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07/07/2022 | FRANCE | N°20/01224

France | France, Cour d'appel de Metz, 6ème chambre, 07 juillet 2022, 20/01224


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS













N° RG 20/01224 - N° Portalis DBVS-V-B7E-FJXN

Minute n° 22/00122





ASSOCIATION COOPERATIVE A RESPONSABILITE LIMITEE C AISSE MUTUELLE DES PROFESSIONS DE SANTE DE MOSELLE

C/

[G] EPOUSE [N]









Jugement Au fond, origine TJ de THIONVILLE, décision attaquée en date du 06 Juillet 2020, enregistrée sous le n° 16/01993





COUR D'APPEL DE METZ



CHAMBRE COMMERCIALE>


ARRÊT DU 07 JUILLET 2022









APPELANTE :



CAISSE MUTUELLE DES PROFESSIONS DE SANTE DE MOSELLE association coopérative à responsabilite limitée, représentée par son représentant légal,

[Adresse 1]

[...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 20/01224 - N° Portalis DBVS-V-B7E-FJXN

Minute n° 22/00122

ASSOCIATION COOPERATIVE A RESPONSABILITE LIMITEE C AISSE MUTUELLE DES PROFESSIONS DE SANTE DE MOSELLE

C/

[G] EPOUSE [N]

Jugement Au fond, origine TJ de THIONVILLE, décision attaquée en date du 06 Juillet 2020, enregistrée sous le n° 16/01993

COUR D'APPEL DE METZ

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 07 JUILLET 2022

APPELANTE :

CAISSE MUTUELLE DES PROFESSIONS DE SANTE DE MOSELLE association coopérative à responsabilite limitée, représentée par son représentant légal,

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Gilles ROZENEK, avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

Madame [M] [G] épouse [N]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Véronique HEINRICH, avocat au barreau de METZ

DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du 03 Février 2022, l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 07 Juillet 2022.

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Jocelyne WILD

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Mme FLORES, Présidente de Chambre

ASSESSEURS : Mme DEVIGNOT,Conseillère

Mme DUSSAUD, Conseillère

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme FLORES, Présidente de Chambre et par Mme Jocelyne WILD, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [M] [N] née [G] est gérante de la SELARL Pharmacie du Centre, ayant son siège [Adresse 1].

Le 15 octobre 2012, la SELARL Pharmacie du Centre a ouvert un compte courant professionnel n° 00 202 70 601 auprès de l'Association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des Professions de Santé de Moselle (CMPS Moselle).

Le 26 octobre 2012 la SELARL Pharmacie du Centre a contracté un emprunt d'un montant de 50 000 euros auprès de la CMPS Moselle.

Le même jour Mme [N] née [G] s'est portée caution solidaire dans la limite de 60 000 euros incluant principal, intérêts et le cas échéant pénalités ou intérêts de retard, pour une durée de 60 mois.

Par acte sous seing privé du 30 juin 2013, Mme [N] née [G] s'est portée caution solidaire en garantie de tous les engagements de la SELARL Pharmacie du Centre, dans la limite d'un montant de 55 000 euros, pour une durée de 5 ans.

Par jugement du 2 octobre 2014, le tribunal de commerce de Briey a placé la SELARL Pharmacie du centre en redressement judiciaire.

Le tribunal de commerce de Briey a prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en procédure de liquidation judiciaire par jugement du 21 janvier 2018, clôturée le 05 septembre 2019.

Par acte d'huissier de justice du 9 novembre 2016, la CMPS Moselle a assigné Mme [N] née [G] devant le tribunal de grande instance de Thionville, afin d'obtenir sa condamnation à lui payer les sommes suivantes avec exécution provisoire et capitalisation des intérêts :

- 51 343,71 euros au titre du découvert en compte courant, avec intérêts au taux légal à compter du

6 septembre 2016,

- 21 604,57 euros au titre du solde du prêt professionnel, avec intérêts au taux conventionnel de 5,69 % et assurance-vie de 0,5 % à compter du 6 septembre 2016,

- 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon jugement rendu le 06 juillet 2020 le tribunal judiciaire de Thionville, constatant la disproportion des engagements aux biens et aux revenus de la caution, a :

- débouté l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des Professions de Santé de Moselle de l'ensemble de ses demandes

- condamné l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle aux dépens

- condamné l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle à payer à Mme [N] née [G] la somme de 1200,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration enregistrée le 21 juillet 2020 au greffe de la cour d'appel de Metz l'Association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des Professions de Santé de Moselle a relevé appel du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Thionville le 06 juillet 2020.

L'appel est limité aux chefs de jugement expressément critiqués et tend à l'annulation subsidiairement à l'infirmation du jugement en ce qu'il a débouté l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des Professions de Santé de Moselle de l'ensemble de ses demandes, et l'a condamnée aux dépens, ainsi qu'à payer à Mme [N] née [G] la somme de 1 200,00 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions déposées le 08 novembre 2021 l'Association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle demande à la cour de :

- dire et juger l'appel de l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle recevable et bien fondé,

- débouter Mme [N] née [G] de son appel incident et de l'ensemble de ses moyens, fins et prétentions,

- infirmer le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

- condamner Mme [N] née [G], dans la limite de ses deux engagements de caution des 26 octobre 2012 (60 000 euros) et 30 juin 2013 (55 000 euros), à payer à l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle :

- la somme de 51 343,71 euros au titre du découvert en compte courant, majorée des intérêts au taux légal, à compter du 6 septembre 2016 ;

- la somme de 21 604,57 euros au titre du solde du prêt professionnel, avec intérêts au taux conventionnel de 5,69 % et assurance-vie de 0,5 % à compter du 6 septembre 2016,

- ordonner la capitalisation des intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement de première instance,

- débouter Mme [N] née [G] de sa prétention de première instance en condamnation de l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner Mme [N] née [G] aux entiers frais et dépens de première instance,

- confirmer sur le surplus des dispositions non contraires,

Subsidiairement, si la Cour estimait devoir juger de la qualité de caution non avertie de Mme [N] née [G],

- dire et juger que le devoir d'information et de mise en garde de l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle vis-à-vis de la caution n'était pas dû,

- dire et juger Mme [N] née [G] non fondée à imputer un manquement audit devoir d'information et de mise en garde, au regard de sa déloyauté,

- condamner Mme [N] née [G], dans la limite de ses deux engagements de caution des 26 octobre 2012 (60 000 euros) et 30 juin 2013 (55 000 euros), à payer à l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle :

- la somme de 51 343,71 euros au titre du découvert en compte courant, majorée des intérêts au taux légal, à compter du 6 septembre 2016 ;

- la somme de 21 604,57 euros au titre du solde du prêt professionnel, avec intérêts au taux conventionnel de 5,69 % et assurance-vie de 0,5 % à compter du 6 septembre 2016,

- ordonner la capitalisation des intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement de première instance,

- débouter Mme [N] née [G] de sa prétention de première instance en condamnation de l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouter Mme [N] née [G] de ses plus amples moyens, fins et prétentions,

- condamner Mme [N] née [G] aux entiers frais et dépens de première instance,

- confirmer sur le surplus des dispositions non contraires,

Plus subsidiairement, si la Cour estimait y avoir lieu à manquement au devoir d'information et de mise en garde,

- dire et Juger que le préjudice de Mme [N] née [G] s'analysant comme la perte de chance de ne pas contracter s'avère nul ; à défaut, si perte de chance il y a, Réduire le préjudice de Mme [N] née [G] à 5% des sommes réclamées par l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle

- condamner Mme [N] née [G] , dans la limite de ses deux engagements de caution des 26 octobre 2012 (60 000 euros) et 30 juin 2013 (55 000 euros), à payer à l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle :

- la somme de 51 343,71 euros au titre du découvert en compte courant, majorée des intérêts au taux légal, à compter du 6 septembre 2016 ;

- la somme de 21 604,57 euros au titre du solde du prêt professionnel, avec intérêts au taux conventionnel de 5,69 % et assurance-vie de 0,5 % à compter du 6 septembre 2016,

- ordonner la capitalisation des intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement de première instance,

- ordonner la compensation des créances réciproques,

- débouter Mme [N] née [G] de sa prétention de première instance en condamnation de l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouter Mme [N] née [G] de ses plus amples moyens, fins et prétentions,

- condamner Mme [N] née [G] aux entiers frais et dépens de première instance,

- confirmer sur le surplus des dispositions non contraires,

Dans tous les cas,

- condamner Mme [N] née [G] à payer à l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner Madame Mme [N] née [G] aux entiers frais et dépens d'appel.

Par conclusions déposées le 16 juillet 2021 au greffe de la cour d'appel de Metz Mme [N] demande à ce qu'il soit statué comme il suit :

- débouter la CMPS Moselle de son appel est de toutes ses demandes, fins et conclusions en tant que dirigées à l'encontre de Mme [N] née [G]

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris

Subsidiairement :

- si la Cour devait estimer que la CMPS Moselle peut néanmoins se prévaloir des cautionnements obtenus, vu l'article 1382 devenu 1240 du Code civil et l'article 1147 ancien du Code civil, constater que la CMPS Moselle a engagé sa responsabilité à l'égard de Mme [N] née [G] et a manqué à son devoir d'information et de mise en garde à l'égard de celle-ci,

- en conséquence, condamner la CMPS Moselle à verser à Mme [N] née [G] une somme égale, intérêts compris, à celle demandée par la CMPS Moselle en la présente procédure, à savoir 51 343,71 euros avec intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2016 et la somme de 21 604,57 euros avec intérêts au taux conventionnel de 5,69 % et assurance vie de 0,5 %, à compter du 6 septembre 2016, avec capitalisation, le tout avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil devenu 1240 et 1147 ancien (devenu l'article 1231-1) du Code civil

- ordonner la compensation des créances respectives et débouter la CMPS DE MOSELLE de toutes ses demandes, de plus amples ou contraires.

- débouter la CMPS Moselle de sa demande tendant à voir appliquer le taux d'intérêt conventionnel, et ce, à compter de l'année 2017, à défaut d'information régulière de la caution depuis cette date et de sa demande de capitalisation

Plus subsidiairement :

- débouter la CMPS Moselle de toutes ses demandes, fins et conclusions en ce qu'elle porte sur le contrat de prêt professionnel et solde dudit prêt à hauteur de 21 604,57 euros

En tout état de cause :

- eu égard aux circonstances de la cause, condamner la CMPS Moselle aux entiers dépens d'instance d'appel et à verser à Mme [N] née [G] la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du CPC.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 décembre 2021

MOYENS DES PARTIES

- sur la disproportion alléguée des engagements de caution :

L'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des Professions de Santé de Moselle (CMPS Moselle) soutient qu'il appartient à la seule caution de rapporter la preuve du caractère disproportionné de son engagement par rapport à ses biens et revenus, soit sur l'ensemble de son patrimoine et rappelle que la disproportion doit être manifeste, c'est-à-dire flagrante ou évidente pour un professionnel raisonnablement diligent. Elle considère que le dépassement d'un taux d'endettement de 33 % ne coïncide pas automatiquement avec une disproportion manifeste.

S'agissant de l'engagement de caution du 26 octobre 2012, la CMPS Moselle se réfère à la fiche remplie le 17 septembre 2012, et indique que les deux prêts qui y sont mentionnés s'inscrivent dans une société d'acquêts, encadrée par les règles de la communauté légale, quand bien même les époux avaient opté pour le régime de la séparation de biens. Elle observe que le bien immobilier acquis avec le prêt le plus conséquent a été inscrit au Livre Foncier « en communauté de biens ». Elle soutient que dans le régime de séparation la société d'acquêts sera liquidée comme la communauté de biens. Elle estime que les biens qui en dépendent doivent être pris en considération pour l'appréciation de la disproportion, et ce quand bien ils ne pourraient être engagés pour l'exécution de la condamnation éventuelle de la caution, en l'absence du consentement exprès du conjoint, conformément à l'article 1415 de code civil.

La CMPS Moselle souligne que l'échéance de l'emprunt immobilier représentait 1578 euros, et que le capital restant dû représentait 105 692,61 euros à la date du 4 octobre 2012, soit après règlement de la dernière échéance de 1578 euros avant l'engagement de caution du 26 octobre 2012. Elle rappelle que l'échéance du prêt personnel de 35 000 euros représentait 367 euros.

La CMPS Moselle soutient que les deux échéances mensuelles des prêts se partagent par parts égales, soit pour l'épouse 972,50 euros par mois. Elle observe que la fiche ne fait pas état d'autres charges.

La CMPS Moselle soutient qu'il était toujours possible de renseigner tout autre engagement dans la partie « renseignements divers ».

L'appelante rappelle que le prêteur n'a pas à procéder à une appréciation objective des ressources de la caution et que les établissements de crédit n'ont pas, en l'absence d'anomalies apparentes, à vérifier l'exactitude de la déclaration.

La CMPS Moselle estime qu'il n'y a pas lieu de tenir compte d'engagements pris antérieurement ou concomitamment à la souscription de l'engagement de caution qui n'ont pas été mentionnés, tels les impôts sur le revenu et les engagements de caution auprès de la BNP.

Concernant le cautionnement en date du 30 juin 2013, la CMPS Moselle fait valoir que Mme [N] née [G] n'a pas fait à ce moment état des autres engagements de caution qu'elle avait déjà souscrits, et qu'elle a failli à son obligation de preuve quant au reste de son patrimoine.

La CMPS Moselle soutient en outre que le patrimoine de Mme [N] née [G], au moment où elle est appelée, lui permet de faire face à ses deux engagements de caution. Elle souligne à cet égard qu'au jour de l'assignation, le 9 novembre 2016, le montant restant dû au titre du capital pour le bien commun était limité, et qu'il n'est pas sûr que ce prêt était toujours en cours à cette date. Elle fait valoir que le bien immobilier reste acquis en pleine propriété, et qu'il ne demeure qu'un engagement de caution de 50 400 euros au profit de BNP Paribas jusqu'au 8 novembre 2021. La CMPS discute des éléments de charge allégués par Mme [N] née [G].

Mme [M] [N] née [G] soutient que la CMPS Moselle ne peut se prévaloir des deux engagements de caution, d'une part parce qu'ils étaient manifestement disproportionnés à ses biens et revenus à la date de leur conclusion et d'autre part parce que la CMPS Moselle ne démontre pas qu'elle peut faire face à ses engagements au moment où elle est appelée.

Elle précise qu'elle était mariée sous le régime de la séparation de biens à l'époque de la souscription de son engagement et qu'en conséquence le caractère disproportionné de son engagement s'apprécie au regard de ses seuls biens et revenus personnels, et de la moitié des biens indivis.

Elle fait valoir que la fiche patrimoniale qu'elle a remplie est très succincte, et que la CMPS Moselle n'a pas sollicité d'information concernant d'autres engagements de caution ni d'autres charges, et n'a pas sollicité d'avis d'imposition.

Elle précise que la fiche patrimoniale mentionne expressément un crédit immobilier souscrit auprès de la BNP à hauteur de 150 000 euros avec un capital restant dû de 107 882,84 euros, et un prêt personnel souscrit auprès de la BNP d'un montant initial de 35 000 euros, avec un capital restant dû de 32 811,38 euros.

Elle considère qu'en retenant la moitié de la mensualité du couple de 1578 euros au titre du crédit immobilier et la mensualité de 367 euros au titre de son prêt personnel, et en ne tenant compte que de ses seuls revenus personnels, son taux d'endettement était déjà de 36 % lors du premier engagement du 26 octobre 2012, et qu'en étalant l'engagement de 60 000 euros sur 60 mois son taux d'endettement passait à 67,38 %. Elle estime donc que ses revenus étaient manifestement insuffisants pour y faire face.

Elle soutient que son taux d'endettement est passé à 89 % avec le second engagement de caution, en date du 30 juin 2013, et souligne que la banque ne lui a demandé aucun renseignement patrimonial complémentaire, et ne s'est jamais enquise d'engagements de caution antérieurs. Elle fait valoir également, parmi ses charges, qu'elle avait contracté 4 précédents engagements de caution entre 2008 et 2011, qui s'ajoutaient aux prêts qu'elle devait rembourser, et que ses « charges » totalisaient ainsi 513 250 euros.

Mme [N] née [G] fait valoir ensuite que pour déterminer si son patrimoine lui permet de faire face à ses engagements au jour où elle est appelée, il y a lieu de prendre en compte le patrimoine au jour de l'assignation du 09 novembre 2016, et que les éléments postérieurs à cette date n'ont pas à être pris en compte. Elle souligne que la CMPS Moselle supporte la charge de la preuve de ce qu'elle pouvait alors faire face à ses engagements, et ne la rapporte pas, et qu'elle entend obtenir paiement de 72 948,28 euros, ce qui représente 203 % de ses revenus annuels. Elle fait valoir également que l'ensemble des éléments actifs et passif de son patrimoine doit être pris en compte, soit la totalité de ses engagements. Enfin elle formule des arguments relatifs à ses revenus et charges.

- sur le soutien abusif allégué et le manquement au devoir d'information et de mise en garde allégué :

La CMPS Moselle rappelle que le soutien abusif est visé par l'article L. 650-1 du code de commerce, qui selon elle pose un principe de non-responsabilité des établissements de crédit, à l'exception des trois exceptions prévues par cet article. La CMPS Moselle souligne que Mme [M] [N] née [G] ne rapporte pas la preuve de l'une de ces hypothèses, ni que le crédit a été fautivement accordé. Elle fait valoir que l'article L. 650-1 du code de commerce ne s'applique pas à l'action en responsabilité de la caution non avertie contre la banque pour manquement au devoir de mise en garde.

La CMPS Moselle rappelle que le devoir de mise en garde vise à vérifier l'engagement de la caution au regard de ses capacités financières, ou l'existence d'un risque d'endettement né du prêt garanti, résultant de l'inadaptation du prêt aux capacités financières de l'emprunteur.

La CMPS Moselle rappelle en outre que le devoir de mise en garde n'est dû qu'à la caution non avertie. Elle souligne que Mme [M] [N] née [G] a été gérante de la SELARL Pharmacie du centre depuis la création de l'entreprise le 10 mai 2008, et a souscrit plusieurs engagements en qualité de gérante pour cette société et s'est portée caution solidaire au moins quatre fois entre 2008 et 2011. Elle estime qu'elle avait la possibilité de mesurer la portée de son engagement et une bonne connaissance du marché, et ne peut être qualifiée de caution non avertie.

La CMPS Moselle estime que Mme [M] [N] née [G] doit se voir opposer sa déloyauté et ne peut invoquer un manquement au devoir de mise en garde de la banque.

À supposer qu'un tel manquement puisse être admis elle souligne que le préjudice de la caution s'analyse en perte de chance de ne pas contracter. Or elle rappelle que le prêt de trésorerie demandé par la SELARL Pharmacie du Centre représentée par sa gérante a été consenti sous condition de la caution solidaire de la gérante, de sorte que la perte de chance de ne pas contracter était nulle d'après la CMPS Moselle. Si une perte de chance devait être admise la CMPS Moselle considère que les fautes de Mme [M] [N] née [G], qui avait souscrit des engagements de caution antérieurs inconnus de la caisse, sont de nature à réduire son préjudice à 5 % des montants qui lui sont réclamés.

Mme [M] [N] née [G] soutient quant à elle, à titre subsidiaire, que la CMPS Moselle a manqué à son devoir de mise en garde.

Elle indique que la CMPS Moselle avait une connaissance au jour le jour de la situation financière de la SELARL Pharmacie du Centre, mais qu'elle ne l'a pas avertie d'un risque d'endettement excessif eu égard à ses revenus et à la situation économique de la pharmacie.

Mme [M] [N] née [G] rappelle qu'il a été considéré que la qualité de dirigeant social n'emporte pas de facto la qualification de caution avertie, et fait valoir qu'elle doit être considérée comme une caution non avertie, sachant qu'elle n'était pas rompue aux affaires et n'avait jamais été gérante auparavant.

L'intimée indique que le professionnel qui manque à son devoir de mise en garde engage sa responsabilité et doit réparer le préjudice de la caution. Mme [N] née [G] estime avoir perdu une chance de ne pas s'engager, ou à tout le moins de ne s'engager que sur des facilités de caisse et non sur l'intégralité des engagements de a SELARL Pharmacie du Centre.

Elle invoque également une faute de la banque qui a octroyé des facilités de caisse à la SELARL Pharmacie du Centre alors que l'activité de celle-ci était déficitaire. À cet égard elle estime que la CMPS Moselle qui a engagé sa responsabilité lui doit réparation à hauteur des sommes demandées, sans que cela puisse être qualifié de perte de chance.

- sur l'opposabilité de la déchéance du terme à la caution :

La CMPS Moselle se prévaut des dispositions de l'article 7. 2 « Caution Solidaire personne physique » du contrat de prêt de trésorerie, ainsi que d'un paragraphe intitulé « exigibilité immédiate » figurant dans les conditions générales du contrat de prêt, pour soutenir qu'il existait une stipulation conventionnelle expresse permettant d'opposer à la caution l'exigibilité immédiate de la créance résultant du prêt en cas de liquidation judiciaire. Elle soutient que la même disposition figurait dans le cautionnement « tous engagements » du 30 juin 2013, et qu'en tout état de cause le solde du compte courant est devenu immédiatement exigible pour la caution par la clôture intervenue en raison de la liquidation judiciaire.

La CMPS Moselle souligne en outre que la caution ne saurait se libérer selon le tableau d'amortissement qui est terminé.

Mme [N] née [G] fait valoir que la déchéance du terme résultant du prononcé de la liquidation judiciaire n'est pas prévue par le contrat, et soutient qu'elle ne peut pas être étendue à la caution. Elle considère en conséquence que la demande en paiement d'une somme de 21 604,57 euros au titre du prêt professionnel est mal fondée à son égard, et qu'elle peut donc se libérer de son engagement, à supposer qu'il soit valable, selon les mêmes conditions que le débiteur principal, à savoir selon le tableau d'amortissement.

- sur les intérêts au taux conventionnel :

La CMPS Moselle soutient avoir délivré l'information annuelle à la caution et considère qu'aucune déchéance d'intérêts ne peut intervenir. Elle estime que la capitalisation des intérêts au taux légal doit être prononcée.

Mme [M] [N] née [G] soutient que la CMPS Moselle doit être déboutée de son droit à intérêts conventionnels, en affirmant qu'elle ne justifie pas de l'information postérieurement à l'année 2017, alors que l'information doit se poursuivre jusqu'à extinction de la dette. Elle considère que la production de lettres d'information ne suffit pas à justifier de leur envoi. Elle estime que la banque ne justifie pas d'une information régulière de la caution.

Enfin Mme [M] [N] née [G] fait valoir que la banque ne justifie pas non plus du montant de sa créance hors intérêts, de sorte que le débouté s'impose.

MOTIFS DE LA DECISION

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 08 novembre 2021 pour l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des professions de Santé de Moselle et le 16 juillet 2021 pour Mme [N] , et auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

Sur le caractère disproportionné de l'engagement de caution

En application de l'article L. 341-4 du code de la consommation dans sa rédaction en vigueur à la date de conclusion du cautionnement litigieux, devenu article L. 332-1 du même code, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Ce texte s'applique à toute caution personne physique, qu'elle soit considérée comme caution profane ou avertie ou ait la qualité de dirigeant social.

Il appartient à la caution, qui l'invoque, de rapporter la preuve de l'existence de la disproportion manifeste de son engagement au moment de la conclusion de celui-ci.

La disproportion à la date de l'engagement s'apprécie au regard de l'ensemble des engagements souscrits par la caution d'une part, de tous les éléments de son patrimoine ainsi que de ses revenus d'autre part, sans tenir compte des revenus escomptés de l'opération garantie. Il y a lieu de rechercher si la caution a la capacité de faire face non à l'obligation garantie, selon les modalités de paiement propres à celle-ci, mais à son propre engagement.

La disproportion manifeste suppose que la caution se trouve dans l'impossibilité manifeste de faire face à son engagement, lorsqu'elle le souscrit, avec ses biens et revenus.

L'existence d'une fiche de renseignements certifiée exacte par la caution a pour effet de dispenser le créancier de vérifier l'exactitude des déclarations qui y sont portées. Sauf anomalies apparentes sur les informations déclarées par la caution, le créancier est en droit de s'y fier.

En vertu de l'ancien article 1134 du Code civil, la caution est tenue à une obligation de loyauté dans la fourniture des renseignements qu'elle fournit à l'établissement prêteur, concernant ses revenus et patrimoine. Dès lors la caution ne pourra pas se prévaloir du caractère erroné d'informations qu'elle a elle-même précédemment communiquées, ni faire valoir que sa situation financière était en réalité moins favorable que celle qu'elle avait déclarée à la banque, ni invoquer des engagements de caution antérieurs qu'elle n'a pas mentionnés dans la fiche de renseignements et que la banque ignorait, quand bien même la banque n'avait pas expressément sollicité d'information à cet égard.

Enfin la disproportion manifeste de l'engagement d'une caution mariée sous le régime de la séparation des biens s'apprécie au regard de ses seuls biens et revenus personnels, comprenant sa quote part dans les biens indivis.

- concernant l'engagement de caution du 26 octobre 2012 :

- à la date à laquelle il a été souscrit :

Le 26 octobre 2012 Mme [M] [N] née [G] s'est engagée en qualité de caution de la SELARL Pharmacie du Centre dans la limite de la somme de 60 000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités de retard, et pour la durée de soixante mois, au bénéfice de la CMPS Moselle (pièce 2 de l'appelante).

Il incombe à Mme [M] [N] née [G] de rapporter la preuve que cet engagement était manifestement disproportionné à ses biens et revenus, et qu'elle était ainsi, le cas échéant, à la date du 26 octobre 2012, dans l'impossibilité d'y faire face.

Dans la « fiche patrimoniale » qu'elle a remplie le 17 septembre 2012 et remise à la CMPS Moselle, Mme [M] [N] née [G] n'a pas mentionné les quatre engagements de caution qu'elle avait contractés auparavant au bénéfice d'une autre banque, la BNP Paribas. Elle n'est pas fondée à s'en prévaloir pour soutenir que son engagement été disproportionné à la date du 26 octobre 2012, ce d'autant plus que ce document intitulé « fiche patrimoniale » avait manifestement pour objet d'obtenir des informations sur l'ensemble de son patrimoine et sur ses capacités de remboursement, et comportait une partie « renseignements divers » dans laquelle Mme [M] [N] née [G] pouvait indiquer ses engagements de caution envers la BNP Paribas.

Dans cette fiche de renseignements à son nom Mme [M] [N] née [G] a précisé qu'elle était mariée sous le régime de la séparation de biens, avec deux enfants à charge, a mentionné le salaire de son mari comme le sien, l'existence d'un crédit immobilier au capital restant dû de 107 882,84 euros, et d'un prêt personnel au capital restant dû de 32 811,34 euros, ainsi que d'une maison à la valeur estimée de 250 000 euros dont elle était propriétaire, située [Adresse 2] (pièce 10 de l'appelante).

Dès lors que Mme [M] [N] née [G] avait précisé dans la fiche sa situation d'épouse mariée sous le régime de la séparation de biens, la CMPS Moselle devait vérifier si la maison lui appartenait exclusivement, et si elle était seule emprunteur ou co-emprunteur solidaire des deux crédits qu'elle avait mentionnés.

Il ressort des mentions d'un acte de prêt du 1er septembre 2009 d'un montant de 144 600 euros consenti par la BNP Paribas à Mme [M] [N] née [G] et à son époux M. [F] [N], destiné à racheter deux prêts immobiliers, que les époux emprunteurs avaient acquis ensemble l'immeuble situé [Adresse 2] en communauté de bien à l'époque, le 10 avril 2002. Il n'est pas contesté que M. et Mme [N] avaient ensuite opté pour le régime de la séparation de biens en 2006 ainsi que l'indique la banque (cf ses conclusions p. 7). Dès lors le bien immobilier était indivis à la date de l'engagement de caution. Il ne doit être pris en compte, pour apprécier le caractère proportionné de cet engagement, qu'à hauteur de la quote part de Mme [M] [N] née [G], soit la moitié indivise. En conséquence seule la moitié de la valeur estimée de la maison mentionnée par Mme [M] [N] née [G] peut être prise en compte, soit 250 000 / 2 = 125 000 euros pour évaluer l'actif de son patrimoine.

Par ailleurs si la CMPS Moselle soutient que les échéances des crédits doivent être partagés par moitié pour déterminer la part de charge mensuelle de l'épouse, en revanche elle ne soutient pas que seule la moitié des capitaux restant dus au titre des emprunts mentionnés dans la fiche devrait être prise en compte pour déterminer le passif de son patrimoine personnel.

Or le prêt de rachat des crédits immobiliers de 144 600 euros, remboursable par échéances mensuelles de 1578 euros, a été contracté par Mme [M] [N] née [G] et son conjoint solidairement, de sorte qu'elle était tenue envers la BNP pour la totalité et pouvait être poursuivie seule pour la totalité (cf contrat de prêt du 01.09.2009, pièce 7 de l'intimée). Il en est de même du prêt personnel de 35 000 euros (pièce 8 de l'intimée). Dès lors Mme [M] [N] née [G] était engagée solidairement pour la totalité du capital restant dû à la date du 26 octobre 2012, concernant ces deux crédits, soit les montants non contestés de 105 692,61 + 32 811,38 = 138 503,99 euros.

L'engagement de caution litigieux d'un montant de 60 000 euros a donc porté les engagements de Mme [M] [N] née [G] à un montant total de 198 503,99 euros, ce qui dépassait de 73 500 euros la valeur de sa quote part de bien indivis évaluée à 125 000 euros.

Les revenus mensuels personnels de Mme [M] [N] née [G] représentaient 3 200 euros par mois, et elle faisait face à la moitié des charges de la vie courante du foyer et d'entretien et d'éducation des deux enfants.

Ainsi le revenu disponible de l'épouse ne lui permettait pas d'apurer rapidement le solde de ses engagements financiers de l'ordre de 73 500 euros selon un court échéancier amiable ou judiciaire ne dépassant pas 24 mois.

Dès lors l'engagement de caution du 26 octobre 2012 était manifestement disproportionné aux biens et revenus personnels de l'épouse, à la date à laquelle il a été souscrit.

- à la date à laquelle la caution a été appelée :

L'engagement du 26 octobre 2012 étant manifestement disproportionné à la date de sa souscription, il incombe à la CMPS Moselle de démontrer qu'à la date à laquelle Mme [M] [N] née [G] a été assignée, soit le 09 novembre 2016, le patrimoine de celle-ci lui permettait de faire face à cet engagement.

Dans l'assignation la CMPS Moselle a sollicité la condamnation de Mme [M] [N] née [G] à lui payer la somme de 21 604,57 euros avec intérêts au taux conventionnel de 5,69 % et assurance-vie de 0,5 % à compter du 6 septembre 2016, au titre de cet engagement de caution souscrit le 26 octobre 2012 afférent au crédit de trésorerie de 50 000 euros en principal consenti le 26 octobre 2012 à la SELARL Pharmacie du centre.

Mme [M] [N] née [G] n'est pas en droit de se prévaloir des engagements de caution auprès de la BNP Paribas qu'elle n'avait pas mentionnés dans la fiche patrimoniale.

À la date du 9 novembre 2016, le capital restant dû au titre du crédit de rachat de crédits immobiliers auprès de la BNP qui avait été mentionné par Mme [M] [N] née [G] sur sa fiche patrimoniale s'élevait à 47 831,47 euros (pièce 7 de l'intimée). Le prêt personnel de 35 000 euros consenti le 12 mars 2012 à M. et Mme [N] par la BNP, remboursable en 84 échéances mensuelles, soit sur 7 ans, était toujours en cours pour un peu plus de deux ans (cf pièce 8 de l'intimée). Mme [M] [N] née [G] n'a pas produit le tableau d'amortissement / plan de remboursement de ce crédit, et la CMPS Moselle, qui supporte la charge de la preuve, ne démontre pas le montant du capital restant dû sur ce prêt à la date du 9 novembre 2016. Le capital restant dû de 32 811,38 euros sera dès lors pris en compte. Le passif personnel de Mme [M] [N] née [G], résultant des crédits qu'elle a contractés en qualité d'emprunteuse solidaire, est ainsi évalué à la somme de 80 642,85 euros à la date du 9 novembre 2016.

Les crédits à la consommation invoqués par Mme [M] [N] née [G], souscrits en octobre 2018 et avril 2019, sont postérieurs à l'assignation du 9 novembre 2016 et n'ont pas à être pris en compte.

S'agissant de l'actif patrimonial, la CMPS Moselle produit une copie du Livre Foncier indiquant que la maison sise [Adresse 2] était toujours inscrite au nom de M. [F] [N] et de Mme [M] [G] à la date du 23 novembre 2016. Il est dès lors tenu compte de la valeur de la quote part indivise de Mme [M] [N] née [G] sur cette maison, soit la somme de 125 000 euros, étant observé qu'il n'est soutenu par aucune des deux parties que la valeur du bien avait évolué depuis le mois de septembre 2012.

En conséquence après déduction du passif évalué à 80 642,85 euros à la date du 9 novembre 2016, l'actif patrimonial disponible représentait 125 000 ' 80 642,85 = 44 357,15 euros à cette même date.

Il en ressort que le patrimoine de Mme [M] [N] née [G], à la date du 9 novembre 2016 à laquelle elle a été appelée par le CMPS Moselle au titre de l'engagement de caution du 26 octobre 2012, lui permettait de faire face à son obligation s'élevant alors à 21 604,57 euros en principal selon les estimations de l'appelante, outre intérêts.

Dès lors la CMPS Moselle est en droit de se prévaloir de l'engagement de caution du 26 octobre 2012, et le jugement est infirmé à cet égard.

- concernant l'engagement de caution du 30 juin 2013  :

- à la date à laquelle il a été souscrit :

Dès lors que le premier engagement de caution du 26 octobre 2012 était manifestement disproportionné aux biens et revenus de Mme [M] [N] née [G], le second de 55 000 euros souscrit 8 mois plus tard, le 30 juin 2013, qui a porté la totalité de ses engagements personnels à 253 500 euros, pour un actif patrimonial de seulement 125 000 euros, était également disproportionné.

- à la date à laquelle la caution a été appelée :

L'engagement du 30 juin 2013 étant manifestement disproportionné à la date de sa souscription, il incombe à la CMPS Moselle de démontrer qu'à la date à laquelle Mme [M] [N] née [G] a été assignée, soit le 09 novembre 2016, le patrimoine de celle-ci lui permettait de faire face à cet engagement.

Selon l'assignation du 9 novembre 2016 l'obligation de Mme [M] [N] née [G] au titre de l'engagement de caution du 30 juin 2016 était évaluée par la CMPS Moselle à 51 343, 71 euros en principal outre intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2016.

Après déduction du passif évalué plus haut à 80 642,85 euros à la date du 9 novembre 2016, et de l'obligation liée à l'engagement de caution du 26 octobre 2012, l'actif patrimonial disponible de Mme [M] [N] née [G] représentait 125 000 ' 80 642,85 ' 21 604,57 = 22 752,58 euros à la date du 9 novembre 2016.

Il ressort de tout ce qui précède que la CMPS Moselle ne démontre pas que le patrimoine de Mme [M] [N] née [G], à la date du 9 novembre 2016 à laquelle elle a été appelée, lui permettait pas de faire face à son obligation découlant de l'engagement de caution du 30 juin 2013, s'élevant alors à 51 343, 71 euros en principal selon les estimations de l'appelante, outre intérêts.

Dès lors la CMPS Moselle n'est pas fondée à se prévaloir de l'engagement de caution du 30 juin 2016, et le jugement est confirmé en ce qu'il rejette la demande à ce titre.

Sur le manquement allégué au devoir de mise en garde :

La banque est tenue à un devoir de mise en garde à l'égard d'une caution non avertie lorsque, au jour de son engagement, celui-ci n'est pas adapté aux capacités financières de la caution, ou s'il existe un risque de l'endettement né de l'octroi du prêt garanti, lequel résulte de l'inadaptation du prêt aux capacités financières de l'emprunteur.

Le caractère averti d'une caution ne peut être déduit de sa seule qualité de gérant.

Il appartient à la CMPS Moselle de rapporter la preuve du caractère averti de Mme [M] [N] née [G] à la date des engagements de caution litigieux.

Le caractère averti ou non de la caution s'apprécie au regard de son expérience professionnelle et de sa connaissance ou méconnaissance des techniques financières et bancaires lui permettant de mesurer les risques encourus à l'occasion de l'engagement de caution litigieux.

En l'espèce il n'est pas contesté que Mme [M] [N] née [G] était gérante de la SELARL Pharmacie du centre depuis la date de commencement d'activité de celle-ci, soit le 10 mai 2008, ainsi qu'il ressort de l'extrait Kbis produit par la CMPS Moselle. Elle exerçait ainsi les fonctions de gérante depuis plus de quatre ans lorsqu'elle a souscrit le premier engagement de caution litigieux du 26 octobre 2012.

En outre il ressort de la pièce 9 de Mme [M] [N] née [G] qu'entre le 10 mai 2008 et le premier engagement de caution litigieux, elle avait en sa qualité de gérante sollicité et obtenu de la BNP Paribas 2 crédits d'investissement au profit de la SELARL Pharmacie du Centre, l'un de 15 000 euros, et le second d'un montant très conséquent de 1 010 000,00 euros. De surcroît sur la même période, elle avait contracté au profit de la BNP Paribas 4 engagements de caution à titre personnel afin de garantir le remboursement de toutes sommes qui pourraient être dues par la SELARL Pharmacie du centre au titre des deux crédits d'investissement précités d'une part, et de toutes sommes dues par celle-ci à un titre quelconque d'autre part. 

En conséquence Mme [M] [N] née [G], qui était gérante et informée de la situation financière de la SELARL Pharmacie du Centre, et qui avait déjà une expérience du crédit et du cautionnement, était une caution avertie à l'occasion des deux engagements de caution du 26 octobre 2012 et 30 juin 2013, de sorte que la CMPS Moselle n'était pas tenue à un devoir de mise en garde à son égard. 

Sur le soutien abusif au crédit allégué :

Selon l'article L. 650-1 du code de commerce, lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci.

Pour le cas où la responsabilité d'un créancier est reconnue, les garanties prises en contrepartie de ses concours peuvent être annulées ou réduites par le juge.

Les dispositions de l'article L. 650-1 du code de commerce régissent, dans le cas où le débiteur fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires, les conditions dans lesquelles peut être recherchée la responsabilité d'un créancier en vue d'obtenir la réparation des préjudices subis du fait des concours consentis.

Elles ne s'appliquent pas à l'action en responsabilité engagée contre une banque par une caution non avertie qui lui reproche de ne pas l'avoir mise en garde contre les risques de l'endettement né de l'octroi du prêt qu'elle cautionne, cette action tendant à obtenir, non la réparation d'un préjudice subi du fait du prêt consenti, lequel n'est pas nécessairement fautif, mais celle d'un préjudice de perte de chance de ne pas souscrire ledit cautionnement.

En revanche l'article L. 650-1 du code de commerce s'applique lorsque la caution fait grief à la banque d'avoir consenti un soutien abusif au débiteur principal.

En l'espèce, Mme [M] [N] née [G] invoque une faute de la banque qui a octroyé des facilités de caisse à la SELARL Pharmacie du Centre alors que l'activité de celle-ci était déficitaire, et elle estime que la CMPS Moselle qui a engagé sa responsabilité lui doit réparation à hauteur des sommes demandées, sans que cela puisse être qualifié de perte de chance.

Ce faisant elle se prévaut d'une faute distincte du manquement du banquier au devoir de mise en garde à son égard, elle estime que la banque a abusivement accordé des facilités de caisse, et l'article L. 650-1 du code de commerce est ainsi applicable.

Cependant Mme [M] [N] née [G] ne prétend pas expressément, et n'établit pas, que l'un des trois cas de responsabilité limitativement prévus par l'article L. 650-1 du code de commerce est caractérisé. Sa demande est mal fondée.

Sur la déchéance du terme :

Le contrat de crédit du 26 octobre 2012 indique qu'il était remboursable sur 36 mois à compter du 15 novembre 2012, soit jusqu'au 15 octobre 2015. Le tableau d'amortissement du prêt était donc expiré à la date de l'assignation, le 9 novembre 2016. A cette date le capital non remboursé par la SELARL Pharmacie du Centre était exigible.

Dès lors les arguments de Mme [M] [N] née [G] relatifs à l'absence d'opposabilité à son égard de la déchéance du terme liée à la liquidation judiciaire du débiteur principal sont inopérants.

Sur le montant de la créance de la banque :

La CMPS Moselle justifie du montant de sa créance en capital, hors intérêts, en produisant d'une part un avis de décision d'admission délivré par le greffier du juge commissaire le 07 mars 2016 dans le cadre de la procédure collective à l'égard de la SELARL Pharmacie du Centre, indiquant que la créance a été définitivement arrêtée à la somme de 18 595,95 euros (pièce 5), et d'autre part sa lettre adressée au mandataire judiciaire le 15 décembre 2014, avec en annexe le bordereau déclaration de créance, indiquant que la somme de 18 595,95 euros se décompose en 18 566,69 euros au titre du capital restant dû, ainsi que 25,32 euros au titre des intérêts et 3,68 euros au titre de l'assurance vie (pièce 3).

Dès lors il y a lieu de condamner Mme [M] [N] née [G] au montant de la créance admise, soit 18 595,95 euros en principal.

Pour le surplus Mme [M] [N] née [G] ne conteste pas l'application d'un taux d'intérêts de 5,69 % l'an, ni même d'un taux d'assurance-vie de 0,5 % l'an à compter du 6 septembre 2016, ainsi que la banque le sollicite.

Sa contestation relative au défaut d'information annuelle et à la déchéance du droit aux intérêts à compter de l'année 2017 sera examinée ci-dessous.

Sur l'information annuelle de la caution et la déchéance du droit aux intérêts au taux conventionnel :

Selon l'article L. 313-22 du code monétaire et financier, les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. ['].

Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette. 

La charge de la preuve de l'accomplissement de l'obligation incombe à l'établissement de crédit, étant précisé que la notification de l'information annuelle n'est soumise à aucune forme particulière, que la seule production de la copie d'une lettre ne suffit pas à justifier de son envoi, et que le banquier n'a pas à prouver que la caution a effectivement reçu l'information envoyée.

En l'espèce il n'est pas contesté que la CMPS Moselle a envoyé jusqu'en mars 2017 à Mme [M] [N] née [G] l'information annuelle concernant l'engagement de caution souscrit en octobre 2012. La CMPS Moselle produit notamment à cet égard les lettres d'information annuelle de 2013 et 2014 et deux constats d'Huissier de justice établissant l'envoi des lettres en mars 2013 et mars 2014 (cf pièces 13 et 14), la lettre d'information annuelle du 7 mars 2016 et le bordereau de dépôt de recommandé portant le cachet de la poste apposé le 15 mars 2016 (pièce 13), ainsi que la lettre du 8 mars 2017 et le bordereau de dépôt de recommandé portant le cachet de la poste apposé le 17 mars 2017 (pièces 13 et 18).

En revanche la CMPS Moselle ne rapporte pas la preuve d'un envoi de la lettre d'information annuelle après le mois de mars 2017. En effet les pièces 23 et 24 ne contiennent que les photocopies des lettres d'information pour les années 2018 à 2020, ainsi que des formulaires de recommandés ne comportant ni le cachet de la poste, ni la signature du destinataire, ni l'avis de présentation ou de distribution, ainsi que des copies de bordereaux de dépôt ne comportant pas non plus de cachet de la poste ou timbre à date. La preuve d'envoi des lettres ou du dépôt de ces recommandés auprès des services postaux n'est donc pas rapportée. Or l'information annuelle est due jusqu'à l'extinction de la dette de la caution.

En conséquence la déchéance du droit aux intérêts conventionnels est encourue depuis la date de la dernière information délivrée, soit depuis le 17 mars 2017.

En revanche Mme [M] [N] née [G] est tenue aux intérêts au taux légal à compter d'une mise en demeure qui lui a été adressée personnellement, conformément à l'article 1231-6 du code civil. L'assignation du 9 novembre 2016 tient lieu de mise en demeure, de sorte que le point de départ des intérêts au taux légal peut être fixé au 17 mars 2017.

Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de condamner Mme [M] [N] née [G] à la somme de 18 595,95 euros en principal, laquelle produit intérêts au taux conventionnel de 5,69 % l'an à compter du 6 septembre 2016 jusqu'au 16 mars 2017 inclus, puis produit intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2017, et est également assortie d'une majoration au taux de 0,5 % l'an à compter du 6 septembre 2016 en raison de l'assurance-vie qui n'est pas expressément contestée par la caution. Mme [M] [N] née [G] est tenue dans la limite de l'engagement de caution du 26 octobre 2012 d'un montant total de 60 000 euros. Le jugement est infirmé en ce qu'il rejette intégralement la demande fondée sur le cautionnement du 26 octobre 2012.

Sur l'absence de demande de capitalisation des intérêts s'agissant du solde du crédit :

La CMPS Moselle a formulé une demande de capitalisation des intérêts au taux légal qui s'insère comme suit dans le dispositif de ses conclusions :

« Condamner Mme [N] née [G], dans la limite de ses deux engagements de caution des 26 octobre 2012 (60 000 euros) et 30 juin 2013 (55 000 euros), à payer à l'association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des Professions de Santé de Moselle

55 000

- la somme de 51 343,71 euros au titre du découvert en compte courant, majorée des intérêts au taux légal, à compter du 6 septembre 2016 ;

- la somme de 21 604,57 euros au titre du solde du prêt professionnel, avec intérêts au taux conventionnel de 5,69 % et assurance-vie de 0,5 % à compter du 6 septembre 2016,

Ordonner la capitalisation des intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement de première instance ».

Or les seuls intérêts au taux légal qu'elle évoque dans ses demandes sont ceux assortissant le montant dû au titre du découvert bancaire. La CMPS Moselle n'a pas sollicité expressément la capitalisation des intérêts au taux conventionnel qu'elle revendique au titre du solde du prêt professionnel, ni sollicité expressément, à titre subsidiaire, la capitalisation des intérêts au taux légal qui seraient le cas échéant substitués aux intérêts conventionnels dans l'hypothèse d'une déchéance du droit aux intérêts conventionnels. Dès lors sa demande de capitalisation des intérêts au taux légal ne concerne pas la demande afférente au solde du crédit de trésorerie.

Sur les dépens et l'indemnité prévue par l'article 700 du code de procédure civile :

Les dispositions du jugement statuant sur les dépens et indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance sont infirmées.

Mme [M] [N] née [G] comme la CMPS Moselle succombent partiellement en leurs prétentions, et devront supporter chacune la moitié des dépens de première instance et d'appel. Les demandes réciproques formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile sont rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONFIRME le jugement en ce qu'il a rejetté la demande de l'Association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des Professions de Santé de Moselle (CMPS Moselle) en paiement de la somme de 51 343,71 euros au titre du découvert en compte courant avec intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2016, fondée sur le contrat de cautionnement en date du 30 juin 2013 ;

INFIRME le jugement en toutes ses autres dispositions ;

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées :

DIT que dans ses rapports avec Mme [M] [G] épouse [N] , l'Association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des Professions de Santé de Moselle (CMPS Moselle) est déchue de son droit aux intérêts conventionnels à compter du 17 mars 2017, au titre du solde du crédit du 26 octobre 2012 ;

CONDAMNE Mme [M] [G] épouse [N] à payer à l'Association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des Professions de Santé de Moselle (CMPS Moselle)

la somme de 18 595,95 euros en principal, et ce avec intérêts au taux conventionnel de 5,69 % l'an à compter du 6 septembre 2016 jusqu'au 16 mars 2017 inclus, et avec intérêts taux légal à compter du 17 mars 2017, ainsi qu'avec un taux de cotisation d'assurance-vie de 0,5 % l'an à compter du 6 septembre 2016, le tout en vertu et dans la limite de l'engagement de caution du 26 octobre 2012 d'un montant total de 60 000 euros ;

CONSTATE que la CMPS Moselle ne formule pas de demande de capitalisation des intérêts au taux légal s'agissant du solde du crédit de trésorerie du 26 octobre 2012 ;

REJETTE les demandes en dommages-intérêts formées par Mme [M] [G] épouse [N];

REJETTE les demandes des parties formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance;

CONDAMNE Mme [M] [G] épouse [N] à supporter la moitié des dépens de première instance et l'Association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des Professions de Santé de Moselle (CMPS Moselle) à en supporter l'autre moitié.

Et y ajoutant

REJETTE les demandes des parties formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel;

CONDAMNE Mme [M] [G] épouse [N] à supporter la moitié des dépens d'appel et l'Association coopérative à responsabilité limitée Caisse Mutuelle des Professions de Santé de Moselle (CMPS Moselle) à en supporter l'autre moitié.

Le GreffierLa Présidente de Chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/01224
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;20.01224 ?
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