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14/01/2002 | FRANCE | N°2001/00146

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 14 janvier 2002, 2001/00146


Arrêt Assistance Publique des Hôpitaux de Paris / consorts X... et autres page 3 FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES Pascale X... est née le 3 octobre 1970 Peu après une opération de l'hypophyse au mois de septembre 1979 , il était diagnostiqué une insuffisance de sécrétions de l'hormone de croissance . Elle était alors traitée par l'administration d'une telle hormone de janvier à juillet 1985 . Ensuite elle menait une vie quotidienne sans difficulté au point qu'elle intégrait le personnel du Conseil Régional Languedoc Roussillon. Au mois d'août 1999 elle se plaignait

de vertiges, de crispation dans les jambes et des tremblements de...

Arrêt Assistance Publique des Hôpitaux de Paris / consorts X... et autres page 3 FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES Pascale X... est née le 3 octobre 1970 Peu après une opération de l'hypophyse au mois de septembre 1979 , il était diagnostiqué une insuffisance de sécrétions de l'hormone de croissance . Elle était alors traitée par l'administration d'une telle hormone de janvier à juillet 1985 . Ensuite elle menait une vie quotidienne sans difficulté au point qu'elle intégrait le personnel du Conseil Régional Languedoc Roussillon. Au mois d'août 1999 elle se plaignait de vertiges, de crispation dans les jambes et des tremblements des membres inférieurs . Egalement elle souffrait de troubles neurologiques à partir du mois de janvier 2.000. Il était alors suspecté, , à la suite du traitement par hormone de croissance extractive en 1985, une maladie de Creutzfeld Jakob iatrogéne compte tenu des signes cliniques présentées. Cette suspicion était confirmée le 6 juin 2.000 par le service des Maladies Endocriniennes du Centre Hospitalier Universitaire de Montpellier et le 4 octobre 2000 par le service de Neurologie du CHU de Marseille . Le 28 novembre 2.000 Pascale X... et ses parents Santo X... et Raymonde Gavila son épouse assignait sur le fondement de l'article 145 du nouveau Code de procédure civile : - l'association France Hypophyse prise en la personne de son liquidateur, - l'assistance Publique Hôpitaux de Paris, établissement public, - l'Institut Pasteur , fondation d'utilité publique, - la SA société Pharmacia et Upjhon, devant le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Montpellier afin d'obtenir une expertise médicale pour déterminer la nature exacte de la maladie dont Pascale X... souffrait, de rechercher les modalités de transmission, et d'évaluer leurs conséquences notamment les préjudices. Arrêt Assistance Publique des Hôpitaux de Paris / consorts X... et autres page 4 L'Institut Pasteur et la Société

Pharmacia et Upjhon déclaraient alors ne pas s'opposer à la demande d'expertise , sous toutes réserves de responsabilités, la société Pharmacia et Upjhon ajoutant que les éléments d'appréciation dont elle disposait la conduisait à contester la fourniture d'hormones de croissance par le laboratoire Kabi. En revanche l'association France Hypophyse et l'Assistance Publique Hôpitaux de Paris ne comparaissaient pas. Par ordonnance du 5 décembre 2.000 le Président du Tribunal de Grande Instance accueillait la demande et ordonnait une expertise confiée aux professeurs Billette de Villemar 26 avenue du docteur Arnold Y... à Paris et le professeur Gérars Cathelineau Hôpital Saint Louis à Paris avec notamment pour mission de : - préciser si l'affection dont souffre Pascale X... est une maladie de Cruzfeldt Jakob iatrogéne , -si une contamination est la conséquence du traitement administré à l'aide d'hormones de croissance de janvier à juillet 1985, - de préciser s'il existe d'autres modes de contamination possible en l'espèce, - de décrire les modalités de collecte, de conservation, de circulation et de distribution avec les rappels des moyens existant à l'époque de déceler une possible contamination, - de recherche si les prélèvements ont été effectués dans le respect des normes et précautions , -de distinguer de manière précise le rôle joué par chacun des défendeurs dans la production, l'homologation, la conservation, la circulation et la distribution des produits, enfin de préciser les conséquences dommageables. L'assistance Publique Hôpitaux de Paris a régulièrement relevé appel de cette décision le 10 janvier 2001en application de l'article 99 du nouveau Code de procédure civile. En cours d'instance le 12 juin 2001 Pascale X... décédait . Arrêt Assistance Publique des Hôpitaux de Paris / consorts X... et autres page 5 L'établissement appelant soutient essentiellement que la président du Tribunal de Grande Instance

n'était pas compétent en raison de la matière pour connaître de la demande dirigée contre lui, alors qu'il est un établissement public à caractère administratif en application de l'article R 716-3 1 du Code de la santé publique. Et il s'agit pour lui de faire respecter le principe de la séparation des pouvoirs, le litige étant indivisible. Il sollicite donc l'infirmation de l'Ordonnance déférée et le rejet des demandes seule la juridiction administrative pouvant connaître du litige. Les consorts X... demandent la confirmation de cette décision et la condamnation de l'établissement appelant à leur payer la somme de 2.500 frs chacun sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile . L'Association France Hypophyse, représentée par le Ministre de l'Emploi et de la Solidarité, prise en la personne du directeur de l'administration générale du Personnel et du Budget, expose que seul le juge administratif est compétent pour connaître d'une mesure d'expertise à l'encontre de l'association. En effet bien qu'obéissant à la loi de 1901, elle fonctionnait comme un ensemble réuni par l'Etat pour assurer une mission générale de service public. Egalement le dommage dont se plaint Pascale X... résulte de la fourniture par la Pharmacie des Hôpitaux de Paris de l'hormone de croissance qui lui a été administrée dans un hôpital public en sorte qu'il existait un contrat de droit public. Les intimés ont aussi saisis le juge administratif qui a ordonné le 18 janvier 2001 une expertise en choisissant les mêmes experts en sorte qu'il n'existe plus de motif légitime à l'instauration d'une mesure d'expertise ordonnée par le juge civil d'autant que cette mesure ne saurait plus être exécutée dans les termes où elle a été ordonnée en raison du décas de Pascale X.... Arrêt Assistance Publique des Hôpitaux de Paris / consorts X... et autres page 6 L'Institut Pasteur sollicite la confirmation de la décision déférée et la condamnation de l'Assistance Publique Hôpitaux de Paris à lui payer

la somme de 10.000 frs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile . La société SA Pharmacia et Upjohn, venant aux droits du laboratoire Kabi, a été assignée le 29 octobre 2001 à son siège social et à personne habilitée. Elle n'a pas constitué avoué. MOTIFS Attendu que selon les pièces produites, notamment le rapport de l'IGAS, l'association France Hypophyse, régie par la loi du 1er juillet 191 a été fondée le 27 février 1973 , avec publication au Journal Officiel du 16 mars 1973 ; que son siège social était fixé à l'origine à la clinique des maladies du rein et du métabolisme à l'Hôpital des Enfants Malades , puis à compter du 19 novembre 1985 a été fixé à la Pharmacie Centrale des Hôpitaux de l'Assistance Publique ; Attendu que cette association comprenant des membres de droit et d'autres adhérents élus, a assumé sans discontinuité depuis sa création deux missions essentielles à savoir celle de contrôler l'attribution d'hormone et celle d'animer et de coordonner l'ensemble du dispositif français ; Attendu que la production des hormones était assurée par l'Institut Pasteur, le conditionnement et la distribution par la Pharmacie Centrale des hôpitaux de l'assistance publique et le financement par la CNAMTS, tandis que l'association était chargée de la collecte des hypophyses et du contrôle de l'attribution de l'hormone, en sus de son rôle de fédérateur de l'ensemble ; Arrêt Assistance Publique des Hôpitaux de Paris / consorts X... et autres page 7 Attendu que, dans ce cadre l'association France Hypophyse désignait les médecins pédiatres à la commission nationale de répartition de l'hormone de croissance , commission intégrée au sein de cette association, et qui avait seule compétence pour décider de l'attribution des hormones et choisir les enfants ; que France Hypophyse avait élaboré des formulaires standards, et diffusé des notices précisant les règles d'attribution retenues par les experts ; Attendu que parallèlement France Hypophyse a procédé , depuis

l'origine, à la collecte des hypophyses ; qu'ainsi un dispositif était mis en ouvre consistant en : - une action d'information et d'incitation auprès des pédiatres et des anatomo pathologistes des centres hospitaliers , - le paiement , assuré par le budget de l'association, du prélèvement des hypophyses sur les cadavres de la conservation dans des congélateurs, - une rémunération de pédiatres vacataires chargés du ramassage périodique et du transport en emballage réfrigéré vers le laboratoire de l'Institut Pasteur ; Attendu que c'est ainsi que cette association a développé une activité telle que le rapporteur de l'IGAS a qualifié la situation de monopole dans la collecte ; qu'en outre il doit être souligné que jusqu'eu 1988 l'association a contribué " au fonctionnement et à l'organisation du ou des laboratoires nationaux assurant l'extraction des hormones hypophysaires " ; que ces mentions dans les statuts demeureront jusqu'en 1985 et l'association a d'ailleurs rémunéré des techniciens de laboratoire de l'Institut Pasteur et a accordé des subventions à cet organisme ; Attendu que l'association disposait enfin de ressources importantes tirées de la vente à l'Institut Pasteur des hypophyses collectées dans les hôpitaux ; qu'en raison de la marge commerciale brute ainsi dégagée , les subventions de la CNAMTS ou de l'Etat n'ont atteint, pendant la période actuellement en litige, que 10 à 15 % du budget, les dons des parents ne dépassant pas 3,3 % , et les cotisations s'étant élevées symboliquement à 3.000 frs au total ; Arrêt Assistance Publique des Hôpitaux de Paris / consorts X... et autres page 8 Attendu que plus dès l'origine la création de l'association a en fait échappé à l'administration, s'agissant d'une auto organisation d'éminents pédiatres par des initiatives personnelles, étant précisé d'une part que les représentants du ministère de la Santé n'ont jamais fait partie de l'instance réelle de direction qu'était le bureau de l'association,

d'autre part que l'importance des ressources constituait un facteur d'autonomie et qu'enfin un premier rapport, réclamé à l'IGAS en 1982 a été très mal reçu par les responsables de France Hypophyse qui n'ont pas mis en ouvre les recommandations énoncées à cette époque ; Attendu qu'en conséquence il apparaît que l'association était le maître d'ouvre d'un système réalisant la collecte , désignant les patients aptes à bénéficier de l'administration des produites et coordonnant l'ensemble des activités dans une autonomie indiscutable, les autres organismes lui étant subordonnés dans cette activité et il existait une intégration très étroite sous l'égide de l'association France Hypophyse, de l'ensemble des structures privés, publiques ou para publiques; que cette constatation contredit, du moins en l'état des investigations existantes et pour le période litigieuse, les affirmations de l'Assistance Publique Hôpitaux de Paris ; Attendu que les relations ayant existé entre l'association France Hypophyse, organisme de droit privé, qui a récolté les produits, mis en place les circuits de transport jusqu'au traitement, et ensuite établis la liste des personnes devant les recevoir, dont Pascale X..., relèvent du droit privé ; que la mise en cause actuelle de cette association par les héritiers et les membres de la famille, dont l'intérêt moral ne peut être dénié, est donc un litige qui relève, du moins pour cet aspect, de la compétence des juridictions judiciaires s'agissant de l'allégation de la participation par l'association à la fourniture d'un produit non exempt de vice ; Attendu que s'agissant de la simple mise en ouvre d'une expertise destinée à préciser les faits et à dégager d'éventuelles responsabilités, et ceci avant tout procès, seul est applicable l'article 145 du Nouveau Code de Procédure Civile qui institue un régime autonome des référés; Arrêt Assistance Publique des Hôpitaux de Paris / consorts X... et autres page 10 Attendu que , sur le fondement de ce texte, la juridiction

saisie ne peut refuser à une partie une expertise dans la mesure où un motif légitime est établi et où l'action exercée, qui tend à préserver ou établir la preuve de faits, n'est pas d'ores et déjà manifestement infondée ; que les conditions légales étant satisfaites, la saisine du juge des référés administratif pour obtenir une expertise ne constitue pas un obstacle, étant précisé que celle ordonnée par le premier juge est antérieure au décès et de ce chef a un intérêt certain quant à la conservation des preuves ; Attendu que dans ces conditions il convient de confirmer l'ordonnance qui a accueilli la demande et ordonné une expertise ; Attendu qu'il parait équitable que l'Assistance Publique Hôpitaux de Paris participe à concurrence de 200 ä aux frais exposés par chacun des intimés en cause d'appel et non compris dans les dépens ceci en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; qu'il n'y a pas lieu d'allouer à l'Institut Pasteur une somme à ce titre ; Vu l'article 696 du Nouveau Code de Procédure Civile;

PAR CES MOTIFS

LA COUR Confirme l'Ordonnance déférée en toutes ses dispositions, Y Ajoutant, Condamne Assistance Publique Hôpitaux de Paris à payer à chacun des intimés, personne physique, la somme de 200 ä pour ses frais en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Rejette la demande de l'Institut Pasteur, Arrêt Assistance Publique des Hôpitaux de Paris / consorts X... et autres page 10 Condamne Assistance Publique Hôpitaux de Paris et l'association France Hypophyse aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés, pour ces derniers, par les avoués de la cause selon les dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : 2001/00146
Date de la décision : 14/01/2002

Analyses

MESURES D'INSTRUCTION

L'action en justice, demandant l'obtention d' une expertise destinée à préciser les faits et à dégager d'éventuelles responsabilités dans la fourniture d'hypophyse non exempt de vices ayant entrainé un décès, et dirigée à l'encontre d'une association régie par la loi de 1901 et maitre d'oeuvre d'un système de collecte d'hypophyse où plusieurs autres organismes lui sont subordonnés, relève du droit privé puisque cette association jouit d'une autonomie vis à vis de l'administration, tant au niveau de sa direction que de ses ressources. Seul est alors applicable l'article 145 du nouveau Code de procédure civile qui institue un régime autonome des référés, sans qu'il puisse être opposée l'existence d'une saisine du juge des référés administratifs, celle ordonnée par le premier juge étant antérieure au décès et présentant de ce fait un intérêt certain dans la conservation de la preuve


Références :

Code de procédure civile (Nouveau), article 145

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2002-01-14;2001.00146 ?
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