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18/06/2024 | FRANCE | N°22/05453

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 18 juin 2024, 22/05453


N° RG 22/05453 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OOIV









Décision du

Tribunal Judiciaire de LYON

Au fond

du 05 juillet 2022



RG : 19/08866

ch n°4





[H]



C/



Association PRO BTP

S.A. SAF BTP IARD - SOCIETE D'ASSURANCES FAMILIALES DES SALARIES ET ARTISANS IARD





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile B



ARRET DU 18 Juin 2024


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APPELANT :



M. [F] [H]

né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 6] (69)

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représenté par Me Marie POCHON, avocat au barreau de LYON, toque : 1156









INTIMEES :



l'association PRO BTP

[Adresse 4]

[Lo...

N° RG 22/05453 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OOIV

Décision du

Tribunal Judiciaire de LYON

Au fond

du 05 juillet 2022

RG : 19/08866

ch n°4

[H]

C/

Association PRO BTP

S.A. SAF BTP IARD - SOCIETE D'ASSURANCES FAMILIALES DES SALARIES ET ARTISANS IARD

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 18 Juin 2024

APPELANT :

M. [F] [H]

né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 6] (69)

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Marie POCHON, avocat au barreau de LYON, toque : 1156

INTIMEES :

l'association PRO BTP

[Adresse 4]

[Localité 5]

S.A. SAF BTP IARD - SOCIETE D'ASSURANCES FAMILIALES DES SALARIES ET ARTISANS IARD

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentées par Me Séverine MARTIN de la SELARL MARTIN SEYFERT & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1792

ayant pour avocat plaidant Me Bérengère MONTAGNE de la SCP AGMC AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P 430

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 04 Mai 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 12 Mars 2024

Date de mise à disposition : 18 Juin 2024

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Olivier GOURSAUD, président

- Stéphanie LEMOINE, conseiller

- Bénédicte LECHARNY, conseiller

assistés pendant les débats de Elsa SANCHEZ, greffier

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSE DU LITIGE

M. [H] était gérant d'une société nommée Electricité générale [H].

A ce titre, il a souscrit le 23 novembre 1999, par l'intermédiaire de l'association Pro BTP, plusieurs garanties auprès de la compagnie SAF BTP Iard intitulées « remboursement santé plus, toutes options » et « garantie coups durs », avec prise d'effet au 1er janvier 2000.

Le 25 novembre 2012, un syndrome dépressif sévère lui a été diagnostiqué et il a été placé en arrêt de travail à compter du 14 février 2014. Il a perçu des indemnités journalières de la part du RSI jusqu'au 1er août 2015, puis une pension d'invalidité d'un montant de 842,16 euros, ramenée ultérieurement à 740,41 euros.

En parallèle, M. [H] a sollicité Pro BTP pour la mise en jeu de la garantie « coups durs » et il lui a été opposé que le « burn out » était exclu de la garantie.

Par lettres recommandées des 29 mai et 11 juillet 2018, il a vainement mis en demeure la société de régler la pension d'invalidité prévue au contrat à compter du 1er août 2015. Puis, le 19 octobre 2018, il a saisi le médiateur de la protection sociale. L'association Pro BTP a quant à elle confirmé son refus de prise en charge.

Suivant un acte d'huissier de justice du 13 septembre 2019, M. [H] a fait assigner l'association Pro BTP devant le tribunal de grande instance de Lyon et par voie de conclusions du 18 juin 2020, la société d'assurances familiales des salariés et artisans Iard, la Compagnie SAF BTP IARD (l'assureur) est intervenue volontairement à l'instance, en qualité d'assureur de l'association.

Par jugement du 5 juillet 2022, le tribunal judiciaire de Lyon a reçu l'intervention volontaire de l'assureur, a débouté M. [H] de ses demandes et l'a condamné à payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.

Par déclaration du 26 juillet 2022, M. [H] a relevé appel du jugement.

Par conclusions notifiées le 11 octobre 2022, il demande à la cour de:

- infirmer le jugement du 5 juillet 2022 dans toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau

- condamner la Compagnie SAF BTP IARD - en ce que l'assureur n'est pas fondé à exciper d'une exclusion de garantie non valable et inopposable à M. [H], d'une part en ce qu'elle n'est pas rédigée en caractères très apparents, d'autre part, en ce qu'elle n'est ni formelle ni limitée - à verser à M. [H]:

- une somme de 107.582,73 € €, arrêtée au 1 er octobre 2022 au titre des arrérages de la demi-rente échue depuis le 1er janvier 2015, à parfaire au jour de l'arrêt à intervenir et en considération des revalorisations de rente annuelles, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation, avec capitalisation conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

- une demi-rente invalidité revalorisable annuellement conformément à la police, à terme échu par trimestre à compter de l'arrêt à intervenir, jusqu'à l'âge du départ à la retraite de M [H];

- condamner in solidum l'association PROBTP et la Compagnie SAF BTP IARD à verser à M. [H] une somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance (appel et première instance), avec droit de recouvrement direct au profit de Me Pochon, avocat, sur son affirmation de droit.

Par conclusions notifiées le 7 janvier 2023, l'association Pro BTP et l'assureur demandent à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 5 juillet 2022.

- débouter M [H] de l'ensemble de ses prétentions.

- condamner M [H] à la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance qui pourront être recouvrés par Me

Martin, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions précitées en application de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 4 mai 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il y a lieu de relever que l'association Pro BTP ne demande pas que soit ordonnée sa mise hors de cause dans le dispositif de ses conclusions, de sorte que la cour n'est pas saisie d'une telle demande.

Par ailleurs, la recevabilité de l'intervention volontaire de la compagnie SAF BTP IARD n'est pas contestée, de sorte qu'il n'y a pas lieu de la confirmer.

1. Sur la garantie due par l'assureur

M. [H] soutient que l'exclusion de garantie contenue dans une notice d'information résumant les conditions générales, non rédigée en caractères apparents, qui n'est ni formelle ni limitée, ne lui est pas opposable. Il fait notamment valoir que:

- seule une notice résumant les conditions générales lui a été remise, à l'exclusion des conditions générales elles-mêmes,

- les troubles de la dépression dont il souffre sont exclus de la garantie,

- pour être valables, les exclusions de garantie visées dans une notice afférente à une assurance de groupe doivent être imprimées en caractères très apparents, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisqu'elle figure dans un titre dont la police du texte utilisée est la même que pour tous les autres titres de la notice et noyée au milieu d'autres clauses;

- il est jugé qu'une clause qui exclut la garantie pour troubles psychiatriques est imprécise car trop floue et les termes utilisés des notions « d'affections psychiatriques », « état dépressif », « soins intensifs », « établissement spécialisé » , ne sont pas donnés.

L'assureur fait notamment valoir que:

- il s'agit d'un contrat d'assurance de groupe, de sorte que l'adhérent accède au contrat par le biais de l'association à laquelle il adhère, et l'assureur doit lui remettre une notice qui résume les conditions générales;

- le bulletin d'adhésion mentionne que M. [H] a reconnu avoir reçu la notice, de sorte que les termes de la notice lui sont opposables;

- le motif de son arrêt de travail tombe dans le champ d'application de la clause d'exclusion relative aux asthénies, états dépressifs et affections psychiatriques non justifiables de soins intensifs dans un établissement spécialisé;

- les exclusions sont très apparentes car annoncées dans le cadre d'un paragraphe propre, avec un intitulé ayant une taille de police supérieure en caractères majuscules et soulignés « CE QUE NE GARANTIT PAS PREVOYANCE COUPS DURS », puis les motifs d'exclusion sont énoncés dans un langage simple et clair;

- la clause est précise et limitée et ne nécessite aucune interprétation.

Réponse de la cour

Sur l'opposabilité de la notice

En application de l'article L 141-4 du code des assurances, pour les contrats d'assurance de groupe, le souscripteur est tenu de remettre à l'adhérent une notice établie par l'assureur, qui définit les garanties et leurs modalités d'entrée en vigueur, ainsi que les formalités à accomplir en cas de sinistre. La preuve de la remise de la notice à l'adhérent incombe au souscripteur.

En l'espèce, le bulletin d'adhésion du 23 novembre 1999 produit par l'assureur et signé par l'appelant, mentionne qu'il reconnaît avoir reçu la notice résumant les conditions générales des contrats.

Cette notice porte les mêmes références que la police d'assurance et définit les garanties et leurs modalités d'entrée en vigueur, ainsi que les formalités à accomplir en cas de sinistre, de sorte qu'il est établi qu'elle a été remise à M. [H] et que l'assureur peut s'en prévaloir.

Sur le caractère formel et limité de l'exclusion

Il résulte de l'article L. 113-1 du code des assurances que les clauses d'exclusion de garantie doivent être formelles et limitées de façon à permettre à l'assuré de connaître exactement l'étendue de sa garantie.

M. [H] souffrant de troubles dépressifs, a été placé en arrêt maladie à compter du 14 février 2014 et a demandé à l'assureur le versement d'une demi rente invalidité au titre de la garantie « coups durs » qu'il a souscrite.

Pour s'opposer à la demande de M. [H], l'assureur se prévaut de l'exclusion de garantie mentionnée dans la notice qui lui a été remise, qui stipule dans une rubrique intitulée Ce que ne garantit pas prévoyance coups durs: « Prévoyance coups durs vous garantit aux conditions précitées pour tout arrêt de travail ou invalidité ou tout décès, à l'exclusion des conséquences des seuls cas suivantes: (...) Les asthénies, les états dépressifs et les affections psychiatriques, non justifiables de soins intensifs dans un établissement spécialisé (...) ».

Outre le fait que « les états dépressifs » et les « affections psychiatriques » visés ne sont pas définis dans la notice, force est de constater que les termes employés, très larges, sont génériques et ne permettent pas d'identifier avec précision les maladies ou les affections auxquelles il est fait référence.

Cette clause n'étant ni formelle ni limitée, doit être réputée non écrite.

Le jugement est donc infirmé.

2. Sur les demandes en paiement de M. [H]

La garantie « coups durs » souscrite par M. [H] prévoit le versement d'une demi-rente invalidité d'un montant mensuel de 1 157,25 euros jusqu'au 31 décembre 2015, revalorisée à 1157,25 euros ensuite, si le taux global d'invalidité est compris entre 33 et 66%.

M. [H] justifie être en incapacité partielle au métier depuis le 1er août 2015, soit selon l'attestation de l'assurance maladie du 12 mars 2018 une perte de sa capacité de travail ou de gain supérieure à 2/3 de celle que lui procurerait une activité commerciale ou de chef d'entreprise relevant du régime maladie de la sécurité sociale des indépendants.

L'assureur ne conteste pas, pour le cas où la clause d'exclusion de garantie n'est pas applicable, les sommes réclamées par M. [H].

Néanmoins, alors que M. [H] demande le paiement des arrérages de la demi-rente échue à compter du 1er janvier 2015, il y a lieu de relever que celui-ci ne justifie de son incapacité partielle qu'à compter du 1er août 2015, de sorte que l'assureur doit être condamné à lui payer :

- la somme de (1 153,79 euros X 5) 5 768, 95 euros au titre des arrérages de la demi rente échue du 1er août au 31 décembre 2015,

- la somme de (1 157,25 X 81) 93 737,25 euros au titre des arrérages de la demi rente échue du 1er janvier 2016 au 1er octobre 2022,

soit la somme totale de 99 506, 20 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 13 septembre 2019, date de l'assignation.

La capitalisation des intérêts dus pour une année entière, qui est demandée, est en outre ordonnée.

L'assureur est également condamné au paiement d'une demi-rente invalidité revalorisable annuellement, conformément à la police, jusqu'à l'âge du départ à la retraite de M. [H], sous réserve qu'il en remplisse les conditions.

3. Sur les autres demandes

Le jugement est infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'indemnité de procédure.

La cour estime que l'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [H] et condamne l'assureur à lui payer la somme de 3.000 euros à ce titre.

Les dépens de première instance et d'appel sont à la charge de l'assureur.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

statuant de nouveau et y ajoutant,

Condamne la société SAF BTP IARD à payer à M. [F] [H], la somme de

99 506, 20 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 13 septembre 2019 au titre des arrérages de la demi rente échue au 1er octobre 2022;

Ordonne la capitalisation des intérêts dus pour une année entière;

Condamne la société SAF BTP IARD à payer à M. [F] [H] une demi rente invalidité revalorisable annuellement conformément à la police d'assurance jusqu'à son départ à la retraite, sous réserve qu'il en remplisse les conditions;

Condamne la société SAF BTP IARD à payer à M. [F] [H], la somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne la société SAF BTP IARD aux dépens de première instance et d'appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile b
Numéro d'arrêt : 22/05453
Date de la décision : 18/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-18;22.05453 ?
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