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04/07/2024 | FRANCE | N°20/02231

France | France, Cour d'appel de Lyon, 6ème chambre, 04 juillet 2024, 20/02231


N° RG 20/02231 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M53Q









Décision du Tribunal d'Instance de VILLEURBANNE

du 10 décembre 2019



RG : 11-18-4366







S.A.R.L. C.A CUCINE



C/



[Z]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



6ème Chambre



ARRET DU 04 Juillet 2024







APPELANTE :



SARL C.A CUCINE

[Adresse 6]

[Localité 2]



Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938

assisté de Me Hélène BOURDELOIS, avocat au barreau de TOULON





INTIMEE :



Mme [J]-[V] [Z] veuve [R]

née le 29 Octobre 1942 à [Localité 4] (69)

[Adresse 1]

[Localité 5]


...

N° RG 20/02231 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M53Q

Décision du Tribunal d'Instance de VILLEURBANNE

du 10 décembre 2019

RG : 11-18-4366

S.A.R.L. C.A CUCINE

C/

[Z]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

6ème Chambre

ARRET DU 04 Juillet 2024

APPELANTE :

SARL C.A CUCINE

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938

assisté de Me Hélène BOURDELOIS, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE :

Mme [J]-[V] [Z] veuve [R]

née le 29 Octobre 1942 à [Localité 4] (69)

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Norbert BEAL, avocat au barreau de LYON, toque : 56

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 27 Juin 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 28 Mai 2024

Date de mise à disposition : 04 Juillet 2024

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Joëlle DOAT, présidente

- Evelyne ALLAIS, conseillère

- Stéphanie ROBIN, conseillère

assistées pendant les débats de Cécile NONIN, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Joëlle DOAT, présidente, et par Cécile NONIN, greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Faits, procédure et demandes des parties

Selon un bon de commande n° 2288 du 22 mars 2017, Mme [J]-[V] [Z] a commandé à la foire de [Localité 3], sur le stand de la société CA Cucine, société spécialisée en installation et aménagement de cuisines et salles de bains, une salle de bains entièrement équipée avec douche à l'italienne pour un montant de 20 000 euros toutes taxes comprises, incluant la fourniture et la pose.

Le 29 mars 2017, elle a régularisé un second bon de commande portant sur la même prestation et mentionnant 'confirme et remplace le bon de commande n°2288 du 22 mars 2017".

Elle a versé la somme de 8 000 euros à la signature du bon de commande.

Par courrier du 18 avril 2018, Mme [J]-[V] [Z] a sollicité auprès de la société CA Cucine la possibilité de payer le solde du prix, soit 12 000 euros, en deux versements de 6 000 euros, l'un à la livraison des marchandises et l'autre à l'achèvement des travaux.

Les travaux ont été terminés le 15 juin 2018 et Mme [J]-[V] [Z] a refusé de payer le solde du prix de 6 000 euros et de signer le certificat de fin de travaux.

Par acte d'huissier de justice du 31 octobre 2018, la société CA Cucine a fait assigner Mme [J]-[V] [Z] devant le tribunal d'instance de Villeurbanne aux fins d'obtenir sous le bénéfice de l'exécution provisoire, sa condamnation à lui payer :

- la somme de 6 000 euros en exécution du bon de commande signé le 29 mars 2017,

- la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts,

- la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l'instance.

Elle a sollicité en outre qu'il lui soit donné acte de son engagement à poser une porte de douche gratuitement et non comprise dans le bon de commande initial.

Par jugement du 10 décembre 2019, le tribunal d'instance a :

- condamné Mme [J]-[V] [Z] à payer à la société CA Cucine la somme de 6 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement,

- condamné la société CA Cucine à payer à Mme [J]-[V] [Z] la somme de 5 470 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement,

- ordonné la compensation entre ces sommes,

- condamné la société CA Cucine à payer à Mme [J] [V] [Z] la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société CA Cucine de sa demande de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné la société CA Cucine aux dépens de l'instance,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

La société CA Cucine a interjeté appel de ce jugement le 23 mars 2020.

Aux termes de ses conclusions elle a demandé à la cour :

- d'infirmer le jugement, sauf en ce qu'il a condamné Mme [J]-[V] [Z] à lui payer la somme de 6 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement et débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

et statuant à nouveau de :

- condamner Mme [J]-[V] [Z] à lui payer la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- la condamner à lui payer la somme totale de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel, outre les dépens.

Par conclusions en réponse et d'appel incident, Mme [J] [V] [Z] a demandé à la cour de :

- débouter la société CA Cucine de toutes ses demandes,

- réformer le jugement, en ce qu'il a condamné la société CA Cucine à lui payer la somme de 5 470 euros, et ordonné la compensation entre ces sommes et débouté les parties de leurs autres demandes,

et statuant à nouveau

- condamner la société CA Cucine à lui verser la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner la société CA Cucine à lui payer la somme de 5 470 euros au titre des travaux de remise en état,

- condamner la société CA Cucine à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance,

- ordonner que le solde des travaux soit la somme de 6 000 euros due par elle à la société CA Cucine se compensera avec les sommes dues par cette dernière au titre des dommages intérêts pour manquement aux obligations des articles L 111-1, L 221-18 et L 221-5 du code de la consommation soit la somme de 13 270 euros,

- condamner en conséquence la société CA Cucine à lui verser la somme de 7 270 euros,

y ajoutant ,

- condamner la société CA Cucine au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de procédure d'appel.

Par arrêt du 18 novembre 2021, la cour a ordonné, avant dire droit, une expertise confiée à [L] [C], aux fins de déterminer de manière contradictoire l'origine, la nature et l'imputabilité des désordres constatés.

Par courrier du 10 janvier 2022, Mme [J]-[V] [Z] a, par l'intermédiaire de son avocat, fait savoir qu'elle ne consignerait pas les frais d'expertise, dans la mesure où le bien avait été vendu et que l'acquéreur avait procédé à la réfection complète de la salle de bains.

Une ordonnance de caducité a été rendue le 13 janvier 2022.

Par conclusions récapitulatives n° 3 sur réouverture des débats, notifiées par voie dématérialisée le 13 mars 2023, la société CA Cucine demande à la cour de :

- réformer le jugement en ce qu'il :

- l'a condamnée à payer à Mme [J]-[V] [Z] veuve [R] la somme de 5 470 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement,

- ordonné la compensation entre ces sommes,

- l'a condamnée à payer à Mme [J]-[V] [Z] veuve [R] la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive,

- l'a condamnée aux dépens de l'instance,

- confirmer ledit jugement en ce qu'il a :

- condamné Mme [J]-[V] [Z] veuve [R] à lui payer la somme de 6 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement,

- débouter les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

et statuant de nouveau,

- condamner Mme [J]-[V] [Z] veuve [R] à lui payer la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- condamner Mme [J]-[V] [Z] veuve [R] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance, et de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, soit au total la somme de 5 000 euros,

- condamner Madame [J]-[V] [Z] veuve [R] aux entiers dépens.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir que :

- Mme [Z] n'a pas émis de réserves sur la qualité des travaux effectués à l'exception d'une demande de pose d'une porte de douche non prévue au contrat, qu'elle acceptait à titre commercial de lui poser, et a attendu l'assignation pour se plaindre de désordres, alors que la société CA Cucine a fait appel à un poseur qui est assuré et qu'elle l'aurait fait revenir le cas échéant,

- le constat d'huissier du 22 juin 2018 sur lequel s'est appuyé le premier juge n'a pas été réalisé contradictoirement,

- le lien de causalité entre les travaux réalisés et les désordres allégués n'est pas établi.

Ainsi des problèmes d'humidité ne peuvent se révéler en 10 jours, alors que la fin des travaux est daté du 12 juin 2018.

En outre, l'huissier n'a pas de compétence pour relever un défaut de planéité du sol de la douche sans bac, que seul un expert peut constater, en raison des normes spécifiques imposées pour une douche à l'italienne. Concernant la fissure et la chute partielle du joint d'arête de la marche carrelée de la douche, cela peut résulter d'une autre cause, qu'un défaut de pose et notammant d'un choc,

- les attestations versées aux débats sont sans utilité dans le présent litige, ne procédant qu'à des constatations et ne pouvant déterminer les causes,

- le devis non accepté ne peut davantage servir de base à l'évaluation d'un préjudice matériel, préjudice en tout état de cause absent, Mme [Z] ayant vendu le bien et n'ayant pas exposé de travaux de reprise,

- Mme [Z] a cherché par tous les moyens à se soustraire à son obligation de paiement, n'a jamais fait état de désordres avant l'assignation délivrée, ce qui justifie l'octroi de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- elle persiste à invoquer la nullité du contrat, étant cependant dans l'impossibilité de restituer des biens vendus et sollicite une compensation incohérente, ne justifiant pas d'une perte de prix subi, l'acte de vente ne mentionnant pas une diminution du prix en lien avec les désordres de la salle de bains et la baisse entre le prix figurant dans le mandat de vente et le prix finalement retenu étant courante,

- les dispositions du code de la consommation sont respectées, le deuxième bon de commande reprenant les termes du premier avec des métrés exacts, ces éléments ne pouvant être connus sur le stand de la foire. L'information précontractuelle a donc bien été respectée,

- les nouveaux arguments développés par Mme [Z] tels que l'absence d'affichage pour les exposants des dispositions relatives à la loi Hamon et la violation de l'article L 224-60 du code de la consommation doivent être rejetés, les dispositions ayant été respectées,

- la référence à Casamia sur l'encadré relatif aux dispositions de la loi Hamon correspond au nom commercial de la société, CA Cucine étant sa raison sociale,

- le préjudice de jouissance n'est pas établi.

Par conclusions n° 5 après réouverture des débats, notifiées par voie dématérialisée le 19 juin 2023, Mme [J]-[V] [Z] demande à la cour de :

- débouter la société CA Cucine de toutes ses demandes,

en revanche,

- réformer le jugement en ce qu'il a condamné la société CA Cucine à lui payer la somme de 5470 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement,

- ordonné la compensation entre ces sommes,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

et statuant à nouveau,

à titre principal,

- prononcer la nullité du contrat conclu avec la société CA Cucine,

- en conséquence, ordonner la compensation entre d'une part la somme de 20 000 euros toutes taxes comprises qui lui est due par la société CA Cucine au titre de la restitution du prix et d'autre part la somme de 20 000 euros due à la société CA Cucine au titre de la valeur de la salle de bains,

- condamner la société CA Cucine à lui verser la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice de jouissance,

- condamner la société CA Cucine à lui verser la somme de 5 470 euros à titre de dommages et intérêts pour la perte de prix subi,

à titre subsidiaire,

- condamner la société CA Cucine à lui verser la somme de 5 470 euros à titre de dommages et intérêts liés à la perte de prix subi,

- condamner la société CA Cucine à lui verser la somme de 2 000 euros au titre du préjudice de jouissance,

- ordonner que le solde des travaux soit la somme de 6 000 euros due par elle à la société CA Cusine se compensera à due concurrence avec les sommes dues par la société CA Cucine à titre de dommages et intérêts pour la perte de prix subie, des dommages et intérêts pour trouble de jouissance et de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant de 11 270 euros

en conséquence,

- condamner la société CA Cucine à lui verser la somme de 5 270 euros,

en tout état de cause,

- confirmer les dispositions au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant,

- condamner la société CA Cucine à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de la procédure d'appel,

- confirmer le jugement du tribunal d'instance de Villeurbanne du 10 décembre 2019,

- condamner la société CA Cucine aux dépens.

Elle soutient que :

- la société CA Cucine a manqué aux obligations découlant des articles L 224-59, L 224-60 et L 224-61 du code de la consommation relatif à l'information de l'absence de délai de rétractation et que la nullité du contrat doit être prononcée.

La charge de la preuve incombe à la société CA Cucine, contrairement à ce que cette dernière prétend, et elle échoue à rapporter celle-ci au regard des pièces versées aux débats,

- les dispositions de l'article L 111-1 du code de la consommation n'ont pas été respectées, un plan d'implantation précis n'ayant pas été fourni au moment de la commande.

Même à considérer que le second bon de commande est la continuation du premier, il s'agirait d'un avenant apportant des modifications et notamment un plan d'implantation précis. En outre, la ventilation du prix a été profondément modifiée, de sorte que l'économie du contrat a été bouleversée.

- la nullité du contrat implique des restitutions réciproques, mais la restitution en nature étant impossible, elle sollicite la compensation entre la restitution du prix et la somme en valeur de la salle de bains,

- elle a subi un préjudice de jouissance devant aller se doucher dans un autre appartement dont elle est propriétaire, alors qu'elle est âgée et malade et la somme allouée par le jugement déféré est insuffisante,

- la responsabilité décennale de la société CA Cucine est engagée en cas d'infiltration. Or, la preuve des désordres et de leur imputabilité à la société CA Cucine est suffisamment établie par le constat d'huissier, soumis à la discussion des parties, le courrier de la société CA Cucine, des photographies, des attestations et un devis.

Si les travaux de remise en état n'ont pas été effectués, elle a dû vendre son bien immobilier à un moindre prix,

- si la responsabilité décennale n'est pas retenue, la responsabilité de la société CA Cucine est engagée, sur le fondement de l'obligation de résultat.

La cour se réfère aux conclusions précitées pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture est intervenue à l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION

- Sur la demande de nullité du contrat

- au motif du non respect des articles L 224-59 à L 224-60 du code de la consommation

Aux termes de l'article L 224-59 du code de la consommation, avant la conclusion de tout contrat entre un consommateur et un professionnel à l'occasion, notamment, d'un salon, le professionnel informe le consommateur qu'il ne dispose pas d'un délai de rétractation.

L' article L 224-60 du même code spécifie que les offres de contrat faites dans les foires et salons mentionnent l'absence de délai de rétractation en des termes clairs et lisibles dans un encadré apparent.

L'article 2 de l'arrêté du 2 décembre 2014 relatif aux modalités d'information sur l'absence de délai de rétractation prévoit que les offres de contrat visées aux articles L 222-59 à L 224-62 mentionnent dans un encadré apparent situé en en-tête du contrat et dans une taille qui ne peut être inférieure au corps 12, la phrase suivante : Le consommateur ne bénéficie pas d'un droit de rétractation pour un achat effectué dans une foire ou dans un salon.

En l'espèce, le bon de commande du 22 mars 2017 mentionne que Casamia informe Mme [Z] qu'un achat effectué sur foire, salon ou magasin ne dispose pas de délai de rétraction.

Ce texte se situe dans l'en tête du contrat en dessous de l'identité des co-contractants et il est précisé Casamia -SARL CA Cucine, soit le nom commercial et la dénomination sociale sans qu'une confusion puisse être relevée. Il correspond toutefois à la formule anciennement en vigueur, le texte précité de l'article 2 de l'arrêté n'étant pas reproduit.

L'absence de délai de rétractation est néanmoins explicite, visible et l'exigence relative à la police de caractères est respectée.

Mme [Z] fait grief également à la société CA Cucine de ne pas avoir respecté les dispositions de l'article 1 de l'arrêté précité, prévoyant que les professionnels proposant la vente de biens ont l'obligation d'afficher "de manière visible pour les consommateurs sur un panneau ne pouvant pas être inférieur au format A3 dans une taille de caractères ne pouvant être inférieure à celle du corps quatre-vingt-dix, la phrase suivante :

'Le consommateur ne bénéficie pas d 'un droit de rétractation pour tout achat effectué dans cette foire'.

La charge de la preuve incombe au professionnel, contrairement à ce que l'appelante soutient, et la seule production du contrat de participation entre l'organisateur de la foire et elle- même comportant une annexe rappelant la nécessité d'affichage et l'affirmation générale de l'existence de contrôles ne prouve pas la réalité de cet affichage par la société CA Cucine.

Cependant, en vertu de l'article L. 242-23 du code de la consommation, tout manquement aux dispositions des articles L. 224-59 à L. 224-62 est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale. Ces dispositions ne sont pas sanctionnées par la nullité du contrat .

En outre, il convient de constater que la mention de l'absence de possibilité de rétractation figure précisément en en-tête du contrat, et également dans un encadré se situant juste sous les signatures des co-contractants, Mme [Z] en étant donc informée et il ne peut être retenu qu'elle n'a pas été en mesure de consentir librement, n'ayant jamais exprimé la volonté de se rétracter, de sorte que le vice du consentement ne peut pas non plus être retenu.

En conséquence, les moyens soulevés sont inopérants pour fonder la demande de nullité du contrat, qui est rejetée.

- au motif du non respect des dispositions de l'article L 111-1 du code de la consommation

L'article L. 111-1 du code de la consommation dans sa version applicable à la date du contrat prévoit qu'avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;

3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;

5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;

6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.

La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'Etat(...).

Si Mme [Z] soutient que le premier bon de commande signé à la foire ne comporte pas de plan précis alors que ce dernier doit être présent au moment de la commande, il convient cependant d'observer que ce bon de commande comporte le descriptif détaillé des meubles, des matériaux et éléments sanitaires composant la salle de bains et qu'un plan sur lequel figure les différents meubles et installations mais également des cotes est également joint.

Ce plan technique permet d'informer l'acquéreur pour lui permettre de donner un consentement éclairé. En outre, si la présentation de métrés totalement exacts n'est pas possible dans le cadre de ventes réalisées sur des foires, la visite à domicile permettant de confirmer les métrés et d'établir un plan parfaitement précis, le premier plan est déjà précis. Le premier bon de commande mentionne d'ailleurs que la société va se rendre sur place pour les métrés, ce qui permet une connaissance personnelle des mesures exactes de la salle de bains. C'est dans ce contexte que le second bon de commande a été réalisé, ce dernier n'étant que la continuation du premier bon de commande comme l'a mentionné à juste titre le premier juge. Il est en effet repris les mêmes travaux et la fourniture de meubles identiques, le même prix total.

La simple ventilation différente du prix ne permet pas de caractériser un bouleversement de l'économie générale du contrat, les dispositions de l'article L 111-1 du code de la consommation impliquant la mention d'un prix total et non du prix unitaire de chaque élément.

L'argumentation de Mme [Z] ne peut donc pas prospérer.

Ce faisant, elle est déboutée de sa demande de nullité sur le fondement du non respect des dispositions de l'article L 111- 5 du code de la consommation.

La demande de nullité étant rejetée, il n'y a pas lieu d'examiner les demandes consécutives à la nullité du contrat.

- sur la demande en paiement du solde de la facture à la société CA Cucine

En l'espèce, il est établi que le contrat prévoit un prix de 20 000 euros pour la fourniture et l'installation de la salle de bains de Mme [Z]. Elle a payé la somme de 8 000 euros lors de la signature, puis 6 000 euros à la livraison du matériel.

Elle reste dès lors redevable de la somme de 6 000 euros, point sur lequel les parties s'accordent dans leurs conclusions.

Le jugement est ainsi confirmé en ce qu'il a condamné Mme [Z] à payer à la société CA Cucine la somme de 6 000 euros, au titre du solde de la facture, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement.

- Sur la responsabilité de la société CA Cucine

Il est invoqué la garantie décennale et la garantie contractuelle.

Aux termes de l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage des dommages même résultant d'un vice du sol qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement le rendent impropres à sa destination. (...)

En l'espèce, il convient d'observer que la pose d'une douche à l'italienne ne constitue pas un ouvrage et les désordres l'affectant ne relèvent pas de la garantie décennale. En effet, si des problèmes d'infiltration sont évoqués, ceux-ci ne ressortent pas du constat d'huissier établi non contradictoirement, mais soumis à la libre discussion des parties, lequel ne peut être écarté à titre de preuve. Il résulte de celui-ci que le sol présente un défaut de planéité et que lorsque la douche est alimentée en eau, celle-ci s'évacue vers les bords et non vers la bonde, que le joint de l'arête supérieure extérieur de la marche carrelée autour de la douche est fissuré et a chuté partiellement, que le sèche serviette cache en partie une prise.

Il est également observé une chute de peinture sous la patère et une boursouflure à la jonction de la corniche.

Si un carreau est cassé et que des moisissures sont présentes sur des photographies produites en pièce n° 14 par l'intimé, ce qui n'est pas le cas sur les photographies prises par l'huissier de justice dans le cadre de son constat du 22 juin 2018, la preuve d'infiltrations dans le mur en lien avec des travaux non exécutés correctement n'est pas rapportée, le seul constat d'huissier et les attestations versées aux débats ne permettant pas d'avoir un avis technique et professionnel sur ce point, et l'expertise ordonnée par la cour d'appel avant dire droit n'ayant pas été réalisée.

Dès lors, les conditions de la mise en oeuvre de la garantie décennale ne sont pas réunies.

En revanche, la société CA Cucine est tenue pour la réalisation de ses travaux à une obligation de résultat dans le cadre de la garantie contractuelle.

Les désordres précédemment listés démontrent qu'elle a manqué à ses obligations, ce qui relève de la garantie contractuelle.

- Sur la demande de dommages et intérêts liés à la perte de prix subie

Mme [Z] sollicite dans le dispositif de ses conclusions à titre subsidiaire, la cour n'ayant pas fait droit à sa demande à titre principal l'allocation de la somme de 5 470 euros au titre de la perte de prix subie.

Elle soutient ainsi que le prix de vente de sa maison a été réduit en raison des difficultés afférentes à la salle de bains. Il est établi que les travaux de remise en état correspondant au devis d'un montant de 5470 euros n'ont pas été réalisés. Mme [Z] verse également aux débats le mandat de mise en vente de sa maison avec exclusivité conclu le 22 février 2019 avec l'office notarial Actanot Notaire, mentionnant un prix net vendeur de 285 000 euros et la promesse de vente du 22 octobre 2019 pour la somme de 270 000 euros, toutefois elle ne justifie pas que cette diminution de prix résulte notamment des travaux nécessaires dans la salle de bains et non de négociations habituelles dans le cadre des ventes immobilières. La seule mention dans la promesse de vente, selon laquelle le promettant a fait effectuer des travaux de réfection complète de la salle de bains par la société CA Cucine, qu'une procédure judiciaire est en cours et que la condamnation éventuelle de la société Cucine fera le profit ou la perte du promettant le bénéficiaire achetant le bien en l'état sans recours contre le promettant ne présentant pas de caractère probatoire.

En conséquence, elle est déboutée de sa demande.

- sur la demande de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance

Il est démontré que la douche dite à l'italienne posée par la société CA Cucine présentait des désordres et notamment un écoulement sur les côtés et non au centre en direction de la bonde, l'eau jaillissant à l'extérieur.

Mme [Z], agée de 77 ans ne pouvait dans ces conditions se doucher dans sa maison et allait se doucher dans un autre appartement lui appartenant à [Localité 5], ce qui est corroboré par les attestations produites. Elle justifie ainsi d'un préjudice de jouissance qui doit être réparé par l'allocation de la somme de 1 000 euros.

Le jugement déféré est infirmé en ce sens.

- Sur la demande de compensation

Il convient d'ordonner la compensation entre la somme due par Mme [Z] à hauteur de 6 000 euros et celle due par la société CA Cucine à hauteur de 1 000 euros.

- Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive formée par la société CA Cucine

Ni les circonstances du litige, ni les éléments de la procédure ne permettent de caractériser à l'encontre de Mme [Z] une faute de nature à faire dégénérer en abus son droit de défendre en justice.

La demande de dommages et intérêts est ainsi rejetée.

Le jugement est confirmé en ce sens.

- Sur les demandes accessoires

Les parties obtenant partiellement gain de cause, elles conserveront la charge de leurs dépens de première instance et d'appel,

L'équité commande de débouter les deux parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement en ce qu'il a :

- condamné Mme [J]-[V] [Z] veuve [R] à payer à la société CA Cucine la somme de 6 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

- débouté la société CA Cucine de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,

L'infirme pour le surplus

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- déboute Mme [J]-[V] [Z] de sa demande de nullité du contrat qu'elle a conclu avec la société CA Cucine,

- déboute Mme [J]-[V] [Z] de sa demande de dommages et intérêts liés à la perte de prix subie,

- condamne la société CA Cucine à payer à Mme [J]-[V] [Z] la somme de 1 000 euros au titre du trouble de jouissance,

- ordonne la compensation entre la somme de 6 000 euros due par Mme [J]-[V] [Z] à la société CA Cucine et celle de 1 000 euros due par la société CA Cucine à Mme [J]-[V] [Z],

- dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel,

- déboute les deux parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile tant pour les frais irrépétibles de première instance que d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/02231
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;20.02231 ?
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