensation opérée par la caisse de la mutualité sociale agricole des Pyrénées Orientales sur la totalité des avantages vieillesse d'un assuré social afin de recouvrer des majorations de retard déroge au droit commun relatif à la fraction insaisissable des rémunérations du travail, en application de l'article 1143-1 du Code rural. Ce jugement a été confirmé par arrêt de la Cour d'appel de MONTPELLIER le 12 février 1998, lequel, sur le pourvoi formé par Monsieur X... Y..., a été cassé et annulé dans toutes ses dispositions le 13 juillet 2000. Par arrêt du 1er février 2001, la Cour d'appel de N MES a infirmé le jugement du 05 juin 1997 et dit que la faculté de prélèvement ouverte à la caisse de la mutualité sociale agricole des Pyrénées Orientales pour obtenir paiement des sommes dues ne pouvait s'exercer sur le montant des allocations vieillesse, qu'à concurrence des proportions déterminées par l'article R 145-2 du Code du travail. Monsieur X... Y... a

sollicité le paiement de la totalité des retraites prélevées à tort depuis le 1er janvier 1990 et le paiement d'une somme de 50.000 francs à titre de dommages et intérêts, outre une somme de 8.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Par jugement en date du 18 juin 2001, le juge de l'exécution a : - dit que la fraction insaisissable des allocations vieillesse servies à Monsieur X... Y... depuis le 1er janvier 1996 s'élevait à la somme de 15.375,72 francs ; - condamné la caisse de la mutualité sociale agricole des Pyrénées Orientales à payer à Monsieur X... Y... une somme de 15.375,72 francs, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2001 ; - dit que la demande relative aux prélèvements antérieurs au 01 janvier 1996 était irrecevable ; - condamné la caisse de la mutualité sociale agricole des Pyrénées Orientales à payer à Monsieur X... Y... la somme de 3.000 francs à titre de dommages et intérêts, outre celle de 3.500 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; - rejeté tous autres moyens ou demandes plus amples ou contraires au présent dispositif ; - condamné la caisse de la mutualité sociale agricole des Pyrénées Orientales aux dépens. Le 25 juin 2001, Monsieur Y... a régulièrement interjeté appel de la décision à lui notifiée le 21 juin 2001. MOYENS DES PARTIES EN APPEL L'appelant, Monsieur Y..., conteste la décision déférée en ce qu'elle a déclaré irrecevable sa demande tendant au remboursement des prélèvements opérés à compter du 1er janvier 1990, date de sa mise en retraite, jusqu'au 1er janvier 1996, date de sa requête au juge de l'exécution. Il fait valoir, à cet effet, que l'article 70 du nouveau Code de procédure civile autorise toute demande additionnelle s'il existe un lien suffisant avec la demande initiale, et estime que tel est le cas en l'espèce puisque la MSA a agi pour cette période pour recouvrer sa créance de la même manière que pour la période

postérieure au 1er janvier 1996. Il demande, en conséquence, de réformer de ce chef le jugement attaqué. Il soutient par ailleurs que c'est à tort que le jugement entrepris a pris en compte toutes ses retraites pour calculer la fraction saisissable selon les dispositions de l'article R 145-2 du Code du travail, alors que, selon lui, l'article 1143-1 du Code rural ne le permet pas. Il estime, au vu de cet article, que le droit pour la MSA de recouvrer sa créance à son encontre doit être circonscrit à l'allocation vieillesse qu'elle lui doit, ce qui exclut, en conséquence, d'inclure les autres retraites. Il demande de réformer le jugement, en limitant à l'allocation vieillesse le droit à recouvrement, par compensation, dont profite la MSA. Il fait valoir en outre que l'article R 145-3 du Code du travail stipule que, dans tous les cas, la somme laissée à la disposition du bénéficiaire de la rémunération correspond au montant mensuel du revenu minimum d'insertion, à savoir la somme de 2.300 francs et qu'en l'espèce le montant de l'allocation vieillesse que lui devait la MSA a toujours était inférieur au RMI. Il en conclut que l'allocation vieillesse est insaisissable en totalité et que dès lors la MSA n'était pas fondée à appréhender tout ou partie de l'allocation vieillesse qui lui était due par cet organisme social et qu'elle doit lui restituer depuis le 1er janvier 1990 la somme de 131.149 francs, soit en euros celle de 19.993,54. Il souligne qu'après des années de procédure, la MSA a d'ailleurs admis son erreur puisqu'elle n'a pas effectué un prélèvement pour l'année 2001. Il soutient enfin qu'il a fait l'objet d'un préjudice financier en raison de cette privation pécuniaire pendant 10 ans et des tracas qu'il a ressentis alors qu'il est d'un âge très avancé et de santé précaire, réclamant à ce titre la somme de 50.000 francs soit 7.622,45 euros en réparation de ce préjudice. Il sollicite également la somme de 1.500 euros, en application de l'article 700 du nouveau

Code de procédure civile. L'intimée, la MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE DES PYRÉNÉES ORIENTALES (MSA) demande de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande additionnelle de Monsieur Y... portant sur la période du 1er janvier 1990 au 1er janvier 1996, et estime que le remboursement de la somme de 131.149 francs est erroné dès lors que le montant des revenus, toutes retraites confondues, mentionné par Monsieur Y... est inexact. Elle demande que l'appelant produise aux débats la justification de l'intégralité de ses revenus annuels, toutes retraites confondues, indiquant qu'ainsi au titre de l'année 2000, Monsieur Y... a perçu, toutes pensions de retraite confondues, la somme annuelle de 71.466,60 francs et sollicite que la fraction saisissable soit calculée sur l'intégralité des revenus perçus conformément aux dispositions de l'article R 145-2 du Code du travail. Elle conclut, en conséquence, à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a fixé à la somme de 15.375,72 francs le montant des sommes devant être restitué à Monsieur Y.... Faisant appel incident, elle conteste que Monsieur Y... ait pu subir un préjudice financier ouvrant droit à l'allocation de dommages et intérêts, et demande d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a accordé, à ce titre, une somme de 3.000 francs. Elle réclame, en toute hypothèse, la somme de 1.525 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. MOTIFS DE L'ARRÊT A - Sur la recevabilité de la demande additionnelle Z... que dans sa requête en date du 18 octobre 1996 saisissant le juge de l'exécution, Monsieur Y... exposait qu'à la date du 1er janvier 1996 il restait devoir à la MSA la somme de 151.131,94 francs pour majoration de retard dans le règlement de cotisations agricoles, et que pour avoir paiement de sa créance, la MSA, depuis le 1er janvier 1996, opérait une compensation entre une fraction de sa créance et sa dette issue du versement de la retraite

trimestrielle d'un montant de 3.493,13 francs ; Z... qu'il indiquait également que la MSA ne lui versait pas sa retraite d'agriculteur qui revêt un caractère alimentaire en opérant cette compensation et demandait de déterminer la fraction insaisissable de sa retraite et de condamner la MSA à lui rembourser la fraction insaisissable depuis le 1er janvier 1996 ; Z... que le juge de l'exécution ayant saisi d'une question préjudicielle le tribunal des affaires de sécurité sociale des PYRÉNÉES ORIENTALES, celui-ci a rendu, le 5 juin 1997, sa décision qui a été confirmée le 12 février 1998 par arrêt de la Cour d'appel de MONTPELLIER, lequel, sur pourvoir formé par Monsieur Y..., a été cassé et annulé en toutes ses dispositions par arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 13 juillet 2000 ; Z... qu'après décision de la Cour d'appel de renvoi, à savoir la Cour d'appel de N MES, qui, le 1er février 2001, a infirmé le jugement du 5 juin 1997, Monsieur Y... a déposé, le 23 mars 2001, ses conclusions au juge de l'exécution, sollicitant que la MSA soit condamnée à lui rembourser la totalité des retraites prélevées à tort depuis le 1er janvier 1990, date de sa prise de retraite, jusqu'à ce jour, soit le somme de 130.000 francs ; Z... qu'au regard de l'exposé des prétentions originaires contenues dans la requête du 18 octobre 1996 et du contenu de la demande additionnelle, il apparaît que celle-ci doit être admise, dès lors qu'elle procède directement de la demande originaire et tend aux mêmes fins, à savoir le remboursement des retraites appréhendées à tort selon Monsieur Y... non seulement pour la période à compter du 1er janvier 1996, mais également pour la période antérieure ayant commencé le 1er janvier 1990, et pour laquelle, ce qui n'est pas contesté, la MSA a procédé de la même manière que pour la période postérieure débutant le 1er janvier 1996 ; Z... qu'en définitive, la demande additionnelle ne faisant que reprendre, en les élargissant

quant à la période, les prétentions comprises dans la demande originaire, elle doit, conformément à l'article 70 du nouveau Code de procédure civile, être déclarée recevable ; Z... que dès lors de ce chef, le jugement déféré qui a déclaré irrecevable la demande additionnelle portant sur les prélèvements antérieurs au 1er janvier 1996, doit être réformé ; B - Sur la demande en remboursement Z... qu'en vertu de l'article L 725-1 du Code rural, anciennement article 1143-1, "les caisses de mutualité sociale agricole et les organismes visés à l'article L 731-30 ont la faculté de prélever sur le montant des prestations dues à leurs adhérents, à l'exception des prestations familiales, les cotisations dont ceux-ci sont redevables à leur égard" ; Z... qu'en application de ces dispositions, il est reconnu l'existence d'une compensation au profit de la MSA laquelle a la faculté de prélever les cotisations dont sont redevables ses adhérents à son égard, mais compensation portant uniquement sur le montant des prestations qu'elle-même leur doit, et non pas comme voudrait le faire juger la MSA sur l'intégralité des revenus annuels, en l'espèce sur toutes les retraites confondues de Monsieur Y..., et qui n'est permise que dans les limites prévues en matière de salaires par l'article R 145-2 du Code du travail ; Z... que la MSA ayant contesté le calcul de Monsieur Y... au seul motif que la fraction saisissable devait être calculée sur l'intégralité de ses revenus annuels et non sur sa seule pension vieillesse qu'elle lui sert, il convient dès lors d'accueillir la demande de remboursement de Monsieur Y... à hauteur de la somme de 131.149 francs soit en euros 19.993,54 ; Z... que le jugement déféré qui a accueilli la demande de remboursement de Monsieur Y... à hauteur de la somme de 15.375,72 francs doit être réformé sur ce point ; C - Sur le préjudice financier invoqué par Monsieur Y... Z... qu'il résulte de la propre requête de Monsieur Y... que celui-ci était

redevable à la MSA des Pyrénées Orientales, au titre des majorations de retard, de la somme de 151.131,94 francs ; Z... que par ailleurs la MSA des Pyrénées Orientales indique dans ses conclusions, sans être contredite, que Monsieur Y... reste redevable à l'égard de la MSA de l'Ile-de-France et de la MSA des Charentes Maritimes de la somme de 400.000 francs ; Z... qu'il apparaît que Monsieur Y... est un mauvais payeur et que son refus de paiement a été continuel, puisqu'étant redevable de majorations de retard ; Z... que Monsieur Y... ne peut dès lors invoquer un préjudice qu'il s'est lui-même crée en refusant de payer ses cotisations et en obligeant la MSA à recourir à cette compensation sur les arrérages de sa retraite, en les retenant en totalité, ce qui a été reconnu comme bien fondé par deux juridictions ; Z... qu'en conséquence Monsieur Y... doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts et le jugement déféré réformé de ce chef ; D - Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile Z... que l'équité commande de faire bénéficier Monsieur Y... des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et de lui allouer, à ce titre, pour l'ensemble de la procédure de première instance et d'appel, la somme de 760 euros ; Z... que succombant en sa plus grande part dans ses prétentions et devant supporter les dépens de première instance et d'appel, la MSA ne saurait prétendre au bénéfice de ces dispositions ; PAR CES MOTIFS La Cour Reçoit l'appel principal de Monsieur Y... X... et l'appel incident de la MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE DES PYRÉNÉES ORIENTALES, réguliers en la forme ; Au fond, infirmant, en toutes ses dispositions, le jugement déféré et statuant à nouveau à cet égard, Déclare recevable la demande additionnelle de Monsieur Y... portant sur la période antérieure au 1er janvier 1996 ; Dit que la fraction insaisissable des allocations vieillesse servies à Monsieur Y... par la MSA depuis le 1er janvier 1990 s'élève à la

somme de dix neuf mille neuf cent quatre vingt treize euros cinquante quatre centimes (19.993,54 ) ; Condamne, en conséquence, la MSA des Pyrénées Orientales à payer la somme de 19.993,54 euros à Monsieur Y... ; Déboute Monsieur Y... de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice financier ; Condamne la MSA des Pyrénées Orientales à payer à Monsieur Y..., pour l'ensemble de la procédure de première instance et d'appel, la somme de sept cent soixante euros (760 ), en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; La condamne en outre aux dépens de première instance et d'appel avec pour ceux d'appel droit de recouvrement direct au profit de la SCP ARGELLIES - TRAVIER - WATREMET, avoués, en application des dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT, JFB/VS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 01/2762
Date de la décision : 16/09/2002

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Demande additionnelle - Recevabilité - Lien suffisant avec la demande originaire.

Doit être déclarée recevable la demande additionnelle effectuée devant la cour d'appel dès lors que la demande , consistant en des remboursements de retraites appréhendées à tort par une caisse de mutualité sociale, ne fait qu'élargir à une période plus vaste, les prétentions originaires, circonscrites dans un laps de temps moindre

AGRICULTURE - Mutualité sociale agricole - Assurances sociales - Cotisations.

Si une caisse de mutualité sociale agricole se voit reconnaitre par l'article L- 725 du code rural, l'existence d'une compensation, ayant ainsi le droit de prélever les cotisations dont sont redevables ses adhérents à son égard sur le montant des prestations servies, cette compensation porte uniquement sur le montant des seules prestations qu'elle même leur doit et non sur l'intégralité de leurs revenus annuels et dans les limites prévues en matière de salaires par l'article R- 145-2 du code du travail


Références :

Code du travail, article R. 145-2 Code rural, article L. 725-1

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2002-09-16;01.2762 ?
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