La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/06/2024 | FRANCE | N°22/07754

France | France, Cour d'appel de Lyon, 6ème chambre, 20 juin 2024, 22/07754


N° RG 22/07754 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OT5B









Décision du Juge de la mise en état du Tribunal Judiciaire de LYON

du 14 novembre 2022



RG : 21/03724







Société NEXITY LAMY



C/



S.A.S. DELASTRE IMMOBILIER [Adresse 1]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



6ème Chambre



ARRET DU 20 Juin 2024







APPELANTE :



LA SOCIETE NEXIT

Y LAMY

[Adresse 3]

[Localité 5]



Représentée par Me Jean-christophe BESSY, avocat au barreau de LYON, toque : 1575

assistée de Me Benjamin PORCHER de la SELAS PORCHER & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS





INTIMEE :



LE SYNDICAT DES COPROPRIET...

N° RG 22/07754 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OT5B

Décision du Juge de la mise en état du Tribunal Judiciaire de LYON

du 14 novembre 2022

RG : 21/03724

Société NEXITY LAMY

C/

S.A.S. DELASTRE IMMOBILIER [Adresse 1]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

6ème Chambre

ARRET DU 20 Juin 2024

APPELANTE :

LA SOCIETE NEXITY LAMY

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Jean-christophe BESSY, avocat au barreau de LYON, toque : 1575

assistée de Me Benjamin PORCHER de la SELAS PORCHER & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

LE SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU [Adresse 1] représenté par son syndic en exercice la SOCIETE DELASTRE IMMOBILIER

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Eric DUMOULIN de la SCP DUMOULIN - ADAM, avocat au barreau de LYON, toque : 1411

assisté de Me Marie-Noëlle GRANDJEAN, avocat au barreau de SETE

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 27 Juin 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 Mai 2024

Date de mise à disposition : 20 Juin 2024

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Joëlle DOAT, présidente

- Evelyne ALLAIS, conseillère

- Stéphanie ROBIN, conseillère

assistées pendant les débats de Cécile NONIN, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Joëlle DOAT, présidente, et par Cécile NONIN, greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES

En 2005, la métropole de [Localité 6] a engagé des travaux dans des galeries souterraines se trouvant sous l'immeuble situé [Adresse 1] (69 001).

Un effondrement du sol provoqué par l'affaissement progressif des terrains surmontant un vide souterrain, dénommé fontis, a été découvert dans la cave de cet immeuble, en avril 2005.

Le syndic de l'immeuble était à cette date la régie Sauzay.

En juillet 2006, des fissurations et des lézardes sont apparues dans l'immeuble.

Par ordonnance en date du 7 juin 2013, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon, statuant sur la requête du syndicat des copropriétaires dirigée contre la métropole de Lyon et la ville de Lyon, a désigné un expert avec mission de déterminer les causes et les conséquences des désordres affectant l'immeuble.

Par ordonnance en date du 8 mars 2017, le juge des référés du tribunal administratif, considérant qu'en l'état de l'instruction, M. [V] [C], expert, était fondé à demander que les opérations d'expertise soient étendues à la régie Lamy laquelle ne contestait pas l'utilité de sa présence, a prononcé l'extension sollicitée.

Le rapport d'expertise a été déposé le 26 juillet 2017.

Par jugement en date du 17 novembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté les demandes du syndicat des copropriétaires dirigées contre la métropole de Lyon et la ville de Lyon et s'est déclaré incompétent pour connaître des demandes du syndicat contre le syndic, la régie Lamy.

Le tribunal a considéré que les désordres invoqués par le syndicat des copropriétaires n'étaient pas la conséquence directe des travaux effectués pour le compte de la métropole de Lyon dans les galeries souterraines situées sous l'immeuble.

Et il a estimé qu'à l'époque de la découverte du fontis dans la cave en 2005, les conditions de dégradation du sol dûes au fontis n'étaient pas réunies pour l'affaissement des murs, mais qu'elles le seront en juillet 2006 et dans les jours qui précèdent, de sorte que la ville de [Localité 6] n'avait pas commis de faute.

Le syndicat des copropriétaires a interjeté appel de ce jugement devant la cour administrative d'appel à l'égard de la métropole de [Localité 6], de la ville de [Localité 6] et du syndic. L'appel est actuellement pendant.

Par acte d'huissier en date du 7 juin 2021, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble a fait assigner son syndic, la société Nexity Lamy, devant le tribunal judiciaire de Lyon, pour s'entendre condamner celui-ci à lui payer la somme de 879 376,83 euros toutes taxes comprises en réparation de son préjudice, outre la somme de 70 000 euros en réparation de ses préjudices immatériels, faisant valoir que les conséquences dommageables du sinistre survenu en 2006 étaient entièrement imputables à la faute du syndic.

La société Nexity Lamy a saisi le juge de la mise en état d'un incident, aux fins de voir :

- prononcer le sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive dans le cadre de la procédure en cours devant la cour administrative d'appel

- déclarer irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires au titre des préjudices subis individuellement par les copropriétaires pour défaut de qualité et intérêt à agir

- déclarer irrecevables comme étant prescrites les demandes formées par le syndicat des copropriétaires à son encontre, tant en son nom qu'en celui des copropriétaires.

Par ordonnance en date du 14 novembre 2022, le juge de la mise en état a :

- ordonné le sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt définitif qui sera rendu par la cour administrative d'appel

- rejeté les fins de non recevoir tirées du défaut de qualité à agir du syndicat des copropriétaires et de la prescription de l'action de ce dernier

- dit que les dépens de l'incident suivront le sort de ceux de l'instance au fond

- condamné la société Nexity Lamy à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le juge de la mise en état a considéré, en ce qui concerne la qualité à agir, que les éléments du rapport d'expertise établissaient l'existence d'un préjudice éprouvé par l'ensemble des copropriétaires et qu'ils supportaient de la même façon, et en ce qui concerne la prescription, que le point de départ de l'action en responsabilité contractuelle introduite par le syndicat des copropriétaires contre le syndic devait être fixé à la date à laquelle il avait eu connaissance de ce que la régie Sauzay était présente en avril 2005 lors de la découverte du fontis mais s'était abstenue de l'informer de l'existence de celui-ci et n'avait pas immédiatement engagé les mesures appropriées, c'est à dire le 26 septembre 2016, date de remise à l'expert judiciaire d'un compte-rendu de chantier mentionnant la présence de la régie Sauzay.

La société Nexity Lamy a interjeté appel de cette ordonnance, le 22 novembre 2022, son appel portant sur tous les chefs de l'ordonnance, y compris le chef ayant prononcé le sursis à statuer.

Dans ses conclusions n° 3, la société Nexity Lamy demande à la cour :

- de confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a prononcé le sursis à statuer

- d'infirmer l'ordonnance pour le surplus

statuant à nouveau,

- de déclarer irrecevables pour défaut de qualité et d'intérêt à agir les demandes formulées par le syndicat des copropriétaires au titre des préjudices subis par les copropriétaires individuellement

- de déclarer irrecevables comme prescrites les demandes formulées par le syndicat des copropriétaires tant en son nom qu'en celui des copropriétaires

- de débouter le syndicat de ses demandes

- en tout état de cause, de condamner le syndicat des copropriétaires à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Dans ses conclusions n°3, le syndicat des copropriétaires demande à la cour :

- de confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté l'incident de prescription et a condamné la société Nexity Lamy à lui payer une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- 'de faire droit à l'appel incident en ce qu'il a retenu l'incident tendant au sursis à statuer et de dire n'y avoir lieu'

- de condamner la société Nexity Lamy à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 juin 2023.

SUR CE :

Sur le sursis à statuer

Par soit-transmis en date du 15 mai 2024, la cour a soulevé d'office la question de la recevabilité de l'appel incident formé par le syndicat des copropriétaires au regard des dispositions de l'article 380 du code de procédure civile et demandé aux parties de lui adresser ses observations sur ce point.

Le syndicat des copropriétaires, dans sa réponse en date du 28 mai 2024, fait observer que dans ses conclusions d'intimé, il demande également la confirmation du sursis à statuer (') et que la cour peut prendre acte que les deux parties présentent la même demande, à savoir la confirmation du sursis à statuer ordonné par le premier juge.

****

L'article 380 du code de procédure civile énonce que la décision de sursis peut être frappée d'appel sur autorisation du premier président de la cour d'appel s'il est justifié d'un motif grave et légitime, que la partie qui veut faire appel saisit le premier président, qui statue selon la procédure accélérée au fond, et que l'assignation doit être délivrée dans le mois de la décision.

En l'espèce, la société appelante a abandonné dans ses conclusions d'appel sa critique du chef de l'ordonnance tendant à voir infirmer la disposition de l'ordonnance ayant prononcé le sursis à statuer, mais le syndicat des copropriétaires, dans ses conclusions d'intimé, a formé appel incident dudit chef, demandant implicitement que celui-ci soit infirmé et que la demande de sursis à statuer soit rejetée.

Le syndicat des copropriétaires n'ayant pas saisi le premier président d'une demande d'autorisation d'interjeter appel (principal) de la décision de sursis à statuer, son appel incident formé devant la cour à cette fin est irrecevable.

Sur les fins de non-recevoir

Aux termes de son soit-transmis du 15 mai 2024, la cour a également demandé aux parties de lui adresser ses observations sur le point suivant :

un sursis à statuer ayant été prononcé par le juge de la mise en état, ce sursis ne s'étend-il pas aux fins de recevoir soulevées par la société Nexity Lamy devant ce juge '

Le syndicat des copropriétaires répond le 28 mai 2024 que le premier juge a statué sur deux demandes distinctes, présentant des régimes procéduraux autonomes, et que, dans ces conditions, le rejet des fins de non-recevoir sera confirmé par la cour tel que demandé dans les conclusions qu'il a notifiées.

La société Nexity Lamy fait observer, dans sa réponse du 6 juin 2024, qu'elle avait soulevé devant le premier juge liminairement la question du sursis, de sorte que le prononcé du sursis aurait dû conduire le juge à ne pas se pencher sur la fin de non-recevoir qu'elle avait également soulevée, et que ce point de l'ordonnance encourt en tout état de cause l'infirmation, puisque le sursis aurait dû s'appliquer à l'ensemble du litige, y compris aux irrecevabilités.

Elle ajoute que si la cour estime que le sursis n'empêche pas de statuer sur les irrecevabilités, il conviendra de trancher ce point.

****

Aux termes de l'article 378 du code de procédure civile, la décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine.

S'agissant d'une exception de procédure, la demande de sursis à statuer dans l'attente de la décision d'une juridiction administrative doit, à peine d'irrecevabilité, être présentée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.

En application de l'article 123 du code de procédure civile, complété par le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020, les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu'il n'en soit disposé autrement.

L'article 789 du code de procédure civile issu du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020 dispose que, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les fins de non recevoir et que les parties ne sont plus recevables à soulever ces fins de non-recevoir au cours de la même instance, à moins qu'elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état.

La société Nexity Lamy a demandé au juge de la mise en état de surseoir à statuer dans l'attente d'une décision définitive dans le cadre de la procédure actuellement en cours devant la cour administrative d'appel.

Elle a également demandé au juge de la mise en état, sans préciser que cette demande était faite à titre subsidiaire au cas où la demande de sursis à statuer serait rejetée, de statuer sur les fins de non-recevoir tirées du défaut de qualité à agir du syndicat des copropriétaires au titre des préjudices subis par les copropriétaires individuellement et de la prescription des demandes formées à son encontre.

Le juge a donc statué sur ces fins de non-recevoir, bien qu'il ait accueilli la demande de sursis à statuer.

Or, le sursis à statuer s'étend à l'ensemble du litige, fins de non-recevoir et fond.

Il convient d'infirmer l'ordonnance qui a statué sur les fins de non-recevoir, alors que l'instance était suspendue par le sursis qu'elle venait de prononcer, et de dire qu'en l'état, ces fins de non-recevoir sont devenues sans objet en raison de la mesure de sursis.

A l'expiration du sursis, si l'instance est poursuivie, il appartiendra à la société Nexity Lamy, de représenter le cas échéant ses fins de non-recevoir devant le juge de la mise en état.

La société Nexity Lamy ayant obtenu gain de cause devant le premier juge en sa demande de sursis à statuer, l'ordonnance doit être infirmée en ce qu'elle a condamné cette société à payer au syndicat des copropriétaires une indemnité de procédure et la demande du syndicat formée en application de l'article 700 du code de procédure civile doit être rejetée.

Chacune des parties conservera la charge de ses dépens d'appel et de ses frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement :

DECLARE irrecevable l'appel incident tendant à l'infirmation du chef de l'ordonnance ayant prononcé le sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt définitif qui sera rendu par la cour administrative d'appel

INFIRME l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté les fins de non recevoir tirées du défaut de qualité à agir du syndicat des copropriétaires et de la prescription de l'action de ce dernier

Statuant à nouveau sur ce point,

DIT que ces fins de non-recevoir sont en l'état devenues sans objet en raison du sursis à statuer prononcé par l'ordonnance

REJETTE la demande du syndicat des copropriétaires fondée sur l'article 700 du code de procédure civile de première instance

DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel

REJETTE les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22/07754
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;22.07754 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award