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02/07/2024 | FRANCE | N°22/07139

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 02 juillet 2024, 22/07139


N° RG 22/07139 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OSQK















Décision du

Tribunal Judiciaire de LYON

Au fond

du 06 septembre 2022



RG : 20/07175

ch 4









[G]



C/



S.A. CNP ASSURANCES

Association APICIL UPESE ASSOCIATION





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 02 Juillet 2024


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APPELANT :



M. [X] [G] ès-qualités d'héritier de Mme [H] [G]

né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 9] (69)

[Adresse 8]

[Localité 5]



Représenté par Me Achille VIANO, avocat au barreau de LYON, toque : 1949









INTIMEES :



S.A. CNP ASSURANCES

[Adresse 4...

N° RG 22/07139 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OSQK

Décision du

Tribunal Judiciaire de LYON

Au fond

du 06 septembre 2022

RG : 20/07175

ch 4

[G]

C/

S.A. CNP ASSURANCES

Association APICIL UPESE ASSOCIATION

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 02 Juillet 2024

APPELANT :

M. [X] [G] ès-qualités d'héritier de Mme [H] [G]

né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 9] (69)

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représenté par Me Achille VIANO, avocat au barreau de LYON, toque : 1949

INTIMEES :

S.A. CNP ASSURANCES

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me Pierre-laurent MATAGRIN, avocat au barreau de LYON, toque : 568

Association APICIL UPESE ASSOCIATION

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON, toque : 1983

ayant pour avocat plaidant Me Marjorie PASCAL, avocat au barreau de LYON, toque : 362

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 15 Février 2024

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 28 Mars 2024

Date de mise à disposition : 02 Juillet 2024

Audience présidée par Bénédicte LECHARNY, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Olivier GOURSAUD, président

- Stéphanie LEMOINE, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSÉ DE L'AFFAIRE

Le 21 décembre 1999, [H] [G] a souscrit par l'intermédiaire de l'institution de prévoyance Apicil Arcil prévoyance, devenue l'association Apicil Upese association (l'association), un contrat de prévoyance invalidité dépendance géré par la société AXA puis transféré à la société CNP Assurances (la CNP).

Par courrier du 22 juillet 2016, son fils, M. [X] [G], arguant de l'état de dépendance de sa mère, a sollicité l'ouverture des droits du contrat d'assurance.

La CNP a retenu une dépendance partielle de niveau 1 du 24 mars 2016 au 26 septembre 2018, ouvrant droit à une rente annuelle de base de 2 297,52 euros calculée sur un taux de rente de 50 %, puis un état de dépendance de niveau 2 à compter du 27 septembre 2018.

Après le décès de [H] [G] survenu le [Date décès 3] 2019, M. [G], agissant en qualité d'héritier de sa mère, a assigné l'institution de prévoyance Apicil Arcil prévoyance et la CNP devant le tribunal judiciaire de Lyon en paiement d'arriérés de rente et en indemnisation.

Par jugement du 6 septembre 2022, le tribunal a :

- donné acte à l'association de son intervention volontaire aux lieux et place de l'institution de prévoyance Apicil Arcil prévoyance,

- débouté M. [G] de toutes ses demandes,

- condamné M. [G] à payer à l'association et à la CNP a somme de 1 200 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties pour le surplus,

- condamné M. [G] aux dépens.

Par déclaration du 26 octobre 2022, M. [G] a relevé appel du jugement.

Par conclusions notifiées le 18 octobre 2023, il demande à la cour de :

- réformer le jugement dans toutes ses dispositions,

et statuant de nouveau,

à titre principal,

- juger que l'état de dépendance de [H] [G] nécessitait une surveillance constante dès le 24 mars 2016,

- condamner in solidum la CNP et l'association à lui payer :

la somme de 12'310,64 euros au titre des arriérés de rente,

celle de 7 854 euros au titre des frais de déplacement exposés,

celle encore de 5 000 euros au titre du préjudice moral,

celle de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

à titre subsidiaire,

- désigner avant-dire droit tel expert qu'il plaira à la cour pour déterminer la gravité de la dépendance de sa mère du 24 mars 2016 au 27 septembre 2018,

dans tous les cas,

- condamner in solidum la CNP et l'association à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum la CNP et l'association aux entiers dépens de la présente instance, distraits au profit de Maître Achile Viano, avocat sur son affirmation de droit.

Par conclusions notifiées le 18 avril 2024, la CNP demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- rejeter la demande d'expertise formée par M. [G] comme étant une prétention nouvelle irrecevable,

- débouter M. [G] de toutes ses demandes formées à son encontre,

y ajoutant,

- condamner M. [G] à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [G] aux entiers dépens tant de première instance que d'appel, distraction faite au profit de Maître Pierre Laurent Matagrin, sur son affirmation de droit en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 24 avril 2023, l'association demande à la cour de :

- déclarer l'appel interjeté par M. [G] comme étant recevable mais l'en débouter comme étant infondé et injustifié,

- confirmer la décision du tribunal en ce qu'il a débouté M. [G] de toutes ses demandes formulées à son encontre,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [G] au paiement d'une indemnité de 1 200 euros à son profit en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance,

y ajoutant,

- condamner M. [G] au paiement d'une indemnité de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à raison des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- condamner le même aux entiers dépens d'instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 15 février 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Sur les demandes formées contre la CNP

M. [G] reproche à la CNP d'avoir commis une faute dans l'exécution des prestations contractuelles en refusant de prendre en compte l'état de dépendance de sa mère lié à ses troubles psychiques (ligne A du contrat) pour considérer qu'elle était en état de dépendance partielle et non totale. Il soutient que l'état de dépendance de sa mère correspondait à une dépendance totale avec obligation de surveillance dès son hospitalisation du 24 mars 2016. Il sollicite la condamnation de la CNP à lui verser le solde de la rente et à l'indemniser des préjudices qu'il a subis du fait du paiement tardif et incomplet de la rente.

Il sollicite, à titre subsidiaire, une expertise judiciaire.

La CNP conclut au rejet de la demande d'expertise, aux motifs qu'elle est nouvelle en appel et qu'elle vise à suppléer la carence de l'appelant dans l'administration de la preuve. Elle soutient que ce dernier ne démontre pas que sa mère nécessitait une surveillance et une assistance constantes suite à des troubles psychiques avant le 27 septembre 2018. Elle estime en conséquence n'avoir commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité contractuelle. Enfin, elle fait valoir, d'une part, que l'appelant, qui n'a jamais été son cocontractant, n'est pas fondé à solliciter sa condamnation à des dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil, d'autre part, sur le fond, que ses demandes sont spéculatives et non indemnitaires.

Réponse de la cour

Selon l'article 1134, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

En l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats par les parties que [H] [G] a souscrit un contrat intitulé « Liberté option 2 » qui garantit la dépendance totale ou partielle dans les conditions suivantes : « Le versement à l'assuré de 100 % (en cas de dépendance totale de l'assuré) ou 50 % (en cas de dépendance partielle de l'assuré) de la rente mensuelle indiquée sur le bulletin d'adhésion », ainsi qu'il ressort de l'article 3 des conditions générales du contrat.

Il ressort encore de l'extrait des conditions générales annexé au bulletin d'adhésion que ce contrat stipule notamment :

« Article 2 - Quelques définitions

Pour l'application du contrat, on entend par :

[...]

Dépendance : on entend par dépendance l'impossibilité permanente, médicalement constatée (accompagnée ou non de troubles psychiques) d'effectuer seul les actes de la vie quotidienne : se déplacer, s'habiller, s'alimenter, se laver, uriner. L'état de dépendance est apprécié par un médecin inscrit au Conseil de l'Ordre à partir de la grille d'évaluation suivante puis validé par le médecin-conseil de l'assureur.

Nombre de points

A

Surveillance et assistance constante suite à des troubles psychiques

7

B

Dépendance nécessitant une aide pour :

1) s'alimenter (boire, manger,...)

2) s'habiller (se chausser,')

3) faire sa toilette (se laver, se coiffer, se raser,')

4) se déplacer (se lever, se coucher, s'asseoir,')

5) uriner (')

Total

Aide partielle

1

1

1

1

1

Aide totale

2

2

2

2

2

Dépendance garantie par votre contrat : Si le total des points (de la ligne A ou B) est égal à 6 (dépendance partielle) ou supérieur à 6 (dépendance totale), l'assuré est considéré en état de dépendance. [...]

Article 3 - L'objet de votre contrat

Votre contrat prévoit les prestations suivantes :

La dépendance totale : le versement à l'assuré de 100 % de la rente mensuelle indiquée sur le bulletin d'adhésion en cas de dépendance totale de l'assuré.

La dépendance partielle : le versement à l'assuré de 50 % de la rente mensuelle indiquée sur le bulletin d'adhésion. [...] ».

Il appartient à M. [G] qui réclame le versement d'une rente à hauteur de 100 % à compter du 24 mars 2016 d'établir que sa mère remplissait les conditions requises par le contrat pour bénéfice de la garantie pour dépendance totale à compter de cette date.

Sur ce point, l'appelant soutient plus particulièrement que l'état de sa mère nécessitait une surveillance permanente en raison de ses troubles psychiques, de sorte qu'elle remplissait les conditions de la ligne A du tableau de garantie.

À l'appui de cette affirmation, il verse aux débats plusieurs pièces médicales, notamment le compte rendu d'hospitalisation de sa mère en service de médecine au centre hospitalier de [Localité 10] du 24 au 31 mars 2016, un document intitulé « dossier médical de demande d'admission en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes » daté du 20 avril 2016, un certificat médical de demande de mise sous tutelle rédigé le 30 avril 2016 par le docteur [P], expert psychiatre, deux bilans de mini-mental state examination (MMS) datés des 8 août 2016 et 21 novembre 2017, l'attestation médicale d'état de dépendance renseignée par le Docteur [O] le 18 avril 2017, la grille AGGIR établie par le docteur [K] [T] le 27 septembre 2018 et un certificat médical établi le 10 octobre 2018 par le docteur [V].

S'il est établi à la lecture de ces pièces que l'état de santé de [H] [G] nécessitait une surveillance constante en raison d'une altération de ses facultés cognitives depuis au moins le 19 mai 2016, il n'en résulte pas la preuve, en revanche, qu'elle nécessitait une assistance constante, telle qu'exigée par la ligne A du tableau de garantie, avant le 27 septembre 2018, date à laquelle elle est passée d'une dépendance de stade GIR 2 à une dépendance de stade GIR 1.

En effet, il ressort :

- du compte rendu d'hospitalisation du 4 avril 2016 que [H] [G] « effectue ses transferts et marche avec une canne »,

- du dossier médical de demande d'admission en EHPAD du 20 avril 2016 qu'elle fait seule (A) ou partiellement (B) un certain nombre d'actes marqueurs de l'autonomie et qu'elle ne présente pas d'autres symptômes psycho comportementaux que l'anxiété,

- de l'attestation médicale d'état de dépendance établie par le docteur [O] le 18 avril 2017 que son état de santé lui permet d'effectuer seule ou avec une aide partielle un certain nombre d'actes de la vie quotidienne.

M. [G] reconnaît lui-même dans ses conclusions d'appel que l'état de dépendance de sa mère était classé GIR 2 jusqu'au 27 septembre 2018, correspondant à l'une des situations suivantes :

- soit une personne confinée au lit ou au fauteuil, dont les fonctions mentales ne sont pas totalement altérées et dont l'état exige une prise en charge pour la plupart des activités de la vie courante,

- soit une personne dont les fonctions mentales sont altérées, qui est capable de se déplacer, mais qui nécessite une surveillance permanente.

Si ce degré de dépendance nécessite une surveillance permanente en cas d'altération totale des fonctions mentales, il ne justifie pas, en revanche, une assistance constante, à la différence du GIR 1. Or, l'état de santé de [H] [G] n'a été classé GIR 1 qu'à compter du 27 septembre 2018, date à laquelle la CNP lui a accordé une rente de dépendance totale.

Au vu de ce qui précède, la cour retient, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une mesure d'expertise, que M. [G] ne rapporte pas la preuve que l'état de santé de sa mère justifiait le bénéfice d'une rente de dépendance totale pour la période antérieure au 27 septembre 2018.

En l'absence de faute de la CNP dans l'exécution de ses prestations contractuelles, le jugement attaqué est confirmé en ce qu'il a débouté M. [G] de ses demandes en paiement dirigées contre la CNP, tant au titre d'un prétendu arriéré de rente qu'au titre de l'indemnisation des préjudices allégués.

2. Sur les demandes formées contre l'association

Dans la mesure où la cour a jugé que la CNP n'avait pas manqué à ses obligations contractuelles en accordant à [H] [G] une rente de 50 % du 24 mars 2016 au 26 septembre 2018, l'appelant n'est pas fondée à reprocher à l'association une faute commise dans la gestion du contrat de prévoyance, au motif qu'elle « n'a entrepris aucune démarche pour activer la garantie de prévoyance souscrite par son assurée ».

Par ailleurs, si M. [G] reproche encore à l'association d'avoir « mis plusieurs semaines à traiter les demandes adressées par [lui], lorsqu'elle a daigné répondre », force est de constater qu'il n'établit pas la preuve d'un lien de causalité entre le simple retard allégué et les préjudices qu'il invoque.

Aussi convient-il de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [G] de ses demandes dirigées contre l'association.

3. Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement est encore confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance.

M. [G], partie perdante, est condamné aux dépens d'appel et à payer à la CNP et à l'association la somme de 1 000 euros chacune au titre des frais irrépétibles qu'elles ont dû engager.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [X] [G] à payer à la société CNP Assurances et à l'association Apicil Upese association la somme de 1 000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [X] [G] aux dépens d'appel,

Fait application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit des avocats qui en ont fait la demande.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 22/07139
Date de la décision : 02/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-02;22.07139 ?
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