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11/07/2024 | FRANCE | N°23/01458

France | France, Cour d'appel de Metz, 6ème chambre, 11 juillet 2024, 23/01458


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS













N° RG 23/01458 - N° Portalis DBVS-V-B7H-F74V

Minute n° 24/00134





Association CARREFOUR

C/

Association FEDERATION DIOCESAINE DES OEUVRES DE CHARITE DE MO SELLE 'CARITAS'









Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de METZ, décision attaquée en date du 28 Juin 2023, enregistrée sous le n° 20/01285





COUR D'APPEL DE METZ



CHAMBRE COMME

RCIALE



ARRÊT DU 11 JUILLET 2024









APPELANTE :



Association CARREFOUR, représentée par son Président

[Adresse 3]

[Localité 1]



Représentée par Me Stéphane FARAVARI, avocat au barreau de METZ

...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 23/01458 - N° Portalis DBVS-V-B7H-F74V

Minute n° 24/00134

Association CARREFOUR

C/

Association FEDERATION DIOCESAINE DES OEUVRES DE CHARITE DE MO SELLE 'CARITAS'

Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de METZ, décision attaquée en date du 28 Juin 2023, enregistrée sous le n° 20/01285

COUR D'APPEL DE METZ

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 11 JUILLET 2024

APPELANTE :

Association CARREFOUR, représentée par son Président

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Stéphane FARAVARI, avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

Association FEDERATION DIOCESAINE DES OEUVRES DE CHARITE DE MOSELLE 'CARITAS', représentée par son Président

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Armelle BETTENFELD, avocat au barreau de METZ

DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du 16 Avril 2024 tenue par Mme Anne-Yvonne FLORES, Magistrat rapporteur, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans son délibéré, pour l'arrêt être rendu le 11 Juillet 2024, en application de l'article 450 alinéa 3 du code de procédure civile.

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Cindy NONDIER

COMPOSITION DE LA COUR :

PRÉSIDENT : Mme FLORES, Présidente de Chambre

ASSESSEURS : Mme DEVIGNOT,Conseillère

Mme DUSSAUD, Conseillère

ARRÊT : Contradictoire

Rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Anne-Yvonne FLORES, Présidente de Chambre et par Mme Cindy NONDIER, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Par acte authentique en date du 5 septembre 1977, l'association Foyer Saint Joseph et l'association Carrefour ont conclu un contrat intitulé « bail à loyer » portant sur la mise à disposition d'un ensemble immobilier situé [Adresse 3] à [Localité 1] pour une durée de 31 années entières et consécutives à compter du 1er septembre 1977 à charge pour l'association Carrefour d'y poursuivre une mission d'accueil de mineurs en difficultés.

Selon décret en date du 27 mars 2006, la dissolution de l'association Foyer Saint Joseph a été approuvée et la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle Caritas (ci-après dénommée l'association Caritas) a été autorisée à accepter la dévolution de l'actif net résultant de la liquidation de l'association Foyer Saint Joseph.

Par acte authentique du 20 décembre 2006, l'association Foyer Saint Joseph a fait donation pure et simple à l'association Caritas de l'ensemble immobilier sis[Adresse 3].

Suivant avenants au contrat de « bail à loyer » passés entre l'association Caritas et l'association Carrefour en date des 29 août 2008 et du 22 mai 2009, la durée du contrat conclu le 05 septembre 1977 a été successivement prorogée jusqu'au 31 août 2010.

L'association Carrefour s'étant maintenue dans les lieux postérieurement au 31 août 2010, l'association Caritas a saisi le président du tribunal d'instance de Metz qui, par ordonnance de référé en date du 07 mars 2011, a ordonné une expertise judiciaire afin de procéder à l'évaluation de la valeur locative de l'ensemble immobilier situé à [Adresse 3], et ce en vue de faire fixer le montant de l'indemnité d'occupation représentant la contrepartie de la jouissance des lieux par l'association Carrefour.

Par jugement du 14 août 2014, devenu définitif après le désistement d`appel de l'association Carrefour constaté par ordonnance du 9 mai 2017, le tribunal de grande instance de Metz a débouté l'association Carrefour de l'ensemble de ses demandes tendant à contester la transmission d'actif net de l'association Foyer Saint Joseph à l'association Caritas, et donc la qualité de propriétaire de l'ensemble immobilier sis rue Marchant à Metz de l'association Caritas.

Par arrêt en date du 28 novembre 2016, le Conseil d'Etat a rejeté la requête de l'association Carrefour aux fins d`annulation de la décision de rejet de sa demande d`abrogation du décret du 27 mars 2006.

Par exploit d'huissier délivré le 16 juillet 2020, l'association Caritas a constitué avocat et a fait assigner l`association Carrefour devant le tribunal judiciaire de Metz, chambre civile, aux fins de le voir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, au visa des articles 12 du code de procédure civile et 1708 et suivants du code civil :

ordonner, à défaut de départ volontaire dans le mois suivant la signification du jugement à intervenir, l'expulsion de l'association Carrefour et de tous occupants de son chef des locaux situés [Adresse 3] à [Localité 1] avec, au besoin, le concours de la force publique et l'assistance d`un serrurier, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard,

condamner l`association Carrefour à lui verser 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner l'association Carrefour aux entiers dépens.

Par jugement contradictoire rendu le 28 juin 2023, le tribunal judiciaire de Metz a :

débouté l'association Carrefour de sa demande de requalification du contrat de bail conclu entre elle et l'association Foyer Saint Joseph le 5 septembre 1977, en contrat de location-gérance,

constaté que l'association Carrefour occupe sans droit ni titre l'ensemble immobilier situé[Adresse 3]) depuis le 31 août 2010,

ordonné en conséquence, à défaut de départ volontaire des lieux dans le délai de 6 mois suivant la signification de la présente décision, l`expulsion de l'association Carrefour et de tout occupant de son chef, de l`ensemble immobilier situé [Adresse 3] à [Localité 1], et ce au besoin avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier, sous astreinte de 200 euros par jour de retard pendant un délai de 6 mois, passé lequel il pourra être à nouveau fait droit,

débouté l`association Carrefour de sa demande de condamnation de l'association fédération diocésaine des 'uvres de charité de Moselle association Caritas Moselle à lui rembourser le coût de travaux ou d'impenses,

condamné l'association Carrefour à payer à l`association fédération diocésaine des 'uvres de charité de Moselle association Caritas Moselle une indemnité de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

débouté l'association Carrefour de sa demande de condamnation de l'association fédération diocésaine des 'uvres de charité de Moselle association Caritas Moselle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné l`association Carrefour aux dépens de l'instance,

rappelé que la présente décision est exécutoire de plein droit par provision.

Par déclaration du 11 juillet 2023, enregistrée au greffe de la cour d'appel de Metz le 17 juillet 2023, l'association Carrefour a interjeté appel aux fins d'annulation, subsidiairement infirmation, du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Metz le 28 juin 2023 en visant la totalité de ses dispositions et en ce qu'il a rejeté ses demandes.

La Fédération association Caritas Moselle a formé appel incident par voie de conclusions.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 mars 2024.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions du 20 février 2024, auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, l'association Carrefour demande à la cour d'appel de :

« Recevoir l'appel de l'Association association Carrefour, le dire bien fondé.

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il déboute l'association Carrefour de la demande de requalification du contrat de bail conclu entre elle et l' association Foyer St Joseph le 05.09.1977, en contrat de location-gérance, en ce qu'il constate que l' association Carrefour occupe sans droit ni titre l'ensemble immobilier situé [Adresse 3] à [Localité 1] depuis le 31.08.2010, en ce qu'il ordonne en conséquence, à défaut de départ volontaire des lieux dans le délai de 6 mois suivant la signification de la présente décision, l'expulsion de l' association Carrefour et de tout occupant de son chef, de l'ensemble immobilier situé [Adresse 3], et ce au besoin avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier, sous astreinte de 200 euros par jour de retard pendant un délai de 6 mois, passé lequel il pourra être à nouveau fait droit, en ce qu'il déboute l' association Carrefour de sa demande de condamnation de l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle »' à lui rembourser le coût de travaux ou d'impenses, en ce qu'il condamne l' association Carrefour à payer à l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle »' une indemnité de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il déboute l' association Carrefour de sa demande de condamnation de l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle »' au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il condamne l' association Carrefour aux dépens de l'instance, en ce qu'il rappelle que la décision est exécutoire de plein droit par provision, en ce qu'il rejette les demandes de l' association Carrefour tendant à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet de l'ensemble des demandes de l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle »', tendant reconventionnellement à voir déclarer qu'il s'est opéré entre la Fédération association Caritas Moselle et l' association Carrefour un nouveau bail à l'expiration du bail initial conclu le 05.09.1977 et de ses avenants, tendant à voir déclarer que ce nouveau bail comporte les mêmes clauses et conditions que le précédent, tendant à voir réserver le droit de l' association Carrefour de solliciter en application des dispositions de l'article 1716 du code civil, une estimation du prix du bail par expert, tendant subsidiairement à voir déclarer que la convention liant l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » à l' association Carrefour est un contrat de location-gérance devant se poursuivre aux conditions financières du bail conclu en date du 05.09.1977, tendant en tout état de cause à la condamnation de l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle »' à payer à l' association Carrefour la somme de 2 101 000 euros en remboursement de ses travaux et investissements de grosses réparations avec intérêts de droit au taux légal à compter du jugement, tendant à la condamnation de l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle »' à payer à l' association Carrefour la somme de 2 635 000 euros en remboursement de ses impenses nécessaires et impenses utiles avec intérêts au taux légal à compter du jugement, tendant à la condamnation de l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle »' aux entiers frais et dépens de l'instance ainsi qu'à lui payer une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, tendant à voir écarter l'exécution provisoire du jugement.

Et statuant à nouveau :

Vu l'article 256 du code civil,

Vu les articles 1716 et 1738 du code civil,

Vu les articles 555, 606, 1100, 1301-2 et 1303 du code civil,

Vu les articles L 144-1 et suivants du code de commerce,

Déclarer irrecevable l'ensemble des demandes, fins et prétentions de la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle », subsidiairement les dire mal fondées et les rejeter.

Recevoir les demandes reconventionnelles de l'Association association Carrefour et les dire bien fondées.

Constater la tacite reconduction du bail et déclarer qu'il s'est opéré entre la Fédération Diocésaine des'uvresde Charité de Moselle « association Caritas Moselle » et l'Association association Carrefour un nouveau bail à l'expiration du bail initial conclu le 5 septembre 1977 et de ses avenants.

Prononcer l'existence de ce nouveau bail et ordonner la poursuite des relations entre les parties selon ce nouveau bail.

Déclarer et ordonner que ce nouveau bail comporte les mêmes clauses et conditions que le précédent, subsidiairement, réserver le droit à l'Association association Carrefour de solliciter en application de l'article 1716 du code civil une estimation du prix du bail par expert.

Débouter en conséquence la Fédération Diocésaine des'uvresde Charité de Moselle « association Caritas Moselle » de sa demande d'expulsion de l'Association association Carrefour et de tout occupant de son chef de l'ensemble immobilier situé [Adresse 3] à [Localité 1].

Subsidiairement,

Prononcer la requalification de la convention liant la Fédération Diocésaine des'uvresde Charité de Moselle « association Caritas Moselle » à l'Association association Carrefour en contrat de location-gérance devant se poursuivre aux conditions financières du bail en date du 5 septembre 1977.

Débouter en conséquence la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » de sa demande d'expulsion de l'Association association Carrefour et de tout occupant de son chef de l'ensemble immobilier situé [Adresse 3] [Localité 1].

Plus subsidiairement encore,

Constater et prononcer l'existence d'une obligation naturelle de la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » envers l'Association association Carrefour.

Prononcer la transformation de cette obligation naturelle en une obligation civile.

Débouter en conséquence la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » de sa demande d'expulsion de l'Association association Carrefour et de tout occupant de son chef des biens immobiliers situés [Adresse 3] à [Localité 1].

Rejeter en tout état de cause l'ensemble des demandes de la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle », les dire mal fondées.

Déclarer irrecevable l'appel incident formé par l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » pour défaut de succombance et d'intérêt à agir.

Subsidiairement, rejeter l'appel incident de par l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle », le dire mal fondé.

Rejeter l'ensemble des fins de non-recevoir soulevées par l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle ».

Débouter l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

A titre infiniment subsidiaire, et si par impossible la Cour maintenait l'expulsion de l'Association association Carrefour des biens immobiliers situés [Adresse 3] [Localité 1].

Rejeter la demande d'astreinte et dire n'y avoir lieu de prononcer une astreinte.

Subsidiairement, repousser le délai pour quitter les lieux et le point de départ de toute astreinte éventuelle à six mois suivant la signification de l'arrêt à intervenir.

Condamner la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » à payer à l'Association association Carrefour une somme de 2 101 000 euros en remboursement de ses travaux et investissements de grosses réparations, avec intérêts au taux légal à compter du jugement.

Condamner la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » à payer à l'Association association Carrefour une somme de 2 635 000 euros en remboursement de ses impenses nécessaires et impenses utiles, avec intérêts au taux légal à compter du jugement.

En tout état de cause, condamner la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » aux entiers frais et dépens d'instance et d'appel, ainsi qu'à payer à l'Association association Carrefour une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance, et une somme de 10 000 euros au même titre pour la procédure d'appel ».

Au soutien de ses prétentions, l'association Carrefour affirme d'abord que les demandes de l'association Caritas ne sont pas recevables dans la mesure où l'expertise relative à la valeur locative de l'ensemble immobilier est encore en cours, démontrant selon elle une volonté de poursuivre les relations contractuelles et faisant courir le risque d'une contrariété entre les décisions.

L'association Carrefour ajoute que l'association Caritas est irrecevable à former appel incident faute de remplir les conditions d'intérêt et de succombance. L'association Carrefour ajoute que l'association Caritas n'a pas soulevé de fins de non-recevoir en première instance.

L'association Carrefour soutient en outre que ses demandes ne souffrent d'aucune prescription, qu'elle a intérêt et qualité à agir tout autant que l'association Caritas a intérêt et qualité à défendre ou encore que sa demande reconventionnelle en reconnaissance d'une obligation naturelle est recevable comme se rattachant par un lien suffisant aux prétentions originaires tendant à son maintien dans les lieux.

Sur le fondement des articles 1716, 1736, 1738 su code civil ainsi que 256 du code local de procédure civile, l'association Carrefour soutient ensuite que, faute pour l'association Caritas d'avoir fait délivrer un commandement de quitter les lieux et d'avoir solliciter son expulsion plus tôt, leur relation contractuelle s'est poursuivie autour d'un nouveau bail verbal auquel l'association Caritas n'a pas délivré congé, justifiant pour l'appelante que la demande d'expulsion soit rejetée. L'association Carrefour ajoute que le fondement juridique de son occupation des locaux depuis le 1er septembre 2010 résulte d'un accord tacite entre les parties et notamment par la tacite reconduction du bail conclu en 1977 et de ses avenants conduisant à un nouveau bail, cette fois-ci verbal, auquel il ne peut être mis fin que par la délivrance d'un congé et suivant un délai, respectant les usages, laissé au preneur pour quitter les lieux.

Subsidiairement, l'association Carrefour sollicite, au visa des articles L. 144-1 et suivants du code de commerce, la requalification du contrat de bail en contrat de location-gérance soutenant que l'approche économique des relations établies entre elle et l'association Caritas conduit à considérer que les actes intervenus ont abouti à ce que l'association Carrefour poursuive l'exploitation de l'activité économique de l'association Saint Joseph. L'association Carrefour se prévaut notamment d'une clientèle civile caractérisant un fonds civil et précise que le fait de ne poursuivre aucun but lucratif n'exclue pas l'exercice d'une activité économique. L'association Carrefour rappelle et explique également avoir le statut et suivre le fonctionnement des établissements sociaux et médicaux sociaux. La poursuite des relations au travers du contrat de location-gérance fait, selon l'association Carrefour, obstacle à la demande d'expulsion de l'association Caritas.

Subsidiairement encore, l'association Carrefour soutient, au visa de l'article 1100 du code civil, que l'engagement d'hébergement pris par l'association Caritas constitue une obligation naturelle mutée en obligation civile, faisant selon elle obstacle à la demande d'expulsion.

En cas de confirmation du jugement en ce qu'il a ordonné son expulsion, l'association Carrefour soutient qu'il n'y a pas lieu de confirmer la demande d'astreinte et qu'il y a lieu de repousser le délai qui lui est laissé pour quitter les lieux.

L'association Carrefour sollicite en outre l'indemnisation des travaux et investissements qu'elle a réalisés sur l'immeuble au cours de la période d'occupation de l'ensemble immobilier, se fondant pour cela sur les clauses du contrat de bail mais également sur les articles 1720 et 606 du code civil. L'association se fonde également sur l'accession telle que régie par l'article 555 du code civil, mais également la gestion d'affaire et l'enrichissement injustifié selon les dispositions de l'article 1301-2 et 1303 du même code. Selon l'association Carrefour, ses dépenses sont établies selon un listing des travaux réalisés depuis 1977 ainsi qu'une attestation du commissaire aux comptes, et précise limiter sa demande au montant de la valeur nette restant à amortir, soit 2 101 millions d'euros.

Par conclusions du 13 décembre 2023, auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la Fédération association Caritas Moselle demande à la cour d'appel de :

Rejeter l'appel de l'Association association Carrefour,

Accueillir uniquement l'appel incident de l'Association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » et le déclarer recevable et fondé ;

Infirmer le jugement uniquement en ce que, statuant au fond, il a :

Débouté l'Association association Carrefour de sa demande de requalification du contrat de bail conclu entre elle et l'Association Foyer Saint Joseph le 5 septembre 1977, en contrat de location-gérance,

Débouté l'Association association Carrefour de sa demande de condamnation de l'Association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle », à lui rembourser le coût de travaux ou d'impenses qui s'élevaient aux regard des prétentions de première instance au somme de 2 101 000 euros (remboursement des travaux et investissements de grosses réparations) et de 2 635 000 euros (remboursement des impenses nécessaires et utiles) et ceux avec intérêts au taux légal à compter du jugement

Et statuant à nouveau :

Déclarer l'Association association Carrefour irrecevable en ses demandes tendant à voir:

Prononcer la requalification de la convention liant la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » à l'Association association Carrefour en contrat de location-gérance devant se poursuivre aux conditions financières du bail en date du 5 septembre 1977,

Débouter en conséquence la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » de sa demande d'expulsion de l'Association association Carrefour et de tout occupant de son chef de l'ensemble immobilier situé [Adresse 3] [Localité 1]

Condamner de l'Association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » à lui rembourser le coût de travaux ou d'impenses qui s'élevaient au regard des prétentions de première instance aux sommes de 2 101 000 euros en remboursement des travaux et investissements de grosses réparations et de 2 635 000 euros en remboursement des impenses nécessaires et utiles et ce, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;

Et le confirmer pour le surplus,

Subsidiairement,

Confirmer le jugement, au besoin par adjonction de motifs et subsidiairement par substitution de motifs,

Très subsidiairement, confirmer le jugement en toutes ses dispositions et débouter l'Association association Carrefour de l'ensemble de ses demandes,

Y ajoutant,

Déclarer l'Association association Carrefour irrecevable en sa demande présentée pour la première fois à hauteur de Cour, et tendant à voir :

Constater et prononcer l'existence d'une obligation naturelle de la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » envers l'Association association Carrefour.

Prononcer la transformation de cette obligation naturelle en une obligation civile.

Débouter en conséquence la Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » de sa demande d'expulsion de l'Association association Carrefour et de tout occupant de son chef des biens immobiliers situés [Adresse 3] [Localité 1].

Subsidiairement, débouter l'Association association Carrefour de ces mêmes demandes.

En tout état de cause,

Déclarer l'Association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins, moyens, conclusions et prétentions et les accueillir,

Déclarer l'Association association Carrefour irrecevable et subsidiairement mal fondée en l'ensemble de ses demandes, fins, moyens, conclusions et prétentions et les rejeter.

Condamner l'Association association Carrefour aux entiers frais et dépens d'appel.

Condamner l'Association association Carrefour à payer à l'Association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle « association Caritas Moselle » une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel.

Au soutien de ses prétentions et s'agissant d'abord des demandes afférentes à l'expulsion de l'association Carrefour, l'association Caritas affirme avoir qualité et intérêt à agir dans la mesure où, selon elle, le contrat de bail a pris fin le 31 aout 2010 et que l'association Carrefour se trouve depuis cette date occupant sans droit ni titre de locaux lui appartenant. L'association Caritas affirme que l'action en fixation de l'indemnité d'occupation diffère de l'action en expulsion en ce qu'elles n'ont pas le même objet, emportant donc selon elle aucune contrariété.

L'association Caritas soutient ensuite que le bail conclu le 05 septembre 1977 avait été consenti pour une durée de 31 ans, que deux avenants sont intervenus par la suite pour proroger le terme du bail au 31 août 2009 puis au 31 août 2010. L'intimée ajoute que le second avenant contient la mention selon laquelle cette seconde prolongation est réalisée à titre exceptionnel et pour une nouvelle durée maximale et ferme de douze mois, précisant qu'aucune prorogation ne sera encore possible. L'intimée en déduit que le contrat est arrivé à terme le 31 août 2010 et que l'association Carrefour se trouve donc occupante sans droit ni titre depuis le 1er septembre 2010. L'intimée soutient avoir envoyé à l'association Carrefour une mise en demeure de libérer les lieux, à la suite de négociations amiables infructueuses, mais également de lui avoir laissé un délai de trois mois pour y procéder.

L'association Caritas ajoute que l'octroi d'un nouveau délai, compte tenu de la durée de l'occupation sans droit ni titre et du fait que, selon elle, l'association Carrefour n'ait jusqu'à présent entrepris aucune démarche pour libérer les lieux, n'est pas justifié mais démontre la nécessité d'une astreinte.

Sur la recevabilité de l'appel incident qu'elle a formé, l'association Caritas soutient être défenderesse aux demandes reconventionnelles présentées par l'appelante et qu'elle n'a à ce titre opposé aucune demande mais seulement des moyens de défense. L'association Caritas ajoute qu'elle a entendu faire appel que pour clarifier ses moyens de défenses et ainsi opposer la fin de non-recevoir aux demandes reconventionnelles de l'association Carrefour. L'intimée rappelle en outre pouvoir opposer ces moyens en tout état de cause, en application des articles 122 et 123 du code de procédure civile. Elle se prévaut également des articles 563, 564 et 565 du code de procédure civile pour écarter le moyen adverse tenant à la demande nouvelle. L'association Caritas précise enfin que si la qualification d'appel incident ne satisfaisait pas aux règles du droit processuel, elle a en tout état de cause présenté une demande d'infirmation pour faire valoir les fins de non-recevoir qu'elle soulève.

Sur la demande tendant à voir constater la tacite reconduction du bail, l'association Caritas affirme qu'elle et l'association Carrefour ont expressément convenu à l'expiration du bail au 31 aout 2010 sans prorogation possible, conformément aux stipulations de l'avenant signé par elles le 22 mai 2009, d'autant qu'il y est également stipulé que le bail prendra fin à la date convenue sans qu'il ne soit nécessaire de délivrer un congé. L'association Caritas affirme en outre que la tacite reconduction, régie par l'article 1738 du code civil, repose sur une présomption de volonté des parties dont l'existence est souverainement appréciée par les juges du fond, et qu'en l'espèce il a été contractuellement convenu qu'il n'y aurait aucun renouvellement et qu'en tout état de cause elle n'a jamais donné son accord pour une reconduction et a toujours manifesté sa volonté de ne pas poursuivre le contrat de bail. L'intimée ajoute encore que son action en référé pour obtenir estimation de la valeur locative, est destinée à fixer sa demande au titre de l'indemnité d'occupation et qu'elle ne vaut pas demande de fixation de loyer.

Sur la demande de requalification du contrat de bail en contrat de location-gérance, l'association Caritas soulève d'abord la fin de non recevoir sur le fondement de la prescription et ainsi des articles 122 du code de procédure civile et 2224 du code civil.

Subsidiairement, l'association Caritas affirme que la demande est mal fondée, alléguant qu'à la date de la conclusion du contrat de bail, le bailleur originel n'a jamais été propriétaire ou exploitant d'un fonds de commerce ou d'un établissement artisanal, qu'il n'a alors jamais été concédé la location d'un fonds de commerce et qu'une telle requalification est exclue par le contrat de bail lui-même en son article 2. L'association Caritas affirme encore que l'appelante ne démontre pas en quoi les résidents des établissements sociaux et médico-sociaux pourraient être considérés comme un élément constitutif d'un fonds civil. Elle ajoute encore que l'association Carrefour n'est pas venue aux droits de l'association Foyer Saint Joseph qui a fait l'objet d'une dissolution et d'une liquidation amiable et qu'elle n'a pas été choisie pour se voir attribuer l'actif net.

Sur la demande de reconnaissance d'une obligation naturelle, l'association Caritas affirme d'abord que cette demande est irrecevable faute d'avoir été présentée pour la première fois en appel et comme ne se rattachant pas par un lien suffisant à la demande initiale.

Subsidiairement, l'association Caritas fait d'abord observer que les dispositions sur lesquelles se fonde l'association Carrefour sont entrées en vigueur le 1er octobre 2016, et ensuite que l'obligation naturelle ne peut naitre que de l'exécution volontaire ou de la promesse d'exécution d'un devoir de conscience envers autrui. L'association Caritas affirme ne jamais avoir entendu reconduire le contrat de bail ni avoir promis de le faire et qui ne peut être tirées de telles conséquences aux tentatives de négociations qu'elles ont entamées ensemble mais sans succès.

Sur la demande reconventionnelle en paiement, l'association Caritas sollicite l'irrecevabilité de cette prétention faute de lien suffisant entre la demande principale et cette demande, sur le fondement des articles 64 et 70 du code de procédure civile. L'intimée soulève également le défaut de qualité et d'intérêt à agir exposant que l'association Carrefour ne justifie pas avoir été solvens des travaux qui auraient été réalisés, mais encore le défaut de qualité et d'intérêt à défendre puisqu'elle soutient n'avoir été propriétaire de l'immeuble qu'à compter du 1er janvier 2007 sans pour autant avoir absorbé l'association Foyer Saint Joseph. Enfin, l'association Caritas affirme que la demande est partiellement prescrite, au visa de l'article 2224 du code civil.

Subsidiairement, l'association Caritas soulève l'application du contrat traitant de ce sujet et notamment de la clause, prévu à l'article 1er du contrat, en vertu de laquelle les grosses et menues réparations ont été mises à la charge du preneur. L'intimée ajoute qu'il convient d'interpréter cette clause à l'aune de l'article « loyer » du contrat de bail mettant à la charge du preneur un loyer annuel de 1 500 francs lequel exclu tout enrichissement injustifié. Selon l'association Caritas, l'association Carrefour reconnait judiciairement que le financement des travaux de réhabilitation de l'ensemble immobilier était la contrepartie du faible loyer. L'intimée précise encore que le contrat prévoyait notamment une clause d'accession laquelle excluait toute indemnité pour le preneur.

MOTIFS DE LA DECISION

A-Sur la procédure

A titre liminaire, il est observé que, contrairement aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, l'association Carrefour, si elle demande l'irrecevabilité de l'ensemble des demandes de l'association Caritas, ne formule de moyens au soutien de cette demande que contre les demandes d'expulsion, d'infirmation et d'irrecevabilité soulevées par l'association Caritas.

Il ne sera donc statué que sur la recevabilité des demandes d'expulsion, d'infirmation et d'irrecevabilité des demandes de l'association Caritas. Les autres demandes sont déclarées recevables.

I- Sur la recevabilité des demandes formées par l'association Caritas tendant à voir déclarer irrecevables les demandes de l'association Carrefour en requalification du contrat de bail et en remboursement des travaux et impenses

L'article 123 du code de procédure civile dispose que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.

Il est constant que les fins de non-recevoir peuvent être soulevées pour la première fois à hauteur de cour.

En l'espèce, il apparait d'abord des conclusions de l'association Carrefour que celle-ci n'évoque le moyen tenant à la nouveauté de la prétention adverse qu'au soutien de sa demande tendant à voir déclarer irrecevable l'appel incident formé par l'association Caritas.

Or, s'il apparait en effet que l'association Caritas sollicite à hauteur d'appel l'irrecevabilité des demandes en requalification et en indemnisation de l'association Carrefour, cette demande ne saurait être qualifiée de nouvelle dans la mesure où, en application de l'article 123 du code de procédure civile, elle peut être proposée en tout état de cause.

Les demandes d'irrecevabilité soulevées par l'association Caritas contre les demandes de requalification du contrat et d'indemnisation des travaux et impenses formée par l'association Carrefour sont donc recevables.

II-Sur la recevabilité des demandes de l'association Caritas contre l'association Carrefour

Sur la recevabilité au regard des dispositions de l'article 546 du code de procédure civile

L'article 546 alinéa 1er du code de procédure civile dispose que le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt, si elle n'y a pas renoncé.

En l'espèce, l'association Caritas a formé appel incident et demandé l'infirmation du jugement en ce qu'il a débouté l'association Carrefour de sa demande de requalification du contrat de bail en contrat de location-gérance et en ce qu'il a débouté l'association Carrefour de sa demande de condamnation de l'association Caritas au remboursement du coût des travaux ou impenses. Il est précisé que ces chefs du dispositif sont également visés par la déclaration d'appel et, de ce fait, dévolus à la cour par l'appel principal.

Plus précisément, le jugement, en déboutant l'association Carrefour, a répondu à une défense au fond tandis que l'association Caritas, à hauteur de cour, oppose comme moyen de défense une fin de non-recevoir qui n'appelle donc pas la même solution.

L'association Caritas, même s'il elle n'a pas succombé en première instance, n'aurait donc pas pu soulever de fin de non-recevoir sans solliciter l'infirmation du jugement, de sorte qu'elle a bien intérêt à former appel incident.

L'appel incident est donc recevable.

Sur la recevabilité de la demande d'expulsion de l'association Carrefour

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Il est constant que l'article précité ne procède pas à une énumération exhaustive des fins de non recevoir.

En l'espèce, il apparait que l'association Carrefour soulève le risque de contradiction entre la procédure de référé expertise portant sur la valeur immobilière du bien, non encore aboutie, et la procédure actuelle initiée par l'association Caritas aux fins d'obtenir l'expulsion de l'association Carrefour et ne comportant pas de demande indemnitaire relative à la jouissance du bien par cette dernière.

Cependant, le risque de contradiction ne constitue pas une fin de non-recevoir de la demande de sorte que le moyen soulevé est inopérant.

La demande d'expulsion de l'association Caritas est donc recevable.

III- Sur la recevabilité des demandes de l'association Carrefour

Sur la prescription de la demande de requalification du contrat de bail en contrat de location-gérance

Aux termes de l'article 64 du code de procédure civile constitue une demande reconventionnelle la demande par laquelle le défendeur originaire prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire.

En vertu des articles 71 et 72 du code de procédure civile, constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen au fond du droit, la prétention de l'adversaire. Elle peut être opposée en tout état de cause.

En l'espèce, alors que l'association Caritas sollicite l'expulsion de l'association Carrefour, cette dernière demande notamment la requalification du contrat de bail en contrat de location-gérance.

La demande formée par l'association Carrefour ne se résume donc pas au simple rejet de la prétention adverse et doit dès lors être considérée comme une demande reconventionnelle soumise à la prescription.

Aux termes de l'article 2262 du code civil, contemporain au cas d'espèce, toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans, sans que celui qui allègue cette prescription soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi.

L'article 2224 du code civil, issu de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Aux termes de l'article 2222 alinéa 2 du même code, en cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Selon l'article 33 du décret n°53-960 du 30 septembre 1953 applicable à l'espèce, repris à l'article L. 145-60 du code de commerce depuis le 21 septembre 2000, les actions relatives aux baux commerciaux sont soumises à une prescription biennale.

Il est en outre constant que le délai de prescription applicable aux actions en requalification du contrat court à compter de la conclusion du contrat.

En l'espèce, il est constant que le bail conclu en 1977 est un bail civil régit pas les règles du code civil. Aucune règle légale ou réglementaire instaure un délai de prescription spéciale aux contrats de location-gérance de sorte que la demande de requalification dont s'agit est soumise au délai de prescription de droit commun.

Ensuite, le contrat ayant été conclu le 5 septembre 1977 et n'étant pas contesté que l'activité de l'association Carrefour a commencé depuis cette date, la prescription a commencé à courir dès sa conclusion, de sorte qu'elle a été acquise trente ans plus tard, soit le 5 septembre 2007.

Encore, à supposer la conclusion d'un nouveau bail à compter du 1er septembre 2010, la prescription de la demande de requalification de ce bail en contrat de location-gérance était acquise au 1er septembre 2015.

Dès lors, la demande de requalification du contrat de bail est irrecevable.

Il y a donc lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté l'association Carrefour de sa demande de requalification du contrat de bail en contrat de location-gérance et, statuant à nouveau, cette demande sera déclarée irrecevable.

Sur la recevabilité de la demande de reconnaissance d'une obligation civile

L'article 564 du code de procédure civile dispose que, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Toutefois, aux termes des articles 565 et 566 du même code, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent et les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

En l'espèce, il ressort du jugement que l'association Carrefour n'a pas sollicité, comme elle le fait désormais à hauteur d'appel, de voir constater et prononcer l'existence d'une obligation naturelle de l'association Caritas et de transformer cette obligation naturelle en obligation civile.

Néanmoins, il apparait que ces demandes sont présentées dans le but de faire obstacle à la demande d'expulsion formée par la partie adverse de sorte qu'elles ne peuvent être qualifiée de demandes nouvelles puisqu'elles tendent aux mêmes fins que celles présentées en première instance.

Le moyen doit donc être rejeté.

L'article 567 du code de procédure civile dispose que les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel.

L'article 70 du code de procédure civile dispose que les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant. Toutefois, la demande en compensation est recevable même en l'absence d'un tel lien, sauf au juge à la disjoindre si elle risque de retarder à l'excès le jugement sur le tout.

En l'espèce, la demande initiale, formée par l'association Caritas est une demande d'expulsion, à laquelle l'association Carrefour oppose désormais une demande de reconnaissance d'une obligation civile d'hébergement, ceci dans le but d'empêcher son expulsion.

Cette dernière demande ne se limite pas à exiger le seul rejet de la prétention de l'appelant, de sorte qu'il s'agit d'une demande reconventionnelle qui, en application des dispositions précitées, si elle est recevable à hauteur d'appel, doit néanmoins se rattacher par un lien suffisant à la demande initiale.

A cet égard et à supposer la demande bien fondée, il apparait que celle-ci est susceptible d'entrainer, outre la reconnaissance d'un droit d'hébergement, le maintien dans les lieux de l'association Carrefour et ainsi de faire échec à la demande d'expulsion formée par l'association Caritas.

Il y a donc un lien suffisant entre la demande initiale et la demande reconventionnelle.

Les demandes formées par l'association Carrefour tendant à voir constater et prononcer l'existence d'une obligation naturelle de l'association Caritas et de transformer cette obligation naturelle en obligation civile sont donc recevables.

Sur la recevabilité de la demande reconventionnelle en remboursement formée par l'association Carrefour

Sur l'intérêt et la qualité à agir de l'association Carrefour pour former une demande en remboursement contre l'association Caritas

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, le défaut de qualité et le défaut d'intérêt constituent chacun des fins de non-recevoir.

L'article 31 du même code dispose que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

L'article 32 du code de procédure civile dispose qu'est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.

En l'espèce, l'association Carrefour souhaite obtenir remboursement des frais qu'elle allègue avoir elle-même déboursés au service du fonds immobilier appartenant à l'association Caritas.

Aussi s'agissant de frais qu'elle prétend avoir exposé à titre personnel, indépendamment de savoir si les frais ont effectivement été déboursés ou non, ce qui relève d'une appréciation au fond, l'association Carrefour a intérêt et qualité à ce que sa demande soit étudiée.

Le moyen est donc rejeté.

Sur la qualité et l'intérêt à défendre de l'association Caritas contre la demande en remboursement formée par l'association Carrefour

L'association Caritas est devenue propriétaire de l'ensemble immobilier sis rue Marchant à Metz selon donation du Foyer Saint Joseph effectuée par acte authentique du 20 décembre 2006 et la substituant dès lors au preneur originel.

Les travaux effectués par l'association Carrefour l'ont été sur le bien dont l'association Caritas est propriétaire de sorte que cette dernière, et ce quelque soit le fondement et le bien fondé ou non de la demande, a bien qualité à défendre pour la demande en remboursement du coût de ces travaux réalisé sur le bien dont elle est propriétaire.

En outre, dans la mesure où, cette somme lui est réclamée elle a intérêt à contester cette prétention.

Ainsi, l'association Caritas a intérêt et qualité à défendre.

Le moyen est donc rejeté.

Sur la prescription de la demande en remboursement des travaux et impenses formée par l'association Carrefour

L'article 2224 du code civil, issu de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Aux termes de l'article 2222 alinéa 2 du même code, en cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

En l'espèce, l'association Carrefour fonde sa demande en remboursement sur les règles régissant le contrat de bail, et subsidiairement sur la théorie des impenses, l'enrichissement injustifié et la gestion d'affaire. Il s'agit donc d'actions personnelles soumises aujourd'hui à une prescription quinquennale.

De plus, l'association Carrefour ne pouvait ignorer avoir réalisé les travaux évoqués et le remboursement qu'elle était susceptible d'obtenir dès leur réalisation de sorte que seuls les travaux réalisés dans les cinq années qui précèdent l'assignation du 16 juillet 2020 ne sont pas couverts par la prescription.

Dès lors, la demande de remboursement est prescrite pour les travaux réalisés avant le 16 juillet 2015.

Il y a donc lieu de la déclarer irrecevable comme prescrite pour les travaux réalisés avant cette date.

Sur le lien suffisant entre la demande principale et la demande reconventionnelle en remboursement formée par l'association Carrefour

Comme déjà évoqué au visa des articles 567 et 70 du code de procédure civile, la demande reconventionnelle doit, pour être recevable, présenter un lien suffisant avec la demande initiale. Toutefois la demande de compensation est recevable même en l'absence d'un tel lien.

En l'espèce, l'association Carrefour sollicite, à titre infiniment subsidiaire et dans le cas où la cour ordonnerait son expulsion, le remboursement des travaux, investissement de grosses réparation, impenses utiles et nécessaires effectuées par elle sur l'immeuble pour la période courant du 5 septembre 1977 au 31 décembre 2021.

Il convient dans un premier temps de préciser qu'aucune prétention de condamnation en paiement n'est exigée contre l'association Carrefour de sorte que la demande formulée par cette dernière ne peut s'analyser en une demande de compensation.

Néanmoins, bien que la demande initiale se résume en l'espèce en une demande d'expulsion, c'est en raison de l'usage du bien, consenti par l'association Caritas, que ces frais ont été déboursés par l'association Carrefour. Ainsi dans l'hypothèse où il serait fait droit à la demande d'expulsion, il apparaitrait nécessaire de traiter des demandes de remboursement afférentes à l'usage du bien.

La demande reconventionnelle a donc un lien suffisant avec la demande initiale.

Le moyen est donc rejeté.

Ainsi, la demande en paiement formée par l'association Carrefour est recevable.

B -Sur le fond

Il est rappelé que la demande de requalification du contrat de bail en contrat de location-gérance a été déclarée irrecevable. Il convient donc d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté l'association Carrefour de cette demande afin de, statuant à nouveau, constater l'irrecevabilité de cette demande.

Sur la tacite reconduction du bail

L'article 1736 du code civil dispose que si le bail a été fait sans écrit, l'une des parties ne pourra donner congé à l'autre qu'en observant les délais fixés par l'usage des lieux.

Aux termes de l'article 1737 du code civil le bail cesse de plein droit à l'expiration du terme fixé, lorsqu'il a été fait par écrit, sans qu'il soit nécessaire de donner congé.

L'article 1738 du code civil dispose que si, à l'expiration des baux écrits, le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par l'article relatif aux locations faites sans écrit.

Aux termes de l'article 256 du code local de procédure civile, peut être introduite une demande en constatation de l'existence ou de la non-existence d'un rapport de droit, en reconnaissance ou en constatation de la fausseté d'un document, lorsque le demandeur a un intérêt juridique à faire constater immédiatement en justice l'existence du rapport de droit ou la sincérité ou la fausseté du document.

La tacite reconduction suppose donc l'existence d'un bail arrivé à son terme, un maintien dans les lieux effectif du preneur et une volonté des parties pour la reconduction de ce bail, laquelle supporte une présomption simple et fait l'objet d'une appréciation souveraine des juges du fond.

En l'espèce, il est constant que le bail initial a été conclu pour 31 ans en 1977 de sorte que son terme était prévu pour le 31 aout 2008. Il est également constant que la durée du bail a été prorogée au 31 aout 2009 selon avenant du 29 aout 2008, puis au 31 aout 2010 selon avenant 22 mai 2009.

Le premier avenant du 31 aout 2008 comporte la mention suivante sous l'article intitulé « Expiration du bail » :

« Sans qu'il soit besoin de notifier une quelconque résiliation, le bail expirera automatiquement le 31 aout 2009, sans prorogation possible. 

Toutefois, les parties se réservent la possibilité de conclure une nouvelle convention, étant précisé qu'en cas d'accord sur ce point, celui-ci devra être formalisé au plus tard trois mois avant l'expiration du bail. »

Le second avenant, signé le 22 mai 2009, relate l'existence de discussions entre les parties et de la volonté de l'association Carrefour de se porter acquéreur de l'ensemble immobilier. Il est ensuite fait mention de ceci : « Dans ces conditions, il apparaît nécessaire, dans l'attente de l'évaluation qui sera faite par les Services des Domaines et de l'aboutissement des pourparlers, de proroger une dernière fois et à titre exceptionnel, pour une période maximale de douze (12) mois, le bail objet des présentes ».

Ce dernier avenant comporte également, pareillement au premier, un article 3 intitulé « Expiration du bail » mais ne contenant cette fois que la mention suivante :

« Sans qu'il soit besoin de notifier une quelconque résiliation, le bail expirera automatiquement le 31 aout 2009, sans prorogation possible. »

Il ressort de ces constatations que, d'une part, le contrat de bail est arrivé à son terme le 31 aout 2010, à la suite de deux prolongations d'une année chacune.

D'autre part, s'agissant de l'avenant conclu le 22 mai 2009, il apparait de manière particulièrement claire et précise que la prolongation accordée serait la dernière et que l'arrivée du terme ne nécessitera pas la notification d'une résiliation de sorte que la volonté de l'association Caritas de mettre fin à la relation contractuelle est sans équivoque.

Le fait que l'association Caritas n'ait pas entamé de procédure d'expulsion ni délivré un commandement de quitter les lieux s'agissant uniquement d'une abstention et non d'un acte positif n'établit pas la volonté non équivoque de cette dernière de poursuivre les relations contractuelles, ni à venir contredire les dispositions contractuelles précitées consenties entre les parties.

Il ressort au contraire des pièces du dossier que par acte d'huissier du 5 octobre 2010 l'association Caritas saisissait le juge des référés afin de solliciter une expertise judiciaire pour évaluer la valeur locative de l'ensemble immobilier situé [Adresse 3] à Metz. Il ressort d'ailleurs des termes de l'ordonnance : «  la demanderesse affirme que l'association Carrefour s'est maintenue dans les lieux et qu'elle est dés lors en droit de faire fixer le montant de l'indemnité d'occupation et sollicite l'expert afin de fixer la valeur locative de l'immeuble ».

Elle a dés lors exprimé clairement dés octobre 2010 que l'association Carrefour était occupante sans titre.

En outre, les pièces produites par l'association Carrefour mentionnant tantôt la poursuite des négociations avec l'association Caritas au-delà de l'année 2010, tantôt l'existence d'un bail verbal ayant pris la suite du bail conclu en 1977 et de ses avenants, émanent soit de l'association Carrefour elle-même soit de constatations issues de ses propres affirmations. Ces éléments sont donc insuffisants à établir la volonté de l'association Caritas de poursuivre le bail.

De plus, si l'association Carrefour dispose effectivement de la faculté de voir constater un rapport de droit en application de l'article 256 du code local de procédure civile, il n'est cependant pas établi, pour le même défaut de force probante que celui précédemment évoqué, que les relations se sont poursuivies sous un bail verbal de sorte que les dispositions régissant la rupture d'un tel contrat, et notamment l'article 1736 du code civil, ne sont pas applicables.

Enfin, il ne peut être déduit de la période de négociation amiable entre les deux parties la volonté pour le propriétaire de l'immeuble de poursuivre les relations contractuelles précédemment existantes.

Le bail a donc pris fin le 31 aout 2010 et n'a pas été poursuivi par la suite.

Sur l'obligation civile

Selon l'article 1100 du code civil, issu de n°2016-131 du 10 février 2016, les obligations naissent d'actes juridiques, de faits juridiques ou de l'autorité seule de la loi. Elles peuvent naître de l'exécution volontaire ou de la promesse d'exécution d'un devoir de conscience envers autrui.

L'article précité n'est entré en vigueur que le 1er octobre 2016, il reste qu'il était auparavant de jurisprudence constante que l'exécution volontaire ou la promesse d'exécution d'un devoir de conscience transforme l'obligation naturelle en obligation civile.

En l'espèce, l'association Carrefour sollicite la transformation d'une obligation naturelle de l'association Caritas, constituée dans le devoir moral d'hébergement de celle-là eu égard à sa mission caritative en une obligation civile.

Cependant, si l'association Caritas n'a pas sollicité judiciairement l'expulsion dès la rupture du contrat de bail, cette abstention ne peut à elle seule caractériser un engagement volontaire d'exécuter une obligation morale d'hébergement et ce nonobstant sa mission caritative.

D'ailleurs comme déjà exposé dès 2011, l'association Caritas sollicitait le juge des référés pour voir ordonner une expertise afin de déterminer la valeur de l'indemnité d'occupation puisqu'elle soutenait que l'association Carrefour était occupante sans droit ni titre tel que cela ressort de l'ordonnance de référé précitée du 7 mars 2011.

Il s'en est en outre suivi diverses procédures judiciaires desquelles il ne ressort pas qu'elle ait admis une obligation morale envers l'association Carrefour.

Dès lors, l'obligation naturelle alléguée ne s'est pas muée en obligation civile susceptible de contraindre l'association Caritas à poursuivre l'hébergement de l'association Carrefour.

La demande doit donc être rejetée et il y sera ajouté au jugement de ce chef.

Sur la demande d'expulsion

Faute de renouvellement du bail et de transformation de l'obligation naturelle en obligation civile, il est donc établi que l'association Carrefour est occupante sans droit ni titre depuis le 31 aout 2010.

L'association Caritas est donc bien fondée à solliciter l'expulsion de l'association Carrefour.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a constaté que l'association Carrefour occupe sans droit ni titre l'ensemble immobilier situé [Adresse 3] à Metz depuis le 31 août 2010.

Néanmoins, bien que l'association Carrefour soit occupante sans droit ni titre depuis plus de dix ans il y a lieu, compte tenu de l'activité d'utilité publique exercée par celle-ci, de lui accorder un délai de six mois pour quitter les lieux et de faire courir ce nouveau délai à compter de la signification du présent arrêt.

De plus, et justement du fait de sa qualité d'occupante sans droit ni titre depuis plus de dix ans, il y a lieu d'assortir l'expulsion de l'association Carrefour d'une astreinte 80 euros par jour de retard passé ce délai de six mois qui lui est accordé pour quitter les lieux.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a ordonné l'expulsion de l'association Carrefour à défaut de départ volontaire de celle-ci mais uniquement en ce qu'il a fait commencer le délai de six mois pour quitter les lieux à compter de la signification du jugement.

Ainsi, statuant à nouveau, il sera ordonné l'expulsion de l'association Carrefour et celle-ci sera condamnée à quitter les lieux sous astreinte de 80 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de six mois suivant la signification du présent arrêt.

Sur l'indemnisation des travaux et investissements réalisés sur l'immeuble

Il est d'abord constaté que l'association Carrefour se prévaut des règles relatives aux baux à loyer pour fonder sa demande en remboursement et notamment des articles 1720 et 606 du code civil, ainsi que sur les clauses du bail à loyer conclu avec l'association Caritas le 05 septembre 1977.

Toutefois, étant établi que le bail a pris fin le 31 août 2010 et que la demande de remboursement n'est recevable que pour les travaux réalisés à partir du 16 juillet 2016, ces règles ne sont pas applicables et le moyen doit donc être rejeté.

Ensuite, l'article 1353 du code civil dispose que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

L'article 9 du code de procédure civile dispose qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, l'association Carrefour sollicite le remboursement des dépenses qu'elle a déboursées pour la réalisation de travaux sur l'immeuble, sur les fondements de l'accession, de l'enrichissement injustifié et de la gestion d'affaire.

Quelque soit le fondement invoqué, l'association Carrefour, à l'origine de la demande, supporte la charge de la preuve des dépenses évoquées. Or, il est constaté qu'elle ne produit qu'un listing qui apparait émaner d'elle-même et ne comprend aucune référence à un paiement effectif de sorte que ce document n'établit ni la titularité de la dépense ni la certitude de son montant.

De plus, l'attestation du cabinet Sologest produite par l'association Carrefour ne supplée pas la carence de la preuve dans la mesure où elle ne comporte que des informations abstraites sur l'existence d'une vérification comptable portant sur la concordance entre les comptes annuels de l'exercice clos le 31 décembre 2021, non produits devant la cour, et les informations figurant dans un document établi par la direction, non produit également.

En définitive, l'association Carrefour n'apporte pas la preuve, qui pourtant lui incombe, des dépenses dont elle demande pourtant remboursement et doit donc être déboutée de sa demande sans qu'il ne soit nécessaire d'aborder davantage les autres moyens au soutien de sa demande.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La cour confirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Metz le 28 juin 2023 en ce qu'il a condamné l'association Carrefour aux dépens ainsi qu'à payer à l'association Caritas la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Y ajoutant, l'association Carrefour succombant à hauteur de cour, l'équité commande de la condamner aux dépens ainsi qu'à payer à l'association Caritas la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevables les demandes formées par l'association Carrefour ;

Déclare irrecevable pour cause de prescription la demande de requalification du contrat de bail conclu le 05 septembre 1977 en contrat de location-gérance formée par l'association Carrefour;

Déclare recevable la demande de voir constater l'existence d'une obligation naturelle et de la transformée en obligation civile formée par l'association Carrefour ;

Déclare irrecevable pour cause de prescription la demande de remboursement formée par l'association Carrefour mais uniquement concernant les dépenses antérieures au 16 juillet 2016;

Infirme le jugement rendu le 28 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Metz en ce qu'il a débouté l'association Carrefour de sa demande de requalification du contrat de bail conclu entre elle et l'association Foyer Saint Joseph le 05 septembre 1977 en contrat de location-gérance et ordonné, à défaut de départ volontaire des lieux dans le délai de six mois suivant la signification de la présente décision, l`expulsion de l'association Carrefour et de tout occupant de son chef, de l`ensemble immobilier situé [Adresse 3] [Localité 1], et ce au besoin avec le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier, sous astreinte de 200 euros par jour de retard pendant un délai de 6 mois, passé lequel il pourra être à nouveau fait droit ;

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Constate l'irrecevabilité de la demande de requalification du contrat de bail conclu entre elle et l'association Foyer Saint Joseph le 05 septembre 1977 en contrat de location-gérance ;

Ordonne l'expulsion de l'association Carrefour ;

Condamne l'association Carrefour à quitter les lieux sous astreinte de 80 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de six mois suivant la signification du présent arrêt ;

Y ajoutant,

Rejette la demande de voir constater et prononcer l'existence d'une obligation naturelle et de prononcer la transformation de cette obligation en obligation civile ;

Condamne l'association Carrefour aux dépens d'appel ;

Déboute l'association Carrefour de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne l'association Carrefour à payer à l'association Fédération Diocésaine des 'uvres de Charité de Moselle Caritas la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente de chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23/01458
Date de la décision : 11/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-11;23.01458 ?
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