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20/06/2024 | FRANCE | N°22/05742

France | France, Cour d'appel de Lyon, 6ème chambre, 20 juin 2024, 22/05742


N° RG 22/05742 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OO7U









Décision du Juge des contentieux de la protection de VILLEURBANNE

du 13 juin 2022



RG : 11-22-0660







S.A. CREATIS



C/



[I]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



6ème Chambre



ARRET DU 20 Juin 2024







APPELANTE :



S.A. CREATIS

[Adresse 4]

[Localité 3]



Représentée par Me Amélie GONCALVES de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON, toque : T.1740





INTIME :



M. [U] [I]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 5]



défaillant





* * * * * *





Date de clôture de l'inst...

N° RG 22/05742 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OO7U

Décision du Juge des contentieux de la protection de VILLEURBANNE

du 13 juin 2022

RG : 11-22-0660

S.A. CREATIS

C/

[I]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

6ème Chambre

ARRET DU 20 Juin 2024

APPELANTE :

S.A. CREATIS

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Amélie GONCALVES de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON, toque : T.1740

INTIME :

M. [U] [I]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 5]

défaillant

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 04 Avril 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 Mai 2024

Date de mise à disposition : 20 Juin 2024

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Joëlle DOAT, présidente

- Evelyne ALLAIS, conseillère

- Stéphanie ROBIN, conseillère

assistées pendant les débats de Cécile NONIN, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt rendu par défaut publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Joëlle DOAT, présidente, et par Cécile NONIN, greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Faits, procédure et demandes des parties

Par offre préalable acceptée le 11 septembre 2017, la société Creatis a consenti à M. [U] [I] un rachat de crédits d'un montant de 30 200 euros remboursable en 144 mensualités de 281,14 euros chacune, incluant des intérêts au taux nominal de 5,12 % l'an.

Les échéances n'ont pas été régulièrement honorées.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 mai 2021, la société Cofidis a mis en demeure M. [U] [I] de régler les échéances impayées dans un délai de 30 jours et l'a informé qu'à défaut la déchéance du terme serait prononcée.

Par lettre recommandée du 16 août 2021, la déchéance du terme a été prononcée.

Par acte d'huissier du 15 février 2022, la société Creatis a fait assigner M. [U] [I] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Villeurbanne, aux fins de le voir condamner à lui payer les sommes de :

- 29 179,13 euros outre intérêts conventionnels de 5,12% à compter du 26 mai 2021,

- 350 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

A l'audience, le tribunal a relevé d'office les moyens tirés du défaut de justification de la remise d'une offre de crédit munie d'un bordereau de rétractation détachable ainsi que de l'absence de production des éléments d'informations spécifiques aux regroupements de crédits et a invité la société Creatis à faire valoir ses observations sur la déchéance du droit aux intérêts pouvant en découler.

La société Creatis a indiqué que la déchéance du droit aux intérêts n'était pas encourue, estimant avoir rempli ses obligations.

M. [U] [I], assigné à l'étude d'huissier n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter.

Il a, par courrier reçu au tribunal pendant le délibéré, présenté ses excuses pour son absence à l'audience et indiqué avoir déposé un dossier de surendettement, déclaré recevable par la commission. Son courrier a été communiqué à la société Creatis.

Par jugement du 13 juin 2022, le juge des contentieux de la protection a :

- dit n'y avoir lieu à réouverture des débats,

- reçu la société Creatis en son action,

- prononcé la déchéance du droit aux intérêts,

- condamné M. [U] [I] à payer à la société Creatis la somme de 20 775,17 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 15 février 2022,

- débouté la société Creatis de ses demandes plus amples ou contraires,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [U] [I] aux dépens de l'instance,

- maintenu l'exécution provisoire du jugement

Par déclaration du 5 août 2022, la société Creatis a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions signifiées à l'intimé défaillant le 6 octobre 2022, elle demande à la cour :

- d'infirmer le jugement déféré, sauf en ce qu'il a :

- dit n'y avoir lieu à réouverture des débats,

- reçu son action,

- condamné M. [U] [I] aux dépens de l'instance,

statuant à nouveau et y ajoutant,

- de condamner M. [U] [I] à lui payer la somme de :

- 29 179,13 euros outre intérêts contractuels au taux de 5,12% à compter du 26 mai 2021,

- 750 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- débouter M. [U] [I] de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner M. [U] [I] aux dépens d'appel.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir que la déchéance du droit aux intérêts n'est pas encourue, la lecture combinée des articles L 312-19 et L 312-21 du code de la consommation ne laissant apparaître l'obligation du bordereau de rétractation que sur l'offre destinée à l'emprunteur et non sur l'offre du prêteur, cette dernière ne présentant aucune valeur probante sur ce point.

Elle ajoute que l'offre préalable acceptée par M. [I] versée aux débats comporte la mention selon laquelle il a reconnu être en possession d'un exemplaire des conditions particulières et générales doté d'un formulaire détachable de rétractation, ce qui laisse présumer la régularité de l'offre, aucune sanction ne pouvant donc être appliquée.

Elle indique en outre que la clause pénale réclamée est conforme aux dispositions légales et contractuelles et ne revêt dans ce contexte pas de caractère excessif.

Enfin, elle considère que les frais irrépétibles engagés par elle pour recouvrer sa créance ne doivent pas rester à sa charge.

M. [U] [I] n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 avril 2023.

La déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées à M. [U] [I] par acte d'huissier du 6 octobre 2022.

Elles ont été remises selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile.

L'arrêt sera rendu par défaut.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Le contrat de prêt ayant été conclu le 11 septembre 2017, les dispositions du code de la consommation s'entendent dans leur rédaction issue de l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et du décret n°2016-884 du 29 juin 2016.

- Sur la demande en paiement

L'article R 623-1 du code de la consommation prévoit que le juge peut relever d'office toutes les dispositions du code de la consommation dans les litiges nés de son application.

Selon l'article L 312-19 du code de la consommation, l'emprunteur peut se rétracter sans motif dans un délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de l'acceptation de l'offre de contrat de crédit comprenant les informations prévues à l'article L 312-28.

L'article L 312-21 du même code dispose qu'afin de permettre l'exercice du droit de rétractation mentionné à l'article L 312-19 un formulaire détachable est joint à son exemplaire de contrat de crédit.

Le non respect de cette obligation est sanctionné par la déchéance du droit du prêteur au remboursement des intérêts contractuels en vertu de l'article L 311-48 alinéa 1er dudit code.

Il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu'il a satisfait à ses obligations précontractuelles. La signature par l'emprunteur de l'offre préalable comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis le bordereau de rétractation constitue seulement un indice qu'il incombe à celui-ci de corroborer par un ou plusieurs autres éléments. (Cour de Cassation 1ère civ 21 octobre 2020).

En l'espèce, il appartient donc à la société Creatis de rapporter la preuve que l'offre de prêt remise à l'emprunteur comporte bien le bordereau de rétractation et que ce dernier contient les mentions exigées.

Or, elle ne peut se contenter de produire aux débats l'offre qu'elle a conservée, dépourvue de bordereau de rétractation et mentionnant seulement que l'emprunteur a reconnu rester en possession d'un exemplaire du contrat doté d'un formulaire détachable de rétractation, ce qui ne constitue qu'un indice devant être corroboré par un ou plusieurs éléments.

La société Créatis n'a présenté ni en première instance, ni en cause d'appel d'éléments corroborant la clause type précitée, de sorte qu'elle échoue à rapporter la preuve de son obligation.

La déchéance du droit aux intérêts doit donc être confirmée.

Lorsque la déchéance du droit aux intérêts est prononcée, le prêteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu, ainsi que le cas échéant au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu.

La déchéance du droit aux intérêts conventionnels ne dispense pas l'emprunteur du paiement des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure.

Il résulte des pièces produites que le capital emprunté est de 30 200 euros et que les versements effectués par l'emprunteur s'élèvent à 9 424,83 euros. Ainsi, M. [U] [I] est redevable de la somme de 20 775,17 euros, conformément au jugement déféré.

En outre, par arrêt du 27 mars 2014 (CJUE 27 mars 2014 affaire C-565/12, le Crédit Lyonnais Sac/ Fesih Kalhan) la Cour de Justice de l'Union Européenne a dit pour droit que l'article 23 de la directive 2008/48 du Parlement européen et du conseil concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil s'oppose à l'application d'intérêts au taux légal, lesquels sont en outre majorés de plein droit deux mois après le caractère exécutoire d'une décision de justice prononçant la déchéance du droit aux intérêts, si 'les montants susceptibles d'être effectivement perçus par le prêteur à la suite de l'application de la sanction de déchéance du droit aux intérêts ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s'il avait respecté ses obligations découlant de ladite directive.'

En l'espèce, compte tenu du taux d'intérêt contractuel et du montant du taux d'intérêt légal majoré, ce dernier étant actuellement nettement supérieur au taux d'intérêt conventionnel de l'offre objet du présent litige, et pour assurer une sanction significative et dissuasive de la déchéance du droit aux intérêts, il convient de condamner M. [U] [I] à payer à la société Creatis la somme de 20 775,17 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 16 août 2021, date de la mise en demeure prononçant la déchéance du terme, le jugement étant confirmé, sauf sur la date du point de départ des intérêts au taux légal non majoré.

- Sur les demandes accessoires

L'équité commande de confirmer le jugement concernant les dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile.

La société Creatis succombant en son recours est condamnée aux dépens de la procédure d'appel.

Compte tenu de la solution apportée au litige, la société Creatis est déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles, en application de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement, sauf sur le point de départ des intérêts au taux légal non majoré de la condamnation de M. [U] [I] à payer à la société Creatis la somme de 20 775,17 euros,

Statuant à nouveau de ce seul chef,

Dit que les intérêts au taux légal non majoré courent à compter du 16 août 2021,

Y ajoutant,

Condamne la société Creatis aux dépens de la procédure d'appel,

Déboute la société Creatis de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22/05742
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;22.05742 ?
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